COMM.
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 10 janvier 2018
Rejet non spécialement motivé
M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10033 F
Pourvoi n° X 16-25.085
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ M. Gérard Y...,
2°/ Mme Yamina Z..., épouse Y...,
domiciliés tous deux [...] ,
3°/ la société Le Privilège, société civile immobilière, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 7 juillet 2016 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (8e chambre C), dans le litige les opposant :
1°/ à Mme Dominique A..., domiciliée [...] , prise en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la SCI Le Privilège,
2°/ à la société Crédit Lyonnais, société anonyme, dont le siège est [...] , représentée par son mandataire la société le Crédit logement, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 28 novembre 2017, où étaient présents : M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Remeniéras, conseiller rapporteur, M. Guérin, conseiller, Mme Guinamant, avocat général référendaire, M. Graveline, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de Me Le Prado, avocat de M. et Mme Y... et de la société Le Privilège, de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Crédit Lyonnais ;
Sur le rapport de M. Remeniéras, conseiller, l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme Y... et la société Le Privilège aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Crédit Lyonnais la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y... et la société Le Privilège.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR débouté la SCI Le Privilège, ainsi que M. Gérard Y... et Mme Yamina Z..., épouse Y... de toutes leurs demandes formées contre le Crédit Lyonnais.
AUX MOTIFS QUE « les appelants et l'intervenante volontaire reprochent au Crédit Lyonnais d'avoir consenti un soutien abusif à la SCI Le Privilège, au sens de l'article L 650-1 du code de commerce, lors de la souscription du prêt litigieux et de s'être immiscée dans la gestion de cette société lors de la conclusion de protocole d'accord; mais que sans entrer dans le détail de leur argumentation, il convient de constater que les éléments épars communiqués ne sont pas de nature à démontrer que le prêt consenti le 6 février 2004 à la SCI Le Privilège était ruineux ou inadapté à la situation financière de cette société nouvellement créée; que d'ailleurs la SCI Le Privilège a honoré les échéances du prêt pendant plus de deux ans; qu'en outre, le simple fait pour le Crédit Lyonnais d'avoir participé au protocole d'accord du 9 décembre 2008 n'établit pas à lui seul l'existence d'une immixtion fautive de la banque dans la gestion de la SCI Le Privilège ni même l'existence d'une pression exercée par la banque sur les dirigeants de cette société; que d'ailleurs il résulte des courriers échangés entre le Crédit Lyonnais et la SCI Le Privilège que dès le mois de mars 2008, cette société prenait conseil auprès d'un avocat (pièces n° 6, 7 et 8 du Crédit Lyonnais) ; qu'aucune responsabilité ne peut être retenue à l'encontre du Crédit Lyonnais des chefs d'un soutien abusif ou d'une immixtion fautive dans la gestion de la SCI Le Privilège ».
ALORS, D'UNE PART, QUE le juges du fond sont tenus de répondre aux conclusions dont ils sont régulièrement saisis et de procéder à l'analyse, même sommaire, des documents versés aux débats ; que dans ses conclusions signifiées le 16 juillet 2015 (p 16 in fine, p 17), la SCI Le Privilège faisait valoir et justifiait par des avis d'imposition sur les revenus de 2002 à 2004, régulièrement versés aux débats, qu'à la date d'octroi du prêt, celle-ci ne disposait d'aucune ressource et que les revenus des cautions étaient quasi inexistants, tandis que les mensualités de l'emprunt s'élevaient à 2 295 euros, de sorte que le prêt litigieux était manifestement ruineux ; qu'en écartant toute faute commise par la banque sans analyser, même sommairement, les pièces, ni répondre au moyen de l'emprunteuse qu'elle se borne à citer pour le rejeter, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et, partant, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
ALORS, D'AUTRE PART, QU'une banque consent un crédit ruineux à une entreprise quand elle lui octroie, en connaissance de cause, un crédit dont le coût est incompatible avec sa trésorerie et lui interdit toute rentabilité quand bien même sa situation ne se trouverait pas irrémédiablement compromise dès le moment de l'octroi du crédit ; que pour écarter le moyen tiré du caractère ruineux du prêt litigieux, l'arrêt se borne à relever que l'emprunteuse en a honoré les échéances pendant deux ans ; qu'en statuant ainsi par des motifs inopérants, impropres à établir que le crédit ne présentait pas un caractère ruineux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 650-1 du code de commerce.
ALORS ENFIN QUE les juges du fond sont tenus de répondre aux conclusions dont ils sont saisis ; que dans ses écritures signifiées le 16 juillet 2015 (p 15 § 1), la SCI Le Privilège faisait valoir qu'en décembre 2003, la banque s'était ingérée dans ses affaires en tirant un chèque sur le compte du père de M. Gérard Y..., M. Georges Y..., sans l'autorisation de ce dernier et sans l'en informer et ce, afin de couvrir une erreur grossière qu'elle avait commise dans les formalité d'octroi du prêt litigieux ; qu'en excluant l'existence d'une immixtion fautive de la banque dans la gestion de l'emprunteuse sans répondre à ces conclusions déterminantes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.