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26/10/2017 | FRANCE | N°16-14822

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 octobre 2017, 16-14822


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 janvier 2016), que M. X..., né le 1er juin 1950, commandant de bord sur Boeing 747/400, au sein de la société Air France, s'est porté volontaire pour un stage de qualification sur Airbus A 380 au cours de la campagne de qualification pour la saison été 2009, réitérant cette demande pour les saisons suivantes ; qu'invoquant les dispositions de l'article 2.4.3.2 de la convention d'entreprise du personnel navigant technique aux termes desquelles un officier navigant peut

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 janvier 2016), que M. X..., né le 1er juin 1950, commandant de bord sur Boeing 747/400, au sein de la société Air France, s'est porté volontaire pour un stage de qualification sur Airbus A 380 au cours de la campagne de qualification pour la saison été 2009, réitérant cette demande pour les saisons suivantes ; qu'invoquant les dispositions de l'article 2.4.3.2 de la convention d'entreprise du personnel navigant technique aux termes desquelles un officier navigant peut prétendre à une qualification de type avion tant que sa durée d'affectation sur le type d'avion souhaité avant son départ à la retraite est supérieure ou égale à la durée minimale d'affectation due, la société a refusé ses demandes au motif que l'intéressé atteindrait puis dépasserait l'âge de soixante ans avant la durée minimale d'affectation sur ce type d'avion, qui était pour lui de six années ; que se prévalant des dispositions de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile permettant, à certaines conditions, aux pilotes de continuer leur activité jusqu'à l'âge de soixante-cinq ans, le salarié a saisi la juridiction prud'homale en référé puis au fond de demandes tendant à faire reconnaître l'existence d'une discrimination fondée sur son âge ; que devant atteindre l'âge de soixante cinq ans le 1er juin 2015, la société Air France lui a adressé le 6 février 2015 une proposition de reclassement, le salarié devant faire connaître sa décision à la date du 19 février 2015 ; que ce même jour, la société Air France l'a convoqué à un entretien préalable à une éventuelle rupture de son contrat de travail, notifiée au salarié le 5 mars 2015 ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur, qui est préalable :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser au salarié la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination alors, selon le moyen :

1°/ qu'aux termes de l'article L.421-9 du code de l'aviation civile, tel qu'en vigueur au 1er janvier 2010, la limite d'âge pour exercer la fonction de pilote est de soixante ans ; que la possibilité ouverte par le législateur de piloter jusqu'à l'âge de soixante-cinq ans ne résulte pas de la volonté de l'employeur mais seulement d'un choix individuel exprimé par le salarié qui doit être renouvelé chaque année sous réserve de strictes conditions à remplir notamment médicales ; que l'article 2.4.3.2 de la convention d'entreprise du personnel navigant technique précise que le pilote pour changer de qualification sur un avion (pilotage d'un autre avion) doit satisfaire à une durée minimale d'affectation sur cet avion, déterminée en fonction de son cursus de carrière depuis son embauche; qu'il résulte de ces dispositions que la période éventuelle de poursuite de l'activité de pilote au-delà de soixante ans ne peut pas être prise en considération dans le calcul de la durée minimale d'affectation sur un avion en raison de son caractère aléatoire, étranger à la volonté de l'employeur, ce qui est exclusif de toute discrimination; que la cour d'appel qui a relevé que l'article L.421-9 du code de l'aviation civile applicable a organisé la possibilité d'une poursuite de l'activité de pilote à la seule initiative du salarié, selon des conditions strictes pour une année supplémentaire, renouvelable les quatre années suivantes et que la demande doit être formulée par le pilote au plus tard trois mois avant le soixantième anniversaire, aurait dû déduire de ses énonciations que le fait d'avoir écarté le salarié des stages de qualification sur Airbus A380 pour les saison IATA été/hiver 2009-2010, alors qu'il avait atteint l'âge de soixante ans le 1er juin 2010, n'était pas discriminatoire ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L.421-9 du code de l'aviation civile et l'article 2.4.3.2 de la convention d'entreprise du personnel navigant technique en vigueur ;

2°/ qu'aux termes de l'article L.1133-2 du code du travail et de l'article 6 paragraphe 1 de la directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000, portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, les différences de traitement fondées sur l'âge ne sont pas discriminatoires lorsqu'elles consistent en la fixation d'un âge maximum pour le recrutement fondé sur la formation requise pour le poste concerné ou la nécessité d'une période d'emploi raisonnable avant la retraite ; que le changement de qualification sur avion après une période de formation obligatoire et une durée minimale d'affectation sur cet avion permet de piloter un autre avion ; que ce changement de qualification constitue un recrutement sur un autre avion, en sorte que les dispositions de l'article L. 1133-2 du code du travail qui autorisent la prise en compte d'un âge maximum pour le recrutement en raison de la durée de la formation ou d'une période raisonnable d'emploi avant la retraite a vocation à s'appliquer, en sorte que le fait d'écarter d'un stage de qualification sur avion un salarié qui atteint l'âge de soixante ans durant la période minimale d'affectation sur cet avion, ne constitue pas une mesure discriminatoire ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L.1133-2 du code du travail et l'article 6 paragraphe 1 de la directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000 ;

Mais attendu, d'abord, qu'ayant rappelé que l'article L. 1132-1 du code du travail interdit qu'une personne fasse l'objet d'une mesure de discrimination, directe ou indirecte, notamment en matière de formation, de qualification ou de promotion professionnelle, en raison de son âge, qu'ayant retenu que l'objectif de sécurité publique est assuré pour les pilotes de plus de soixante ans par les conditions posées par le paragraphe II de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile qui organise la possibilité de poursuite de leur activité professionnelle à leur seule initiative jusqu'à soixante cinq ans en qualité de pilote en leur fixant des conditions d'exercice de leur activité afin d'assurer la sécurité publique, consistant dans la limitation aux vols en équipage avec plus d'un pilote, dont un seul âgé de plus de soixante ans, et qu'ayant constaté que l'employeur n'apportait aucun élément faisant apparaître que le refus opposé au salarié était justifié par un objectif légitime, la cour d'appel a, par ces seuls motifs non critiqués par le moyen, caractérisé une discrimination fondée sur l'âge ;

Attendu, ensuite, que l'employeur n'ayant pas soutenu devant les juges du fond que le changement de qualification constituerait un recrutement sur un autre avion au sens des dispositions de l'article L. 1133-2 du code du travail, le moyen, nouveau, mélangé de fait et de droit est irrecevable ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de limiter à la somme de 50 000 euros les dommages et intérêts alloués pour discrimination du fait de l'âge et de rejeter sa demande d'indemnité pour préjudice moral spécial et de carrière alors, selon le moyen :

1°/ que la réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue ; qu'en jugeant que les différents postes de préjudice dont M. X... sollicite la réparation trouvent leur origine dans un fait unique, à savoir, la perte de chance d'accéder au pilotage d'un A380, et des droits qui en découlent en ce qui concerne tant la rémunération, que les droits à la retraite, et le montant de l'indemnité de fin de carrière, - ce dont il résultait que la perte de chance devait être mesurée au regard de ces trois éléments-, et en limitant à la somme globale de 50 000 euros la réparation allouée, la cour d'appel, qui s'est abstenue de mesurer la réparation accordée à la chance perdue, a violé l'article 1147 du code civil ;

2°/ que le juge doit motiver sa décision ; qu'en jugeant que le préjudice certain de M. X... devait être réparé par l'allocation de la somme globale de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts sans préciser les éléments ayant permis de déterminer ce montant, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi ; qu'en jugeant que le préjudice certain de M. X... devait être réparé par l'allocation d'une somme globale et limitée de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts, la cour d'appel, qui n'a pas mesuré la réparation allouée à la chance perdue, a méconnu les exigences du droit à un procès équitable et a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

4°/ que dans ses conclusions d'appel délaissées, M. X... faisait valoir que depuis le mois de mars 2010, il avait dû engager une procédure pour faire valoir ses droits et que depuis cinq ans, la société Air France, qui avait persévéré dans sa position en confirmant sa volonté d'exclusion de la qualification de type Airbus A 380 du seul fait de son âge, lui faisait subir un préjudice moral distinct du fait de la discrimination en raison de l'âge ; qu'en jugeant que M. X... avait été victime de discrimination du fait de l'âge et en le déboutant de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral spécial et de carrière, sans avoir répondu sur ce point aux conclusions de M. X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu d'abord que, sous le couvert de griefs infondés de défaut de motifs, de violation de la loi et de l'article 6§1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine par les juges du fond de l'évaluation du montant du préjudice résultant, pour le salarié, en matière de rémunération, de droits à la retraite et d'indemnité de fin de carrière, de la perte d'une chance d'accéder au pilotage d'un A380 ;

Attendu ensuite que le moyen, sous le couvert d'un grief non fondé de violation de la loi, ne tend en sa quatrième branche qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine par la cour d'appel de l'existence du préjudice moral du salarié dont elle a estimé qu'il ne rapportait pas la preuve ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à voir dire et juger que la rupture de son contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à lui verser diverses sommes au titre de la rupture du contrat de travail et de dommages et intérêts spéciaux pour notification prématurée et fautive de la rupture de son contrat de travail et perte de chance d'un poste au sol alors, selon le moyen :

1°/ qu'il résulte de l'article L. 6521-4 du code des transports que le contrat de travail du navigant n'est pas rompu du seul fait que la limite d'âge est atteinte sauf s'il est impossible à l'employeur de lui proposer un reclassement dans un emploi au sol et que la rupture du contrat ne peut pas intervenir avant les 65 ans du pilote ; que M. X... faisait valoir dans ses conclusions d'appel que la date anniversaire de ses soixante cinq ans était le 1er juin 2015 et que la société Air France ne pouvait pas notifier la rupture de son contrat de travail avant cette date sans méconnaître son obligation de rechercher un poste au sol en application de l'article L. 6521-4 du code des transports et notifier ainsi prématurément la rupture du contrat ; qu'en relevant que la société Air France avait notifié à M. X... la rupture de son contrat de travail dès le 5 mars 2015 et en affirmant que « la Sa Air France a respecté son obligation de reclassement en faisant à Jean-Michel X... une proposition écrite et précise de reclassement, qu'elle n'est pas tenue d'organiser préalablement à cette proposition un entretien préalable, et que l'intéressé, qui était parfaitement informé de ce qu'il devrait impérativement cesser ses activités de commandement de bord le 1er juin 2015, était en mesure, dans le délai de treize jours qui lui était imparti, d'apprécier tout à la fois le sérieux de l'offre qui lui était faite et les conditions d'exécution des fonctions présentées, lui-même, au cours de sa carrière ayant nécessairement dû effectuer des stages de même nature que ceux dont il aurait eu la charge », la cour d'appel a violé l'article L. 6521-4 du code des transports ;

2°/ que les recherches de reclassement doivent être préalables au licenciement ; qu'en considérant qu'Air France avait respecté son obligation de reclassement parce qu'elle avait postérieurement à la rupture du contrat de travail, fait une nouvelle proposition de reclassement à M. X..., la cour d'appel a violé l'article L. 6521-4 du code des transports ;

3°/ que dans ses conclusions d'appel délaissées, M. X... faisait valoir que la société Air France n'avait pas organisé l'entretien approfondi prévu par la convention PNT de mai 2006 et notamment son article 1-2-2 qui dispose qu'il doit être procédé à un entretien approfondi «avec le salarié en présence d'un délégué du personnel navigant technique en vue de réunir toutes les informations utiles sur ses aptitudes, son expérience, ses aspirations et, par conséquent, ses possibilités d'orientation et d'emploi au sol ainsi que sur les actions de formation à prévoir dans son cas. L'ensemble des informations ainsi recueillies est communiqué aux organisations syndicales concernées du Personnel Navigant Technique et du Personnel Sol 15 jours au moins avant la réunion de la Commission tripartite prévue à l'article suivant » ; qu'en affirmant que la société Air France n'était pas tenue d'organiser préalablement à la proposition un entretien préalable, sans avoir répondu à ce chef pertinent de conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 6521-4 alinéa 5 du code des transports que le contrat de travail du navigant n'est pas rompu du seul fait d'une demande de reclassement, du fait que la limite d'âge est atteinte, sauf s'il est impossible à l'employeur de lui proposer un reclassement dans un emploi au sol ou si l'intéressé refuse d'accepter l'emploi qui lui est proposé ;

Et attendu que la cour d'appel, qui a rappelé que le salarié devait cesser ses activités de commandement de bord le 1er juin 2015, jour de ses soixante-cinq ans, et retenu que l'employeur lui avait fait une proposition écrite et précise de reclassement, qu'il n'avait pas acceptée, qui ne nécessitait pas l'organisation préalable d'un entretien préalable, a par ces seuls motifs légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, qui critique un motif surabondant en sa deuxième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le troisième moyen du pourvoi principal du salarié :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen ci-après annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens afférents à son pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité à la somme de 50.000 euros les dommages et intérêts alloués à M. Jean-Michel X... pour discrimination du fait de l'âge et rejeté la demande d'indemnité pour préjudice moral spécial et de carrière ;

AUX MOTIFS QU'en l'espèce Jean-Michel X... invoque les faits suivants : - il réunissait les trois conditions posées par l'article L.2-4 du chapitre 1 de la convention d'entreprise du personnel navigant technique d'Air France-Cepnt, séniorité, amortissement de la dernière qualification de type avion, nombre de saisons lata, pour prétendre au bénéfice d'un changement de type avion et à une mise sur stage sur l'A380, - depuis la loi du 17 décembre 2008, il pouvait travailler jusqu'à 65 ans et donc, contrairement à ce que prétend la Sa Air France qui soutient que sa candidature ne pouvait pas être retenue au motif qu'il convient de retenir l'âge butoir de 60 ans pour le calcul des saisons Iata, prétendre à une qualification de type avion comme pouvant légalement travailler pendant 12 saisons Iata (i.e de la saison été 2009 jusqu'à la saison hiver 2014/2015),- l'exclusion pour le calcul des saisons Iata potentielles d'activité de navigant, les cinq dernières années potentielles d'activité, soit 10 saisons, au prétexte que le navigant sera âgé de 60 à 65 ans, et le refus d'accès à une qualification de type avion, au motif qu'il ne peut justifier du nombre de saisons demandées en incluant en tout ou partie cette période, sont constitutifs d'une discrimination à raison de l'âge ; que pour étayer ses affirmations, Jean-Michel X... se prévaut de : - l'article 2-4-3-2 du chapitre 1 de la Cepnt intitulé «durée minimale d'affectation sur un type avion» qui précise qu'un officier navigant peut prétendre à une qualification de type avions tant que sa durée d'affectation sur le type avions souhaitée avant son départ à la retraite est supérieure ou égale à la durée minimale d'affectation... », - la loi du 17 décembre 2008 prévoyant sous certaines conditions la possibilité pour les navigants de poursuivre leur activité au-delà de 60 ans, - l'article L.421-9 du code l'aéronautique civile qui prévoit un seul âge butoir 65 ans, sans opérer de distinction selon lui entre un âge « collectif » et un âge « individuel » comme le fait la Sa Air France ; qu'il souligne le fait qu'un navigant indique à la compagnie qu'il justifie du nombre exigé de saisons, au sens de l'article 2-4 du Cepnt, il ne peut s'agir que de saisons potentielles ; que Jean-Michel X... établit ainsi l'existence matérielle de faits pouvant laisser présumer l'existence de discrimination à son encontre ; qu'il n'est en outre pas contesté que le règlement international JAR FCL qui permet aux pilotes de voler jusqu'à l'âge de 65 ans révolus, est applicable en l'espèce ; que force est de constater à cet égard que la société Air France n'apporte aucun élément faisant apparaître que le refus opposé à Jean-Michel X... était justifié par un objectif légitime ; que de plus, l'article 2.4.3.2 de la convention d'entreprise du personnel navigant technique ne fixe pas l'âge précis au-delà duquel il est interdit à un navigant de prétendre à une qualification sur un type d'avion, mais se borne à préciser que celui-ci doit satisfaire avant son départ en retraite à une durée minimale d'affectation sur un type d'avion ; qu'au sens de cette disposition claire et non équivoque, il y a lieu de prendre en considération, pour chaque navigant un âge individualisé de départ en retraite, pouvant, conformément au paragraphe deux de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile, aller jusqu'à 65 ans, et non un âge théorique de départ en retraite à 60 ans, mentionné au paragraphe un de cet article ; que toute autre interprétation rendrait ces dispositions conventionnelles moins favorables que la législation nationale et la réglementation internationale ci-dessus rappelées ; qu'il résulte de ce qui précède que la société Air France a violé l'article L. 1132-1 du code du travail en écartant Jean-Michel X... d'un stage de qualification sur Airbus A380 alors même que des dispositions légales lui permettaient de poursuivre son activité jusqu'à l'âge de 65 ans et qu'elle a violé l'article L.1132-1 du code du travail en ne retenant que son âge comme motif de refus ; que la discrimination est établie ; que compte tenu des circonstances de la discrimination subie, de sa durée et des conséquences dommageables il en est résulté pour Jean-Michel X..., ainsi que cela ressort des pièces et des explications fournies, un préjudice de carrière qui s'analyse comme une perte de chance ; que les différents postes de préjudice dont Jean-Michel X... sollicite la réparation trouvent leur origine dans un fait unique, à savoir, la perte de chance d'accéder au pilotage d'un A380, et des droits qui en découlent en ce qui concerne tant la rémunération, que les droits à la retraite, et le montant de l'indemnité de fin de carrière ; qu'il en résulte pour Jean-Michel X... un préjudice certain qui doit être réparé par l'allocation de la somme globale de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts ; que faute pour lui de rapporter la preuve du préjudice moral qu'il invoque, il sera débouté de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice ;

1°) ALORS QUE la réparation d'une perte de chance doit être mesurée à la chance perdue ; qu'en jugeant que les différents postes de préjudice dont M. X... sollicite la réparation trouvent leur origine dans un fait unique, à savoir, la perte de chance d'accéder au pilotage d'un A380, et des droits qui en découlent en ce qui concerne tant la rémunération, que les droits à la retraite, et le montant de l'indemnité de fin de carrière, - ce dont il résultait que la perte de chance devait être mesurée au regard de ces trois éléments-, et en limitant à la somme globale de 50.000 euros la réparation allouée, la cour d'appel, qui s'est abstenue de mesurer la réparation accordée à la chance perdue, a violé l'article 1147 du code civil ;

2°) ALORS QUE le juge doit motiver sa décision ; qu'en jugeant que le préjudice certain de M. X... devait être réparé par l'allocation de la somme globale de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts sans préciser les éléments ayant permis de déterminer ce montant, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi ; qu'en jugeant que le préjudice certain de M. X... devait être réparé par l'allocation d'une somme globale et limitée de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts, la cour d'appel, qui n'a pas mesuré la réparation allouée à la chance perdue, a méconnu les exigences du droit à un procès équitable et a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

4°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel délaissées (cf. p. 22), M. X... faisait valoir que depuis le mois de mars 2010, il avait dû engager une procédure pour faire valoir ses droits et que depuis cinq ans, la société Air France, qui avait persévéré dans sa position en confirmant sa volonté d'exclusion de la qualification de type Airbus A 380 du seul fait de son âge (pièces 12 et 13), lui faisait subir un préjudice moral distinct du fait de la discrimination en raison de l'âge ; qu'en jugeant que M. X... avait été victime de discrimination du fait de l'âge et en le déboutant de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral spécial et de carrière, sans avoir répondu sur ce point aux conclusions de M. X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de M. X... tendant à voir dire et juger que la rupture de son contrat de travail s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir la condamnation de la Sa Air France à lui verser les sommes de 65.800 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, 192.396 euros à titre d'indemnité de licenciement, 360.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et 47.720 euros à titre de dommages et intérêts spéciaux pour notification prématurée et fautive de la rupture de son contrat de travail et perte de chance d'un poste au sol ;

AUX MOTIFS QUE le 6 février 2015, la Sa Air France a adressé à Jean-Michel X... la lettre recommandée suivante : « Le 1er juin prochain, vous atteindrez l'âge de 65 ans, et ne pourrez plus continuer à exercer votre métier de pilote dans le transport aérien public. En application de l'article L.6521-4 du code des transports, vous proposons un reclassement sur le poste de SFI, niveau de poste : N1.2, localisation Roissy, horaires : poste à plein temps, rémunération brute annuelle pour une activité plein temps : 47 741,17 euros ; que les dispositions de la convention d'entreprise du personnel au sol ainsi que la convention collective du transport aérien personnel au sol seront applicables à compter de la date de votre prise de fonction effective. Vous trouverez ci joint le descriptif du poste proposé. Nous vous remercions de bien vouloir nous confirmer, au plus tard le 19 février 2015, l'acceptation ou le refus de cette proposition de reclassement. A défaut de réponse écrite de votre part dans le délai imparti, ou dans le cas où vous refuseriez le poste proposé, nous serons contraints d'envisager la rupture de votre contrat de travail » ; que la mission générale du poste proposé de SFI (Synthetic Flight Instructor) est ainsi résumée dans le descriptif joint à cette lettre : « Dans le cadre du plan d'instruction défini par la direction de la formation du personnel navigant, le SF1 est un cadre sol avec expérience de pilote qui conçoit et dispense des stages d'instruction en vol simulé en vue de la délivrance de QT (qualification de type) ou de formation MCC (Multi Crew Course) à des pilotes d'Air fiance ou clients extérieurs (compagnie aérienne ou individuel) » ; que le 9 février 2015, Jean-Michel X... a répondu en ces termes : « Vous mentionnez dans le courrier ci-dessus référencé la date du 19 février 2015, comme échéance limite «au plus tard» d'acceptation ou refus de votre proposition de reclassement dans un emploi au sol. Outre le fait que je sois actuellement programmé en élaboration de planning le 02/03/2015 pour un «entretien FCS» au cours duquel il ne fait aucun doute que mon interlocuteur ne manquera pas de me fournir de nécessaires et précieux renseignements complémentaires quant à mes options de reclassement au sol ...Il m'apparaît par ailleurs quelque peu prématuré et limitatif de devoir arrêter ma décision au plus tard le 19 février 2015 alors qu'il ne fait aucun doute que vous aurez à coeur de poursuivre votre recherche d'emploi au sol au sein du groupe Air France-Kim tout entier bien après cette date et cela jusqu'au dernier jour de personnel navigant au sein de la compagnie Air France. Je compte donc sur votre persévérance et votre compréhension jusqu'à ce terme quant à la finalité de ma décision de poursuivre ou non au sol une carrière de trente-trois ans en vol.. » ; qu'en réponse, la Sa Air France lui a écrit le 12 février 2015 : « Nous accusons réception de votre courrier du 09 février 2015. Nous vous confirmons qu'il convient de vous positionner avant le 19 février prochain sur ce poste de SFI. Nous continuerons nos recherches de reclassement et le cas échéant ne manquerons pas de vous proposer tout poste qui deviendrait disponible » ; qu'enfin le 19 février 2015, la Sa Air France faute pour lui d'avoir confirmé par écrit son souhait d'être reclassé au sol sur le poste de SFI, la Sa Air France, la rupture de son contrat de travail étant envisagée, a convoqué Jean-Michel X... à un entretien préalable fixé au 2 mars suivant, puis, par lettre recommandée du 5 mars 2015, lui a notifié la rupture de son contrat de travail sur le fondement de l'article L. 6521-4 du code des transports ; que Jean-Michel X... estime que cette rupture doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse au motif que : - l'article L. 6521-4 implique l'obligation pour l'employeur de rechercher loyalement, activement et sérieusement toutes les alternatives à la rupture du contrat de travail, préalablement à la notification de la rupture, - l'obligation de l'employeur de rechercher un poste au sol au titre du reclassement s'il doit commencer en amont, doit aussi perdurer jusqu'aux 65 ans, - Air France n'a engagé aucune réflexion en amont sur une formation ou une adaptation pour un poste au sol, en vue d'un reclassement, notamment dans le cadre de sa gestion prévisionnelle des emplois qu'elle est la seule à maîtriser, - Air France n'a pas organisé l'entretien approfondi prévu par la Cepnt de mai 2006, - ses lettres démontrent l'absence de volonté sérieuse de le reclasser et l'inexécution de ses obligations ; que force est de constater que la Sa Air France a respecté son obligation de reclassement en faisant à Jean-Michel X... une proposition écrite et précise de reclassement, qu'elle n'est pas tenue d'organiser préalablement à cette proposition un entretien préalable, et que l'intéressé, qui était parfaitement informé de ce qu'il devrait impérativement cesser ses activités de commandant de bord le 1er juin 2015, était en mesure, dans le délai de treize jours qui lui était imparti, d'apprécier tout à la fois le sérieux de l'offre qui lui était faite et les conditions d'exécution des fonctions présentées, lui-même, au cours de sa carrière ayant nécessairement dû effectuer des stages de même nature que ceux dont il aurait eu la charge ; qu'il y a lieu de relever de plus que la Sa Air France justifie avoir, postérieurement, poursuivi ses recherches de reclassement comme elle l'indiquait dans sa lettre du 12 février 2015, et avoir fait à Jean-Michel X... une nouvelle proposition de reclassement, qu'il n'a pas acceptée, sur un poste à temps plein de «cadre expert Pôle technique», niveau N1.2, situé à Roissy, moyennant une rémunération brute annuelle de 47.741,17 € ; qu'il convient par conséquent de le débouter de sa demande tendant à voir dire que la rupture de son contrat de travail doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de toutes ses demandes subséquentes ;

1°) ALORS QU'il résulte de l'article L. 6521-4 du code des transports que le contrat de travail du navigant n'est pas rompu du seul fait que la limite d'âge est atteinte sauf s'il est impossible à l'employeur de lui proposer un reclassement dans un emploi au sol et que la rupture du contrat ne peut pas intervenir avant les 65 ans du pilote ; que M. X... faisait valoir dans ses conclusions d'appel (cf. p. 24 à 31) que la date anniversaire de ses soixante cinq ans était le 1er juin 2015 et que la société Air France ne pouvait pas notifier la rupture de son contrat de travail avant cette date sans méconnaître son obligation de rechercher un poste au sol en application de l'article L. 6521-4 du code des transports et notifier ainsi prématurément la rupture du contrat ; qu'en relevant que la société Air France avait notifié à M. X... la rupture de son contrat de travail dès le 5 mars 2015 et en affirmant que « la Sa Air France a respecté son obligation de reclassement en faisant à Jean-Michel X... une proposition écrite et précise de reclassement, qu'elle n'est pas tenue d'organiser préalablement à cette proposition un entretien préalable, et que l'intéressé, qui était parfaitement informé de ce qu'il devrait impérativement cesser ses activités de commandement de bord le 1er juin 2015, était en mesure, dans le délai de treize jours qui lui était imparti, d'apprécier tout à la fois le sérieux de l'offre qui lui était faite et les conditions d'exécution des fonctions présentées, lui-même, au cours de sa carrière ayant nécessairement dû effectuer des stages de même nature que ceux dont il aurait eu la charge », la cour d'appel a violé l'article L.6521-4 du code des transports ;

2°) ALORS QUE les recherches de reclassement doivent être préalables au licenciement ; qu'en considérant qu'Air France avait respecté son obligation de reclassement parce qu'elle avait postérieurement à la rupture du contrat de travail, fait une nouvelle proposition de reclassement à M. X..., la cour d'appel a violé l'article L. 6521-4 du code des transports ;

3°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel délaissées (cf. p 28 et 29), M. X... faisait valoir que la société Air France n'avait pas organisé l'entretien approfondi prévu par la convention PNT de mai 2006 et notamment son article 1-2-2 qui dispose qu'il doit être procédé à un entretien approfondi « avec le salarié en présence d'un délégué du personnel navigant technique en vue de réunir toutes les informations utiles sur ses aptitudes, son expérience, ses aspirations et, par conséquent, ses possibilités d'orientation et d'emploi au sol ainsi que sur les actions de formation à prévoir dans son cas. L'ensemble des informations ainsi recueillies est communiqué aux organisations syndicales concernées du Personnel Navigant Technique et du Personnel Sol 15 jours au moins avant la réunion de la Commission tripartite prévue à l'article suivant » ; qu'en affirmant que la société Air France n'était pas tenue d'organiser préalablement à la proposition un entretien préalable, sans avoir répondu à ce chef pertinent de conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de M. X... tendant à obtenir la condamnation de la Sa Air France à lui verser la somme de 3.835,92 à titre de reliquat de congés payés ;

AUX MOTIFS QUE Jean-Michel X... fait valoir qu'il a opté pour le régime B des congés payés, soit 48 jours calendaires de congés payés par an, option prévue par le chapitre V de la convention d'entreprise du personnel navigant technique du 5 mai 2006 en son point 2 intitulé «droit à congés» et que la Sa Air France ne respecte pas cette disposition en ne lui attribuant qu'un droit de 45 jours ; qu'il conteste le moyen développé par la Sa Air France qui soutient que l'accord « pilote transform 2015 » a annulé le point 2 de la Cepnt et que cette disposition n'est plus applicable ; que le préambule de la Cepnt précise expressément que les accords d'établissement qui viendraient à être conclus ne peuvent contenir de dispositions inférieures par rapport aux conventions d'entreprise, ne prévoit pas une telle exclusion les accords d'entreprises ; qu'il est prévu par ailleurs que les dispositions de la convention d'entreprise dont la révision est demandée resteront en vigueur jusqu'à la conclusion d'un avenant ; que l'accord « accord pilote Transform 2015» en ce qu'il s'applique à tous les pilotes de la société Air France est un accord d'entreprise et non pas un accord d'établissement ; qu'il est mentionné :- à l'article 4 de l'accord : « En parallèle de la diminution du nombre de jours de congés des chefs pilotes dans le cadre du projet proxima et des mesures transverses dans l'entreprise sur la limitation des majorations de congés basse saison pour les pilotes le quota du régime B est en conséquence ramené à 45 jours. Le régime A n'est pas modifié », - à l'article 1 de l'annexe 3 « congés » de cet accord : « L'article 2 «droit à congés» de l'annexe 5.2 de l'accord collectif PNT 2003-2005 est annulé et remplacé par l'article ci-dessous : L'officier navigant a le choix entre deux régimes de congés...Régime B: 45 jours de congés sur les deux saisons Eté et Hiver avec 26 jours ou moins sur la saison «Eté»... » ; que la Sa Air France fait observer à juste titre que les dispositions de la Cepnt du 5 mai 2006 sont les mêmes que celles de la Cepnt 2003-2005 et que l'observatoire de la transformation pilote a lors de sa réunion du 8 juillet 2013 confirmé au terme d'un relevé de décisions que « le paragraphe 4 du chapitre 4 de l'accord Pilote Transform 2015 s'applique en totalité… » ; qu'il résulte donc de l'ensemble de ces textes que Jean-Michel X... qui a opté pour le régime B est mal fondé à revendiquer un reliquat de congés sur la base de 48 jours au titre des années 2013 à 2105, les dispositions de l'accord Transform 2015 prévoyant expressément une diminution du nombre de jours de congés des pilotes à 45 jours ;

ALORS QUE dans ses conclusions d'appel délaissées (cf. p. 36, production), M. X... faisait valoir que le point 1 de l'accord « pilotetransform 2015» cité par Air France ne visait pas la modification de la convention d'entreprise du personnel navigant technique (PNT) du 5 mai 2006, mais un autre accord : «l'accord collectif PNT 2003-2005» ; qu'en jugeant que l'accord « pilote transform 2015 » s'appliquait à tous les pilotes de la société, sans avoir répondu à ce chef pertinent de conclusions, la cour d‘appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Moyen produit au pourvoi incident par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Air France

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;

D'AVOIR condamné la société Air France à verser au salarié la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination ;

AUX MOTIFS QU' « aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article 1er de la loinº 2008-496 du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L.3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou à raison de son état de santé ou de son handicap. L'article L. 1134-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige relatif à l'application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence de discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article 1er de la loinº 2008-96 du 27 mai 2008, au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que sa décision est motivée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forge sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. En l'espèce Jean-Michel X... invoque les faits suivants : - il réunissait les trois conditions posées par l'article L.2-4 du chapitre I de la convention d'entreprise du personnel navigant technique d'Air France-Cepnr, séniorité, amortissement de la dernière qualification de type avion, nombre de saisons lata, pour prétendre au bénéfice d'un changement de type avion et à une mise sur stage sur l' A380, - depuis la loi du 17 décembre 2008, il pouvait travailler jusqu'à 65 ans et donc, contrairement à ce que prétend la Sa Air France qui soutient que sa candidature ne pouvait pas être retenue au motif qu'il convient de retenir l'âge butoir de 60 ans pour le calcul des saisons lata, prétendre à une qualification de type avion comme pouvant légalement travailler pendant 12 saisons lata (i.e de la saison été 2009 jusqu'à la saison hiver 2014/2015), - l'exclusion pour le calcul des saisons lata potentielles d'activité de navigant, les cinq dernières années potentielles d'activité, soit 10 saisons, au prétexte que le navigant sera âgé de 60 à 65 ans, et le refus d'accès à une qualification de type avion, au motif qu'il ne peut justifier du nombre de saisons demandées en incluant en tout ou partie cette période, sont constitutifs d'une discrimination à raison de l'âge. Pour étayer ses affirmations, Jean-Michel X... se prévaut de : - l'article 2-4-3-2 du chapitre l de la Cepnt intitulé «durée minimale d'affectation sur un type avion» qui précise qu'un "officier navigant peut prétendre à une qualification de type avions tant que sa durée d'affectation sur le type avions souhaitée avant son départ à la retraite est supérieure ou égale à la durée minimale d'affectation ... ", - la loi du 17 décembre 2008 prévoyant sous certaines conditions la possibilité pour les navigants de poursuivre leur activité au-delà de 60 ans ; - l'article L.421-9 du code l'aéronautique civile qui prévoit un seul âge butoir 65 ans, sans opérer de distinction selon lui entre un âge "collectif' et un âge "individuel" comme le fait la Sa Air France. Il souligne le fait qu'un navigant indique à la compagnie qu'il justifie du nombre exigé de saisons, au sens de l'article 2-4 du Cepnt, il ne peut s'agir que de saisons potentielles. Jean-Michel X... établit ainsi l'existence matérielle de faits pouvant laisser présumer l'existence de discrimination à son encontre. La Sa Air France fait valoir que Jean-Michel X... ne remplissait pas les conditions exigées pour bénéficier d'un stage de qualification sur Airbus A380 dès lors que la durée minimale d'affectation sur un type avion, selon l'article 2.4.2 de la Cepnt est fonction du nombre de qualifications précédemment effectuées, que Jean-Michel X..., qui avait, depuis son embauche en date du 10 mai 1982, effectué six qualifications au sens de cet article, avait une durée d'affectation de douze saisons lata, qu'il ne pouvait y prétendre qu'à la condition que sa durée d'affectation sur cet avion d'ici son départ à Ia retraite au sens de conventionnel, soit supérieure ou égale à la durée minimale d'affectation conventionnellement due, soit douze saisons lata, que pour une mise en stage à la saison été 2009, la durée d'amortissement de Jean-Michel X... aurait expiré à l'issue de la saison hiver 2014-2015. Selon la Sa Air France, Jean-Michel X... qui a atteint l'âge de 60 ans le 1er juin 20 1 0, date depuis laquelle, par application de l'article L.421-9-1 du code de l'aviation civile, ne peut plus exercer, sauf demande de prolongation dans les termes de I'articleL.421-9 II du même code, son activité de Pnt, de sorte que sa durée d'affectation étant inférieure à sa durée minimale d'affectation due, ne lui permet pas de prétendre à la qualification qu'il revendiquait. Elle soutient que le fait que l'intéressé ait demandé, le janvier 2009, la prolongation de son activité en qualité de commandement de bord est inopérant en ce que le paragraphe II, issu de la loi du 17 décembre 2008, de l'article L.421-9 du code de l'aviation civile permet seulement au personnel navigant technique ayant atteint l'âge de 60 ans au-delà duquel il est possible d'exercer une activité de pilote et de copilote dans le transport aérien de poursuivre sur sa demande cette activité pendant une durée d'un an, soit jusqu'à l'âge de 61 ans, dans certaines conditions, cette demande pouvant être renouvelée dans les mêmes conditions les quatre années suivantes. Si l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile prévoit, en son paragraphe I, que le personnel navigant de l'aéronautique civile ne peut exercer aucune activité en qualité de pilote ou de copilote dans le transport aérien public au-delà de l'âge de 60 ans, il ajoute en son paragraphe II, que ce personnel est toutefois maintenu en activité au-delà de 60 ans pour une année supplémentaire, sur demande formulée au plus tard trois mois avant le 60ème anniversaire, uniquement dans le cas de vol en équipage avec plus d'un pilote, à la condition qu'un seul des pilotes soit âgé de plus de 60 ans et que cette demande puisse être renouvelée dans les mêmes conditions les quatre années suivantes. Dès lors cet article ne prévoit pas une limite d'âge à 60 ans entraînant pour les pilotes soit la fin de leur contrat de travail, soit leur reclassement dans d'autres activités, mais organise la possibilité d'une poursuite de leur activité professionnelle à leur seule initiative jusqu'à l'âge de 65 ans, toujours en qualité de pilote, en leur fixant des conditions d'exercice de leur activité afin d'assurer la sécurité publique, consistant dans la limitation aux vols en équipage avec plus d'un pilote, dont un seul âgé de plus de 60 ans. Par ailleurs la directive 2009/78/CE du conseil du 27 novembre 2010, portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi de travail, précise, en son article 1, que les états membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondé sur l'âge ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment de politique de I'emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens pour parvenir à la réalisation de cet objectif sont appropriés et nécessaires, les dispositions de cette directive ayant été codifiées en droit interne dans les articles L. 1133-1 et L. 1133-2 du code du travail. Il n'est en outre pas contesté que le règlement international JAR FCL qui permet aux pilotes de voler jusqu'à l'âge de 65 ans révolus, est applicable en l'espèce. Force est de constater à cet égard que la société Air France n'apporte aucun élément faisant apparaître que le refus opposé à Jean-Michel X... était justifié par un objectif légitime. De plus, l'article 2.4.3.2 de la convention d'entreprise du personnel navigant technique ne fixe pas l'âge précis au-delà duquel il est interdit à un navigant de prétendre à une qualification sur un type d'avion, mais se borne à préciser que celui-ci doit satisfaire avant son départ en retraite à une durée minimale d'affectation sur un type d'avion. Au sens de cette disposition claire et non équivoque, il y a lieu de prendre en considération, pour chaque navigant un âge individualisé de départ en retraite, pouvant, conformément au paragraphe deux de l'article L. 421-9 du code de l'aviation civile, aller jusqu'à 65 ans, et non un âge théorique de départ en retraite à 60 ans, mentionné au paragraphe un de cet article. Toute autre interprétation rendrait ces dispositions conventionnelles moins favorables que la législation nationale et la réglementation internationale ci-dessus rappelées. Il résulte de ce qui précède que la société Air France a violé l'article L.1132-1 du code du travail en écartant Jean-Michel X... d'un stage de qualification sur Airbus A380 alors même que des dispositions légales lui permettaient de poursuivre son activité jusqu'à l'âge de 65 ans et qu'elle a violé l'article L.1132-1 du code du travail en ne retenant que son âge comme motif de refus. La discrimination est établie. Compte tenu des circonstances de la discrimination subie, de sa durée et des conséquences dommageables il en est résulté pour Jean-Michel X..., ainsi que cela ressort des pièces et des explications fournies, un préjudice de carrière qui s'analyse comme une perte de chance. Les différents postes de préjudice dont Jean-Michel X... sollicite la réparation trouvent leur origine dans un fait unique, à savoir, la perte de chance d'accéder au pilotage d'un A380, et des droits qui en découlent en ce qui concerne tant la rémunération, que les droits à la retraite, et le montant de l'indemnité de fin de carrière. Il en résulte pour Jean-Michel X... un préjudice certain qui doit être réparé par l'allocation de la somme globale de 50 000 € à titre de dommages-intérêts. Faute pour lui de rapporter la preuve du préjudice moral qu'il invoque, il sera débouté de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral ».

ALORS QU'aux termes de l'article L.421-9 du code de l'aviation civile, tel qu'en vigueur au 1er janvier 2010, la limite d'âge pour exercer la fonction de pilote est de soixante ans; que la possibilité ouverte par le législateur de piloter jusqu'à l'âge de soixante-cinq ans ne résulte pas de la volonté de l'employeur mais seulement d'un choix individuel exprimé par le salarié qui doit être renouvelé chaque année sous réserve de strictes conditions à remplir notamment médicales; que l'article 2.4.3.2 de la convention d'entreprise du personnel navigant technique précise que le pilote pour changer de qualification sur un avion (pilotage d'un autre avion) doit satisfaire à une durée minimale d'affectation sur cet avion, déterminée en fonction de son cursus de carrière depuis son embauche; qu'il résulte de ces dispositions que la période éventuelle de poursuite de l'activité de pilote au-delà de soixante ans ne peut pas être prise en considération dans le calcul de la durée minimale d'affectation sur un avion en raison de son caractère aléatoire, étranger à la volonté de l'employeur, ce qui est exclusif de toute discrimination; que la cour d'appel qui a relevé que l'article L.421-9 du code de l'aviation civile applicable a organisé la possibilité d'une poursuite de l'activité de pilote à la seule initiative du salarié, selon des conditions strictes pour une année supplémentaire, renouvelable les quatre années suivantes et que la demande doit être formulée par le pilote au plus tard trois mois avant le soixantième anniversaire, aurait dû déduire de ses énonciations que le fait d'avoir écarté le salarié des stages de qualification sur Airbus A380 pour les saison IATA été/hiver 2009-2010, alors qu'il avait atteint l'âge de soixante ans le 1er juin 2010, n'était pas discriminatoire ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L.421-9 du code de l'aviation civile et l'article 2.4.3.2 de la convention d'entreprise du personnel navigant technique en vigueur.

ET ALORS QU'aux termes de l'article L.1133-2 du code du travail et de l'article 6 paragraphe 1 de la directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000, portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail, les différences de traitement fondées sur l'âge ne sont pas discriminatoires lorsqu'elles consistent en la fixation d'un âge maximum pour le recrutement fondé sur la formation requise pour le poste concerné ou la nécessité d'une période d'emploi raisonnable avant la retraite ; que le changement de qualification sur avion après une période de formation obligatoire et une durée minimale d'affectation sur cet avion permet de piloter un autre avion ; que ce changement de qualification constitue un recrutement sur un autre avion, en sorte que les dispositions de l'article L.1133-2 du code du travail qui autorisent la prise en compte d'un âge maximum pour le recrutement en raison de la durée de la formation ou d'une période raisonnable d'emploi avant la retraite a vocation à s'appliquer, en sorte que le fait d'écarter d'un stage de qualification sur avion un salarié qui atteint l'âge de soixante ans durant la période minimale d'affectation sur cet avion, ne constitue pas une mesure discriminatoire ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L.1133-2 du code du travail et l'article 6 paragraphe 1 de la directive n° 2000/78/CE du 27 novembre 2000.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-14822
Date de la décision : 26/10/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 janvier 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 oct. 2017, pourvoi n°16-14822


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.14822
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