CIV. 1
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 13 septembre 2017
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10536 F
Pourvoi n° R 16-20.111
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. François X..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 7 avril 2016 par la cour d'appel de Versailles (1re chambre, 1re section), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. Philippe Y..., domicilié [...] ,
2°/ à Mme Dominique Y..., domiciliée [...] ,
3°/ à M. Jean-Luc Z..., domicilié [...] , pris en qualité d'exécuteur testamentaire de Lucie E...,
4°/ à M. Geoffroy A..., domicilié [...] , pris en qualité d'administrateur provisoire de la succession de Lucie E..., veuve B...,
5°/ au Musée d'Orsay, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 27 juin 2017, où étaient présents : Mme Batut, président, M. C..., conseiller rapporteur, M. Matet, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de Me D..., avocat de M. X..., de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de M. et Mme Y... ;
Sur le rapport de M. C..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à M. X... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le Musée d'Orsay ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à M. et Mme Y... la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille dix-sept. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par Me D..., avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR révoqué les dispositions testamentaires stipulées au bénéfice de M. X... contenues dans le testament olographe du 3 mars 1998, les codicilles du 3 mars 1998 et le testament authentique du 12 décembre 2000 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les premiers juges ont retenu à juste titre que la condamnation de M. X... pour abus de faiblesse et vols au préjudice de Lucie E... est devenue définitive sur ses dispositions pénales le 3 décembre 2009 et dit qu'en conséquence l'action en révocation initiée à l'encontre de M. X... le 13 octobre 2009, soit dans l'année du jour où ils ont eu connaissance de la condamnation définitive du légataire, est recevable ; qu'il sera rappelé qu'aux termes de l'article 957 du code civil : La demande en révocation pour cause d'ingratitude devra être formée dans l'année, à compter du jour du délit imputé par le donateur au donataire ou du jour que le délit aura pu être connu par le donateur. Cette révocation ne pourra être demandée par le donateur contre les héritiers du donataire ni par les héritiers du donateur contre le donataire, à moins que dans ce dernier cas, l'action n'ait été intentée par le donateur ou qu'il soit décédé dans l'année du délit ; Que ces dispositions n'excluent cependant pas que lorsque le fait invoqué constitue une infraction pénale, le point du départ du délai préfix d'une année soit retardé au jour où la condamnation pénale établit la réalité de ce fait c'est à dire au jour où elle devient définitive ; que le retard du point de départ de ce délai est toutefois conditionné au fait que le délai d'un an ne soit pas expiré au jour de la mise en mouvement de l'action publique par le demandeur à la révocation ; qu'en l'espèce, la condamnation pénale de M. X... pour les délits d'abus de faiblesse et de vols au préjudice de Lucie E... est devenue irrévocable avec l'arrêt confirmatif de la cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 26 novembre 2008 qui n'a été frappé de pourvoi que sur les intérêts civils ; que si les délits d'abus de faiblesse s'étendent sur une période s'achevant en 2004, les délits de vols ont été retenus pour des faits ayant eu lieu courant 2004 et 2005 ; qu'il ressort des pièces produites que le gérant de tutelle de Lucie B... a été autorisé à se constituer partie civile dans la procédure pénale, ouverte en 2004, par ordonnance du juge des tutelles en date du 4 novembre 2004 ; qu'il avait précédemment dénoncé, par lettres du 7 octobre 2004 adressées tant au procureur de la République qu'au juge d'instruction, une suspicion de vol concernant M. X... ; qu'il s'est ensuite constitué partie civile avant même que l'ensemble des faits susceptibles d'être qualifiés de vols ne soit découvert ; M. X... n'est en conséquence pas fondé à soutenir que le délai d'un an était expiré au jour de la mise en mouvement de l'action publique par le demandeur à la révocation ; Que par ailleurs, Lucie E... est décédée le [...] moins d'un an après que la condamnation pénale de M. X... est devenue irrévocable ; que les consorts Y..., qui sont les héritiers de la victime, ont introduit leur action en octobre 2009 Que pour ces motifs et ceux pertinents des premiers juges, le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu que l'action en révocation était recevable ; Que c'est également par des motifs pertinents que la cour approuve que les premiers juges ont accueilli la demande de révocation tant du testament authentique du 12 décembre 2000 que des testament et codicilles du 3 mars 1998 en leurs stipulations au bénéfice de M. X..., au regard de la nature et de la gravité des délits d'abus de faiblesse et de vol dont celui-ci a été irrévocablement reconnu coupable ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il résulte de l'article 957 du code civil, rendu applicable en matière de testament par l'article 1046 du même code, que la demande en révocation pour cause d'ingratitude doit être formée dans l'année à compter du jour du délit imputé par le donateur au donataire ou du jour où le délit aura pu être connu par le donateur. Cette révocation ne pourra être demandée ni par le donateur contre les héritiers du donataire, ni par les héritiers du donateur contre le donataire, à moins que, dans ce dernier cas, l'action n'ait été intentée par le donateur ou qu'il ne soit décédé dans l'année du délit. Néanmoins, lorsque le disposant s'est trouvé dans l'incapacité d'agir avant son décès, l'action judiciaire en révocation d'un testament pour cause d'ingratitude peut être exercée par ses héritiers, dans l'année du jour où ils ont eu à la fois connaissance du délit imputé au légataire et du testament fait en faveur de celui-ci. Ce délai est un délai préfix de déchéance qui n'est susceptible ni d'interruption ni de suspension et court malgré la mise sous tutelle du testateur. En l'espèce Mme Dominique Y... et M. Philippe Y... prétendent, sans être utilement contredits, qu'ils n'ont eu connaissance de l'existence du testament authentique du 12 décembre 2000 qu'au jour du décès de Lucie B..., soit le [...] . Par ailleurs, la condamnation de M. François X... pour abus de faiblesse et vols est devenue définitive sur ses dispositions pénales le 3 décembre 2008, le pourvoi n'ayant porté que sur les dispositions civiles dudit arrêt. Dès lors, l'action en révocation initiée à l'encontre de M. François X... le 13 octobre 2009, soit dans l'année du jour où ils ont eu connaissance à la fois de la condamnation définitive du légataire et du testament en faveur de celui-ci, est recevable. L'article 955 du Code Civil dispose que la donation entre vifs ne pourra être révoquée pour cause d'ingratitude que si le donataire à attenté à la vie du donateur, que s'il s'est rendu coupable envers lui de sévices, délits ou injures graves ou s'il lui refuse des aliments. Il constant que M. François X... a été définitivement déclaré coupable d'abus de faiblesse et de vols commis entre 2001 et 2004, donc postérieurement à la rédaction du testament contesté, sur la personne de Lucie B... et condamné à une peine de 3 ans d'emprisonnement ferme ainsi qu'à réparer un préjudice s'élevant à plusieurs millions d'euros. La commission de ces délits graves, prévus et réprimés par les articles 223-15-2 alinéa l, 223-15-3, 311-1, 311-3, 311-14 du Code Pénal, justifient incontestablement la révocation du testament authentique du 12 décembre 2000, de sorte que la demande subsidiaire de Mme Dominique Y... et M. Philippe Y... doit être accueillie. S'agissant d'une action dirigée à l'encontre de M. François X... à titre personnel, la révocation du testament du 12 décembre 2000 ne porte que sur les droits consentis à ce dernier, de sorte que le Musée d'Orsay, bénéficiaire d'un legs particulier, soutient à bon droit que son legs demeure valable (
) l'action en révocation des libéralités consenties au bénéfice de M. François X... le 3 mars 1998 est recevable et fondée pour les mêmes motifs que ceux sus développés et doit être accueillie. ;
1°) - ALORS QUE l'action en révocation d'un testament pour ingratitude doit être intentée par le testateur ou son représentant dans un délai d'un an à compter du jour du délit imputé par le testateur au bénéficiaire, ou du jour que le délit a été connu ; qu'une procédure pénale ne permet de suspendre ce délai que s'il pas expiré au jour de la mise en mouvement de l'action publique par le demandeur à la révocation ; que la cour d'appel a constaté que l'action publique avait été mise en mouvement non par Lucie B... ou son représentant, mais par ses enfants ; qu'en estimant que le délai d'un an n'avait commencé à courir qu'à partir de l'arrêt correctionnel du 26 novembre 2008, la cour d'appel a violé les articles 955 et 957 du code civil ;
2°) – ALORS QU'en ne rechercha nt pas, comme elle y était invitée, si les délits reprochés à M. X... n'étaient pas connus au plus tard en 2005, de sorte que l'action engagée par les consorts Y... en 2009 était largement tardive, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 955 et 957 du code civil ;
3°) - ALORS QU'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si les consorts Y... n'avaient pas nécessairement été informés de l'existence du testament dès son établissement par Me Z..., avocat de Lucie B... et gérant de tutelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 955 et 957 du code civil.