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16/11/2017 | FRANCE | N°16-22816;16-22817;16-22818

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 novembre 2017, 16-22816 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° F 16-22. 816, H 16-22. 817 et G 16-22. 818 ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1233-4 du code du travail en sa rédaction applicable à la cause ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que Mmes X...et Y... et M. Z..., salariés de la société Etablissements Olivier Guille et fils, ont été licenciés pour motif économique le 27 février 2012 ;

Attendu que pour dire le licenciement de ces salariés dépourvu de cause réelle et sérieuse, la c

our d'appel retient que, pour justifier de ses recherches de reclassement en interne, l'employeu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° F 16-22. 816, H 16-22. 817 et G 16-22. 818 ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1233-4 du code du travail en sa rédaction applicable à la cause ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que Mmes X...et Y... et M. Z..., salariés de la société Etablissements Olivier Guille et fils, ont été licenciés pour motif économique le 27 février 2012 ;

Attendu que pour dire le licenciement de ces salariés dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel retient que, pour justifier de ses recherches de reclassement en interne, l'employeur ne verse aux débats que le projet de plan de sauvegarde pour l'emploi du 7 janvier 2012 mais non le plan de sauvegarde de l'emploi lui-même ; qu'il ne justifie donc pas d'offres de reclassement précises et individualisées faites aux salariés et, de ce fait, ne justifie pas avoir rempli son obligation de recherche individuelle de reclassement, ce qui prive les licenciements de cause réelle et sérieuse ;

Qu'en se déterminant ainsi, alors que l'employeur est libéré de l'obligation de faire des offres de reclassement au salarié dont il envisage le licenciement pour motif économique lorsque l'entreprise ou le groupe auquel elle appartient, ne comporte aucun poste disponible en rapport avec ses compétences, au besoin en le faisant bénéficier d'une formation d'adaptation, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme elle y était invitée, si l'employeur ne justifiait pas de l'impossibilité de reclasser les salariés, a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, les arrêts rendus le 24 juin 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen ;

Condamne Mmes X..., Y... et M. Z...aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen unique commun produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Etablissements Olivier Guille et fils, M. A..., ès qualités, et la société Vitani-Bru, ès qualités, demandeurs aux pourvois n° F 16-22. 816 à G 16-22. 818

IL EST FAIT GRIEF aux arrêts infirmatifs attaqués d'AVOIR dit que les licenciements des salariés étaient sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la société Etablissements Olivier Guille et fils à leur payer des dommages et intérêts à ce titre, ainsi qu'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et d'AVOIR condamné la société Etablissements Olivier Guille et fils aux dépens,

AUX MOTIFS QUE Par application des dispositions de l'article L. 1233-4 du code du travail, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient, sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente ou à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure. Les offres de reclassement proposées au salarié doivent être écrites et précises ; que la notion de groupe à laquelle se réfèrent les dispositions précitées, correspond aux entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permet d'effectuer la permutation de toute ou partie du personnel ; qu'en d'autres termes, la permutabilité du personnel entre les entreprises concernées est l'élément déterminant de cette notion de groupe, la détention d'une partie de capital d'une société par une autre, comme les liens de parenté ou d'alliance existant entre les associés de deux entreprises, n'implique pas la possibilité d'effectuer entre elles la permutation de toute ou partie du personnel, et ne caractérise donc pas l'existence d'un groupe au sein duquel le reclassement doit être recherché ; que la charge de la preuve de l'impossibilité de proposer un reclassement au salarié pèse sur l'employeur qui doit justifier de recherches actives, sérieuses et loyales en vue de le reclasser ; que la société Olivier Guille et fils est fondée à soutenir que les recherches de postes disponibles dans les sociétés du groupe auquel appartient l'employeur qui envisage un licenciement économique collectif n'ont pas à être assorties du profil personnalisé des salariés concernés pour l'établissement du plan de redressement intégré au plan de sauvegarde de l'emploi, lequel doit seulement préciser le nombre, la nature, la localisation, le statut et la rémunération des emplois disponibles au sein du groupe ; qu'il lui incombe cependant de justifier de l'existence et de la teneur du plan de sauvegarde de l'emploi ; que le licenciement [du salarié] était inclus dans 48 autres licenciements de salariés de la société Olivier Guille et fils, et les postes occupés supprimés étaient des postes d'ouvriers (36), d'employés (6) et de techniciens (7) ; que pour justifier de ses recherches de reclassement en interne l'employeur ne verse aux débats que le projet de plan de sauvegarde pour l'emploi en date du 7 janvier 2012, soumis au comité d'entreprise du 16 janvier 2012, puis transmis le 17 janvier 2012 pour l'avis de la DIRECCTE ; que dans son avis en date du 24 janvier 2012, la DIRECCTE formule notamment les observations suivantes : " je note que seulement deux postes de reclassement sont proposés en interne, au sein du groupe. Un de ces postes Briatex est un poste à créer. Il conviendrait qu'une fiche de poste soit établie de manière à permettre un positionnement des salariés en toute connaissance de cause'et aussi'les postes proposés en reclassement interne au groupe doivent être précis et détaillés. Les propositions de reclassement doivent être individuelles et correspondre à un emploi équivalent à celui occupé par le salarié licencié ", et demande à l'employeur de communiquer aux membres du comité d'entreprise la teneur de sa transmission et de lui faire part de suites données à ces observations ; que la société Olivier Guille et fils ne verse aux débats que le procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise du 30 janvier 2012 auquel est annexé l'avis du 24 janvier 2012 ainsi que sa réponse en date du 27 janvier 2012 adressée à la DIRECCTE, dans laquelle elle indique au sujet des précisions des postes de reclassement et des postes pouvant être proposés : " conformément aux exigences de la jurisprudence notre PSE précise le nombre, la nature et la localisation des postes de reclassement possible " ; que ce courrier fait référence à deux documents annexés dont un intitulé'PSE au 27 janvier 2012 " ; qu'or aucun des documents annexés à ce courrier n'est joint, et singulièrement le plan de sauvegarde de l'emploi en date du 27 janvier 2012, qui n'est pas versé aux débats ; que la société Olivier Guille et fils ne justifie donc pas d'offres de reclassement précises et individualisées faites aux salariés et de ce fait ne justifie pas avoir rempli son obligation de recherche individuelle de reclassement, ce qui prive le licenciement [du salarié] de cause réelle et sérieuse ;

1. ALORS QUE l'employeur est libéré de l'obligation de faire des offres de reclassement au salarié dont il envisage le licenciement pour motif économique lorsque l'entreprise et le cas échéant le groupe ne comporte aucun emploi disponible en rapport avec ses compétences, au besoin en le faisant bénéficier d'une formation d'adaptation ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions oralement soutenues, la société Etablissements Olivier Guille et fils faisait valoir qu'elle avait interrogé l'ensemble des sociétés du groupe employant des salariés et avec lesquelles la permutation du personnel était envisageable sur l'existence de postes disponibles, que trois des quatre sociétés consultées (Vial frères, IMF et Arguitex) avaient répondu par la négative, et la dernière (la société Broussaud textile) avait répondu qu'elle disposait d'un poste disponible ; qu'elle énonçait que si cette recherche dans le périmètre de reclassement avait ainsi abouti, compte tenu de la situation économique difficile du groupe-reconnue par la cour d'appel-, à l'identification de deux postes disponibles seulement, l'un au sein même de la société Etablissements Olivier Guille et fils par création d'un emploi d'administration commerciale, et l'autre de technicien régleur machine au sein de la société Broussaud textile, aucun de ces postes ne pouvait convenir aux salariés compte tenu de leurs compétences y compris après une formation complémentaire, ce d'autant que le poste créé au sein de l'entreprise supposait la maîtrise parfaite de la langue allemande, que ne possédaient pas les salariés (conclusions d'appel, p. 16 à 21) ; qu'elle produisait à cet égard d'une part, les lettres de l'employeur à destination des sociétés précitées du groupe en date des 15 décembre 2011 et 20 janvier 2012, et les réponses de ces sociétés, et d'autre part, les registres du personnel des sociétés Etablissements Olivier Guille et fils et Arguitex (prod. 6 à 14) ; qu'en affirmant que l'employeur ne justifiait pas d'offres de reclassement précises et individualisées faites aux salariés et, de ce fait, ne justifiait pas avoir rempli son obligation de recherche individuelle de reclassement, au prétexte inopérant qu'il ne versait pas aux débats le plan de sauvegarde de l'emploi adressé à la Direccte le 27 janvier 2012, quand il lui incombait de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'employeur ne justifiait pas de l'absence d'emplois disponibles en rapport avec les compétences des salariés, au besoin en les faisant bénéficier d'une formation d'adaptation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 ;

2. ALORS en outre QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les documents qui leurs sont soumis ; qu'en l'espèce, le bordereau de communication de pièces annexé aux conclusions de l'employeur mentionnait, sous les numéros 12 à 17 et 52, les lettres adressées par la société Etablissements Olivier Guille et fils aux sociétés Vial frères, IMF, Broussaud textile et Arguitex les 15 décembre 2011 et 20 janvier 2012, ainsi que les réponses de ces sociétés ; qu'en affirmant que pour justifier de ses recherches de reclassement, l'employeur ne versait aux débats que le projet de plan de sauvegarde pour l'emploi en date du 7 janvier 2012, soumis au comité d'entreprise du 16 janvier 2012, puis transmis le 17 janvier 2012 pour avis de la Direccte, et le procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise du 30 janvier 2012 auquel était annexé l'avis de la Direccte du 24 janvier 2012 ainsi que sa réponse en date du 27 janvier 2012 adressée à la Direccte, la cour d'appel a dénaturé le bordereau précité par omission et violé le principe susvisé, ensemble l'article 4 du code de procédure civile ;

3. ALORS QUE les juges du fond ne peuvent modifier les termes du litige ; qu'en l'espèce, dans leurs conclusions oralement soutenues, les salariés ne se prévalaient pas de l'absence de production du plan de sauvegarde de l'emploi en date du 27 janvier 2012 ; qu'en affirmant qu'il incombait à l'employeur de justifier de l'existence et de la teneur du plan de sauvegarde de l'emploi et en jugeant que faute de verser aux débats le plan de sauvegarde de l'emploi en date du 27 janvier 2012 adressé à la Direccte en annexe à sa lettre du même jour, l'employeur ne justifiait pas avoir rempli son obligation de recherche individuelle de reclassement, la cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

4. ALORS à tout le moins QU'en relevant d'office l'absence au dossier du plan de sauvegarde de l'emploi en date du 27 janvier 2012, ce qu'aucune des parties n'évoquait, sans provoquer leurs observations préalables, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-22816;16-22817;16-22818
Date de la décision : 16/11/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 24 juin 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 nov. 2017, pourvoi n°16-22816;16-22817;16-22818


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Ohl et Vexliard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.22816
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