SOC.
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 24 janvier 2018
Rejet non spécialement motivé
M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10055 F
Pourvoi n° N 16-11.299
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Scop des Lamaneurs du port de [...], dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 27 novembre 2015 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale, 14e chambre), dans le litige l'opposant à M. Dominique Y..., domicilié [...] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 12 décembre 2017, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Z..., conseiller rapporteur, M. Pietton, conseiller, Mme Dumont, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Scop des Lamaneurs du port de [...], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. Y... ;
Sur le rapport de Mme Z..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Scop des Lamaneurs du port de [...] aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. Y... ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre janvier deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Scop des Lamaneurs du port de [...].
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR confirmé le jugement rendu dans l'instance relative à la sanction disciplinaire de mise à pied qui avait rejeté la fin de non-recevoir tirée de la règle de l'unicité de l'instance, annulé la sanction disciplinaire prononcée à l'encontre de M. Y... le 3 février 2011 et condamné la société coopérative ouvrière de production des lamaneurs du port de [...] aux dépens et à lui payer une somme de 3.032,08 euros, et d'AVOIR, y ajoutant, condamné la SCOP des lamaneurs du port de [...] aux dépens d'appel et à payer à M. Y... les sommes de 1500 euros à titre de dommages et intérêts, de 303,20 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur le rappel de salaire outre une somme par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « La demande d'annulation de la sanction disciplinaire : Elle a été ainsi notifiée par lettre du 3 février 2011 : "Suite au conseil de discipline du 28 janvier 2011, auquel vous avez participé, sur les faits qui vous sont reprochés à savoir : propos tenus à M. Bertrand A..., Marine and Facilities de la société DSDF, dans les locaux de ladite société, de nature à porter préjudice à notre établissement et à certains de ses administrateurs. Conformément à la convocation de la société Coopérative des lamaneurs du port de [...], en date du 18 février 2004, nous avons été amenés à vous sanctionner d'une mise à pied disciplinaire de 15 jours avec suspension de salaire, et d'une mise à l'épreuve jusqu'à la fin de votre carrière au sein de la coopérative ; si un fait semblable devait se reproduire, nous envisagerions à votre égard une sanction plus élevée". En application des articles L1333-1 et L1333-2 du Code du travail, en cas de litige, le Conseil de prudhommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. Il peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise. M. Y... qui se plaint notamment d'une violation des droits de la défense, son avocat ayant été interdit de l'assister devant le Conseil de discipline, et le Président du conseil d'administration s'étant au contraire entretenu avec son propre avocat au téléphone, a été convoqué à l'entretien préalable à la sanction sans qu'il fasse connaître la possibilité de se faire assister d'un défenseur. Or, M. Y... qui a été sanctionné par une mise à pied emportant privation du salaire correspondant, l'a été en sa qualité de salarié. Dès lors, l'employeur devait en application de l'article R1332-1 du Code du travail, mentionner dans la convocation le droit de l'intéressé se faire assister de la personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise. La procédure est irrégulière et l'irrégularité a empêché M. Y... de se défendre. La gravité de ce manquement justifie l'annulation de la sanction et la condamnation de la SCOP des lamaneurs du port de [...] à payer à M. Y... le rappel de salaire correspondant ainsi que l'indemnité de congés payés afférente. Le prononcé d'une telle sanction dans ces conditions a causé à M. Y... un préjudice qui, au vu des éléments de la cause, doit être évalué à la somme de 1.500 euro » ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « la SCOP des lamaneurs a sanctionné Dominique Y... d'une mise à pied disciplinaire de 15 jours avec suspension de salaire et d'une "mise à l'épreuve jusqu'à la fin de SA$gt; carrière" ; que si la convention portant règlement intérieur de la société rédigée le 18 février 2004 prévoit la possibilité de sanctionner les agissements d'un salarié d'une mise à pied disciplinaire d'une durée maximale d'un mois, elle n'autorise nullement l'employeur à cumuler cette mesure avec celle de la mise à l'épreuve, qui n'est au demeurant ni réglementée, ni même prévue par la convention ; qu'il y a lieu, dans ces circonstances et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, d'annuler la sanction et de condamner la SCOP des lamaneurs à payer au salarié une somme de 3.032,08 euros correspondant aux salaires échus pendant la période de mise à pied » ;
1) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent pas méconnaitre les limites du litige telles qu'elles sont fixées par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, dans leurs « conclusions déposées et reprises par les parties qui ont été entendues en leurs plaidoiries » (arrêt page 3), les parties n'ont pas formulé de moyen tiré d'une violation de l'article R.1332-1 du code du travail aux termes duquel la convocation à un entretien préalable à une sanction doit mentionner le droit de l'intéressé de se faire assister par la personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, le salarié se plaignant seulement de l'absence d'information quant à « la possibilité de se faire assister ou représenter par un avocat » et du fait que son avocat n'ait pas été admis à assister au conseil de discipline ; qu'en jugeant cependant que la procédure était irrégulière et partant la mise à pied nulle faute de convocation répondant aux exigences de l'article R.1332-1 du code du travail, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent pas relever un moyen d'office sans au préalable inviter les parties à faire valoir leurs observations ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé d'office un moyen tiré de la violation de l'article R.1332-1 du code du travail sans qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la cour d'appel ait au préalable invité les parties à faire valoir leurs observations sur ce point ; qu'il en résulte que la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont expressément constaté que la mise à pied disciplinaire, d'une durée maximale d'un mois, était prévue par le règlement intérieur ; qu'en annulant la mise à pied litigieuse aux motifs inopérants qu'elle était accompagnée d'une mise à l'épreuve qui n'était pas réglementée, la cour d'appel, qui a statué par des motifs qui étaient tout au plus de nature à justifier l'annulation de la seule mise à l'épreuve, a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1333-1 et L.1333-2 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et condamné la SCOP des lamaneurs du port de [...] à payer à M. Y... les sommes de 44 035,74 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement, 8500,58 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre celle de 850,05 euros au titre des congés payés afférents, 130 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1500 euros à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la mention du droit individuel à formation, 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et d'AVOIR condamné la SCOP des lamaneurs du port de [...] aux dépens ;
AUX MOTIFS QUE « La lettre de licenciement qui fixe les termes du litige était ainsi rédigée : "L'assemblée générale extraordinaire de la SCOP des lamaneurs du port de [...] a décidé en date du 20 mai 2011 de procéder à votre exclusion. Je suis contraint de vous notifier votre licenciement pour faute grave. Tout d'abord, il faut rappeler le lien très fort qui existe dans une société coopérative de production ouvrière entre le statut d'associé et le contrat de travail. La jurisprudence considère que l'exclusion justifiée d'un associé salarié constitue en elle-même une cause réelle et sérieuse de licenciement. Mais, je vous l'ai dit, c'est même pour faute grave que ce licenciement est notifié. La SCOP des lamaneurs du port de [...] considère que chacune des initiatives dirigées contre la société à laquelle vous apparteniez, constitue une faute grave. Je rappelle tout d'abord qu'à la suite du conseil de discipline du 28 janvier 2011, vous aviez été sanctionné d'une mise à pied disciplinaire de 15 jours avec suspension de salaire, et mise à l'épreuve, jusqu'à la fin de votre carrière au sein de la coopérative. En dépit du préjudice que les agissements ainsi sanctionnés avaient causé à la coopérative, vous avez estimé devoir saisir le tribunal de commerce de [...] d'une action en contestation de cette décision légitime et en paiement de dommages et intérêts, c'est le premier fait reproché. Puis par une lettre du 20 janvier 2011, que vous m'aviez adressée en qualité de président, vous avez manifesté une attitude portant atteinte à la bonne marche de la société coopérative des lamaneurs du port de [...] : votre courrier portait gravement atteinte à la mémoire d'un collègue décédé tragiquement dans un accident du travail, il y a une dizaine d'années et constituait une véritable injure à l'égard de ses collègues présents à ses côtés le jour de l'accident tragique. Mieux encore dans le cadre d'une procédure judiciaire portée devant le juge des référés, vous avez demandé l'autorisation de communiquer l'enquête pénale diligentée suite à l'accident du [...], dans lequel avait trouvé la mort M. B... ; cette autorisation vous a d'ailleurs été refusée par ordonnance du 19 mai 2011. Bien entendu, le licenciement n'intervient que parce que vous vous seriez légitimement soucié de la sécurité au travail ou de la santé des uns et des autres. Mais vous n'avez à vous substituer ni à la direction de l'entreprise, ni à la médecine du travail, ni à l'inspection du travail. Vous avez porté des accusations graves contre des collègues de travail que vous avez mis en cause dans ce courrier. Vous avez également estimé devoir prendre des initiatives auprès de M. le Commandant de port, M. C..., (il vous a été présenté le mail du 11 février 2011 de M. le Commandant de port, relatant ces faits). Entendu le 20 mai par l'assemblée générale, au lieu de rechercher la réconciliation avec vos collègues, vous n'avez su que manier la menace, indiquant ainsi que relaté au PROCÈS VERBAL d'assemblée, que votre licenciement coûterait cher à la SCOP des lamaneurs du port de [...]. Plus généralement, vous avez porté atteinte à l'esprit coopératif et vous avez multiplié les agressions et les procédures contre la SCOP, tous éléments constituant autant de fautes graves qui vous sont aujourd'hui reprochées." En application des articles L1232-1 et suivants du Code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. En cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié. La SCOP des lamaneurs du port de [...] soutient que la perte de la qualité d'associé est une cause réelle et sérieuse de licenciement. Mais les statuts de la SCOP des lamaneurs du port de [...] prévoient seulement que "pour devenir associé, il faut avoir une profession permettant d'être occupé dans l'entreprise sociale", que "toute personne ayant été occupée pendant cinq ans au moins, par la société, peut présenter une demande d'admission comme sociétaire", et qu'"en cas de rejet d'une demande d'admission, celle-ci peut être renouvelée chaque année". Ces mêmes statuts ne prévoient pas que l'exclusion d'un associé entraîne par là même son licenciement et confient au conseil d'administration le soin d'embaucher et de révoquer les ouvriers et employés de la SCOP. Il en résulte que la perte par l'exclusion de la qualité d'associé n'a aucune conséquence sur le maintien du contrat de travail. S'agissant des fautes énoncées au soutien du licenciement, il convient d'écarter d'emblée celle relative à la saisine du tribunal de commerce pour contester la sanction disciplinaire notifiée le 3 février 2011. Il ne saurait être imputé à faute à un salarié qui s'estime injustement sanctionné, de saisir le juge pour faire valoir ses droits. Le principal reproche fait à l'intéressé est l'envoi d'un courrier au président de la SCOP des lamaneurs du port de [...], le 20 janvier 2011, courrier soulignant la consommation habituelle et excessive d'alcool parmi les lamaneurs, pratique dangereuse tant pour les intéressés que les tiers, et rappelant le décès, deux ans auparavant, dans l'exercice de ses fonctions, d'un lamaneur sous l'emprise de l'alcool. Ce courrier reprochait, exemples précis à l'appui, la faiblesse des sanctions et l'absence de réaction significative de la part de la SCOP face à "ce fléau". La SCOP estime qu'un tel courrier était de nature à porter atteinte à la mémoire d'un ancien lamaneur, et d'être injurieux envers tous les lamaneurs. Mais, ce courrier était adressé au seul président de la SCOP qui n'était pas tenu, comme il l'a fait, de l'afficher dans les locaux et ainsi de le porter à la connaissance de tous. En sa qualité d'associé, comme de travailleur, M. Y... avait qualité pour attirer l'attention du président sur les dangers présentés par selon lui, une consommation excessive d'alcool au travail, qui au demeurant n'est déniée ni d'une manière générale, ni aux cas particuliers évoqués. Il n'est d'ailleurs pas reproché à l'intéressé de fausses énonciations. La mention du décès de M. B... en état d'ébriété [...] , n'est pas une atteinte à sa mémoire mais le rappel utile d'un drame vraisemblablement causé par l'alcool. À cet égard, la veuve de M. B... atteste que selon l'enquête de police, son mari est effectivement décédé en état d'alcoolémie (1,63 gramme d'alcool dans le sang) après un déjeuner en compagnie des trois lamaneurs de sa bordée, arrosé de plusieurs verres de whisky et de vin. Elle estime que la SCOP "ne pouvait ne pas être au courant" et regrette l'absence de mise en oeuvre par l'employeur de mesure de prévention. C'est après avoir reçu sa convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement, que conjointement avec Madame B..., M. Y... a saisi le juge des référés, déjà saisi par la SCOP des lamaneurs du port de [...] aux fins de rétractation de l'ordonnance désignant un huissier pour assister à l'assemblée générale extraordinaire du 20 mai 2011, d'une demande tendant à autoriser Madame B... à lui communiquer le procès-verbal de police sur les circonstances du décès de son mari, et à en faire utilisation dans le cadre de sa défense disciplinaire. Dans ce cadre, il ne peut être reproché à un salarié de faire état au président du conseil d'administration, de problèmes récurrents d'alcoolisme dans un secteur d'activité particulièrement exposé, où la sécurité constitue un enjeu primordial. Il ne peut non plus lui être reproché, pour les besoins de sa défense, de demander l'autorisation en justice de produire un procès-verbal d'enquête de police sur le décès d'un lamaneur, alors même, au surplus, que la veuve s'associait à cette démarche de nature à établir le bien-fondé de critiques relatives à la sécurité. Quant aux propos tenus au commandant du port, fin janvier 2011, la Cour relève qu'ils n'ont pas été confirmés par une attestation de celui-ci. D'après le courriel de M. C..., en charge de la sécurité du port, M. Y... stressé et désemparé, lui a fait part de son inquiétude, craignant, après une convocation devant le conseil de discipline pour la conversation avec M. Y..., d'être licencié. Le contenu du mail, ayant trait notamment à la mise "en cause de certains de ses collègues dans des affaires dont je n'avais jamais ou très vaguement entendu parler" et à la tentative de justification de son action auprès de M. A... "disant qu'en dénonçant les problèmes d'alcool de certains de ses collègues, il agissait par souci de sécurité pour le bien de la coopérative et de ses collègues", est en toute hypothèse insuffisamment circonstanciée pour caractériser un comportement fautif de M. Y... et une "initiative" dirigée contre la SCOP, mais témoigne plutôt du désarroi de l'intéressé. Enfin, la menace proférée sous l'effet de l'émotion, par M. Y..., seul face à ses associés, pendant l'assemblée générale, relative au coût du licenciement, n'est pas pour ce motif, constitutive d'un abus de son droit d'expression. Dans ces circonstances, étant rappelé que M. Y... était membre de la SCOP depuis 1980, que lui-même indique sans être démenti, qu'il n'avait jusqu'à présent, fait l'objet que d'un avertissement, les faits reprochés ne sont pas de nature, pour le courrier adressé au président de la SCOP ou la demande faite en référé, ou bien ne sont pas suffisamment caractérisés, pour l'entretien avec M. C..., ou les propos en assemblée générale, pour constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement » ;
1) ALORS QUE si les sociétés coopératives de production peuvent employer des personnes n'ayant pas la qualité d'associé, la perte de la qualité d'associé, même involontaire, justifie le licenciement de la même manière que le licenciement emporte, sauf exception légale, la perte de la qualité d'associé ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1 à 11 de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978 portant statut des sociétés coopératives de production ;
2) ALORS QUE constitue une faute le fait pour un salarié d'abuser de sa liberté d'expression en formulant, auprès de tiers ayant des relations professionnelles avec son employeur, des propos de nature à porter atteinte à la réputation de ce dernier ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de la cour d'appel que M. Y... avait, dans ses conversations avec le commandant de port, M. C..., chef de la capitainerie, « mis en cause (de) certains de ses collègues dans des affaires dont [M. C...] n'avai[t] jamais ou très vaguement entendu parler » et fait état de « problèmes d'alcoolisme de certains de ses collègues » ; que de tels propos concernant ses collègues lamaneurs du port de [...], auprès du commandant de port, caractérisaient un abus fautif de la liberté d'expression en ce qu'ils étaient de nature à faire douter de la capacité de la SCOP à fournir une prestation correcte dans des conditions de sécurité acceptables ; qu'en retenant au contraire que le courriel de M. C... n'était pas suffisamment circonstancié pour caractériser un comportement fautif de M. Y..., la cour d'appel a violé l'article L.1235-1 ensemble l'article L.1121-1 du Code du travail ;
3) ALORS QUE, indépendamment de tout abus de la liberté d'expression, caractérise une faute grave ou à tout le moins une cause réelle et sérieuse de licenciement, le fait pour un salarié d'adopter un comportement caractérisant sa volonté de se placer en dehors du lien de subordination ; qu'en l'espèce l'employeur faisait valoir que l'attitude agressive de M. Y..., accusant ses collègues lamaneurs d'être des ivrognes devant eux, auprès de leur employeur, et plus encore auprès des autorités du port, détruisait l'affectio societatis compte tenu de ses démarches hostiles, ce qui était de nature à rendre impossible le maintien de son contrat de travail, ce d'autant qu'il avait déjà été sanctionné pour voie de fait à l'égard d'un autre membre du personnel de la SCOP ; qu'en omettant en l'espèce de rechercher si l'attitude du salarié, examinée dans son ensemble, n'interdisait pas la poursuite du contrat de travail en ce qu'elle révélait sa volonté de se placer en dehors du lien de subordination, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1235-1 du code du travail ;
4) ALORS QUE la preuve est libre en matière sociale ; qu'en jugeant non suffisamment probant le courriel du commandant de port, M. C..., au prétexte qu'il n'était pas confirmé par une attestation de sa part, la cour d'appel a violé le principe susvisé ensemble l'article 1315 du code civil ;
5) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent pas dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir qu'avant le licenciement, M. Y... avait fait l'objet de deux sanctions, soit la mise à pied du 3 février 2011 et encore une sanction pour voie de fait contre un autre salarié de la SCOP le 12 mars 2009 (conclusions d'appel de l'employeur page 10) ; qu'en affirmant cependant que c'est « sans être démenti » que M. Y..., membre de la SCOP depuis 1980, indiquait « qu'il n'avait jusqu'à présent, fait l'objet que d'un avertissement », la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR condamné la SCOP des lamaneurs du port de [...] à payer à M. Y... les sommes de 44 035,74 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement, 8.500,58 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre celle de 850,05 euros au titre des congés payés afférents, 130 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 1500 euros à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la mention du droit individuel à formation, 3000 euro en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et d'AVOIR condamné la SCOP des lamaneurs du port de [...] aux dépens ;
AUX MOTIFS QUE « Le salarié a droit en application de l'article L1234-9 du Code du travail, à un cinquième de mois de salaire au titre des dix premières années, auxquels s'ajoutent deux quinzièmes de mois de salaires par année au-delà de dix ans d'ancienneté. Le salaire de référence est selon la formule la plus avantageuse, soit le douzième de la rémunération des douze mois précédant la rupture, soit le tiers des trois derniers mois. En l'espèce, au vu des bulletins de paie communiqués, le douzième de la rémunération sur les douze derniers mois s'élève à 4.892,86 euro, et le tiers des trois derniers mois à 4.255,58 euro. Il convient en conséquence de prendre en considération le douzième et l'indemnité de licenciement est égale à (4.892,86 euro x 2) = 9785,72 + (21/3 x 4.892,86 euro) = 34.250,02 euro = 44.035,74 euro. Par ailleurs, au vu des bulletins de paie, M. Y... aurait perçu pendant la période de préavis, la somme de 4.250,29 euro. L'indemnité compensatrice de préavis sera donc égale à 8.500,58 euro, outre les congés payés afférents. Enfin, au vu de l'ancienneté et de la rémunération de l'intéressé, de sa capacité à retrouver un emploi, de son âge, 58 ans à ce jour, de ce qu'il a subi une perte de chance de percevoir une retraite à taux plein, de la taille de l'entreprise, la Cour est en mesure de fixer à la somme de 130.000 euro le montant des dommages et intérêts dus en application des dispositions de l'article L1235-3 du Code du travail. Enfin, l'employeur a omis de préciser le nombre d'heures de droit individuel à la formation auquel M. Y... pouvait prétendre. Ayant atteint le nombre maximum d'heures de droit individuel à formation, le salarié subit un préjudice qui sera réparé par l'allocation de la somme de 1.500 euro à titre de dommages et intérêts » ;
ALORS QUE tel que le faisait valoir l'employeur en cause d'appel (conclusions page 13) le salarié, marin affilié à l'ENIM, pouvait bénéficier d'une retraite à taux plein au plus tard à 55 ans ; que cependant, la cour d'appel a fixé à 130 000 euros le montant des dommages et intérêts dus en conséquence du licenciement jugé sans cause réelle et sérieuse, au regard de la capacité du salarié, âgé de 58 ans au jour de l'audience, de retrouver un emploi, et au prétexte qu'il aurait perdu une chance de percevoir une retraie à taux plein ; qu'en statuant ainsi, sans examiner, comme elle y était invitée, la situation du salarié au regard de ses droits à la retraite, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1235-3 et des articles L.5552-1 et suivants du code des transports./SA$gt;