COMM.
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 17 janvier 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme A..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10062 F
Pourvoi n° S 16-23.746
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ la société Vernouillet automobiles, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
2°/ la société Catherine Vincent, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Vernouillet automobiles,
contre l'arrêt rendu le 22 juin 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 4), dans le litige les opposant à la société FCA France, dont le siège est [...] anciennement dénommée Fiat France,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 5 décembre 2017, où étaient présents : Mme A..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme X..., conseiller référendaire rapporteur, Mme Orsini, conseiller, M. Y..., avocat général, M. Graveline, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Vernouillet automobiles, de la société Catherine Vincent, de la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat de la société FCA France ;
Sur le rapport de Mme X..., conseiller référendaire, l'avis de M. Y..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Vernouillet automobiles et la société Catherine Vincent, ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept janvier deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour la société Vernouillet automobiles et la société Catherine Vincent, ès qualités.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Vernouillet Automobiles de toutes ses demandes dirigées contre la société Fiat France ;
Aux motifs que « il y a lieu de rechercher si en rompant unilatéralement sans préavis les huit contrats de distribution qui la liaient à la société Vernouillet Automobiles dont les titres venaient d'être acquis par M. Y qu'elle n'avait pas agréé, la société Fiat France a rompu brutalement les relations commerciales établies ; qu'il ressort des dispositions de l'article L 442-6-I 5° du code de commerce qu'engage sa responsabilité et s'oblige à réparer le préjudice causé, celui qui rompt brutalement une relation commerciale établie, sans préavis tenant compte de la durée de la relation commerciale ; que toutefois cet article prévoit in fine que ses dispositions ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations contractuelles ; que par lettre recommandée avec accusé réception du 28 mars 2007, la société Fiat France a écrit à la société Vernouillet Automobiles qu'elle apprenait « avec stupéfaction », la cession de la totalité des parts de la société à M. Y le 23 mars 2007 « sans son accord écrit et préalable alors même que les dispositions des articles 53.1.c) et 60.1.c) des contrats qui nous lient prévoient et imposent de soumettre tout changement de propriétaire actionnaire ou direction à notre agrément
la cession que vous avez réalisée sans notre agrément constitue de ce fait un événement grave, au sens des articles 53.1.c) et 60.1.c) de nos contrats et en conséquence, nous sommes contraints de procéder, par la présente à la résiliation extraordinaire de l'ensemble des contrats de Distributeur Agréé en date du 01/12/2003 qui nous lient (
). la résiliation desdits contrats prendra effet à la date de la présentation de la présente »; qu'il en ressort que la cause de la résiliation unilatérale des contrats réside, non pas comme le soutient à tort la société Vernouillet Automobiles, dans l'existence de procédures opposant la société Fiat France à M. Y laquelle est seulement la cause du refus d'agréer ce dernier, mais dans la cession des titres de la société sans l'accord préalable de la société Fiat France ; que les articles 53.1.c) et 60.1.c) des contrats prévoient en des termes identiques que la société Fiat France pourra résilier le contrat, de plein droit, sans préavis, par lettre recommandée en cas de survenance de « changement des propriétaires et/ou des associés ou actionnaires et/ou des personnes qui assurent la gestion effective du distributeur et/ou transfert de propriété amiable ou judiciaire partielle ou totale des éléments d'actifs propres sans accord préalable et écrit de FIAT »; que ces articles sont dénués d'ambiguïté ; que les parties ont expressément convenu que la cession des titres de la société sans l'accord préalable et écrit de la société Fiat France constituait un événement justifiant la résiliation des contrats de plein droit sans préavis ; que la société Vernouillet Automobiles ne peut sérieusement opposer les articles 44.1 d) et 37.1. d) des contrats qui ne font référence pour tout changement dans le contrôle direct ou indirect de l'actionnariat qu'à une notification par lettre recommandée ; qu'elle s'abstient de préciser que ces articles indiquent en préambule et dans des termes identiques que « Compte tenu de la nature personnelle du présent contrat et sans préjudice des dispositions de l'article 60.1 (et/ou 53.1) le Distributeur (
) notifiera immédiatement par écrit à Fiat par lettre recommandée
»; que ces articles rappellent donc le caractère intuitu personae du contrat et la nécessité d'une autorisation écrite de la société Fiat France en préalable à la notification d'une cession de titres ; que, dès lors, du fait de l'existence d'une clause résolutoire, la cession des titres de la société Vernouillet Automobiles sans accord préalable écrit de la société Fiat France constituait un événement grave justifiant la rupture immédiate des contrats sans préavis ; qu'en conséquence, le caractère brutal de la rupture des relations commerciales n'est pas établi ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Vernouillet Automobiles de ses demandes d'indemnisation au titre des préjudices qui résulteraient de la rupture brutale des relations commerciales avec la société Fiat France ».
Alors qu'il ne peut être fait obstacle aux dispositions d'ordre public de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce par des clauses permettant une rupture sans préavis dès lors que l'inexécution du contrat ne présente pas un degré de gravité suffisant ; que dès lors, quand bien même les conditions contractuelles de mise en oeuvre d'une telle clause seraient réunies, les juges du fond sont tenus de caractériser l'existence d'une inexécution suffisamment grave; qu'en l'espèce, pour débouter la société Vernouillet Automobiles de ses demandes indemnitaires fondées sur la rupture brutale de ses relations commerciales avec la société FCA, la cour d'appel s'est bornée à retenir, en reprenant les termes du courrier de résiliation de la société Fiat France du 28 mars 2007, que la cession de ses titres par la société Vernouillet sans accord préalable du concédant constituait un événement grave au sens des articles 53.1. c) et 60.1. c) des contrats de distributeur et de réparateur agréés; qu'en se fondant sur ces motifs impropres à caractériser un manquement grave de la société Vernouillet Automobiles à ses obligations contractuelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Vernouillet Automobiles de toutes ses demandes dirigées contre la société Fiat France ;
Aux motifs propres que « il y a lieu de rechercher si en rompant unilatéralement sans préavis les huit contrats de distribution qui la liaient à la société Vernouillet Automobiles dont les titres venaient d'être acquis par M. Y qu'elle n'avait pas agréé, la société Fiat France a rompu brutalement les relations commerciales établies ; qu'il ressort des dispositions de l'article L 442-6-I 5° du code de commerce qu'engage sa responsabilité et s'oblige à réparer le préjudice causé, celui qui rompt brutalement une relation commerciale établie, sans préavis tenant compte de la durée de la relation commerciale ; que toutefois cet article prévoit in fine que ses dispositions ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations contractuelles ; que par lettre recommandée avec accusé réception du 28 mars 2007, la société Fiat France a écrit à la société Vernouillet Automobiles qu'elle apprenait « avec stupéfaction », la cession de la totalité des parts de la société à M. Y le 23 mars 2007 « sans son accord écrit et préalable alors même que les dispositions des articles 53.1.c) et 60.1.c) des contrats qui nous lient prévoient et imposent de soumettre tout changement de propriétaire actionnaire ou direction à notre agrément
la cession que vous avez réalisée sans notre agrément constitue de ce fait un événement grave, au sens des articles 53.1.c) et 60.1.c) de nos contrats et qu'en conséquence, nous sommes contraints de procéder, par la présente à la résiliation extraordinaire de l'ensemble des contrats de Distributeur Agréé en date du 01/12/2003 qui nous lient (
). la résiliation desdits contrats prendra effet à la date de la présentation de la présente »; qu'il en ressort que la cause de la résiliation unilatérale des contrats réside, non pas comme le soutient à tort la société Vernouillet Automobiles, dans l'existence de procédures opposant la société Fiat France à M. Y laquelle est seulement la cause du refus d'agréer ce dernier, mais dans la cession des titres de la société sans l'accord préalable de la société Fiat France ; que les articles 53.1.c) et 60.1.c) des contrats prévoient en des termes identiques que la société Fiat France pourra résilier le contrat, de plein droit, sans préavis, par lettre recommandée en cas de survenance de changement des propriétaires et/ou des associés ou actionnaires et/ou des personnes qui assurent la gestion effective du distributeur et/ou transfert de propriété amiable ou judiciaire partielle ou totale des éléments d'actifs propres sans accord préalable et écrit de FIAT »; que ces articles sont dénués d'ambiguïté ; que les parties ont expressément convenu que la cession des titres de la société sans l'accord préalable et écrit de la société Fiat France constituait un événement justifiant la résiliation des contrats de plein droit sans préavis ; que la société Vernouillet Automobiles ne peut sérieusement opposer les articles 44.1 d) et 37.1. d) des contrats qui ne font référence pour tout changement dans le contrôle direct ou indirect de l'actionnariat qu'à une notification par lettre recommandée ; qu'elle s'abstient de préciser que ces articles indiquent en préambule et dans des termes identiques que « Compte tenu de la nature personnelle du présent contrat et sans préjudice des dispositions de l'article 60.1 (et/ou 53.1) le Distributeur (...) notifiera immédiatement par écrit à FIAT par lettre recommandée
»; que ces articles rappellent donc le caractère intuitu personae du contrat et la nécessité d'une autorisation écrite de la société Fiat France en préalable à la notification d'une cession de titres ; que, dès lors, du fait de l'existence d'une clause résolutoire, la cession des titres de la société Vernouillet Automobiles sans accord préalable écrit de la société Fiat France constituait un événement grave justifiant la rupture immédiate des contrats sans préavis ; qu'en conséquence, le caractère brutal de la rupture des relations commerciales n'est pas établi ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Vernouillet Automobiles de ses demandes d'indemnisation au titre des préjudices qui résulteraient de la rupture brutale des relations commerciales avec la société Fiat France ».
Et aux motifs éventuellement adoptés que « quelle que soit la qualification de la résiliation, « résiliation extraordinaire en cas de survenance d'un événement grave » (article 60) ou résiliation extraordinaire en cas de manquement grave (article 61), Vernouillet a commis une faute grave en passant outre le refus opposé à M. Z... de racheter les actions de la société Vernouillet, que cette faute permettait à Fiat de résilier les contrats de distribution avec elle, même sans préavis, il déboutera Vernouillet de ses demandes à ce titre, qu'il s'agisse de la compensation du préavis de 24 mois dont elle a été privée ou de la perte de valeur de l'incorporel de son fonds de commerce ».
Alors que seule une faute grave caractérisant l'impossibilité de poursuivre une relation commerciale établie justifie qu'une partie puisse y mettre fin sans préavis ; qu'en se bornant à affirmer que la société Vernouillet avait commis une faute grave en passant outre le refus opposé par la société Fiat France à la cession de ses titres à M. Z..., sans établir en quoi ce comportement présentait un degré de gravité tel qu'il rendait impossible la poursuite d'une relation commerciale établie depuis 22 ans, la cour d'appel n'a pas légalement justifié au regard de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce.