CIV. 2
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 25 janvier 2018
Rejet non spécialement motivé
M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10066 F
Pourvoi n° U 17-10.964
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Peugeot motocycles, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 17 novembre 2016 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section SB), dans le litige l'opposant à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) d'Alsace, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 décembre 2017, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Y..., conseiller référendaire rapporteur, M. Cadiot, conseiller, Mme Parchemal, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de la société Peugeot motocycles, de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales d'Alsace ;
Sur le rapport de Mme Y..., conseiller référendaire, l'avis de M. de Monteynard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Peugeot motocycles aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Peugeot motocycles et la condamne à payer à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales d'Alsace la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille dix-huit, et signé par M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, et par Mme Szirek, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de la décision. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour la société Peugeot motocycles.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a dit que l'avantage en nature résultant pour les salariés de la SA Peugeot Motocycles de remises tarifaires sur l'achat de véhicules de la SA Peugeot Citroën Automobiles constitue un avantage en nature et D'AVOIR, infirmé le jugement pour le surplus, en particulier en ce qu'il a condamné l'URSSAF d'ALSACE à rembourser à la société exposante la somme de 72.911 euros et, statuant à nouveau, D'AVOIR dit que l'avantage en nature résultant pour les salariés de la société exposante de remises tarifaires sur l'achat de véhicules de la SA Peugeot Citroën Automobiles ne bénéficie pas de la tolérance résultant de la circulaire du 7 janvier 2003 et que le redressement doit être établi sur l'assiette globale de 65.165 euros, soit 29.143 euros pour 2009 et à 36.412 euros pour 2010 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur l'assujettissement des avantages consentis aux salariés ; que l'URSSAF explique que l'avantage tarifaire dont bénéficient les salariés de la SA Peugeot Motocycles a pour origine et pour cause l'appartenance des salariés à l'entreprise de sorte qu'il constitue un avantage en nature ; que la société Peugeot Motocycles conteste cette analyse et fait valoir que l'article L 242-1 §1 du Code de la sécurité sociale ne s'applique pas en l'espèce puisqu'il suppose un lien de subordination ce qui est exclu lorsque c'est une entreprise extérieure qui consent un avantage, que le législateur n'a visé les avantages consentis par des entreprises tierces qu'en 2011 (article L 242-1-4 du Code de la sécurité sociale) en raison de l'inexistence d'un tel dispositif, étant précisé, par une circulaire du 5 mars 2012, que ce nouveau régime ne s'applique pas aux société tierces appartenant au même groupe que l'employeur ; qu'elle ajoute qu'en l'espèce, c'est la société Peugeot Citroën Automobiles SA qui consent des avantages tarifaires aux salariés sur des achats passés directement entre ces salariés et le fabricant, dans le cadre d'une relation totalement extérieure au contrat de travail, elle considère que les références jurisprudentielles invoquées par l'organisme social concernent des avantages octroyés par l'employeur ; que l'article L 242-1 du Code de la sécurité sociale dispose que « pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire. » ; qu'en l'espèce, il est constant que les avantages tarifaires obtenus par les salariés de la SA Peugeot Motocycles auprès de la SA Peugeot Citroën Automobiles, qu'ils soient ou non négociés et consentis directement entre le fabricant et ces salariés, trouvent leur origine dans la relation salariale existant entre les salariés et l'une des sociétés du groupe Peugeot-Citroën, la SA Peugeot Motocycles ; qu'il s'en suit qu'ils constituent un avantage en nature comme l'a exactement décidé le tribunal des affaires de sécurité sociale ; que le jugement sera donc confirmé de ce chef ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE sur la demande principale ; que la SAS Peugeot Motocycles fait partie du groupe Peugeot Citroën; que les salariés de la SAS Peugeot Motocycles bénéficient de tarifs préférentiels sur les véhicules vendus par la SA Peugeot Citroën Automobiles; qu'il n'est pas contesté qu'un vendeur de cette société se rend sur le site de la SAS Peugeot Motocycles pour assurer la vente des véhicules et percevoir le règlement des sommes dues; que le redressement opéré par l'URSSAF porte sur la réduction consentie aux salariés de la SAS Peugeot Motocycles qui doit selon l'organisme de recouvrement être inclue dans l'assiette de calcul des cotisations sociales s'agissant d'un avantage en nature; que selon l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale, pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire; que l'avantage offert en raison de l'appartenance à l'entreprise et à l'occasion du travail accompli est soumis à cotisations sociales; que dans le cadre de la détermination de cette notion d'avantage en nature, la notion d'entreprise doit elle-même être définie comme la réunion des moyens matériels et humains coordonnés et organisés en vue de la réalisation d'un objectif économique déterminé; qu'en adoptant cette définition élargie de l'entreprise, la notion d'avantage en nature a vocation à s'appliquer à l'ensemble des avantages offerts en raison de l'appartenance aux sociétés formant un même groupe, le groupe constituant une modalité d'organisation de l'entreprise globale au sein de laquelle il existe une unicité de l'activité ; que la réduction accordée aux salariés de la SAS Peugeot Motocycles sur les biens de la SA Peugeot Citroën Automobiles ne résulte que de l'appartenance de ses salariés au groupe Peugeot et est en lien directe avec l'activité du groupe qui est la construction de véhicules automobiles; que cette réduction doit donc être qualifiée d'avantage en nature ;
1°) ALORS D'UNE PART QUE selon l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs, en contrepartie ou à l'occasion du travail ; qu'à l'exception du cas des pourboires expressément prévu, ce texte ne vise que les sommes versées aux travailleurs par l'employeur ou pour le compte de l'employeur ; que partant, ne doivent pas être intégrés dans l'assiette des cotisations les avantages consentis aux salariés non pas par l'employeur mais par une société tierce ; qu'en jugeant le contraire, en l'espèce, en considérant que les avantages tarifaires consentis par la société Peugeot Citroën Automobiles aux salariés de la société Peugeot Motocycles constituaient un avantage en nature et devaient être intégrés dans l'assiette des cotisations sociales de cette dernière bien que ces avantages n'aient pas été accordés par l'employeur ni pour son compte, la cour d'appel a violé l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ;
2°) ALORS D'AUTRE PART et en tout état de cause QUE sont soumis à cotisations les seuls avantages en nature résultant de la prise en charge par l'employeur de tout ou partie d'une dépense qui incombe normalement aux salariés ; qu'en l'espèce, la société Peugeot Motocycles faisait valoir qu'elle n'était pas à l'origine de l'avantage tarifaire dont bénéficiait ses salariés sur les biens produits par une autre société du groupe PSA, la société Peugeot Citroën Automobiles, de sorte que les avantages litigieux octroyés à son personnel, même à l'occasion ou en contrepartie du travail fourni à son profit, n'étaient pas rendus possibles par son intermédiaire ni pris en charge par elle-même (cf. ses conclusions d'appel, p. 6 et 7) ; qu'en jugeant néanmoins que les remises tarifaires accordées par la société Peugeot Citroën Automobiles constituaient un avantage en nature et devaient être soumises à cotisations, peu important que la charge financière de ces remises n'incombe pas à la société Peugeot Motocycles, la cour d'appel a violé l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a dit que l'avantage en nature résultant pour les salariés de la SA Peugeot Motocycles de remises tarifaires sur l'achat de véhicules de la SA Peugeot Citroën Automobiles constitue un avantage en nature et D'AVOIR, infirmé le jugement pour le surplus, en particulier en ce qu'il a condamné l'URSSAF d'ALSACE à rembourser à la société exposante la somme de 72.911 euros et, statuant à nouveau, D'AVOIR dit que l'avantage en nature résultant pour les salariés de la société exposante de remises tarifaires sur l'achat de véhicules de la SA Peugeot Citroën Automobiles ne bénéficie pas de la tolérance résultant de la circulaire du 7 janvier 2003 et que le redressement doit être établi sur l'assiette globale de 65.165 euros, soit 29.143 euros pour 2009 et à 36.412 euros pour 2010 ;
AUX MOTIFS QUE sur la tolérance des 30 % ; que l'URSSAF considère que la tolérance ministérielle résultant de la circulaire du 7 janvier 2003 ne s'applique pas aux produits émanant d'une société tierce, fut-elle membre du groupe auquel appartient l'employeur ; que la SA Peugeot Motocycle explique qu'à supposer applicable l'article L 242-1 du Code de la sécurité sociale, cette application doit être intégrale, comprenant la tolérance de 30 % sur les produits commercialisés, elle rappelle que le taux de remise moyen accordé au personnel, tel que l'URSSAF l'a reconnu, s'élève à 24,5 % ; qu'aux termes de la circulaire interministérielle du 7 janvier 2003, « les fournitures de produits et services réalisés par l'entreprise à des conditions préférentielles ne constituent pas des avantages en nature dès lors que leurs réductions tarifaires n'excèdent pas 30% du prix de vente public normal, toutes taxes comprises. L'évaluation doit être effectuée par référence au prix de vente toutes taxes comprises pratiqué par l'employeur pour le même produit ou le même service, à un consommateur non salarié de l'entreprise. Lorsque la fourniture est gratuite ou lorsque la remise dépasse 30% du prix de vente normal, il convient de réintégrer la totalité de l'avantage en nature dans l'assiette. Le même principe trouve à s'appliquer en ce qui concerne les avantages spécifiques alloués au personnel des établissements de crédit. Il convient de noter que cette tolérance concerne les biens ou services produits par l'entreprise qui emploie le salarié et exclut les produits ou services acquis par l'entreprise auprès d'un fournisseur ou d'une autre entreprise. Ainsi, le rabais obtenu par l'employeur, en raison de l'achat de biens en grosses quantités auprès d'un fournisseur, ne peut entrer dans le champ d'application de cette tolérance et est donc constitutif d'un avantage en nature. » ; que ce texte, certes non réglementaire, est d'interprétation stricte et, de ce fait, ne peut recevoir qu'une application limitée aux conditions qu'il fixe ; qu'or, il se limite aux produits et services de l'entreprise, et non du groupe ou d'une autre entreprise, il mentionne l'employeur, il exclut expressément les produits ou services produits par une autre entreprise ; qu'il en résulte que, contrairement à ce qu'ont décidé les premiers juges, cette tolérance ne peut s'appliquer aux avantages ayant fait l'objet du redressement litigieux ; que de ce chef, le jugement sera donc infirmé ;
ALORS QUE précisant le régime applicable aux avantages en nature prévus par l'article L 242-1 du Code de la sécurité sociale, la circulaire DSS n° 2003/07 du 7 janvier 2003 dispose que « les fournitures de produits et services réalisés par l'entreprise à des conditions préférentielles ne constituent pas des avantages en nature dès lors que leurs réductions tarifaires n'excèdent pas 30 % du prix de vente public normal, toutes taxes comprises. (
) cette tolérance concerne les biens ou services produits par l'entreprise qui emploie le salarié et exclut les produits ou services acquis par l'entreprise auprès d'un fournisseur ou d'une autre entreprise. Ainsi le rabais obtenu par l'employeur en raison de l'achat de biens en grosses quantités auprès d'un fournisseur ne peut entrer dans le champ d'application de cette tolérance et est donc constitutif d'un avantage en nature » ; que l'entreprise, au sens de ce texte, doit recevoir la même définition que celle qui est retenue pour la soumettre à l'application du principe d'assujetissement édicté à l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale ; qu'après avoir retenu que la société Peugeot Motocycles était employeur-débiteur des cotisations de sécurité sociale au titre d'un avantage en nature au sens de l'article L 242-1 précité, dès lors que ce n'est qu'à raison de leur appartenance à la société Peugeot Motocycles, entité faisant partie du groupe PSA, que des salariés s'étaient vus accorder des tarifs préférentiels, inférieurs de 30 % au prix de vente public, sur l'achat de véhicules produits par une autre société du groupe, la société Peugeot Citroën Automobiles (arrêt, p. 3), la Cour d'appel qui décide que la société Peugeot Motocycles ne pouvait invoquer le bénéfice de la tolérance résultant de la circulaire du 7 janvier 2003, motif pris que ce texte « se limite aux produits et services de l'entreprise » et par conséquent que les réductions tarifaires litigieuses, même inférieures à 30 %, ne pouvaient bénéficier de ladite tolérance et constituaient des avantages en nature devant en tant que tels être réintégrés dans l'assiette des cotisations sociales de cette société, a violé l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, ensemble la circulaire interministérielle du 7 janvier 2003 précitée ;