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10/01/2018 | FRANCE | N°16-21688

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 janvier 2018, 16-21688


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 27 novembre 2015), que M. Y... a été engagé par les Houillères du bassin du Nord et Pas-de-Calais en qualité de mineur de fond à compter du 9 octobre 1974 ; qu'il bénéficiait d'une prime de chauffage et de l'attribution d'un logement gratuit en application des articles 22 et 23 du décret n° 46-1433 du 14 juin 1946 relatif au statut du personnel des exploitations minières et assimilées ; qu'à la suite de son licenciement pour motif économi

que, il a bénéficié, le 1er juin 1990, d'une mesure de conversion intervenue...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 27 novembre 2015), que M. Y... a été engagé par les Houillères du bassin du Nord et Pas-de-Calais en qualité de mineur de fond à compter du 9 octobre 1974 ; qu'il bénéficiait d'une prime de chauffage et de l'attribution d'un logement gratuit en application des articles 22 et 23 du décret n° 46-1433 du 14 juin 1946 relatif au statut du personnel des exploitations minières et assimilées ; qu'à la suite de son licenciement pour motif économique, il a bénéficié, le 1er juin 1990, d'une mesure de conversion intervenue en application du protocole d'accord du 26 janvier 1989 signé entre les Charbonnages de France et les organisations syndicales et a, au moment de son départ en conversion, opté pour le rachat de ses avantages en nature, le 28 novembre 1989 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale le 9 septembre 2010 ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes et de dire prescrite sa demande en nullité pour vice du consentement de l'acte de rachat de ses avantages en nature et de le débouter de sa contestation de la validité du document du 28 novembre 1989 alors, selon le moyen :

1°/ que la convention qui méconnait une règle d'ordre public est entachée d'une nullité absolue ; que l'obligation du versement viager d'une indemnité de logement et de combustible mise à la charge de l'employeur par les articles 22 et 23 du statut du mineur est d'ordre public comme ayant été instituée par voie réglementaire avec pour objet la protection sociale du mineur ; qu'un salarié ne peut valablement renoncer, tant que son contrat de travail est en cours, aux avantages qu'il tire d'une convention collective ou de

dispositions statutaires d'ordre public ; que sous l'empire de l'ancien article 2262 du code civil, applicable en la cause, l'action en nullité absolue se prescrivait par trente ans ; qu'en déclarant prescrite l'action en nullité de la convention par laquelle M. Y... aurait, en optant pour le versement d'un capital, renoncé, aux termes d'une attestation du 28 novembre 1989, aux indemnités de logement et de combustible qui auraient pu lui être versées au moment de son départ à la retraite, la cour d'appel a violé l'article 2262 du code civil en sa rédaction applicable en la cause, ensemble les articles 22 et 23 du décret n° 46-1433 du 14 juin 1946 relatif au statut du mineur et l'article 6 du code civil ;

2°/ que la prescription de l'action en nullité relative pour erreur de la part d'un contractant ne court que du jour où ce contractant a découvert son erreur ; qu'en fixant le point de départ du délai de prescription de l'action en nullité pour vice du consentement au jour du rachat des avantages en nature de M. Y... sans rechercher à quelle date il avait été en mesure de déceler la nullité dont était affectée sa renonciation au bénéfice du droit d'ordre public aux avantages en nature dont il devait bénéficier au moment de son départ à la retraite, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1304 du code civil en sa rédaction applicable en la cause, ensemble les articles 22 et 23 du décret n° 46-1433 du 14 juin 1946 relatif au statut du mineur et l'article 6 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé qu'en application des dispositions de l'article 1304 du code civil, en sa rédaction applicable au litige, l'intéressé, qui n'était pas l'objet d'une action en exécution de la convention de rachat, n'était plus recevable à invoquer la nullité pour vice du consentement du rachat de ses avantages en nature, la cour d'appel a décidé à bon droit que son action était prescrite ; que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour M. Y...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il avait débouté M. Mohamed Y... de toutes ses demandes et, y ajoutant, d'avoir jugé prescrite sa demande en nullité pour vice du consentement de l'acte de rachat de ses avantages en nature et de l'avoir débouté de sa contestation de la validité du document du 28 novembre 1989 ;

AUX MOTIFS QUE « De la prescription En raison de l'effet dévolutif de l'appel, il convient de statuer à nouveau sur l'entier litige, y compris sur la fin de non-recevoir liée à la prescription, sur laquelle les premiers juges ont omis de statuer.

En l'espèce l'ANGDM soutient que l'action intentée par M. Y... est prescrite faute pour ce dernier de l'avoir intentée dans le délai imparti par l'article 1304 du Code civil qui dispose en son premier alinéa que dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à moins de temps par une loi particulière, cette action dure cinq ans.

En réponse M. Y... fait valoir qu'il n'a pris connaissance de l'attestation en date du 28 novembre 1989, aux termes de laquelle il aurait opté pour le rachat des avantages en nature sous forme de capital, tout en déclarant renoncer de façon définitive aux dits avantages en nature qui pourraient lui être servi en tant que retraité, que dans le cadre de la procédure diligentée par devant le conseil de prud'hommes.

Même d'une part si l'ANGDM ne fournit aucun élément de nature à établir une connaissance antérieure par M. Y... dudit document, hormis l'hypothèse de la signature effective de celui-ci par l'ancien salarié, et d'autre part si la contestation de ce dernier en ce qu'elle porte sur l'existence même de cet acte échappe à la prescription édictée par l'article 1304 du Code civil, il n'en demeure pas moins que ce document du 28 novembre 1989 ne constitue qu'un des éléments dont l'ANGDM entend se prévaloir pour démontrer l'existence d'un rachat des avantages en nature par le versement d'un capital.

En effet l'ANGDM produit également un bordereau de versement où il fait clairement et distinctement apparaître d'une part les montants admis au titre de la prime de conversion et d'autre part ceux octroyés au titre du " rachat des avantages en nature " tel que mentionné sur le dit bordereau.

Elle a également remis un document intitulé " conversion logement " au terme duquel M. Y..., en vue de sa conversion dans la région, demande à devenir " locataire SOGINORPA ", reconnaissant à ce titre être informé d'avoir à s'acquitter du montant du loyer dès la date de sa conversion.

Or ces éléments combinés au fait que l'ancien salarié a perçu les sommes visées par le bordereau au titre de ses avantages en nature relativement au logement et au chauffage constituent la preuve d'un rachat desdits avantages par le versement d'un capital le 1er juin 1990.

Au regard des dispositions de l'article 1304 du code civil M. Y..., qui n'est pas l'objet d'une action en exécution de la convention de rachat, n'est plus recevable à invoquer la nullité pour vice du consentement du rachat de ses avantages en nature depuis le 1er juin 1995, son action étant prescrite.

Il a seulement la faculté de contester la validité du document en date du 28 novembre 1989, sa demande n'étant pas prescrite dans la mesure où, d'une part en vertu des dispositions transitoires de la loi du 17 juin 2008, celle-ci en ce qu'elle réduit la durée de la prescription s'applique aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de ladite loi sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, et d'autre part la contestation de M. Y... a été formalisée dans le délai de cinq ans courant du jour de l'entrée en vigueur de cette loi.

Il convient au regard de l'ensemble de ces éléments de dire que l'action de l'ancien salarié en nullité pour vice du consentement de l'acte de rachat de ses avantages en nature est prescrite.

En revanche ses autres actions ne sont pas prescrites contrairement à ce que l'ANGDM demande en faisant une confusion entre sa contestation en nullité et ses demandes indemnitaires qui sont seulement fondées sur une reconnaissance de la nullité de la demande de rachat des avantages en nature.

De la contestation de la validité du document en date du 28 novembre 1989 Au-delà du fait que la reconnaissance de l'absence de validité du document du 28 novembre 1989, faute d'avoir était réellement signé par M. Y..., serait sans incidence sur l'existence d'un acte de rachat des avantages en nature au 1er juin 1990, il convient de constater que les allégations du salarié s'appuyant sur une expertise graphologique réalisée à sa demande sont contredites par les éléments du dossier, lesquels sont suffisants à établir la conviction de la Cour sans qu'il ne soit nécessaire de recourir à une expertise comme le sollicite l'ancien salarié.

En effet la signature apposée sur le document en date du 28 novembre 1989 est identique tant à celle figurant sur l'attestation valant maintien de l'affiliation à la Can qu'à celle apparaissant sur le document intitulé "conversion-logement " portant demande de M. Y... de devenir "locataire SOGINORPA ", étant précisé qu'aucune contestation n'a été émise quant à la réalité de la signature de ces documents.

Par ailleurs l'ANGDM remet des photocopies du permis de conduire et d'une pièce d'identité de M. Y... sur lesquelles sont apposées des signatures conformes à celles figurant sur l'ensemble des documents précités.

Il convient au regard de l'ensemble de ces éléments de rejeter la contestation de M. Y... quant à la validité du document en date du 28 novembre 1989.

Des demandes en rétablissement des avantages en nature et en dommages et intérêts pour privation de tels avantages depuis 1990 Il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes du salarié en rétablissement des avantages en nature et en dommages-intérêts pour privation de tels avantages depuis 1990, dès lors que l'ANGDM établit que M. Y... a opté pour le rachat des avantages en nature plutôt que pour le paiement d'une rente trimestrielle, et a renoncé de façon définitive aux avantages qui auraient pu lui être servis en tant que retraité, étant précisé que l'exercice de cette option et sa renonciation ont eu des conséquences immédiates d'un point de vue pratique puisqu'il a perçu un capital et a dû s'acquitter des charges de logement et de chauffage, dont il était jusque-là dispensé ».

1°/ ALORS QUE la convention qui méconnait une règle d'ordre public est entachée d'une nullité absolue ; que l'obligation du versement viager d'une indemnité de logement et de combustible mise à la charge de l'employeur par les articles 22 et 23 du statut du mineur est d'ordre public comme ayant été instituée par voie réglementaire avec pour objet la protection sociale du mineur ; qu'un salarié ne peut valablement renoncer, tant que son contrat de travail est en cours, aux avantages qu'il tire d'une convention collective ou de dispositions statutaires d'ordre public ; que sous l'empire de l'ancien article 2262 du Code civil, applicable en la cause, l'action en nullité absolue se prescrivait par trente ans ; qu'en déclarant prescrite l'action en nullité de la convention par laquelle M. Y... aurait, en optant pour le versement d'un capital, renoncé, aux termes d'une attestation du 28 novembre 1989, aux indemnités de logement et de combustible qui auraient pu lui être versées au moment de son départ à la retraite, la Cour d'appel a violé l'article 2262 du Code civil en sa rédaction applicable en la cause, ensemble les articles 22 et 23 du décret n°46-1433 du 14 juin 1946 relatif au statut du mineur et l'article 6 du Code civil ;

2°/ ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE la prescription de l'action en nullité relative pour erreur de la part d'un contractant ne court que du jour où ce contractant a découvert son erreur ; qu'en fixant le point de départ du délai de prescription de l'action en nullité pour vice du consentement au jour du rachat des avantages en nature de M. Y... sans rechercher à quelle date il avait été en mesure de déceler la nullité dont était affectée sa renonciation au bénéfice du droit d'ordre public aux avantages en nature dont il devait bénéficier au moment de son départ à la retraite, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1304 du Code civil en sa rédaction applicable en la cause, ensemble les articles 22 et 23 du décret n°46-1433 du 14 juin 1946 relatif au statut du mineur et l'article 6 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-21688
Date de la décision : 10/01/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 27 novembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 jan. 2018, pourvoi n°16-21688


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Alain Bénabent , SCP Delamarre et Jehannin, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.21688
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