La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/07/2017 | FRANCE | N°16-10.273

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte rnsm/na, 12 juillet 2017, 16-10.273


COMM.

CF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 juillet 2017




Rejet non spécialement motivé


Mme MOUILLARD, président



Décision n° 10312 F

Pourvoi n° X 16-10.273








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suiva

nte :

Vu le pourvoi formé par :

1°/ la société A..., société à responsabilité limitée, dont le siège est [...],

2°/ M. Jean X..., domicilié [...], agissant en qualité de liq...

COMM.

CF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 12 juillet 2017




Rejet non spécialement motivé


Mme MOUILLARD, président



Décision n° 10312 F

Pourvoi n° X 16-10.273








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par :

1°/ la société A..., société à responsabilité limitée, dont le siège est [...],

2°/ M. Jean X..., domicilié [...], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la SARL A...,

contre l'arrêt rendu le 5 novembre 2015 par la cour d'appel de [...] chambre A), dans le litige les opposant à la Caisse de crédit mutuel de Saint-Etienne-La Terrasse, dont le siège est [...],

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 30 mai 2017, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme B..., conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mme Y..., avocat général référendaire, M. Graveline, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société A... et de M. X..., ès qualités, de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la Caisse de crédit mutuel de Saint-Etienne-La Terrasse ;

Sur le rapport de Mme B..., conseiller référendaire, l'avis de Mme Y..., avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société A... et M. X..., ès qualités aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille dix-sept. MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour la société A... et M. X..., ès qualités.

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la SARL A... et la SELAS MJ-Lex, représentée par Me Z..., ès qualité de mandataire judiciaire de la SARL A..., de leurs demandes indemnitaires dirigées contre la Caisse de crédit mutuel de Saint-Etienne ;

Aux motifs que « il est constant que le compte ouvert par la société A... au Crédit mutuel a fait l'objet, le 4 novembre 2010, d'une mention de retrait de carte bancaire au fichier central des chèques de la Banque de France. Par ordonnance réputée contradictoire du 22 septembre 2011, le juge des référés du tribunal de grande instance de Saint-Etienne a jugé que l'inscription de la décision de retrait de carte bancaire et son maintien, n'apparaissaient pas réguliers car d'une part, l'information préalable à l'inscription, prévue par la convention sur le principe et les modalités de gestion du fichier central des retraits de cartes bancaires conclu le 1er avril 2010 entre le groupement des cartes bancaires et la Banque de France, n'avait pas été respectée, et d'autre part, en violation des dispositions de cette convention, le Crédit mutuel n'avait pas demandé l'annulation ou la radiation de l'inscription dans le délai de deux jours suivant le constat de la régularisation. Le juge des référés a ajouté que faute de comparution du Crédit mutuel portant à sa connaissance l'existence d'une contestation sérieuse qui s'opposerait à la mainlevée, il devait ordonner à ce dernier, de demander à la Banque de France de procéder à la radiation ou à l'annulation de la décision de retrait de carte bancaire, sous astreinte de 100 € par jour de retard, passé le délai de cinq jours à compter de la signification de son ordonnance. Le Crédit mutuel, n'a pas formé appel à rencontre de cette ordonnance et dans le cadre de la présente instance, il ne répond pas sur le moyen d'irrégularité de l'inscription et de son maintien à la date de la décision précitée, ne concluant que sur le retard dans l'exécution de la mainlevée de l'inscription ordonnée par le juge des référés. Il s'évince d'ailleurs de son exposé des faits (page 2 de ses conclusions) que la société A... a régularisé l'incident ayant donné lieu à l'inscription avant la saisine du juge des référés. Les parties conviennent que la mainlevée était effective le 22 février 2012. Le Crédit mutuel soutient avoir "opéré la levée du fichage le 30 septembre 2011" soit dans les trois jours de la notification de l'ordonnance le condamnant à y procéder et "qu'il semble que la Banque de France ait tardé à procéder à la radiation" demandée et ce, en raison du comportement de la société A... qui dans une assignation du 16 novembre 2011 se prévalait d'une inscription au FCIP (dont elle semble avoir fait l'objet pour autre cause) et non d'une inscription au fichier central des chèques, qui n'a pas apporté de réponse à son courrier du 23 novembre 2011 et qui n'a communiqué la consultation mettant en évidence le défaut de radiation que le 9 janvier 2012. Le Crédit mutuel produit un document mentionnant la clôture de l'incident par la banque elle-même le 30 septembre 2011, mais il ne justifie d'aucune demande de radiation ou annulation de l'inscription transmise à la Banque de France. En tout état de cause, le Crédit mutuel ne s'est pas inquiété des suites données à sa prétendue demande, alors qu'aux termes de la convention du 1er avril 2010 précitée, il devait informer sans délai par écrit la société A... de la radiation ou annulation de l'inscription. D'autre part, contrairement à ce qu'il avance, l'assignation du 16 novembre 2011 en liquidation d'astreinte ne fait pas état d'une inscription de la société A... au FCIP (fichier central des incidents de paiement). En conséquence, le Crédit mutuel a commis une faute en inscrivant irrégulièrement la décision de retrait de carte bancaire sur le fichier central de chèques de la Banque de France, en la maintenant pendant des mois malgré la régularisation antérieure à l'assignation en référé et encore pendant une période de près de cinq mois, après sa condamnation en référé. Il appartient à la société A... d'établir que ces faits fautifs lui ont causé le préjudice dont elle demande réparation et donc que son activité a été paralysée, comme elle le prétend, car elle n'a pu obtenir, en raison de l'inscription litigieuse, de prêts lui permettant de financer des achats immobiliers. Elle produit une attestation du Crédit Agricole en date du 18 novembre 2011 l'informant qu'après étude approfondie de sa demande, il ne pouvait lui accorder le prêt d'un montant de 37 440 € qu'elle avait sollicité. L'étude approfondie de la demande de prêt par le crédit agricole n'a pu se réduire à la seule consultation des fichiers de la banque de France, l'octroi d'un prêt résultant de l'appréciation, par l'établissement auquel le prêt est demandé, des informations qu'il sollicite sur la situation de l'emprunteur et sur l'opération devant être financée. Or, la société A... ne fournit aucun élément relatif aux pièces transmises au Crédit Agricole, au soutien de sa demande de prêt, sur sa situation et sur l'opération devant être financée. A ce sujet, la société A... indique qu'elle ne peut produire de compromis de vente car elle achetait sur le marché des adjudications et elle ne pouvait demander le prêt permettant de financer un achat, qu'après s'être portée adjudicataire, aucune banque n'analysant un dossier sans preuve d'achat. Pour autant, elle ne produit pas la preuve de l'achat du bien pour le financement duquel elle demandait le prêt et elle ne donne aucune précision sur le sort de cette acquisition. En l'absence de tout élément sur le dossier remis au Crédit Agricole, il ne peut être présumé que le seul motif du refus d'octroi du prêt est l'inscription litigieuse, comme l'affirment les appelantes, ni que ce motif est une mauvaise gestion financière de la société A..., comme le prétend le Crédit mutuel, ce qui rend inutile le débat instauré par les parties sur ce point. D'autre part, le fait, que le 26 juin 2012, le Crédit Agricole ait accordé à la société A... un prêt de 100 000 € ne prouve pas l'existence d'un lien de causalité entre l'inscription litigieuse et le refus opposé quelques mois auparavant alors que le dossier ayant permis l'octroi de ce prêt n'est pas produit et que si la société A... affirme que la levée de l'inscription est le seul élément nouveau intervenu entre les deux demandes, elle ne le prouve pas. Hormis le refus du prêt demandé au Crédit Agricole en novembre 2011, la société A... ne justifie d'aucun autre refus de prêt sur la période du 4 novembre 2010 au 22 février 2012. Sans justifier avoir sollicité des prêts qui lui ont été refusés, la société A... ne démontre pas l'arrêt de l'activité imputable aux fautes du Crédit mutuel et cette preuve ne peut résulter de son affirmation selon laquelle elle s'est abstenue de solliciter des financements car elle savait qu'ils lui seraient refusés. Par ailleurs, la société A... produit une lettre du 18 novembre 2011 par laquelle le Crédit Agricole l'informe qu'il ne donne pas de suite favorable à sa demande d'ouverture de compte bancaire ainsi qu'une lettre de la société American Express en date du 27 octobre 2011 lui indiquant que les informations fournies par la banque de France ne lui permettaient pas de lui octroyer la carte Business Gold qu'elle avait sollicitée. En ce qui concerne le refus d'ouverture de compte bancaire par le Crédit Agricole, pour lequel aucun motif n'est avancé, il ne peut être présumé que ce motif est l'inscription de la décision de retrait de carte bancaire au fichier des chèques de la Banque de France. D'autre part, la société A... ne démontre pas comment l'absence d'ouverture d'un nouveau compte et d'octroi d'une carte bancaire ont pu bloquer son activité alors qu'elle n'a pas sollicité de prêt dans l'année précédant les demandes qu'elle invoque, et qu'elle a attendu le 3 juillet 2011, soit huit mois, pour saisir le juge des référés aux fins de radiation ou annulation de l'inscription. Par ailleurs, il résulte des comptes de résultat de l'année 2010 que la société A... n'avait plus de stock au 31 décembre 2010 et qu'en 2011, elle n'a réalisé qu'une seule opération : l'achat, le 14 octobre 2011, aux enchères publiques d'un bien au prix de 25 100 € financé, précise-t-elle, par les deniers personnels de son gérant. Aucune preuve d'une autre adjudication suivie d'une demande de prêt n'est produite ni même d'un intérêt porté à l'acquisition d'un bien. Et il n'est pas démontré que la seule demande de prêt en novembre 2011 faisait suite à une adjudication qui lui avait été attribuée. En l'état de ces éléments, la société A... ne démontre pas que son absence d'activité en 2011 et une grande partie de l'année 2012, malgré une mainlevée de l'inscription litigieuse en début d'année, résulte de cette inscription. En conséquence, la société A... ne prouve pas que les fautes commises par le Crédit mutuel lui ont causé le préjudice dont elle demande réparation et qui repose sur un calcul de perte de marge brute, en 2011 et 2012, extrapolée à partir du chiffre d'affaires réalisé avant 2011 par la société A... » ;

Alors, d'une part, que le préjudice causé par la perte d'une chance, même faible, est réparable chaque fois que peut être constatée la disparition de la probabilité d'un événement favorable; que pour débouter la société A... de sa demande tendant à réparation d'un préjudice qui, selon ses propres énonciations, consistait dans la perte de chance de contracter les prêts nécessaires à l'exercice de son activité entre le 10 avril 2009, date de la déclaration irrégulière dont elle avait fait l'objet sur le fichier central des chèques, et le 22 février 2012, date du retrait de cette inscription, la cour d'appel s'est bornée à retenir qu'en l'absence de tout élément sur le dossier remis au Crédit agricole, il ne pouvait être présumé que « le seul motif » du refus d'octroi du prêt sollicité était l'inscription irrégulière de la société A...; qu'en se déterminant de la sorte, sans rechercher si, quand bien même elle n'était pas la cause exclusive du refus du prêt sollicité par la société A... auprès du Crédit agricole, son inscription, maintenue irrégulièrement au fichier central des chèques, ne l'avait pas privée d'une chance certaine de l'obtenir, la cour d'appel, qui s'est fondée sur des motifs impropres à démontrer l'absence de probabilité que ce prêt ait été accordé sans les fautes du Crédit mutuel, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil ;

Alors, d'autre part, que le préjudice causé par la perte d'une chance, même faible, est réparable chaque fois que peut être constatée la disparition de la probabilité d'un événement favorable; qu'en se bornant à retenir, pour la débouter de sa demande d'indemnisation d'une perte de chance, que la société A... n'établissait pas « comment l'absence d'ouverture d'un nouveau compte et d'octroi d'une carte bancaire » avaient « pu bloquer son activité » alors qu'elle n'avait « pas sollicité de prêt dans l'année précédant les demandes qu'elle invoque » et avait « attendu le 3 juillet 2011, soit huit mois, pour saisir le juge des référés aux fins de radiation ou annulation de l'inscription », sans rechercher si, dans la mesure où elle avait affecté ses capacité d'endettement, l'inscription prise et maintenue irrégulièrement par le Crédit mutuel n'avait pas privé la société A... d'une chance d'ouvrir un compte dans les livres du Crédit agricole et d'obtenir la carte de crédit sollicitée auprès de la société American Express, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil ;

Alors, en outre, que la victime d'une faute n'est pas tenue de minimiser son dommage dans l'intérêt du responsable; qu'en cas de maintien fautif de l'inscription prise par une banque de son client au fichier central des chèques, le simple fait d'avoir tardé à exercer les actions judiciaires destinées à y mettre fin n'exclut pas le droit à réparation du préjudice subi; qu'en refusant d'indemniser le préjudice de perte chance subi par la société A... du fait de son inscription, prise et maintenue irrégulièrement par le Crédit mutuel, au fichier central des chèques, aux motifs que la société A... avait « attendu le 3 juillet 2011, soit huit mois, pour saisir le juge des référés aux fins de radiation ou annulation de l'inscription », la cour d'appel a méconnu ce principe et violé l'article 1147 du code civil ;

Alors, enfin, et en tout état de cause, que le préjudice causé par la perte d'une chance est réparable chaque fois que peut être constatée la disparition de la probabilité d'un événement favorable ; que dans ses conclusions d'appel, la société A... faisait valoir, sans être contredite par le Crédit Mutuel, que son activité consistait principalement à se porter acquéreur de biens immobiliers vendus aux enchères publiques, et que de telles opérations ne pouvaient être réalisées sans le concours financiers d'un établissement de crédit; qu'en se bornant à retenir, pour la débouter de ses demandes, que la société A... ne démontrait pas que « l'arrêt de son activité » aurait pu être « imputable aux fautes » qu'avait commises le Crédit mutuel et que cette preuve ne pouvait « résulter de son affirmation selon laquelle elle s'était abstenue de solliciter des financements car elle savait qu'ils lui seraient refusés », sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si en inscrivant irrégulièrement la décision de retrait de carte bancaire sur le fichier central des chèques de la Banque de France et en la maintenant pendant des mois, malgré la régularisation antérieure à l'assignation en référé, et encore pendant une période de près de cinq mois, après sa condamnation en référé, le Crédit Mutuel n'avait pas privé la société A... de toute chance de réaliser la moindre acquisition sur le marché des adjudications, auquel elle n'était plus en mesure d'avoir accès faute d'assurance que les prêts bancaires nécessaires à leur financement lui seraient accordés, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil.
Le greffier de chambre


Synthèse
Formation : Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 16-10.273
Date de la décision : 12/07/2017
Sens de l'arrêt : Rejet

Publications
Proposition de citation : Cass. Com. financière et économique - formation restreinte rnsm/na, 12 jui. 2017, pourvoi n°16-10.273, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.10.273
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award