COMM.
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 10 janvier 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10011 F
Pourvoi n° Z 16-15.220
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ Mme Marie-Laure X..., épouse Y...,
2°/ M. Patrice Y...,
domiciliés [...] ,
contre l'arrêt rendu le 28 janvier 2016 par la cour d'appel de Douai (chambre 2, section 2), dans le litige les opposant à la société Banque Populaire du Nord, société anonyme, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 14 novembre 2017, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Graff-Daudret , conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, M. Graveline, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. et Mme Y..., de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Banque Populaire du Nord ;
Sur le rapport de Mme Graff-Daudret , conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Banque populaire du Nord la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné M. et Mme Y... à payer à la société Banque populaire du Nord la somme de 378 281,59 euros, avec intérêts aux taux de 4,5 % l'an sur la somme en principal de 339 459,02 euros, à compter du 2 décembre 2014 ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 2288 du code civil, celui qui se rend caution d'une obligation, se soumet envers le créancier à satisfaire à cette obligation si le débiteur n'y satisfait pas lui-même ; QUE l'article 2290 alinéa 1er du code civil précise que le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur, ni être contracté sous des conditions plus onéreuses ; QUE selon l'article L. 624-2 du code de commerce (dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 12 mars 2014), « au vu des propositions du mandataire judiciaire, le jugecommissaire décide de l'admission ou du rejet des créances ou constate, soit qu'une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence ; QUE l'admission par le juge commissaire, ou par la cour statuant sur appel des décisions de celui ci, d'une créance au passif du débiteur acquiert, quant à son existence et à son montant, l'autorité de la chose jugée à l'égard de la caution ;QU'il ressort de leurs dernières conclusions, que M. et Mme Y..., qui sollicitaient en première instance, outre un report de paiement, que le montant cautionné soit limité à la somme en principal de 463 833,39 euros, outre les intérêts au taux conventionnel de 4,5 %, ne demandent plus que, d'abord, la déduction de la somme de 210 964,86 euros sur la créance de la banque, dont ils ne précisent pas à quel montant elle devrait être fixée, et, ensuite, l'imputation de cette somme sur le capital qui restait dû à la date du redressement judiciaire ; QUE les cautions ne demandant plus en appel la limitation du montant cautionné à la somme en principal de 463 833,39 euros, outre les intérêts, et en l'absence de tout moyen développé sur la question de l'indemnité forfaitaire pour exigibilité anticipée de 37 106,67 euros réclamée par la banque, comme de toute critique du jugement sur' ce point, il s'en déduit que M. et Mme Y... ne contestent plus la devoir ; QUE la banque étant d'accord pour que les annuités soient déduites, la cour devra donc uniquement statuer sur les modalités d'imputation de ces paiements : soit sur le seul capital restant dû à la date d'ouverture, ainsi que le demandent les cautions, soit sur l'entièreté de la dette, intérêts et indemnité de résiliation inclus, comme le sollicite la banque ;
QUE, sur la déduction et l'imputation des annuités versées par la SARL Pharmacie Y..., Il convient de noter qu'en appel, les cautions ne se fondent plus sur l'article L. 626-11 du code de commerce puisqu'elles admettent que celui-ci est applicable seulement dans le cadre d'un plan de sauvegarde et non, comme en l'espèce, dans le cadre d'un plan de continuation après redressement judiciaire ; QU'en toute hypothèse, il peut être remarqué que le plan de continuation (pièce 1 des appelants) prévoit que la créancière soit payée à hauteur de 100 % de sa créance admise en huit annuités constantes ; or, QUE par arrêt du 26 février 2013, la cour d'appel de Douai a admis la créance de la banque à hauteur du capital restant dû à la même date, soit 463 833,39 euros, assorti des intérêts conventionnels au taux de 4,5 % à compter du 2 juillet 2010 ; QU'ainsi, en exécution tant, d'une part, du plan et de la décision de la cour qui admet les intérêts, et, d'autre part de l'article 1254 in fine du code civil (« le paiement fait sur le capital et intérêts, mais qui n'est point intégral, s'impute d'abord sur les intérêts »), l'administrateur judiciaire transmet à la banque deux chèques pour chaque annuité, l'un destiné à régler une partie du capital (57 979,17 euros pour 2013), l'autre les intérêts (12 342,45 euros pour 2013) (pièce 5 et 6 des appelants), de sorte que les annuités versées par la SARL Pharmacie Y... s'imputent à la fois sur le capital et les intérêts ; QUE les cautions invoquent désormais l'article 1244-1 alinéa 2 du code civil aux termes duquel « le juge peut prescrire [...] que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital » ; QUE toutefois, ce texte ne saurait s'appliquer au bénéfice de la caution lorsque les paiements ont été effectués par le débiteur principal, puisqu'en raison du caractère accessoire du cautionnement, l'imputation légalement faite, selon les règles édictées par les articles 1253 et suivants du code civil, du paiement effectué par le débiteur principal est opposable à la caution ;
QUE dès lors qu'il n'est pas contesté que l'imputation des annuités versées par la SARL Pharmacie Y... dans le cadre du plan de continuation a été opérée conformément aux règles légales, les cautions ne peuvent solliciter qu'elles le soient sur le seul capital, les dispositions de l'article 1244-1 du code civil ne pouvant, le cas échéant, s'appliquer qu'aux paiements faits par la caution elle-même ; QU'en conséquence, il convient de condamner M. et Mme Y... à payer à la Banque populaire du Nord la somme de 378 281,59 euros, avec intérêts au taux conventionnel de 4,5 % à compter du 02 décembre 2014, calculés sur 339 459, 02 euros, principal restant dû ;
1- ALORS QU'en se bornant à relever que deux échéances de 70 321,62 € avaient été réglées, qu'elles s'imputaient à la fois sur le capital et sur les intérêts, que, pour 2013, la somme de 57 979,17 € s'était imputée sur le capital, que la créance était initialement de 463 833,39 €, pour la réduire à la somme de 378 281,59 €, sans préciser quelle somme avait été comptabilisée au titre des intérêts ni quelle somme devait s'imputer sur le capital pour l'année 2012, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et méconnu les exigences de l'article 455 du code civil ;
2- ALORS QUE dans leurs écritures d'appel, (p. 5, al. 3), M. et Mme Y... faisaient valoir qu'ils avaient, depuis le jugement, procédé au paiement d'une troisième annuité ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a derechef méconnu les exigences de l'article 455 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est encore reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu d'accorder à M. et Mme Y... un paiement échelonné et rejeté leur demande tendant à l'imputation des paiements sur le capital ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 1244-1 alinéa 1er du code civil, « compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues ». (
) ; QUE l'alinéa 2 du même texte précise que, « par décision spéciale et motivée, le juge peut prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêts à un taux réduit qui ne peut, être inférieur au taux légal ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital » ; QU'il résulte de cette disposition que l'imputation des paiements sur le capital n'est possible que si un report ou un échelonnement est accordé au débiteur ; QUE pour solliciter le report, M. et Mme Y... font notamment valoir qu'ils doivent s'acquitter d'une condamnation solidaire prononcée au bénéfice de la SAS Healthcare pour une somme de plus de 400 000 euros (pièce 14 des appelants) ; QUE cependant, il n'est pas justifié qu'ils aient commencé à régler cette dette, étant relevé que la société Pharmacie Y... en reste tenue à titre principal ; QUE par ailleurs, s'agissant des remboursements allégués au titre du prêt immobilier (pièce 12), il est noté que ceux-ci incombent à la SCI, et non à M. et Mme Y... à titre personnel (pièce 12), et que, comme le souligne justement la banque, la SCI doit nécessairement percevoir des loyers de la SARL, dans le cadre de la continuation de l'activité, affectés au remboursement du prêt ; QUE par ailleurs, les saisies conservatoires opérées par la banque ne sont pas de nature à garantir efficacement le recouvrement de la dette dès lors que les parts sociales ont déjà été nanties au bénéfice d'une autre banque, qui se trouve à un meilleur rang, et que les saisies pratiquées sur les comptes des époux Y... ont porté sur des sommes modestes ; QU'enfin, l'assignation de la banque devant le tribunal de commerce d'Arras date du 27 septembre 2011. De fait, et alors que les cautions n'ont jamais contesté le principe de leur engagement, elles ont déjà bénéficié d'un « délai de grâce » de plus de quatre années et n'établissent pas comment elles seront plus à même de s'acquitter des sommes dues à la banque à l'issue d'un éventuel report de deux autres années ; QU'au regard de ces éléments, la demande de report n'est pas justifiée et sera rejetée ;
QUE la demande d'imputation sur le capital des sommes que les cautions seraient amenées à verser sera, en conséquence refusée, celle-ci ne pouvant recevoir application que si le juge accorde en même temps un délai de grâce ;
QU'enfin, il apparaît que tant en première instance qu'en cause d'appel les cautions n'ont pas sollicité, même à titre subsidiaire, l'octroi du paiement échelonné proposé par la banque et accordé par le tribunal de commerce. ; QU'une telle mesure ne pouvant, en opportunité, leur être imposée, il convient aussi de réformer la décision sur ce point ;
1- ALORS QUE, dès lors qu'un paiement doit s'effectuer de façon échelonnée, le juge peut, par décision motivée, prescrire que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital ; que cette faculté n'est pas subordonnée à l'octroi de délais ; qu'en jugeant néanmoins le contraire pour refuser à M. et Mme Y... l'imputation en priorité sur le capital des annuités de leur dette, la cour d'appel a violé l'article 1244-1 du code civil ;
2- ALORS QUE lorsqu'un débiteur a demandé des délais de paiement en vertu de l'article 1244-1 du code civil, le juge peut, à défaut, lui accorder un simple échelonnement ; qu'en refusant un tel échelonnement, qui avait été accordé par les premiers juges et n'était pas remis en cause par le créancier, parce qu'il n'était pas sollicité par les débiteurs qui avaient seulement demandé un délai de paiement, la cour d'appel a violé l'article 1244-1 du code civil ;
3- ET ALORS QU'en statuant ainsi, elle a également violé l'article 4 du code de procédure civile.