COMM.
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 15 novembre 2017
Rejet non spécialement motivé
M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10462 F
Pourvoi n° B 16-18.143
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Franklin Bach, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , agissant en qualité de liquidateur judiciaire de M. Michel Y...,
contre l'arrêt rendu le 22 mars 2016 par la cour d'appel d'Angers (chambre A, commerciale), dans le litige l'opposant à la société Banco Sabadell , société anonyme de droit espagnol, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Caja de Ahorros del Mediterraneo (CAM),
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 26 septembre 2017, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Z..., conseiller rapporteur, M. Guérin, conseiller, M. B... , premier avocat général, M. Graveline, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Franklin Bach, de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la société Banco Sabadell ;
Sur le rapport de Mme Z..., conseiller, l'avis de M. B... , premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Franklin Bach, ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille dix-sept. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société Franklin Bach.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a rejeté la demande de la SELARL FRANKLIN BACH, ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de Monsieur Y..., visant à la condamnation de la banque au paiement de la somme de 78.100 euros ;
AUX MOTIFS QUE « la Cour n'a pas compétence pour examiner l'irrégularité invoquée par le liquidateur de la vente sur adjudication intervenue en Espagne ni sur la répartition entre créanciers hypothécaires du produit de la vente, ces questions relevant toutes de la compétence des juridictions de l'Etat sur le territoire duquel s'est déroulée l'adjudication, soit ici des juridictions espagnoles, peu important que l'immeuble concerné ait dépendu de la procédure collective ouverte en France ; que, d'autre part, la qualité de créancier hypothécaire de premier rang sur l'immeuble situé en Espagne de la société CAM ne fait, en l'espèce, l'objet d'aucune contestation ; qu'en vertu de l'article 5 du Règlement (CE) n° 1346/2000 du 29 mai 2000, l'ouverture de la procédure d'insolvabilité n'affecte pas le droit réel d'un créancier sur des biens immeubles appartenant au débiteur qui se trouvent, au moment de l'ouverture de la procédure, sur le territoire d'un autre Etat membre ;que les droits ainsi visés sont, notamment, le droit de réaliser ou de faire réaliser le bien et d'être désintéressé par le produit ou les revenus de ce bien, en particulier en vertu d'un gage ou d'une hypothèque ; qu'ainsi ne peut être constitutif d'une fraude le seul fait pour la société CAM, créancier hypothécaire de premier rang, d'avoir été désintéressée par le produit de la vente sur adjudication de l'immeuble grevé de son hypothèque appartenant à M. Y... situé sur le territoire espagnol, peu important qu'elle n'ait pas été à l'initiative de cette vente, étant observé que l'article 20 du même règlement n" 1346/2000 prévoyant l'obligation pour le créancier qui, après l'ouverture d'une procédure d'insolvabilité, obtient satisfaction totale en ce qui concerne sa créance sur des biens du débiteur se trouvant sur le territoire d'un autre Etat membre, de restituer ce qu'il a obtenu au syndic, réserve expressément le cas des créanciers bénéficiant d'un droit réel visé à l'article 5 ; que ne peut rendre rétroactivement frauduleuse la perception par la société CAM des fonds la désintéressent la circonstance que, par ordonnance du 13 octobre 2005, soit postérieurement à cette perception, sa créance, en application de la loi française, ait été déclarée éteinte faute de déclaration de sa part à la procédure collective, alors que cette disposition de la loi française, au demeurant abrogée depuis par le législateur, contredisait le règlement européen ; que, de surcroît, il apparaît des pièces produites par le liquidateur que le paiement par priorité des créanciers hypothécaires au moyen du prix de vente de l'immeuble espagnol était une des dispositions du plan de redressement proposé par M. Y... et autorisé par le tribunal par jugement du 29 septembre 2004 ;qu'il résulte de ce qui précède qu'aucune fraude ou participation à une fraude imputables à la société CAM aux droits de laquelle vient la société Banco Sabadell ne sont établies » ;
ALORS QUE, PREMIEREMENT, le droit réel que confère au créanciers l'hypothèque est un accessoire de la créance ; qu'avant de décider si la banque avait perçu licitement une partie du prix de vente de l'appartement et rejeté la demande du liquidateur, les juges du fond devaient constater que la banque était bien titulaire d'une créance à l'égard de Monsieur Y... ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 2393 du code civil ;
ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, l'extinction née de l'absence de déclaration dans les délais requis produit ses effets du seul fait de l'écoulement du délai ; qu'à cet égard, il importait peu que l'extinction de la créance ait été constatée par une ordonnance du 13 octobre 2005 postérieurement à la perception d'une partie du prix ; que de ce point de vue, l'arrêt, fondé sur un motif inopérant, a été rendu en violation de l'article L. 621-46 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 ;
ALORS QUE, TROISIEMEMENT, lorsqu'ils statuent sur l'extinction d'une créance, par suite de l'absence de déclaration, le juge commissaire ne fait que révéler une situation préexistante depuis le jour de l'expiration du délai, le juge doit dès lors en tenir compte, peu importe la date à laquelle la décision a été rendue ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article L. 621-46 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 ;
ET ALORS QUE, QUATRIEMEMENT, si en vertu de l'article 5 du Règlement (CE) n°1356/2000 du 29 mai 2000, l'ouverture d'une procédure d'insolvabilité n'affecte pas le droit réel que détient le créancier sur un immeuble situé sur le territoire d'un Etat membre autre que celui de l'Etat d'ouverture de la procédure collective, cette disposition, qui ne concerne que l'existence du droit réel constitutif de l'accessoire de la créance, n'intéresse pas l'existence de la créance ou son extinction ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 5 du Règlement (CE) n°1356/2000 du 29 mai 2000;
ET ALORS QUE, CINQUIEMEMENT, à défaut pour le créancier de procéder à la déclaration de sa créance dans le délai, celle-ci est éteinte ;
qu'il importe peu que la disposition en cause, relative à la déclaration de créance et à l'extinction de celle-ci faute de déclaration, a été ultérieurement abrogée ; que de ce point de vue, l'arrêt, fondé sur un motif inopérant, a été rendu en violation de l'article L. 621-46 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a rejeté la demande de la SELARL FRANKLIN BACH, ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de Monsieur Y..., visant à la condamnation de la banque au paiement de la somme de 78.100 euros ;
AUX MOTIFS QUE « la Cour n'a pas compétence pour examiner l'irrégularité invoquée par le liquidateur de la vente sur adjudication intervenue en Espagne ni sur la répartition entre créanciers hypothécaires du produit de la vente, ces questions relevant toutes de la compétence des juridictions de l'Etat sur le territoire duquel s'est déroulée l'adjudication, soit ici des juridictions espagnoles, peu important que l'immeuble concerné ait dépendu de la procédure collective ouverte en France ; que, d'autre part, la qualité de créancier hypothécaire de premier rang sur l'immeuble situé en Espagne de la société CAM ne fait, en l'espèce, l'objet d'aucune contestation ; qu'en vertu de l'article 5 du Règlement (CE) n° 1346/2000 du 29 mai 2000, l'ouverture de la procédure d'insolvabilité n'affecte pas le droit réel d'un créancier sur des biens immeubles appartenant au débiteur qui se trouvent, au moment de l'ouverture de la procédure, sur le territoire d'un autre Etat membre ;que les droits ainsi visés sont, notamment, le droit de réaliser ou de faire réaliser le bien et d'être désintéressé par le produit ou les revenus de ce bien, en particulier en vertu d'un gage ou d'une hypothèque ; qu'ainsi ne peut être constitutif d'une fraude le seul fait pour la société CAM, créancier hypothécaire de premier rang, d'avoir été désintéressée par le produit de la vente sur adjudication de l'immeuble grevé de son hypothèque appartenant à M. Y... situé sur le territoire espagnol, peu important qu'elle n'ait pas été à l'initiative de cette vente, étant observé que l'article 20 du même règlement n" 1346/2000 prévoyant l'obligation pour le créancier qui, après l'ouverture d'une procédure d'insolvabilité, obtient satisfaction totale en ce qui concerne sa créance sur des biens du débiteur se trouvant sur le territoire d'un autre Etat membre, de restituer ce qu'il a obtenu au syndic, réserve expressément le cas des créanciers bénéficiant d'un droit réel visé à l'article 5 ; que ne peut rendre rétroactivement frauduleuse la perception par la société CAM des fonds la désintéressent la circonstance que, par ordonnance du 13 octobre 2005, soit postérieurement à cette perception, sa créance, en application de la loi française, ait été déclarée éteinte faute de déclaration de sa part à la procédure collective, alors que cette disposition de la loi française, au demeurant abrogée depuis par le législateur, contredisait le règlement européen ; que, de surcroît, il apparaît des pièces produites par le liquidateur que le paiement par priorité des créanciers hypothécaires au moyen du prix de vente de l'immeuble espagnol était une des dispositions du plan de redressement proposé par M. Y... et autorisé par le tribunal par jugement du 29 septembre 2004 ;qu'il résulte de ce qui précède qu'aucune fraude ou participation à une fraude imputables à la société CAM aux droits de laquelle vient la société Banco Sabadell ne sont établies » ;
ALORS QUE, les juridictions de l'Etat où la procédure collective a été ouverte ont compétence, en tant que juge de la procédure collective, pour statuer sur la nullité, l'annulation ou l'inopposabilité des actes accomplis au préjudice des créanciers ; qu'à ce titre, le juge français, juge de la procédure collective, était compétent pour déterminer l'incidence à l'égard de la procédure collective des actes accomplis en Espagne lors de la répartition des fonds ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles 3 et 4 du Règlement (CE) n°1356/2000 du 29 mai 2000.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a rejeté la demande de la SELARL FRANKLIN BACH, ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de Monsieur Y..., visant à la condamnation de la banque au paiement de la somme de 78.100 euros ;
AUX MOTIFS QUE « la Cour n'a pas compétence pour examiner l'irrégularité invoquée par le liquidateur de la vente sur adjudication intervenue en Espagne ni sur la répartition entre créanciers hypothécaires du produit de la vente, ces questions relevant toutes de la compétence des juridictions de l'Etat sur le territoire duquel s'est déroulée l'adjudication, soit ici des juridictions espagnoles, peu important que l'immeuble concerné ait dépendu de la procédure collective ouverte en France ; que, d'autre part, la qualité de créancier hypothécaire de premier rang sur l'immeuble situé en Espagne de la société CAM ne fait, en l'espèce, l'objet d'aucune contestation ; qu'en vertu de l'article 5 du Règlement (CE) n° 1346/2000 du 29 mai 2000, l'ouverture de la procédure d'insolvabilité n'affecte pas le droit réel d'un créancier sur des biens immeubles appartenant au débiteur qui se trouvent, au moment de l'ouverture de la procédure, sur le territoire d'un autre Etat membre ;que les droits ainsi visés sont, notamment, le droit de réaliser ou de faire réaliser le bien et d'être désintéressé par le produit ou les revenus de ce bien, en particulier en vertu d'un gage ou d'une hypothèque ; qu'ainsi ne peut être constitutif d'une fraude le seul fait pour la société CAM, créancier hypothécaire de premier rang, d'avoir été désintéressée par le produit de la vente sur adjudication de l'immeuble grevé de son hypothèque appartenant à M. Y... situé sur le territoire espagnol, peu important qu'elle n'ait pas été à l'initiative de cette vente, étant observé que l'article 20 du même règlement n" 1346/2000 prévoyant l'obligation pour le créancier qui, après l'ouverture d'une procédure d'insolvabilité, obtient satisfaction totale en ce qui concerne sa créance sur des biens du débiteur se trouvant sur le territoire d'un autre Etat membre, de restituer ce qu'il a obtenu au syndic, réserve expressément le cas des créanciers bénéficiant d'un droit réel visé à l'article 5 ; que ne peut rendre rétroactivement frauduleuse la perception par la société CAM des fonds la désintéressent la circonstance que, par ordonnance du 13 octobre 2005, soit postérieurement à cette perception, sa créance, en application de la loi française, ait été déclarée éteinte faute de déclaration de sa part à la procédure collective, alors que cette disposition de la loi française, au demeurant abrogée depuis par le législateur, contredisait le règlement européen ; que, de surcroît, il apparaît des pièces produites par le liquidateur que le paiement par priorité des créanciers hypothécaires au moyen du prix de vente de l'immeuble espagnol était une des dispositions du plan de redressement proposé par M. Y... et autorisé par le tribunal par jugement du 29 septembre 2004 ;qu'il résulte de ce qui précède qu'aucune fraude ou participation à une fraude imputables à la société CAM aux droits de laquelle vient la société Banco Sabadell ne sont établies »
ALORS QUE, PREMIEREMENT, l'ordonnance du 26 juillet 2004, confirmée par le jugement du 2 février 2005, avait autorisé la vente de gré à gré de l'immeuble au profit de Monsieur A... ; qu'en validant néanmoins le désintéressement de la société BANCO SABADELL sur le prix obtenu lors de l'adjudication de l'immeuble réalisée en Espagne, les juges du fond ont violé l'autorité de la chose jugée attachée à l'ordonnance du 26 juillet 2004 et au jugement du 2 février 2005;
ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, si le plan avait prévu le paiement par priorité des créanciers hypothécaires sur le prix de vente de l'immeuble espagnol, il laissait entière la question du mode de réalisation du bien : vente de gré à gré ou adjudication ; qu'à cet égard l'arrêt, fondé sur un motif inopérant, a été rendu en violation de l'article 1351 du code civil.