CIV. 2
CGA
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 25 janvier 2018
Rejet non spécialement motivé
M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10056 F
Pourvoi n° P 16-27.584
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Glassy Glass, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 19 octobre 2016 par la cour d'appel de Poitiers (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 décembre 2017, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme A..., conseiller rapporteur, M. Cadiot, conseiller, Mme Parchemal, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Glassy Glass, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée ;
Sur le rapport de Mme A..., conseiller, l'avis de M. de Monteynard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Glassy Glass aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vendée la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille dix-huit, et signé par M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président et par Mme Szirek, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de la décision. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Glassy Glass
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté la société Glassy Glass de son recours et d'avoir déclaré la prise en charge de la maladie de Mme Y... au titre de la législation professionnelle opposable à la société Glassy Glass ;
AUX MOTIFS QUE « dans ses conclusions d'appel, la société Glassy Glass ne reprend pas le moyen relatif à la prétendue violation du principe du contradictoire soulevée devant les premiers juges. Elle revendique l'inopposabilité de la décision de la caisse à son encontre au motif que le délai de prise en charge de la maladie de Mme Y... tel que prévu au tableau des maladies professionnelles n'a pas été respecté.
Aux termes de l'article L461-1 du code de la sécurité sociale est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. En l'espèce, il est admis que Mme Y... souffrait de l'épaule droite, affection inscrite au tableau numéro 57 A des maladies professionnelles. Le délai de prise en charge de cette maladie est de 7 jours. Le délai de prise en charge de la maladie se définit comme la période au cours de laquelle, après cessation de l'exposition au risque, la maladie doit se révéler et être médicalement constatée pour être indemnisée au titre des maladies professionnelles. Il résulte de la déclaration de maladie professionnelle que Mme Y... a cessé d'être exposée au risque le 10 février 2007, date de son arrêt de travail et que la première constatation médicale est du même jour. La société Glassy Glass fait valoir que cette date ne peut être retenue dans la mesure où d'une part, le certificat médical initial joint à la déclaration de Maladie professionnelle est en date du 27 .avril 2007 et d'autre part, la caisse ne rapporté pas la preuve qu'elle lui a transmis le certificat médical dont la date est retenue comme première constatation médicale. Mais, ainsi que l'a relevé le premier juge, la première constatation médicale n'est pas soumise aux mêmes règles de forme que celles prévues à l'article L 461-1 du code de la sécurité sociale pour le certificat médical initial joint à la déclaration de maladie professionnelle. La mention par le médecin traitant d'une date d'arrêt de travail sur un certificat médical même distinct du certificat médical initial est suffisante pour établir la date de la première constatation médicale. Or, en l'espèce, le médecin traitant de Mme Y... a rédigé le 23 avril 2007 un certificat médical mentionnant que celle-ci était en arrêt de travail entrant dans le cadre d'une maladie professionnelle depuis le 10 février 2007. Il convient d'observer, à cet égard, que si ce certificat ne précise pas la pathologie dont souffre Mme Y..., le certificat de prolongation établi 4 jours plus tard par le même médecin fait état d'une suspicion d'une rupture de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite correspondant à la maladie déclarée par l'assurée. La société prétend qu'elle n'a pas été destinataire de ce document et qu'elle n'a pu, en conséquence, vérifier les motifs de l'arrêt de travail au 10 février 2007, Cet argument est, toutefois, inopérant car la caisse avait, conformément aux dispositions de l'article R 441-11 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction alors en vigueur, comme seule obligation d'adresser à l'employeur un double-de la déclaration de la maladie professionnelle qui comportait bien la date du 10 février 2007 comme date de cessation d'exposition au risque et de première constatation médicale et que l'employeur avait été invité à venir consulter le dossier à l'issue de l'instruction et avant la décision de la caisse, n'a pas fait. Dès lors, le premier juge en a déduit exactement, que le délai de prise en charge de 7 jours était établi et qu'en conséquence les conditions du tableau 57 A étaient réunies » ;
AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES QUE « Sur le respect du contradictoire « Sur le caractère professionnel de la maladie de la salariée L'article L 461-1 du Code de la Sécurité Sociale édicte une présomption d'origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions prévues à ce tableau relatives d'une part au délai de prise en charge et d'autre part aux travaux qui occasionnent habituellement la maladie. Il n'est pas contesté que Madame Y... a présenté une épaule douloureuse droite, affection inscrite au tableau n° 57 A des maladies professionnelles. La condition relative à l'exposition au risque n'est pas non plus contestée. Le délai de prise en charge prévu par le tableau n° 57 pour l'affection considérée est de 7 jours. La déclaration de maladie professionnelle précise que le dernier jour de travail de la salariée est le 10 février 2007.La Société GLASSY GLASS soutient que la date de première constatation de la maladie ne peut être fixée au 10 février 2007 dans la mesure où la caisse ne lui a pas transmis le certificat médical établi à cette date. Toutefois, il convient de remarquer que la première constatation médicale de la maladie professionnelle n'est pas soumise aux mêmes exigences de forme que le certificat médical accompagnant la déclaration de cette maladie. Ainsi, un certificat médical ne répondant pas aux conditions de l'article L 461-5 peut constituer la première constatation médicale d'une maladie professionnelle. En l'espèce, si le certificat médical répondant aux conditions de l'article L 461-5 du Code de Sécurité Sociale a été établi le 27 avril 2007, le 23 avril 2007 le Docteur Z..., médecin traitant de Madame Y... avait établi un certificat médical au terme duquel Madame Y... était "en arrêt de travail entrant dans le cadre d'une maladie professionnelle depuis le 10 février 2007". Par ailleurs, la société GLASSY GLASS ne peut valablement soutenir que la caisse avait omis de lui adresser ce certificat dans la mesure où l'article R 441-11 du Code de Sécurité Sociale, dans sa rédaction alors applicable prévoit que la caisse avait seulement pour obligation d'adresser à l'employeur un double de la déclaration de maladie professionnelle, de sorte qu'un tel oubli ne pourrait en toute hypothèse avoir aucune conséquence sur la validité de la procédure. Ainsi, Madame Y... a cessé d'être exposée au risque le 10 février 2007, date de la première constatation médicale de la maladie, de sorte que la condition relative au délai de prise en charge est remplie. Les 3 conditions du tableau étant réunies, la maladie est présumée imputable au travail de l'intéressée. S'agissant d'une présomption simple, l'employeur peut apporter la preuve que le travail n'a joué aucun rôle dans l'apparition de la maladie. Toutefois, la Société GLASSY GLASS ne produit aucun élément de preuve à ce titre de sorte que le caractère professionnel de la pathologie doit être retenue » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE si la pièce caractérisant la première constatation médicale d'une maladie professionnelle dont la date est antérieure à celle du certificat médical initial n'est pas soumise aux mêmes exigences de forme que celuici et n'est pas au nombre des documents constituant le dossier qui doit être mis à la disposition de la victime ou de ses ayants droit et de l'employeur en application de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au litige, il appartient tout de même aux juges du fond de vérifier, en cas de contestation, si les pièces du dossier constitué par la caisse ont permis à l'employeur d'être suffisamment informé sur les conditions dans lesquelles cette date a été retenue ; qu'au cas présent, la société Glassy Glass faisait valoir que le certificat du 23 avril 2007 n'avait été produit qu'au cours des débats et que les éléments recueillis au cours de l'instruction et mis à sa disposition antérieurement à la prise en charge ne faisait pas état d'une première constatation médicale de la maladie antérieurement au 23 avril 2007 ; qu'en refusant de rechercher, comme il lui était demandé, si les pièces du dossier constitué par la CPAM permettaient d'informer l'employeur sur la date de première constatation médicale retenue, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles R. 441-11 et R. 441-13 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'une maladie ne peut être prise en charge sur le fondement de la présomption d'imputabilité instituée par l'article L. 461-1 alinéa 2 du Code de la sécurité sociale que si l'ensemble des conditions exigées par un tableau de maladie professionnelle sont remplies ; qu'en cas de contestation par l'employeur d'une décision de prise en charge d'une maladie professionnelle, c'est à la Caisse qui a pris la décision litigieuse de rapporter la preuve que l'assuré est bien atteint de la maladie visée au Tableau et a été exposé au risque dans les conditions du tableau ; qu'il incombe notamment à la caisse de rapporter la preuve de la constatation médicale dans le délai de prise en charge prévu par le tableau lorsque le certificat médical initial a été établi postérieurement à l'expiration de ce délai de prise en charge ; qu'en se fondant sur la seule mention du certificat établi le 23 avril 2007 par le médecin traitant pour les besoins de la prise en charge selon laquelle Mme Y... aurait été « en arrêt de travail entrant dans le cadre d'une maladie professionnelle depuis le 10/02/07 », sans aucunement indiquer la nature de ladite maladie professionnelle, ni la pathologie visée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale ;
ALORS, DE TROISIEME PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, QU'une maladie ne peut être prise en charge sur le fondement de la présomption d'imputabilité instituée par l'article L. 461-1 alinéa 2 du Code de la sécurité sociale que si l'ensemble des conditions exigées par un tableau de maladie professionnelle sont remplies ; qu'en cas de contestation par l'employeur d'une décision de prise en charge d'une maladie professionnelle, c'est à la Caisse qui a pris la décision litigieuse de rapporter la preuve que l'assuré est bien atteint de la maladie visée au Tableau et a été exposé au risque dans les conditions du tableau ; qu'il incombe notamment à la caisse de rapporter la preuve de la constatation médicale dans le délai de prise en charge prévu par le tableau lorsque le certificat médical initial a été établi postérieurement à l'expiration de ce délai de prise en charge ; que les simples affirmations du médecin traitant ne peuvent être admises comme éléments de preuve de l'existence d'une date de première constatation médicale différente de la date d'établissement du certificat qu'à la condition d'être corroborées par d'autres éléments médicaux ; qu'en se fondant sur la seule mention du certificat établi le 23 avril 2007 par le médecin traitant pour les besoins de la prise en charge selon laquelle Mme Y... aurait été « en arrêt de travail entrant dans le cadre d'une maladie professionnelle depuis le 10/02/07 », sans constater le moindre élément médical contemporain à cette prétendue constatation susceptible de corroborer l'affirmation du médecin traitant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1315 du code civil, L. 461-1 du code de la sécurité sociale et du tableau de maladies professionnelles n°57 ;
ALORS, ENFIN, QUE le droit à un procès équitable implique que la juridiction de sécurité sociale, saisie d'un recours contre une décision d'un organisme de sécurité sociale formé par un assuré ou un employeur, exerce un contrôle de pleine juridiction concernant le bien-fondé de la décision qui lui est déférée ; qu'à cet égard, le juge ne peut, en cas de contestation concernant la date de première constatation médicale, se retrancher derrière les seules mentions du certificat médical initial sans vérifier si celles-ci sont justifiées et s'appuient sur des éléments médicaux ; qu'en se retranchant derrière un « arrêt de travail entrant dans le cadre d'une maladie professionnelle depuis le 10/02/07 » sur le certificat médical initial établi pour les besoins de la prise en charge plusieurs mois plus tard pour estimer que la première constatation médicale serait intervenue dans le délai de prise en charge sans vérifier, comme cela lui était demandé, si cette indication était corroborée par des éléments médicaux, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 142-1 et L. 461-1 du code de la sécurité sociale et 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.