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14/06/2017 | FRANCE | N°16-12373

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 juin 2017, 16-12373


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1224-1 et L. 2261-14 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mmes X..., Y..., Z...et A... ont été engagées en qualité de secrétaires administratives, respectivement les 1er août 1968, 15 septembre 1983, 1er mars 1971 et 1er janvier 1978, par la clinique de Bagneux, devenue la clinique de la Loire en juin 1999 ; qu'à partir du 1er septembre 2010, la gestion de la clinique a été transférée à la Société française de services Sodexo ;

que les salariées, soutenant que le nouvel employeur n'avait pas respecté son oblig...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1224-1 et L. 2261-14 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mmes X..., Y..., Z...et A... ont été engagées en qualité de secrétaires administratives, respectivement les 1er août 1968, 15 septembre 1983, 1er mars 1971 et 1er janvier 1978, par la clinique de Bagneux, devenue la clinique de la Loire en juin 1999 ; qu'à partir du 1er septembre 2010, la gestion de la clinique a été transférée à la Société française de services Sodexo ; que les salariées, soutenant que le nouvel employeur n'avait pas respecté son obligation de maintenir les modalités de calcul du salaire de base, ont refusé de signer l'avenant et saisi la juridiction prud'homale en demande de paiement d'un rappel de salaires ;

Attendu que pour débouter les salariées de leurs demandes, l'arrêt retient que la nouvelle structure de rémunération versée par la Sodexo résulte non pas de leur contrat de travail mais de la convention du personnel de la restauration des collectivités à laquelle les salariées se sont trouvées soumises, le changement de structure salariale s'imposant aux salariés, et que l'indemnité différentielle revendiquée ne peut pas être considéré comme un avantage individuel acquis, s'agissant d'un mécanisme d'harmonisation des salaires ayant une nature collective et visant la collectivité des salariés du secteur ;

Attendu cependant, d'une part, que l'employeur entrant ne peut subordonner le bénéfice dans l'entreprise d'accueil des avantages collectifs, qu'ils soient instaurés par voie d'accords collectifs, d'usages ou d'un engagement unilatéral de l'employeur, à la condition que les salariés transférés renoncent aux droits qu'ils tiennent d'un usage ou d'un engagement unilatéral en vigueur dans leur entreprise d'origine au jour du transfert ou qu'ils renoncent au maintien des avantages individuels acquis en cas de mise en cause d'un accord collectif en application du second des textes susvisés et, d'autre part, que la structure de la rémunération résultant d'une convention collective ou d'un accord collectif mis en cause constitue, à l'expiration des délais prévus par l'article L. 2261-14 du code du travail, un avantage individuel acquis qui est incorporé au contrat de travail des salariés employés par l'entreprise à la date de la cession, scission ou du changement d'activité ; qu'il s'en déduit que l'employeur ne peut la modifier sans l'accord de chacun de ces salariés, quand bien même estimerait-il les nouvelles modalités de rémunération plus favorables aux intéressés ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 décembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ;

Condamne la société française de services Sodexo aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société française de services Sodexo à payer à Mmes X..., Y..., Z...et A... la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze juin deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour Mmes X..., Y..., Z...et A....

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté les salariées de leurs demandes tendant au paiement de rappels de salaires, congés payés y afférents, de prime d'ancienneté et d'indemnité différentielle.

AUX MOTIFS QUE l'article L. 2261-14 du code du travail dispose que lorsque l'application d'une convention ou d'un accord est mise en cause dans un entreprise déterminée en raison notamment d'une fusion, d'une cession, d'une scission ou d'un changement d'activité, cette convention ou cet accord continue de produire effet jusqu'à l'entrée en vigueur de la convention ou de l'accord qui lui est substitué ou à défaut pendant une durée d'un an à compter de l'expiration du délai de préavis de 3 mois prévu à l'article L. 2261-9 ; qu'en cas de transfert du contrat de travail par application de l'article L. 1224-1 du code du travail, la convention collective dont relève le cessionnaire s'applique immédiatement au salarié, les dispositions plus favorables de l'accord mis en cause continuant à lui bénéficier dans les conditions prévues par l'article L1261-14 ; qu'à l'issue de la période de survie de la convention collective applicable dans l'entreprise cédée, les partenaires sociaux doivent négocier un accord d'adaptation, à défaut, les avantages individuels acquis sont incorporés dans le contrat de travail ; qu'un avantage acquis correspond à un droit qui, au jour de la dénonciation de la convention ou de la convention, procurait au salarié une rémunération ou un droit dont il bénéficiait à titre personnel et qui correspondait à un droit déjà ouvert et non simplement éventuel ; que les salariées revendiquent à compter du 1er septembre 2010 le maintien des dispositions plus favorables de calcul de leur salaire de base dont elles bénéficiaient auprès de leur précédent employeur, mais également de l'indemnité différentielle allouée chaque mois par leur ancien employeur, constitutive d'un avantage individuel acquis au sens de l'article L 2261-14 du code du travail ; que la structure de la rémunération était différente au sein de la société Clinique de la Loire car elle incluait le salaire de base avec un taux horaire, l'indemnité différentielle et une prime de dimanche alors que la rémunération de la société Sodexo comprend le salaire de base, la prime d'ancienneté, la prime d'activité continue et la prime de service minimum ainsi que la gratification du 13ème mois ; que s'agissant de l'indemnité différentielle en cause, elle a été définie par le protocole de transposition de la convention collective de l'hospitalisation privée du 18 avril 2002 afin d'assurer l'harmonisation des salaires conventionnels de base dans le cadre de l'application d'une grille salariale à la date d'effet d'une nouvelle convention collective ; qu'elle intègre, en application des articles 4 et 5 du protocole, la prime d'ancienneté, les primes inhérentes à la fonction et les primes de sujétions ; que la nouvelle structure de la rémunération versée par la Sodexo résulte non pas de leur contrat de travail mais de la convention du personnel de la restauration des collectivités ; il s'ensuit que les salariées s'y sont trouvées soumises, le changement de structure salariale s'imposant aux salariées ; qu'il n'est pas contesté que la société Sodexo a maintenu le niveau de rémunération mensuelle et annuelle des salariées au regard de la nouvelle convention collective et qu'elle a, de fait, intégré dans son calcul du salaire de base, l'indemnité différentielle ; qu'au vu de ses éléments, l'indemnité différentielle ne peut pas être considérée comme un avantage individuel acquis, s'agissant d'un mécanisme d'harmonisation des salaires ayant une nature collective et visant la collectivité des salariés du secteur ; alors que le niveau de rémunération n'a pas été réduit par l'application de la nouvelle convention collective, les salariées ne sont pas fondées à se prévaloir de la précédente structure de rémunération, qui ne constitue en aucun cas un avantage individuel acquis mais qui était fixée par une convention collective qui a cessé de produire ses effets ; que contrairement aux allégations des salariées, l'employeur a procédé à juste titre la comparaison des salaires réels annuels en intégrant les primes, qui sont des éléments de rémunération ; que dans ces conditions, et en l'absence de preuve d'une baisse des salaires réels, les demandes de rappel de salaires présentées par Mesdames X..., Y..., Z...et A... doivent être rejetées, par voie d'infirmation du jugement ; que les demandes accessoires en paiement du rappel de prime d'ancienneté, de l'indemnité différentielle et la demande de dommages-intérêts seront rejetées comme non fondées, par voie d'infirmation du jugement.

ALORS QUE lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ; que la rémunération du salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans son accord ; qu'en retenant que le niveau de rémunération des salariés avait été maintenu par le nouvel employeur sans s'attacher au fait que ce dernier avait procédé pour cette comparaison à l'intégration de l'ensemble des sommes versées, y compris celles versées à titre de complément de salaire pour tenir compte de la nature et des conditions de travail, la cour d'appel a violé les articles L1224-1 du code du travail et 1134 du code civil.

QU'en tout cas, en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, quelle était la cause du versement des primes et les raisons de leur versement, la cour d'appel privé sa décision de base légale au regard des articles L1224-1 du code du travail et 1134 du code civil

ALORS en tout cas QUE lorsque l'application d'une convention ou d'un accord est mise en cause dans une entreprise déterminée en raison notamment d'une fusion, d'une cession, d'une scission ou d'un changement d'activité, cette convention ou cet accord continue de produire effet jusqu'à l'entrée en vigueur de la convention ou de l'accord qui lui est substitué ou, à défaut, pendant une durée d'un an à compter de l'expiration du délai de préavis de trois mois ; qu'en déboutant les salariés de leurs demandes qui portaient sur une période courant à compter de la date de la cession, la cour d'appel a violé l'article L. 2261-14 du code du travail.

ET ALORS QUE lorsque la convention ou l'accord mis en cause n'a pas été remplacé par une nouvelle convention ou un nouvel accord dans le délai d'un an à compter de l'expiration du délai de préavis de trois mois, les salariés des entreprises concernées conservent les avantages individuels qu'ils ont acquis, en application de la convention ou de l'accord, à l'expiration de ces délais ; que la structure de la rémunération résultant d'un accord collectif dénoncé constitue à l'expiration des délais de préavis et de survie un avantage individuel acquis qui est incorporé au contrat de travail des salariés employés par l'entreprise à la date de la dénonciation ; qu'en jugeant que le changement de structure salariale opéré par la société cessionnaire s'imposait aux salariés, quand la structure de leur rémunération résultait d'une convention collective mise en cause en raison d'une cession et constituait à l'expiration des délais de préavis et de survie un avantage individuel acquis incorporé à leur contrat de travail, la cour d'appel a de nouveau violé l'article L. 2261-14 du code du travail.
ALORS enfin QUE lorsque la convention ou l'accord mis en cause n'a pas été remplacé par une nouvelle convention ou un nouvel accord dans le délai d'un an à compter de l'expiration du délai de préavis de trois mois, les salariés des entreprises concernées conservent les avantages individuels qu'ils ont acquis, en application de la convention ou de l'accord, à l'expiration de ces délais ; que constitue un avantage individuel acquis un avantage qui au jour de la dénonciation de la convention ou de l'accord collectif procurait au salarié une rémunération ou un droit dont il bénéficiait à titre personnel et qui correspondait à un droit déjà ouvert et non simplement éventuel ; qu'en jugeant que l'indemnité différentielle issue d'un accord collectif visant à compenser la perte de rémunération résultant de nouvelles modalités de calcul des indices, et qui avait personnellement bénéficié à chacun des salariés, ne constituait pas un avantage individuel acquis, la cour d'appel a violé l'article L. 2261-14 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-12373
Date de la décision : 14/06/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 15 décembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 jui. 2017, pourvoi n°16-12373


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.12373
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