CIV. 1
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 22 novembre 2017
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10710 F
Pourvoi n° P 16-13.830
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ M. Pascal X...,
2°/ Mme Séverine Y..., épouse X...,
domiciliés tous deux [...] ,
contre l'arrêt rendu le 19 janvier 2016 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), dans le litige les opposant à la société Compagnie immobilière de Champagne, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 17 octobre 2017, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Verdun, conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Boullez, avocat de M. et Mme X..., de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Compagnie immobilière de Champagne ;
Sur le rapport de Mme Verdun, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Compagnie immobilière de Champagne la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux novembre deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Monsieur Pascal X... et Madame Séverine Y... épouse X... de l'intégralité de leurs demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'article 1992 du Code civil dispose que le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion ; que, dans ce cadre, il est tenu d'une obligation de renseignement et de conseil vis-à-vis de son mandant ; que manque à son devoir de conseil l'agent immobilier qui omet d'informer l'acheteur sur l'existence de désordres apparents affectant l'immeuble vendu qu'il ne pouvait ignorer en sa qualité de professionnel de l'immobilier ; que tel n'est pas le cas en revanche en présence de désordres non apparents si la preuve n'est pas rapportée que l'agent immobilier en avait connaissance ; qu'en l'espèce, il est constant que pour qualifier un manquement de la COMPAGNIE IMMOBILIERE DE CHAMPAGNE à son obligation de conseil, les époux X... doivent démontrer soit l'existence de désordres apparents – des infiltrations affectant la toiture de l'immeuble vendu – soit la connaissance par l'agence de désordres non apparents ; que, sur l'opposabilité du rapport d'expertise la COMPAGNIE IMMOBILIERE DE CHAMPAGNE, le rapport d'expertise de M. A..., désigné dans le cadre de la procédure ayant opposé les époux X... à leurs vendeurs, les époux B..., a été versé aux débats et a acquis de ce fait un caractère contradictoire qui le rend opposable à la COMPAGNIE IMMOBILIERE DE CHAMPAGNE, qui en tire au surplus des éléments en sa faveur pour considérer qu'elle a rempli son devoir de conseil à l'égard des appelants, de sorte qu'il ne lui cause aucun grief ; que, sur le caractère non apparent des désordres, il est important de relever que M. A... n'a pas constaté de visu, lorsqu'il a réalisé ses opérations d'expertise, d'infiltrations dans l'habitation mais que c'est la compagne de M. X..., Melle Y..., qui lui a signalé l'existence d'infiltrations intérieures les jours de fortes pluies et de vent, selon les propres termes de celle-ci ; que l'expert précise d'ailleurs dans son rapport que ces infiltrations ne sont visibles que dans la montée d'escalier au droit d'une poutre en bois noircie, et ce, uniquement les jours de pluie et de grand vent, et que s'agissant de la fuite côté garage, celle-ci se trouve dans un recoin difficilement accessible ; qu'il est donc permis d'en déduire que les désordres majeurs – ceux affectant l'intérieur de l'habitation sur la montée d'escalier – n'étaient apparents que dans des circonstances particulières – pluie et vent – et que le désordre mineur – celui affectant le garage – était difficilement visible ; que, par ailleurs, les époux X... se sont adjoint, avant la vente, les services d'un ingénieur en bâtiment du cabinet PINGAT dont la présence avait été certainement sollicitée des acquéreurs en raison du fait que les vendeurs avaient eux-mêmes construit la maison, les privant de tout recours en garantie décennale ; que ce professionnel n'a détecté aucune anomalie, ni à l'intérieur, ni à l'extérieur de l'immeuble ; que, compte-tenu de ces éléments, il convient de considérer que les désordres affectant la toiture de l'immeuble qui ont entraîné des infiltrations intérieures n'étaient pas apparents ; que, sur l'absence de connaissance des désordres non apparents par l'agent immobilier, l'expert judiciaire désigné dans le cadre de l'instance en référé n'a pas décelé de désordres apparents ; que deux hommes de l'art sont également intervenus sur l'immeuble : - M. C..., expert du cabinet EUREA, le 16 février 2009, pour vérifier l'état de la couverture de l'immeuble, opération qui a nécessité qu'il monte sur le toit pour remarquer que si la tenue des tuiles était loin d'être assurée et qu'il y avait des désordres sur la toiture, les malfaçons étaient essentiellement d'ordre esthétique et les infiltrations superficielles ; cet élément est d'ailleurs conforté par le montant peu important – 14.332,70 euros –, comparé au prix d'acquisition de l'immeuble, de la provision que les époux X... ont accepté de M. et Mme B... pour procéder aux travaux de réparation de la toiture à l'origine des désordres, - M. D..., architecte d.p.1.g,sollicité à son tour dans le cadre d'une expertise et qui a dû recourir aux services d'un couvreur pour l'aider dans ses opérations, a constaté le 8 octobre 2008 des malfaçons sur la toiture mais il n'apparaît pas des énonciations de son rapport qu'il ait lui-même vu des infiltrations dans la cage d'escalier – aucune photographie n'est d'ailleurs annexée à son rapport alors qu'il a pris de nombreux clichés du toit – ; que la COMPAGNIE IMMOBILIERE DE CHAMPAGNE n'est pas un professionnel du bâtiment et n'en a pas la compétence technique ; que, dans cette mesure, il ne pouvait lui être imposé de réaliser des investigations complémentaires ou de suggérer aux acquéreurs de les faire réaliser dès lors que seuls des hommes de l'art ont pu, pour certains avec l'aide de spécialistes de la couverture d'immeuble, détecter les désordres dont les manifestations n'étaient de surcroît visibles que dans des circonstances particulières ; que l'agence immobilière ne pouvait être débitrice envers les époux X... d'une information dont rien ne démontre qu'elle en connaissait l'existence ;
ET AUX MOTIFS, A LES SUPPOSER ADOPTES DES PREMIERS JUGES, QUE, sur la demande principale, l'article 1992 du Code civil dispose que ‘‘le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion'' ; qu'à ce titre, le rôle de l'agent immobilier ne se limite pas à rapprocher deux parties autour d'une transaction immobilière, celui-ci étant débiteur en tant que professionnel de l'immobilier d'un devoir de conseil s'analysant en une obligation de moyen, et qui s'entend d'une information loyale sur les risques de l'opération qu'il pourrait connaître et sur la valeur et les caractéristiques du bien en cause ; qu'ainsi, si l'agent immobilier qui omet d'informer l'acheteur sur l'existence de désordres apparents manque à ses devoirs, il n'en est pas de même pour celui qui n'informe pas ledit acheteur de vices non-apparents, si la preuve n'est pas rapportée de sa connaissance de ceux-ci ; qu'en l'espèce, les vices détaillés dans les différents rapports d'expertise ne sont pas apparent ; qu'en effet, le rapport d'expertise conclut que ‘‘c'est très certainement de bonne foi que [les vendeurs] ont indiqué qu'ils étaient dans l'ignorance des infiltrations car elles ne sont visibles que dans la montée d'escalier au droit d'une poutre en bois noircie. Les infiltrations se produisent les jours de pluie avec fort vent. On peut donc imaginer des conditions particulières (mais non exceptionnelles) dans la survenance des vices. Côté garage, la fuite signalée est dans un recoin difficilement accessible'' ; qu'en outre, il n'a pas été dissimulé aux acquéreurs que la maison avait été construite par les vendeurs eux-mêmes, cette mention figurant tant dans l'acte de vente notarié que dans le compromis de vente sous condition suspensive signé le 16 avril 2007 ; qu'il s'ensuit que si les désordres ne pouvaient être visibles que dans des circonstances particulières, il n'est pas démontré que l'agence immobilière ait eu connaissance des traces d'infiltration, voire même qu'elle ait pu être en capacité d'en prendre connaissance ; que l'agence immobilière ne pouvait dès lors être débitrice envers les acquéreurs d'une information dont il n'est pas démontré qu'elle connaissait l'existence ;
1. ALORS QU'il appartient à l'agent immobilier de vérifier au-delà de l'apparence, le descriptif des annonces qu'il publie pour chercher des acheteurs ; qu'il est constant que l'immeuble vendu aux époux X... n'était pas conforme au descriptif qu'en avait donné la Compagnie immobilière de Champagne dans l'annonce immobilière en considération de laquelle ils ont pris la décision d'acheter ; qu'en subordonnant la mise en oeuvre de la responsabilité de l'agent immobilier à l'existence de désordres apparents ou de ceux dont il aurait eu connaissance, quand sa responsabilité était engagée par cela seul que les déclarations figurant sur l'annonce qu'il avait diffusée sous son nom étaient erronées sans qu'il ait été en mesure de justifier de leur exactitude, la Cour d'appel a violé les articles 1147 et 1992 du Code civil ;
2. ALORS à tout le moins QUE les époux X... soutenaient dans leurs écritures « que la Cour se penchera avec intérêt sur la pièce versée aux débats par la COMPAGNIE IMMOBILIERE DE CHAMPAGNE (pièce 6 adverse) qui est le descriptif et où il est indiqué relativement à cette maison :
"impeccable, bons matériaux" ; que l'état général intérieur est noté comme "Excellent" et que l'état général extérieur est noté comme étant en "Parfait état". [
] que le fait comme l'indique le Tribunal que la maison ait été construite par les vendeurs aurait justement dû attirer l'attention particulière de l'agent immobilier alors même que le Tribunal considère qu'il s'agit là d'un élément qui le disculperait ; que pour l'ensemble de ces raisons et compte tenu de la jurisprudence qui rappelle que l'agent immobilier doit aller au-delà de l'apparence, le Tribunal n'a pas tiré les conséquences qui devaient résulter des dispositions des articles 1992 et suivants du Code civil » (conclusions des exposants, p. 5 § 7 à 9 et p. 6 § 7 et 8) ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si la société COMPAGNIE IMMOBILIERE DE CHAMPAGNE avait manqué à ses obligations, en garantissant, sans nuance, les qualités d'un immeuble par un descriptif dont elle n'était pas en mesure de vérifier l'exactitude au delà des apparences, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1992 et 1147 du Code civil ;
3. ALORS QU'il est interdit aux juges du fond de dénaturer les documents de la cause ; qu'il ressort du rapport d'expertise du 20 juin 2009, tel que visé dans l'arrêt attaqué (p. 2 § 4 et 5), que M. A... a relevé que « tous les vices constatés aujourd'hui étaient visibles et préexistants au moment de l'achat de la maison y compris les traces d'infiltrations intérieures qui trahissaient des malfaçons de la toiture (voir traces de coulures sur les pièces de charpente – photos) », que « les vices étaient décelables par un professionnel » et qu' « aucun des vices constatés n'était caché » (rapport d'expertise, p. 18) ; qu'en affirmant que « l'expert judiciaire désigné dans le cadre de l'instance en référé n'a pas décelé de désordres apparents » (arrêt attaqué, p. 4 § 9), la Cour d'appel a dénaturé ce rapport d'expertise, en violation du dit principe, ensemble l'article 4 du code de procédure civile.