CIV. 1
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 10 janvier 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10009 F
Pourvoi n° A 16-27.687
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Virginie X..., épouse Y..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 15 septembre 2016 par la cour d'appel de Rouen (chambre de la famille), dans le litige l'opposant à M. Bernard Y..., domicilié [...] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 28 novembre 2017, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Z..., conseiller rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP François-Henri Briard, avocat de Mme X..., de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. Y... ;
Sur le rapport de Mme Z..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP François-Henri Briard, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris puis prononcé le divorce des époux aux torts exclusifs de Mme Virginie X... ;
Aux motifs propres que « au soutien de son appel, Mme X... fait valoir que le premier juge a retenu les attestations de deux témoins, M. A... et M. B..., faisant état d'un comportement de moquerie qu'elle aurait adopté à l'égard de son conjoint, alors que ces faits ne sauraient être considérés comme une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage et qu'ils sont contredits par les nombreuses attestations qu'elle verse aux débats. Or, il convient de souligner que Mme X... a saisi le juge aux affaires familiales d'une demande en divorce par assignation délivrée le 29 mai 2012 sur le fondement de l'article 242 du Code civil, le choix d'une procédure contentieuse imposant que la partie demanderesse justifie des faits qu'elle allègue au soutien de sa demande. Dans le cadre de ses dernières écritures, elle se contente d'affirmer que M. Y... est manipulateur et entend le démontrer par des attestations qui exposent pour la plupart le jugement de valeur porté par leurs auteurs sur le comportement du mari ou relatent les propos qui ont pu être tenus par Mme X.... Au soutien de son appel incident, M. Y... fait valoir que l'épouse lui a fait part en 2009 de son intention de divorcer et lui a demandé de ne pas s'opposer à cette demande, le contraignant à faire chambre à part, l'ambiance étant alors devenue insupportable, l'épouse le soumettant à des violences verbales et à des pressions financières, au point qu'il a présenté un état dépressif attesté par son médecin, suivant certificat médical en date du 3 octobre 2011, ce médecin lui ayant accordé le 7 février 2012 une ITT de trois jours, à la suite de l'agression dont il a été victime le 6 février 2012 vers 20h. Il estime que les griefs foliés par l'épouse à son encontre ne sont pas démontrés et il verse aux débats de nombreux témoignages d'où il ressort que Mme X... avait tendance à le ridiculiser en public, adoptant un comportement dénigrant à son égard et développant un discours négatif, alors même que M. Y... a pu lui apporter tout son soutien lors de la période de dépression qu'elle a traversé en 1998. Par ailleurs, il est établi que, dès 2009, l'épouse avait pu évoquer auprès de tiers son désinvestissement affectif à l'égard de son mari et son intention de divorcer, ce qui conforte la version de M. Y... qui s'engageait à ce moment-là dans le rachat d'un important cabinet d'assurances, le choix de changer de régime matrimonial pour opter pour un régime de séparation des biens étant intervenu dans ce contexte. Ainsi, il y a lieu de retenir à l'encontre de l'épouse des faits graves ou renouvelés constitutifs d'une cause de divorce aux sens de l'article 242 du Code civil, le jugement ayant lieu d'être réformé et le divorce étant prononcé aux torts exclusifs de l'épouse » ;
1° Alors qu'aux termes de l'article 242 du code civil, le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune ; qu'un léger désinvestissement affectif et un prétendu comportement dénigrant, de surcroît non dûment prouvés, ne sauraient caractériser un manquement grave aux devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune ; qu'en réformant malgré tout le jugement entrepris et en prononçant le divorce aux torts exclusifs de Mme X... sur cette seule base, la cour d'appel n' a pas justifié sa décision et violé le texte visé au moyen ;
2° Alors qu'aux termes de l'article 242 du code civil, le divorce peut être demandé par l'un des époux lorsque des faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune ; que la cour d'appel de Rouen a opéré une différence de traitement injustifiée entre les époux en ne prenant en compte que les attestations en faveur de M. Y... et en écartant toutes celles produites par Mme X... en ce qu'elles exposeraient pour la plupart le jugement de valeur de leurs auteurs ; que, au contraire, le comportement, méprisant, violent, pervers et manipulateur de M. Y... était clairement démontré dans lesdites attestations ainsi que dans ses rapports avec ses enfants ; que ce comportement constitue une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage imputable à M. Y... ; que, dès lors, en ne prononçant pas le divorce aux torts exclusifs de M. Y..., la cour d'appel a violé le texte visé au moyen ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris puis réduit la prestation compensatoire qui était allouée à Mme Virginie X... à la somme de 90.000 euros en tenant compte de la part de cette dernière dans la liquidation du régime matrimonial des époux ;
Aux motifs propres que Selon les dispositions des articles 270 et 271 du Code civil, la prestation compensatoire est destinée à compenser la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vies respectives des époux, en tenant compte de leur situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible, le législateur ayant énuméré divers critères auxquels les parties se sont référé. En l'espèce, le mariage a duré 24 ans, Mme X... étant âgée de 52 ans et M. Y... de 53 ans. Les deux enfants majeurs sont à la charge de M. Y..., le premier juge ayant relevé que Baptiste poursuit des études à Caen, Thip aine résidant habituellement chez son père, même si elle se rend occasionnellement chez Mme X... qui a été déboutée de sa demande de contribution pour elle, aucune demande n'étant formulée de ce chef devant la cour. Mme X... indique qu'elle s'est entièrement consacrée à l'éducation des enfants et qu'elle dispose actuellement d'un revenu de 464 euros et n'aura aucune retraite, alors que le mari a, pour plusieurs années, une très belle situation puisqu'il est à la tête d'un des plus important cabinet d'assurance du Havre. Or, il ressort des propres attestations produites par Mme X... qui est titulaire d'un diplôme de l'enseignement supérieur (bac + 5), qu'elle a travaillé dans l'enseignement et qu'elle a fait une "pause professionnelle" à la naissance de Thiphaine qui doit être mise en rapport avec l'état dépressif qu'elle a alors présenté. Elle a cherché par la suite à développer une activité de vente, notamment dans le domaine des compléments alimentaires mais qui ne s'est pas avérée viable, ayant seulement repris un emploi dans l'enseignement privé à la suite de sa séparation. Actuellement, elle est employée en qualité de maître auxiliaire à temps partiel dans un établissement d'enseignement privé moyennant une rémunération de l'ordre de 780 euros par mois, suivant déclaration fiscale de ses revenus de l'année 2015. M. Y... est co-gérant de la SARL MBB Assurances. Il a perçu un revenu mensuel de l'ordre de 12 072 euros au titre de l'année 2012, outre des revenus de capitaux mobiliers de 970 euros et des revenus fonciers de 580 euros, soit un revenu mensuel global de plus de 13 600 euros. Son revenu imposable en 2014 s'est élevé à 150 106 euros soit en moyenne 12.508 euros par mois, outre 970 euros de revenus de capitaux et 583 euros de revenus fonciers par mois. Toutefois, il rembourse les prêts contractés pendant la vie commune, le patrimoine immobilier commun étant constitué d'un immeuble [...] au Havre évalué à 480 000 euros, sur lequel il serait dû 136 000 euros, un appartement à la Réunion acheté en 2007 au prix de 240 000 euros, sur lequel serait dus 195 000 euros et 863 parts de la SARL MBB Assurances. Or, les parties ont des droits équivalents sur ces biens acquis avant l'adoption du régime de la séparation des biens par les époux, l'épouse se trouvant à la tête d'un patrimoine constitué par le seul travail de M. Y.... Le patrimoine propre de M. Y... comporte les parts acquises à la suite de l'augmentation de capital de la SARL MBB Assurances et 1416 parts de la société holdings pour l'acquisition desquelles il a souscrit un emprunt de 119 000 euros en 2011, ainsi qu'il ressort de la déclaration sur l'honneur souscrite par lui en date du 28 février 2014. Enfin, il a acquis 50 % des parts de la SCI propriétaire des locaux loués à la SARL MBB Assurances pour un montant de 345 000 euros sur lesquels 298 000 euros sont à rembourser. S'il ne fournit pas de pièces justificatives de ses différents emprunts, il n'est ni prétendu ni démontré qu'il disposait de capacité d'autofinancement, alors que le patrimoine constitué par le couple pendant la période antérieure à l'adoption de la séparation de biens n'a pas été liquidé et qu'il en assume encore le passif pour le compte de la communauté. Il reconnaît disposer d'un placement personnel de 58 000 euros, s'agissant de fonds provenant de la succession de sa grand-mère. Ainsi, il ressort de ce qui précède qu'il existe une disparité dans la situation des parties, l'insertion professionnelle tardive de Mme X... après de nombreuses années sans travailler devant se traduire par des droits à retraite réduits, les possibilité pour le mari d'améliorer sa situation devant également être appréciées au regard de son âge et de l'endettement professionnel important qu'il a contracté pour maintenir une activité rémunératrice dans un domaine qui implique un fort engagement personnel, s'agissant d'un secteur très concurrentiel. Ainsi, il y a lieu, compte tenu de ce qui précède, d'évaluer la prestation compensatoire due à l'épouse à la somme de 90 000 euros en capital, l'épouse ne pouvant demander cumulativement un capital et une rente viagère, les conditions de l'article 276 du Code civil n'étant pas justifiées ;
Alors que la liquidation du régime matrimonial des époux mariés sous le régime de la communauté étant égalitaire, il n'y a pas lieu, en l'absence de circonstances particulières, d'en tenir compte pour la détermination de la prestation compensatoire ; qu'en se fondant sur la part de communauté devant revenir à Mme Virginie X... pour apprécier la disparité créée par la rupture du lien conjugal, la cour d'appel a violé les articles 270 et 271 du code civil ;