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06/12/2017 | FRANCE | N°16-10888

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 décembre 2017, 16-10888


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 13 janvier 2016), que M. X..., engagé par la société Soredis le 9 avril 2001 en qualité de manager de rayon, a démissionné de son emploi le 28 juin 2006 ; que soutenant avoir subi un harcèlement moral, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une somme à titre

de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de prévention des risques psy...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 13 janvier 2016), que M. X..., engagé par la société Soredis le 9 avril 2001 en qualité de manager de rayon, a démissionné de son emploi le 28 juin 2006 ; que soutenant avoir subi un harcèlement moral, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une somme à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de prévention des risques psycho-sociaux, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en l'absence d'agissements constitutifs de harcèlement moral, l'employeur ne peut se voir reprocher d'avoir manqué à son obligation de prévention des risques psycho-sociaux et du harcèlement moral ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 4121-1, L. 4121-2, L. 1152-4 et L. 1152-1 du code du travail ;

2°/ qu'en retenant, dans le corps de sa décision, l'existence d'un manquement à l'obligation de prévention des risques psycho-sociaux et de harcèlement moral, tandis qu'elle vise, dans le dispositif de sa décision, le seul manquement à l'obligation de prévention des risques psycho-sociaux, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur la nature de l'obligation, dont la violation est reprochée à l'employeur, privant ainsi la décision de base légale au regard des articles L. 4121-1, L. 4121-2 et L. 1152-4 du code du travail ;

3°/ que la mise en place d'une méthode de management de nature à provoquer une dégradation des conditions de travail et une altération de l'état de santé physique et psychique des salariés est appréhendée au titre du harcèlement moral ; qu'en consacrant cependant l'existence d'une atteinte à l'obligation de prévention des risques psycho-sociaux, distincte de l'obligation de prévention des agissements de harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail ;

4°/ que l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil s'attache à ce qui a été définitivement, nécessairement et certainement décidé par le juge pénal sur l'existence du fait qui forme la base commune de l'action civile et de l'action pénale, sur sa qualification ainsi que sur la culpabilité de celui à qui le fait est imputé ; qu'en se fondant, pour caractériser le manquement de l'employeur à son obligation de prévention des risques psycho-sociaux, sur les pièces de la procédure pénale, « et notamment des différents procès-verbaux d'audition de ses collègues de l'époque et du rapport dressé par l'inspection du travail en date du 5 septembre 2008 et adressé au procureur de la République près le tribunal de grande instance de la Roche Sur Yon », alors pourtant que les faits allégués par les salariés étaient identiques à ceux portés à la connaissance du juge pénal et pour lesquels M. Y... a été relaxé du chef de harcèlement moral, la cour d'appel a violé le principe susvisé, ensemble l'article 1351 du code civil ;

5°/ qu'en se prononçant par des motifs généraux, tirés des méthodes de management au sein de l'entreprise, sans caractériser les faits personnellement subis par la salariée, susceptibles de caractériser une absence de prévention par l'employeur des risques psycho-sociaux à son égard, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail ;

Mais attendu, d'abord, que l'obligation de prévention des risques professionnels, qui résulte de l'article L. 4121-1 du code du travail, est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral instituée par l'article L. 1152-1 du code du travail et ne se confond pas avec elle ;

Attendu, ensuite, que la cour d'appel, qui a relevé qu'il ressortait notamment de divers procès-verbaux d'audition et d'un rapport de l'inspection du travail que de très nombreux salariés de l'entreprise avaient été confrontés à des situations de souffrance au travail et à une grave dégradation de leurs conditions de travail induites par un mode de management par la peur ayant entraîné une vague de démissions notamment de la part des salariés les plus anciens, a caractérisé un manquement de l'employeur à son obligation de prévention des risques professionnels à l'égard de l'ensemble des salariés de l'entreprise ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur les deuxième et troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Soredis aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six décembre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer, avocat aux Conseils, pour la société Soredis

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Soredis à payer à M. X... la somme de 3 000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à son obligation de prévention des risques psycho-sociaux ;

AUX MOTIFS QUE Sur la demande formée par M. Sylvain X... en paiement de dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de prévention des risques psycho-sociaux et du harcèlement moral : l'article L. 4121-1 du code du travail énonce : « l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : - des actions de préventions des risques professionnels et de la pénibilité du travail, - des actions d'information et de formation, - la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes » ; que l'article L. 4121-2 du même code dispose : « L'employeur met en oeuvre les mesures prévues à L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants : 1° Eviter les risques ; 2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ; 3° Combattre les risques à la source ; 4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ; 5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ; 6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ; 7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1 ; 8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ; 9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs » ; qu'au demeurant, l'employeur est tenu à l'égard de ses salariés d'une obligation de sécurité de résultat ; qu'aussi doit-il leur assurer une protection effective de leur sécurité et tout mettre en oeuvre à cette fin avant qu'il ne survienne l'évènement qui portera atteinte à leur intégrité, la protection qui lui incombe devant s'entendre comme portant sur tous risques pouvant affecter les salariés y compris ceux d'origine psychique ; que si la prévention qui incombe à l'employeur commence par la prise en compte du danger dans les mesures d'organisation qu'il décide, elle lui impose également de s'abstenir de mettre en place une organisation de nature à compromettre la santé de ses salariés et donc par exemple un mode de management induisant un danger ou les germes d'un danger ; qu'or, en l'espèce, il ressort sans ambiguïté des pièces produites par le salariée et notamment des différents procès-verbaux d'audition de ses collègues de l'époque et du rapport dressé par l'inspection du travail en date du 5 septembre 2008 et adressé au procureur de la République près le tribunal de grande instance de La Roche sur Yon, que de très nombreux salariés de l'entreprise ont été confrontés à des situations de souffrance au travail et à une grave dégradation de leurs conditions de travail ; que les témoignages de ces salariés ont fait en particulier apparaitre qu'ils étaient, eux-mêmes ou leurs collègues, victimes de « colères, irrespect, manque de considération, pressions psychologiques, d'une hyper surveillance, d'humiliations du fait de réprimandes injustes ou vexatoires en public ou en situation d'isolement dans le bureau du directeur, de désorganisation de leur travail ou d'incitation à la délation et à des critiques forcées ou encore des pressions systématiques pour les plus vulnérables d'entre eux » ; que l'inspection du travail relevait en outre que ses investigations l'avait conduite à faire ressortir « un mode de management par la peur pouvant aller jusqu'à des pratiques de mobbing conduisant à dégrader les conditions de travail, faire souffrir et pousser les salariés de cette entreprise à la démission » ; qu'elle ajoutait que certains des salariés de l'entreprise avaient évoqué leur état dépressif ou encore l'idée de suicide et que le « médecin du travail avait confirmé cette situation » et faisait état des « inaptitudes totales en urgence » qu'il avait été amené à prononcer dans le cadre de l'article R. 4624-31 du code du travail ; qu'elle précisait avoir constaté une vague de démissions notamment de la part des salariés les plus anciens ; que l'ensemble de ces éléments fait clairement apparaitre que l'employeur a gravement manqué à ses obligations en matière de prévention des risques psycho-sociaux et du harcèlement moral ; qu'aussi il sera condamné à payer à M. Sylvain X... à raison de ses manquements en la matière la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

1°) ALORS QU'en l'absence d'agissements constitutifs de harcèlement moral, l'employeur ne peut se voir reprocher d'avoir manqué à son obligation de prévention des risques psycho-sociaux et du harcèlement moral ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 4121-1, L. 4121-2, L. 1152-4 et L. 1152-1 du code du travail ;

2°) ALORS QU'en retenant, dans le corps de sa décision, l'existence d'un manquement à l'obligation de prévention des risques psycho-sociaux et de harcèlement moral, tandis qu'elle vise, dans le dispositif de sa décision, le seul manquement à l'obligation de prévention des risques psycho-sociaux, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur la nature de l'obligation, dont la violation est reprochée à l'employeur, privant ainsi la décision de base légale au regard des articles L. 4121-1, L. 4121-2 et L. 1152-4 du code du travail ;

3°) ALORS QUE la mise en place d'une méthode de management de nature à provoquer une dégradation des conditions de travail et une altération de l'état de santé physique et psychique des salariés est appréhendée au titre du harcèlement moral ; qu'en consacrant cependant l'existence d'une atteinte à l'obligation de prévention des risques psychosociaux, distincte de l'obligation de prévention des agissements de harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail ;

4°) ALORS QUE l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil s'attache à ce qui a été définitivement, nécessairement et certainement décidé par le juge pénal sur l'existence du fait qui forme la base commune de l'action civile et de l'action pénale, sur sa qualification ainsi que sur la culpabilité de celui à qui le fait est imputé ; qu'en se fondant, pour caractériser le manquement de l'employeur à son obligation de prévention des risques psycho-sociaux, sur les pièces de la procédure pénale, « et notamment des différents procès-verbaux d'audition de ses collègues de l'époque et du rapport dressé par l'inspection du travail en date du 5 septembre 2008 et adressé au procureur de la République près le tribunal de grande instance de la Roche Sur Yon », alors pourtant que les faits allégués par les salariés étaient identiques à ceux portés à la connaissance du juge pénal et pour lesquels M. Y... a été relaxé du chef de harcèlement moral, la cour d'appel a violé le principe susvisé, ensemble l'article 1351 du code civil ;

5°) ALORS QU'en se prononçant par des motifs généraux, tirés des méthodes de management au sein de l'entreprise, sans caractériser les faits personnellement subis par le salarié, susceptibles de caractériser une absence de prévention par l'employeur des risques psychosociaux à son égard, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Soredis à payer à M. X... la somme de 2 000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

AUX MOTIFS QUE Sur la demande formée par M. Sylvain X... en paiement de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail par l'employeur l'article L. 1222-1 du code du travail énonce : « le contrat de travail est exécuté de bonne foi » ; que les éléments précités tirés tant des témoignages des collègues de M. Sylvain X... de l'époque que du rapport dressé par l'inspection du travail déjà exposés font tout aussi clairement apparaître que l'employeur a gravement manqué à son obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail qui le liait à M. Sylvain X... ; qu'en effet, outre qu'il en ressort des agissements répétés imputables à M. Maurice Y... une dégradation des conditions générales de travail au sein de l'entreprise, le procès-verbal d'audition de M. Sylvain X..., corroboré en cela par les autres attestations du dossier, fait apparaitre qu'il a personnellement subi les effets de ces agissements ; qu'ainsi il indiquait par exemple aux enquêteurs : « … quand M. Y... est arrivé, il a supprimé ces primes estimant que tant qu'il ne gagnerait pas assez d'argent, il n'avait pas de raison que de l'argent soit reversé en guise de primes aux employés. Déjà là il n'y avait pas de dialogue possible, alors moi je faisais le tampon avec certains responsables et la direction … il se frottait surtout aux personnes un peu fragiles comme des femmes qui pleuraient facilement, j'en ai vu plus d'une … Il ne m'a jamais vraiment mal parlé mais il se contrôlait mais c'est surtout à la fin quand je voulais démissionner » et encore, répondant à la question « quels moyens utilisait-il et quels actes commettait-il pour vous déconsidérer ou/et vous empêcher de vous exprimer ? » il ajoutait : « la suppression des réunions par exemple, l'installation d'une veilleuse d'une minute trente dans la salle de pause afin que le personnel se rende compte que passé ce délai, il fallait penser à reprendre le travail, cela démontre l'esprit du personnage » ; que dans ces conditions, à raison de son manquement à l'obligation d'exécution loyale du contrat de travail, la société Soredis sera condamnée à payer à M. Sylvain X... la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

1°) ALORS QUE le juge ne peut, sous le couvert d'un manquement à l'obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail, sanctionner des agissements de harcèlement moral, alors pourtant qu'il constatait que les demandes présentées par la salariée de ce chef étaient manifestement irrecevables ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a manifestement violé l'article L. 1222-1 du code du travail.

2°) ALORS QU'en retenant un manquement à l'obligation d'exécution loyale du contrat de travail, cependant qu'elle ne constatait aucun fait précis concernant personnellement le salarié, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 1222-1 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Soredis à payer à M. X... les sommes de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 4 241,95 € à titre d'indemnité légale de licenciement ;

AUX MOTIFS QUE Sur les demandes de M. Sylvain X... tendant à voir juger à titre principal que sa démission produit les effets d'un licenciement nul et à titre subsidiaire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse (…) s'agissant de la demande de M. Sylvain X... formée à titre subsidiaire, lorsque, comme en l'espèce, le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou de manquements imputables à son employeur, le juge, s'il résulte des circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée celle-ci était équivoque, doit s'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, c'est-à-dire étaient d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail, ou dans le cas contraire d'une démission ; qu'en l'espèce, M. Sylvain X... a donné sa démission et a quitté l'entreprise le 3 septembre 2006 ; que son épouse atteste comme suit : « trois mois après l'arrivée de M. Y... à l'hyper U de Chantonnay, mon mari a commencé à avoir des maux de ventre … après de nombreuses consultations, mon mari s'est fait opérer de la vésicule biliaire. D'après le médecin, ces crises se déclenchent en forte période de stress … Après l'arrivée de M. Y... il ne parlait plus du tout de son travail … Il dormait peu et était de plus en plus tendu … il a vécu cette période comme un échec personnel. Il a fallu plusieurs mois pour que mon mari redevienne normal. » ; que la concomitance entre la démission du salarié et la dégradation de son comportement dans la sphère familiale, mise en perspective avec les nombreux et graves manquements de l'employeur qui les ont immédiatement précédées et qui ont eu pour effet une dégradation considérable des conditions générales de travail dans l'entreprise elle-même contemporaine de très nombreuses démissions d'anciens collègues de la salariée et des propres conditions de travail de celle-ci, conduit la cour à considérer que la démission de M. Sylvain X... a trouvé son origine et sa cause dans ces manquements de l'employeur, lesquels en raison de leur gravité rendaient impossible la poursuite de la relation de travail ; qu'aussi la démission de M. Sylvain X... produit-elle les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en raison de la requalification de la démission de la salariée en licenciement sans cause réelle et sérieuse, ce dernier peut prétendre au versement de l'ensemble des indemnités de rupture et ainsi notamment de l'indemnité de licenciement et de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qu'il revendique ; qu'en vertu des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail lesquelles sont applicables en l'espèce, et compte tenu notamment des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. Sylvain X..., de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à retrouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer la somme de 10 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que par ailleurs, il sera fait droit à la demande de M. Sylvain X... en paiement de la somme de 4 241,95 euros à titre d'indemnité de licenciement, dont le montant ne fait pas débat ;

1°) ALORS QU'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur les deux premiers moyens de cassation, entraînera, par voie de conséquence nécessaire, la censure de la motivation par laquelle la cour d'appel a estimé que la démission de M. Sylvain X..., qui avait trouvé son origine et sa cause dans les manquements de l'employeur, devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

2°) ALORS QUE lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ; qu'en retenant que la démission du salarié présentait un caractère équivoque, alors même que ce n'est que dans le cadre du litige prud'homal, initié le 8 mars 2011, soit quatre ans après la démission de la salariée, que ce dernier s'est prévalu de l'existence d'une exécution déloyale du contrat de travail et, pour la première fois à hauteur d'appel, d'un manquement à l'obligation de prévention des risques psychosociaux, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision, au regard de l'article L. 1231-1 du code du travail ;

3°) ALORS QUE lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ; qu'en retenant que la démission du salarié était elle-même contemporaine de très nombreuses démissions d'anciens collègues, la cour d'appel qui a statué par des motifs inopérants pour caractériser le caractère équivoque de sa démission, a entaché sa décision d'un défaut de base légale, au regard de l'article L. 1231-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-10888
Date de la décision : 06/12/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 13 janvier 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 déc. 2017, pourvoi n°16-10888


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Meier-Bourdeau et Lécuyer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.10888
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