CIV. 2
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 18 janvier 2018
Rejet non spécialement motivé
M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10030 F
Pourvoi n° N 16-27.514
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [...] ,
2°/ la société Autocars de la Joigne, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , prise en la personne de son liquidateur amiable M. Jean-Luc Y...,
3°/ M. Alexandre Z..., domicilié [...] ,
contre deux arrêts rendus les 17 mars 2015 et 3 mai 2016 par la cour d'appel de Caen (1re chambre civile), dans le litige les opposant :
1°/ à Mme Régine A..., veuve B..., domiciliée [...] ,
2°/ à M. Mickaël B..., domicilié [...] ,
3°/ à Mme Stéphanie B..., domiciliée [...] ,
4°/ à M. Sébastien B..., domicilié [...] ,
5°/ à Mme Cyprienne C..., domiciliée [...] ,
6°/ à Mme Christine B..., domiciliée [...] ,
7°/ à l'association des assureurs Assurance accidents du travail et maladies professionnelles des exploitants agricoles (AAEXA), dont le siège est [...] ,
8°/ à la Mutualité sociale agricole Côtes Normandes, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 décembre 2017, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, M. D..., conseiller rapporteur, Mme Vannier, conseiller, Mme Mainardi, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat des sociétés Axa France IARD et Autocars de la Joigne, de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de Mme A... ;
Sur le rapport de M. D..., conseiller, l'avis de M. E..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à M. Z... du désistement de son pourvoi ;
Donne acte aux sociétés Axa France IARD et Autocars de la Joigne du désistement de leur pourvoi en tant que formé contre l'arrêt rendu le 3 mai 2016 par la cour d'appel de Caen et en ce qu'il est dirigé contre MM. Mickaël et Sébastien B..., Mmes Stéphanie et Christine B... et Mme C... ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés Axa France IARD et Autocars de la Joigne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des sociétés Axa France IARD et Autocars de la Joigne, les condamne à payer à Mme A... la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour les sociétés Axa France IARD et Autocars de la Joigne.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué (Cour d'appel de Caen, 3 mai 2016) d'AVOIR fixé le préjudice économique de Madame Régine B... à la somme de 272.600,37 euros et d'AVOIR condamné in solidum la SARL Autocars de la Joigne et la Compagnie AXA FRANCE IARD à payer, compte tenu du partage de responsabilité intervenu, à Madame Régine B... la somme de 136.300,18 euros en réparation de son préjudice économique ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la liquidation du préjudice économique de Madame B... : il a été proposé aux parties un mode de calcul du préjudice économique du conjoint survivant qui n'est contesté qu'en ce qui concerne le choix du barème de capitalisation ; Que la Compagnie AXA maintient sa demande visant à écarter l'application du barème de capitalisation publié par la Gazette du Palais en 2013 au profit du barème issu de l'arrêté du 11 février 2015, en sorte qu'elle offre un taux de capitalisation de 16,746 au lieu de 23,956 comme proposé ; qu'il est acquis en droit positif que la cour fait application du barème de capitalisation qui lui paraît le plus adapté à assurer les modalités de la réparation pour le futur, comme l'a jugé la Cour de Cassation (pourvois 14-27.244 et 14-27.243 joints) ; qu'en l'espèce, c'est bien le barème publié par la Gazette du Palais qui est le plus adapté ; que basé sur la même table de mortalité que le barème issu de l'arrêté du 11 février 2015, au taux de capitalisation choisi (1,2 %), il intègre l'inflation, méthode qui seule est de nature à garantir le strict respect du principe de la réparation intégrale vanté par la société AXA ; que pour le surplus, le calcul provisoirement arrêté au 28 février 2015 n'étant pas remis en cause, il convient d'allouer à Madame B... la somme de 136 300,18 euros déterminée comme suit :
- Revenus du défunt : 13.018,70
- Revenus du conjoint : 5.199,00
- Revenus annuels du couple : 18.217,70
Il convient de fixer la part d'autoconsommation du défunt à : 0,25%
Soit un revenu disponible pour le foyer de 13.663,28
De cette somme il convient de déduire
les revenus perçus par la veuve : 5.199,00
soit une perte annuelle pour le foyer de : 8.464,28
que Madame B... subit une perte de revenus qui ne doit pas être limitée à 65 ans et qui est viagère ; qu'il convient de distinguer :
- (1) les sommes échues entre le 28 novembre 2006 et le 28 février 2015 (date qui avait été provisoirement arrêtée comme la plus proche de l'arrêt), soit 8 ans et 3 mois,
- (2) et les sommes à échoir à compter de cette date.
que Madame B... est née le [...] ; qu'elle était donc âgée de 57 ans.
Soit : (1) 8 464,27 X 8 + (8 464,27/12X3) : 69 830,27
(2) 8 464,27X 23,956 : 202.770,17
Sous-total (1) + (2) 272.600,44
Incombant au responsable pour 136.300,22
La créance subrogatoire de l'AAEXA comprend :
- les rentes échues : 6.935,21
- les rentes à échoir : 58.634,69
Total 65.569,90 » ;
ET QUE « en sorte que la répartition entre le tiers-payeurs et le conjoint survivant est la suivante : Préjudice : 272.600,44 ; indemnité à la charge du responsable : 136.300,22 ; Madame B... : 136.300,22 ; AAEXA : 00,0 ; qu'il n'y a pas lieu de déduire de cette somme celle de 32.499 euros versée à ce titre en raison de l'exécution provisoire ordonnée » ;
ALORS QUE si les juges du fond apprécient souverainement le préjudice subi par les ayant droits de la victime d'un accident de la circulation, il ne saurait en résulter ni perte ni profit ; que la pension de réversion ne peut, sans qu'il en résulte un avantage indu pour la veuve, être écartée du calcul des revenus du foyer postérieurs au décès de la victime ; que la Cour d'appel a constaté que l'AAEXA versait à ce titre à Madame B... une rente à la suite du décès de son mari, rente dont elle a relevé l'existence, le montant et le versement (arrêt p. 5 antépénultième alinéa) ; qu'en évaluant néanmoins le montant du préjudice économique de Madame B..., sans prendre en compte la pension de réversion anticipée qu'elle percevait pour évaluer les revenus du foyer postérieurement au décès, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil, dans sa rédaction applicable au présent litige ;
ET ALORS QUE si les juges du fond apprécient souverainement le préjudice subi par les ayant droits de la victime d'un accident de la circulation, il ne saurait en résulter ni perte ni profit ; que la pension de réversion ne peut, sans qu'il en résulte un avantage indu pour la veuve, être écartée du calcul des revenus du foyer postérieurs au décès de la victime ; qu'en se bornant à capitaliser la perte patrimoniale annuelle, fixée à partir des revenus du ménage pour les années 2004 à 2006, de la part d'autoconsommation de Monsieur B..., et des revenus salariés subsistant de Madame B..., sans rechercher, comme il lui était demandé, si Madame B... ne bénéficiait pas également d'une pension de réversion qui devait être imputée sur le préjudice économique dont elle se prévalait, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil dans sa version applicable au présent litige, ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice ;
ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE les juges du fond sont tenus par les termes du litige tels qu'ils résultent des conclusions des parties ; qu'en retenant, pour fixer le préjudice économique de Madame B... à la somme de 272.600,37 euros, sans prendre en considération la pension de réversion, qu' «il a été proposé aux parties un mode de calcul du préjudice économique du conjoint survivant qui n'est contesté qu'en ce qui concerne le choix du barème de capitalisation » (arrêt p. 4 alinéa 9), quand la Compagnie AXA et la SARL Autocars de la Joigne invoquaient expressément la nécessité de modifier le calcul provisoire proposé par la Cour d'appel pour prendre en considération la perception d'une pension de réversion par Madame B..., la Cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;
ALORS ENFIN, SUBSIDIAIREMENT, QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, par conclusions récapitulatives en réouverture des débats, en date du 25 janvier 2016, la Compagnie AXA et la SARL Autocars de la Joigne soutenaient expressément que si la perte annuelle du foyer pouvait être chiffrée à un montant de 8.464,27€, comme cela résultait du calcul provisoire établi par la Cour d'appel dans le cadre de l'arrêt avant dire droit du 17 mars 2015, « toutefois, il faut tenir compte des pensions de réversion perçues par Madame B... » (conclusions p. 3 alinéa 8), pour déterminer la perte économique subie par la veuve, qui devait donc être fixée à un montant moindre que celui retenu dans le calcul provisoire de la Cour d'appel; que ce moyen constituait incontestablement une contestation du mode de calcul retenu par la Cour d'appel dans son arrêt avant dire droit pour fixer l'indemnité due à Madame B...; qu'en retenant néanmoins, pour fixer le préjudice économique de Madame B... à la somme de 272.600,37 euros, sans prendre en considération la pension de réversion, qu' «il a été proposé aux parties un mode de calcul du préjudice économique du conjoint survivant qui n'est contesté qu'en ce qui concerne le choix du barème de capitalisation » (arrêt p. 4 alinéa 9), la Cour d'appel a dénaturé les écrits précités et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;