SOC.
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 24 janvier 2018
Rejet non spécialement motivé
M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président
Décision n° 10061 F
Pourvoi n° V 15-27.310
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Guy Y..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 30 septembre 2015 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale, prud'hommes), dans le litige l'opposant à la société Services conseil expertises territoires (SCET), dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 12 décembre 2017, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Z..., conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, Mme Dumont, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. Y..., de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Services conseil expertises territoires ;
Sur le rapport de Mme Z..., conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre janvier deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. Y....
Il est reproché reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. Guy Y... de sa demande en paiement de complément d'indemnité de départ à la retraite.
AUX MOTIFS QUE l'essentiel du litige porte sur la notion de coemploi, le salarié affirmant que la gestion des ressources humaines de la plupart des sociétés qui l'ont employé était assurée par la SCET qui détenait jusqu'en 2003, des participation importantes dans leur capital de sorte qu'il conviendrait de retenir, pour le calcul de l'indenité de départ à la retraite selon les modalités prévues par la convention collective au minimum neuf ans et dix mois, selon le détail suivant (
) et à titre principal une ancienneté totale de 20 ans et neuf mois en ajoutant à la précédente une « ancienneté additionnelle » de 10 ans et 11 mois (
) ; que M. Y... invoque une gestion commune à l'échelle du groupe « SCET/Caisse des dépôts et consignations » des carrières du personnel mis à a disposition des filiales ; qu'il soutient que c'est pour créer l'apparence d'une certaine orthodoxie juridique que la Caisse des dépôts et consignations et la SCET se sont retirées en 2003 du capital des SEML pour substituer à ces liens capitalistiques un réseau organisant une gestion commune du recrutement, des carrières et de la formation du personnel des SEML et un accord d'entreprise reconnaissant l'existence d'une unité économique et sociale entre les entreprises membres de ce réseau ; qu'il résulte des pièces produites que la SCET recrute de façon permanente des cadres et employés pour les mettre à la disposition des SCEM spécialisées dans la maîtrise d'ouvrages d'aménagement, d'équipements publics et de services aux collectivités appartenant à un réseau dénommé INTERSEM ; qu'elle met par ailleurs à la disposition de celles- là des consultants spécialisés dans le conseil et l'expertise ; qu'il n'est en revanche pas établi que la gestion des ressources humaines soit assurée par l'appelante ; que s'agissant de l'existence d'une unité économique et sociale, la SCET fait justement valoir que les membres de celle-ci sont limitativement énumérés dans l'annexe de l'accord d'entreprise du 15 novembre 2004 (
) et qu'aucune des entreprises pour le compte desquelles M. Y... a oeuvré à un moment ou un autre de sa carrière, à l'exception de la SCET elle-même n'en fait partie ; que pour caractériser l'existence d'une gestion commune intégrée, le salarié fait valoir : - que sa lettre d'engagement renvoyait aux conditions communes du groupe SCET en matière de définition de poste, de positionnement, d'indice et de valeur indiciaire (
), - qu'il a été engagé le 21 juin 1995 par l'appelante pour être aussitôt mis à la disposition de sa filiale guadeloupéenne et réintégré sans forme à l'issue de cette période par la société qui l'avait engagé sur un poste en avancement (
), - que la lettre de transmission de son contrat de travail de chargé de mission au sein de la SEPAC fait référence à la réglementation de la SCET pour les agents en mobilité les conditions particulières de la lettre d'engagement renvoyant là encore aux conditions communes du groupe SCET en matière de définition du poste de positionnement, d'indice et de valeur indiciaire (
), - que c'est la direction régionale du ord Pas de Calais qui l'a mis à disposition du GIE Eurotunnel pour la période du 1er octobre 2000 à décembre 2001, - qu'à l'issue de ses missions/mises à disposition, il rejoignait systématiquement la SCET ; qu'il cite encore une communication de la Cour des comptes à la commission des finances du Sénat qui confirmait, selon lui, l'extrême porosité entre le SCET et les SEM et stigmatisait la « gestion consanguine » des salariés mis à disposition ; que la SCET reconnait l'existence d'un réseau de sociétés clientes mais conteste toute immixtion dans la gestion de celles-ci; qu'elle nie avoir été l'employeur de M. Y... en dehors de la dernière période et rappelle qu'en vertu de l'article 12 de la convention collective Syntec, l'ancienneté correspond «au temps passé dans l'entreprise en une ou plusieurs fois, quel qu'aient été les emplois successifs, déduction faite toutefois, en cas d'engagements successifs, de la durée des contrats dont la résiliation est imputable à la démission de l'intéressé » ; qu'elle indique être structurée en 17 agences et 6 directions interrégionales et donner accès aux clientes, à travers le réseau dont il a été question plus haut, à des services communs ; que le rapport précité de la Cour des Comptes indique certes que « plusieurs sociétés du groupe, prestataires des SEML, avaient adopté de très longue date un modèle de travail en réseau », ce dont était résulté « une tradition d'imbrication des filiales de la caisse et des SEML » que la cour estimait néfaste et juridiquement dangereuse (risque de conflit d'intérêts) mais n'allait pas au-delà ; que hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme le co- employeur du personnel employé par une autre que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques et de la domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion caractérisée dans la gestion économique et sociale des sociétés dominées ; que sans besoin d'examiner l'existence d'un groupe unissant les sociétés énumérées plus haut et en dépit des liens capitalistiques qui ont existé, les éléments invoqués par l'appelant sont insuffisants pour caractériser la triple confusion d'intérêts, d'activités et de direction et les immixtions de l'appelant dans la gestion économique et sociale des entreprises dominées ; que compte tenu par ailleurs des dispositions de l'article 12 de la Convention collective reproduite plus haut (il a démissionné de son poste à la SCET pour entrer au service du GIE Eurotunnel Services le 1er janvier 2001), la demande de Monsieur Y... est injustifiée ; que le jugement qui y a fait droit sera donc infirmé ;
1) ALORS QUE la mise à disposition d'un salarié par son employeur auprès d'un utilisateur est une opération qui ne suppose aucune modification ni a fortiori aucune rupture du contrat de travail initial; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que l'existence d'un réseau d'entreprises n'était pas contestée, pas plus que n'était contestée la mise à disposition de salariés opérée au sein de ce réseau par la SCET ; qu'en retenant que la SCET, société employeur d'origine, n'était pas co-employeur en raison de l'absence d'imbrication suffisante entre les entreprises du groupe, sans rechercher si le lien contractuel d'origine ne subsistait pas lorsque l'employeur usait de son pouvoir d'affectation en mettant le salarié à la disposition des entreprises membres du réseau, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1134 du code civil, ensemble les articles L1221-1 et L8242 du code du travail ;
2) ALORS QU' il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la SCET recrute de façon permanente des cadres et employés pour les mettre à la disposition des SEM, spécialisées dans la maîtrise d'ouvrage d'aménagement, d'équipements publics et de services aux collectivités appartenant à un réseau, et qu'elle met également à la disposition de ces entreprises partenaires des consultants spécialisés dans le conseil et l'expertise ; qu'après avoir fait de telles constatations, la cour d'appel ne pouvait écarter la qualité d'employeur ou de coemployeur de la SCET au seul motif qu'il n'était pas établi que la gestion des ressources humaines des SEM membres du réseau soit assurée par la SCET, sans rechercher si le lien contractuel d'origine n'avait pas subsisté entre M. Y... et la SCET qui avait usé de son pouvoir d'affectation pour mettre ce salarié à la disposition des entreprises partenaires du réseau ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, ensemble les articles L1221-1 et L8242 du code du travail ;
3) ALORS QUE la cour d'appel ne pouvait se référer aux dispositions de la convention collective qui excluaient le décompte de l'ancienneté du salarié au seul cas de démission, dès lors qu'elle n'a pas constaté de démission du salarié lors de chacune des mises à disposition invoquées mais au seul moment de l'entrée de M. Y... au service du GIE Eurotunnel ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans analyser le sort du lien contractuel lors de chacun des cas de mise à disposition de M. Y..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 12 de la convention collective Syntec applicable à la relation de travail.