COMM.
CGA
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 24 janvier 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10065 F
Pourvoi n° Y 13-22.245
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ M. Serge X...,
2°/ Mme Giuliana Y..., épouse X...,
tous deux domiciliés [...] ,
contre les arrêts rendus les 23 mai 2013 et 4 juillet 2013 par la cour d'appel de Nancy (2e chambre civile), dans le litige les opposant à la société Banque Kolb, société anonyme, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 12 décembre 2017, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme A..., conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, M. Graveline, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. et Mme X..., de la SCP François-Henri Briard, avocat de la société Banque Kolb ;
Sur le rapport de Mme A..., conseiller, l'avis de Mme Z..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Banque Kolb la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre janvier deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...
Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR condamné solidairement Monsieur Serge X... et Madame Giuliana Y..., épouse X..., à payer à la société BANQUE KOLB les sommes de 144.159,26 € majorée des intérêts au taux contractuel Euribor 3 mois + 1 point à compter du 3 juin 2009, au titre de l'engagement de caution du 23 décembre 2005 et de 10.707,13 € majorée des intérêts au taux contractuel Euribor 3 mois + 1 point à compter du 3 juin 2009, au titre de l'engagement de caution du 24 août 2006 et d'AVOIR débouté Monsieur et Madame X... de toutes leurs autres demandes ;
AUX MOTIFS QUE sur la mise en oeuvre de la responsabilité de la Sa Banque Kolb, que Monsieur et Madame X..., faisant valoir leur caractère non avertie opposent à la Sa Banque Kolb l'octroi abusif de crédit à l'occasion des prêts consentis à la Sarl Le Rétro ; qu'il sera rappelé que selon l'article L. 650-1 du code de commerce, issu de la loi du juillet 2005 applicable aux procédures collectives ouvertes après le 1er janvier 2006, date de son entrée en vigueur, « lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis sauf les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnés à ceux-ci », l'exclusion de garantie, générale, s'appliquant aussi bien à l'égard de l'entreprise que des créanciers et des cautions ; que M. et Mme X... qui prétendent qu'il y a eu immixtion de la part de la banque dans la gestion de la Sarl Le Rétro lorsqu'elle lui a alloué le 1er mars 2006, en parfaite connaissance de la situation, un prêt de 8000 euros destiné non à assurer la trésorerie courante de l'entreprise, mais à permettre le remboursement aux associés des fonds qu'ils avaient apportés, ne rapportent pas la preuve que la banque aurait été à l'origine d'un quelconque montage, non conforme à l'intérêt social ; que la Sa Banque Kolb fait à juste titre valoir que le prêt litigieux, d'un montant modeste, a été accordé sur la base d'une étude de faisabilité qui lui avait été présentée quelques mois auparavant au moment de la mise en place du financement de l'acquisition du fonds de commerce, qui laissait augurer de bonnes perspectives de rentabilité ; qu'à cet égard, les bilans du fonds de commerce restaurant gril le Rétro produits aux débats, font apparaître un chiffre d'affaires hors taxes de 249 833 euros pour l'exercice clos au 31 mars 2004 et de 259 401 euros pour l'exercice clos au 31 mars 2005, pour un bénéficie respectivement de 9187 euros et de 18 104 euros, l'étude de faisabilité fournie par l'emprunteuse mentionnant un chiffre d'affaires de 267 183 euros en N+1 et de 275 198 euros en N+2, avec un excédent brut d'exploitation de 63 859 euros et de 65 984 euros ; qu'en toute hypothèse, l'engagement de caution de M. et Mme X... étant déclaré nul et de nul effet, ils ne peuvent se prévaloir d'aucun préjudice de ce chef ; que sur le caractère disproportionné de l'engagement de caution ; que sur le montant allégué de la banque à son devoir de mise en garde, il résulte tant de l'article L. 341-4 du code de la consommation issu de la loi du 1er août 2003 que de l'article L. 313-10 du même code applicable au crédit immobilier, que l'établissement de crédit ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et ses revenus à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ; que ce texte, qui pose un principe général de proportionnalité, s'applique, selon la jurisprudence constante, à toute personne physique, qu'elle soit une caution profane ou avertie ou même qu'elle ait la qualité de dirigeant social, de sorte que les développements des parties concernant le caractère averti ou profane des cautions en cause sont sans utilité ; qu'il sera par ailleurs rappelé que si, en cas de pluralité de cautions solidaires, la proportionnalité doit être appréciée séparément puisque chaque caution est tenue au paiement intégral de la dette sans pouvoir opposer le bénéfice de discussion ou le bénéfice de division, en revanche, dans l'hypothèse d'époux communs en biens, ce qui est le cas en l'espèce, l'appréciation doit se faire, non au regard de la situation patrimoniale de chacun, mais de celle de la communauté ; qu'enfin, les cautions sont tenues à une obligation de loyauté dans la fourniture des renseignements qu'ils fournissent à l'établissement prêteur, qui doivent être complets et exacts ; qu'en premier lieu, il ne peut être fait grief à la Sa Banque Kolb d'avoir négligé de vérifier leur situation alors qu'elle produit une fiche de renseignements que M. et Mme X... ont signée le 1er décembre 2005 en certifiant leur exactitude ; qu'il y est mentionné que M. X..., gérant d'une société de services aux industries depuis deux ans, dispose de revenus annuels nets de 16 000 euros et Mme X..., salariée de la Banque Kolb depuis 1975, d'un salaire net de 17.000 euros ; qu'il n'est pas fait état d'indemnités Assedic ; qu'il est par ailleurs indiqué que leur patrimoine est constitué d'une maison principale située à Poussay et évaluée à 200 000 euros ; d'un PEL de euros et d'un PEE de 20.000 euros ; que s'agissant des charges, M. et Mme X... ont déclaré rembourser un crédit voiture contracté auprès de la banque Kolb au titre duquel restent dus 4399 euros et remboursable par échéances annuelles de 3192 euros dont la dernière en mai 2007, un crédit Diac représentant une charge annuelle de 4827,50 euros et un prêt étoile souscrit auprès de la Sa Kolb sur lequel restent dus 6400 euros et dont les échéances annuelles s'élèvent à 2250 euros – soit une charge globale de remboursement de 856 euros mensuels ; qu'il convient également de rappeler le courrier adressé par M. X... à la Banque Kolb le 30 novembre 2005 aux termes duquel il indique que le prêt de 169 000 euros sollicité est destiné au financement de la totalité de l'acquisition du fonds de commerce, afin d'éviter de débloquer le PEL et le PEE en cours, M. X... évoquant en outre une future rentrée d'argent de 86.000 euros suite à un litige prud'homal ; qu'au regard du patrimoine de M. et Mme X... d'une valeur globale de 247.000 euros, suffisamment importante pour éteindre leur dette, l'engagement de caution qu'ils ont souscrit le 23 décembre 2005, nonobstant le montant élevé des remboursements mensuels du prêt garanti, ne peut être qualifié de manifestement disproportionné ; que M. et Mme X... ne peuvent sérieusement soutenir qu'ils n'entendaient pas engager leur bien immobilier, dont ils ont expressément fait état dans la fiche de renseignements qu'ils ont établie et qui a été pris en compte par la banque pour apprécier la proportionnalité de l'engagement par rapport à leur situation patrimoniale ; que s'agissant du cautionnement souscrit le 24 août 2006 à hauteur de 13 000 euros, qu'aux termes de la fiche de renseignement y annexée, M. X..., gérant non salarié de la Sarl Le Rétro, déclare au titre « d'autres revenus » une somme de 22.261 euros et Mme X... un revenu annuel de 19 247 euros ; qu'il est fait état, s'agissant des charges, de deux crédits voitures contractés auprès de la société Cetelem, au titre desquels restent dus respectivement 10 990 euros et 22 500 euros pour les dernières échéances en février 2009 et février 2011 ; qu'est également mentionné le patrimoine immobilier représenté par la maison située à Poussay évaluée à 200.000 euros ; que quelle que soit l'appréciation qui peut être faite du caractère disproportionné de ce nouvel engagement au jour où il a été contracté, il est constant qu'eu égard aux montants pour lesquels ils sont appelés, totalisant en capital 154.866,39 euros, le patrimoine immobilier de M. et Mme X... leur permet de faire face à leur obligation ;
1°) ALORS QUE l'absence de disproportion manifeste de l'engagement de la caution ne dispense pas la banque de son obligation de mise en garde à l'égard de la caution non avertie ; qu'en jugeant « que les développements des parties concernant le caractère averti ou profane des cautions en cause [étaient] sans utilité » (arrêt, p. 13, §6) quand il lui appartenait au contraire de rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p. 23, §1 et §3), si l'établissement de crédit n'avait pas manqué à son devoir de mise en garde à l'encontre de Monsieur et Madame X... et donc de trancher le débat relatif au caractère averti de la caution, la Cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;
2°) ALORS QUE l'absence de disproportion manifeste de l'engagement de la caution ne dispense pas la banque de son obligation de mise en garde à l'égard de la caution non avertie ; qu'en jugeant, pour condamner les époux X... au paiement de différentes sommes, que les engagements de caution des 23 décembre 2005 et 24 août 2006 n'étaient pas disproportionnés, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société BANQUE KOLB n'avait pas « négligé son devoir de mise en garde » et ainsi fait perdre une chance aux cautions « de ne pas avoir contracté » (conclusions, p. 23, §1 et §3), la Cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à établir si, tenue d'un devoir de mise en garde lors de la conclusion des contrats, la banque justifiait y avoir satisfait, privant sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil.