SOC.
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 31 janvier 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme X..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10081 F
Pourvoi n° Q 16-15.234
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Switch, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 9 février 2016 par la cour d'appel de Chambéry (chambre sociale), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme Charlotte Y..., domiciliée [...] ,
2°/ à Pôle emploi Rhône-Alpes, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 19 décembre 2017, où étaient présents : Mme X..., conseiller doyen faisant fonction de président, M. Z..., conseiller rapporteur, M. Pion, conseiller, Mme Becker, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Switch ;
Sur le rapport de M. Z..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Switch aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par M. Pion, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, en l'audience publique du trente et un janvier deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Switch
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Charlotte Y... aux torts de la société SWITCH, dit que cette résiliation produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la société SWITCH à payer à Charlotte Y... les sommes de 16 800 € au titre d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 7 714,08 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 771, 40 € au titre des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS que conformément à l'article 1184 du code civil, la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement, la partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté ayant le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts ; Que, lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée ; que c'est seulement dans le cas contraire qu'il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur ; que, lorsque le salarié n'est plus au service de son employeur au jour où il est statué sur la demande de résiliation judiciaire, cette dernière prend effet, si le juge la prononce, au jour du licenciement ; Que les manquements doivent être suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite de la relation contractuelle ; QU'en l'espèce, Charlotte Y... fait grief à l'employeur de : s'être rendu coupable de travail dissimulé en l'employant sous couvert du statut d'autoentrepreneur fictif, en ne s'acquittant pas de l'intégralité des heures de travail et en ne les mentionnant pas sur les bulletins de paie, en ne lui faisant pas bénéficier de la contrepartie obligatoire du repos afférente aux heures supplémentaires accomplies, en ne réglant ses salaires qu'avec retard, en lui appliquant un forfait jour illégal eu égard à son statut ; n'avoir pas assuré ses obligations de sécurité en matière de protection de la santé ; que du fait de la surcharge de travail, le stress qui en est découlé a provoqué un eczéma et la consultation d'un psychiatre ; ne pas lui avoir fait bénéficier du statut de cadre ce qui l'a privée de la rémunération correspondante ; n'avoir pas repris le versement du salaire à son poste un mois après le constat d'inaptitude ;
QUE le moyen relatif au statut d'auto-entrepreneur, lequel vient d'être analysé et n'a pas été retenu, sera écarté, sans nécessité de plus ample examen ; QUE conformément à l'article L. 3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; Que dès lors la durée légale du travail, telle que définie ci-dessus, constitue le seuil de déclenchement des heures supplémentaires payées à un taux majoré dans les conditions de l'article L. 3121 -22 du code du travail, les heures supplémentaires devant se décompter par semaine civile ; Qu'en vertu de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, le juge formant sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande ; Que si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient aussi à ce dernier de fournir préalablement des éléments suffisamment précis de nature à étayer sa demande et à permettre également à l'employeur d'y répondre ; QUE dans le contrat de travail de la salariée, le nombre de jours travaillés mentionné y est de 218 jours sur l'année civile ; que la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseils, qui régit les rapports des parties, n'est pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l'intéressée, et, donc, à assurer la protection, de la sécurité et de la santé du salarié ; Que la clause de forfait annuel en jours est donc inopposable à Charlotte Y..., en sa qualité d'employée, dont le temps de travail doit être décompté selon le droit commun ; Que pour autant, cette nullité ne saurait fonder à elle-seule un quelconque manquement s'il n'est pas démontré un dépassement d'heures ; Que Charlotte Y... soutient avoir effectué d'août 2012 à juillet 2013, 541 heures supplémentaires et du 1er août 2013 au 4 novembre 2013, 134 heures supplémentaires pour un montant total de 12 214,63 € ; qu'elle admet le règlement d'une somme de 4 831,28 € en décembre 2013 ; que pour étayer ses allégations, elle produit : une copie de son agenda électronique, un décompte hebdomadaire du 20 août 2012 au 4 novembre 2013, un courriel de l'employeur en date du 2 mai 2009 organisant un entretien de travail via Skype à 21 h; Que la salariée produit ainsi des éléments préalables qui peuvent être discutés par l'employeur et qui sont de nature à étayer sa demande ; QUE l'employeur, qui a régularisé un nombre important d'heures supplémentaires accomplies par la salariée depuis août 2012, ne saurait légitimement soutenir que les heures supplémentaires n'ont pas été effectuées, sans son accord implicite : qu'il indique même que lorsqu'il lui demandait de quitter le bureau plus tôt, elle ne s'exécutait pas, sans cependant démontrer s'y être opposé ; que cependant, il verse aux débats la capture d'écran de l'agenda électronique de la salariée, lequel ne fait pas apparaître un travail le samedi et le dimanche ; qu'en outre, contrairement au tableau que produit celle-ci, pour les mois de juin 2013, juillet 2013 et août 2013. la salariée avait reconnu, en signant des reçus, avoir effectivement réalisé 151 heures de travail durant le mois de juin, 99 heures en juillet et 144 heures en août, ce qui rend contestable la fiabilité des tableaux produits par la salariée ; Que les affirmations de la salariée ne peuvent être corroborées par les deux attestations de stagiaires, présentes dans l'entreprise pour la première de juillet à septembre et la seconde de juillet à décembre 2013, lesquels ne peuvent valablement attester d'heures accomplies les jours fériés et après leur départ, ce alors que la salariée a elle-même validé la durée du travail durant les mois de juillet et août 2013 ; que la réception sur une messagerie professionnelle de courriels nocturnes ne peut faire foi d'un quelconque dépassement d'horaires, dès lors qu'en l'absence de courriels de réponse dans le même trait de temps émis par la salariée, ils ne peuvent justifier de son action au travail ; QU'au vu de la régularisation opérée par l'employeur en décembre 2013 et janvier 2014, la cour a la conviction que la salariée n'a pas effectué les heures supplémentaires qu'elle réclame en complément ; que sa demande de contrepartie en repos sera également écartée ; "Attendu que si sa demande de complément d'heures supplémentaires et de congés payés afférents ne peut être accueillie, il n'en demeure pas moins que l'employeur, qui n'a procédé au paiement d'heures supplémentaires qu'il a admis comme accomplies par la salariée, que postérieurement à la saisine de la juridiction de premier ressort, s'est soustrait à leurs versements pendant 16 mois ; Que la privation d'une partie de la rémunération constitue un manquement suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail ; Que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs, il y a lieu de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de l'intéressée aux torts de l'employeur et de dire que cette résiliation produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;QU'en revanche sur le fondement de l'article L 8221-5 du code du travail, il n'est pas établi que l'employeur ait intentionnellement fait effectuer à la salariée des heures supplémentaires sans intention de les lui payer, alors même que la salariée n'avait présenté aucune réclamation à ce titre à son employeur jusqu'à l'entretien de novembre 2013 ; que le caractère intentionnel ne peut en effet s'évincer de la seule absence de paiement des heures supplémentaires et de la non mention sur le bulletin de salaire ; que, par suite, sa demande tendant au paiement de l'indemnité édictée par l'article L. 8223-1 du code du travail doit être rejetée ; Que la salariée avait une ancienneté de plus de deux ans, et justifie de ses démarches pour retrouver un emploi ; QUE dès lors la salariée a droit à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui sera évaluée à la somme de 16 800 €, une indemnité compensatrice de préavis de .7 714,08 €, outre 771,40 € au titre des congés payés afférents ; Qu'en l'absence de contrat de travail de février à mi juillet 2012 et vu les termes de la convention collective, la salariée qui a moins de 28 mois d'ancienneté à la date de la rupture du contrat de travail, ne peut prétendre à l'octroi d'un complément d'indemnité conventionnelle de licenciement à hauteur de 599,98 € ; qu'elle sera déboutée de sa demande de ce chef ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur ne peut être prononcée que si la privation d'une partie de la rémunération a exercé une influence suffisamment défavorable sur celle-ci et si le manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles empêche la poursuite du contrat de travail ; que la cour d'appel, après avoir, de manière péremptoire, affirmé qu'en son principe « la privation d'une partie de la rémunération constitue un manquement suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail », a constaté que la demande du salarié en paiement d'heures supplémentaires était infondée et que l'employeur avait payé dès après la saisine du conseil de prud'hommes les heures supplémentaires qu'il avait « admis » avoir été effectivement accomplies sans constater que cette privation temporaire avait, au cas d'espèce, exercé une influence défavorable sur la rémunération telle qu'elle avait empêché la poursuite du contrat de travail a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE les manquements imputés à l'employeur doivent être appréciés à la date de la décision des juges du fond ou en tout cas à celle de la notification du licenciement lorsqu'à la suite de la demande en résiliation judiciaire la salariée a été licenciée ; que la cour d'appel qui, pour prononcer la résiliation judiciaire aux torts de la société SWITCH, a dit que la salariée n'avait pas été payée d'un certain nombre d'heures supplémentaires entre 2012 et 2013 alors qu'à la date de la notification de son licenciement le 4 octobre 2014 elle était remplie de ses droits, n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient et a violé les articles 1134 et 1184 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société SWITCH à payer à Mlle Y... une somme de 4799, 87 € en rappel de salaires pour la période du 9 août 2014 au 4 octobre 2014, 479,98 € au titre des congés payés afférents à ladite période, 410,42 € au titre du solde de congés payés ;
AUX MOTIFS QU'il est justifié du versement d'une rémunération du 9 août au 23 septembre 2014, versée selon le bulletin de paye au titre de 33 jours de congés payés ; que compte tenu d'un salaire d'un montant de 2571,36 €, la salariée qui s'est vue imposer cette rémunération ainsi qualifiée, est en droit d'obtenir pour la période du 9 août 2014 jusqu'au 4 octobre 2014, un montant total de salaires de 4799, 87 €, outre les congés payés afférents à hauteur de 479,98 € ainsi qu'en complément pour la période qualifiée de congés payé, une somme de 410,42 ;
ALORS QU'il résulte de l'article L. 1226-4 du code du travail que lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail ; que l'employeur ne peut se voir reprocher de ne pas avoir reclassé le salarié, ni de ne pas l'avoir, lorsque ce dernier a volontairement retardé le processus de reclassement ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article susvisé.