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14/06/2017 | FRANCE | N°15-20991

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 juin 2017, 15-20991


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 455 du code de procédure civile et l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 1er septembre 1964 par la Caisse nationale de l'énergie, a, après être devenue salariée de la société Gaz de France le 1er janvier 1993, été mutée au sein de la société Réseau transport d'électricité (RTE) en décembre 2001, dans laquelle elle a occupé le poste d'assistante reporting dÃ

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 455 du code de procédure civile et l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 1er septembre 1964 par la Caisse nationale de l'énergie, a, après être devenue salariée de la société Gaz de France le 1er janvier 1993, été mutée au sein de la société Réseau transport d'électricité (RTE) en décembre 2001, dans laquelle elle a occupé le poste d'assistante reporting décompte jusqu'à la cessation de son activité le 1er septembre 2007, l'intéressée étant alors classée GF10 ; qu'invoquant une différence de traitement entre elle et ses collègues hommes constitutive d'une discrimination, elle a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le classement GF 11 ;

Attendu que pour condamner la société au versement d'une somme à titre de dommages-intérêts pour discrimination de qualification par rapport à au moins une autre personne de son service, l'arrêt retient qu'il résultait des pièces versées au dossier, que la salariée avait intégré en décembre 2001 le poste d'assistante reporting décompte avec une qualification GF9 et avait fini sa carrière après dix ans sans aucune évolution, classée comme GF10, qu'elle exerçait plus particulièrement les fonctions de contrôle, de calcul, d'analyse et de la facturation des clients en sa qualité de « responsable équilibre déclaratifs », que l'organigramme RTE daté du 29 mars 2004 mentionnait deux équipes toutes deux composées de collègues masculins à l'exception de Mme X..., deux autres salariés exerçant les mêmes fonctions d'appui expert RE (M. Z...et A...), qu'aucun critère objectif n'était mis en avant pour justifier que la salariée ait bénéficié d'un régime différent de ses collègues masculins du même groupe, placés dans une situation identique, que la seule affirmation que tous n'exerçaient pas exactement les mêmes activités bien qu'ayant des activités relativement proches ne suffisait pas à justifier que la disparité de situation entre Mme X... et ses deux autres collègues masculins occupant le même poste procédait de critères étrangers à toute discrimination ;

Qu'en statuant ainsi, en retenant, d'une part, que les deux équipes du service dans lequel travaillait Mme X... étaient composées de collègues masculins à l'exception de l'intéressée, sans préciser sur quel élément elle se fondait pour affirmer que le salarié portant le nom de famille A... était un collègue masculin de la salariée, alors que cette dernière présentait dans ses conclusions Saholy A... comme étant une femme, et en retenant, d'autre part, une différence de qualification entre M. Z... et la salariée, alors qu'il résultait des conclusions d'appel de la société et des organigrammes de la société communiqués aux débats que ce dernier, entré au service responsable équilibre en juillet 2005, bénéficiait du même classement GF10 que la salariée, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte et de l'obligation susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 mai 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze juin deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Réseau de transport d'électricité

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société RTE à verser à Mme X... une somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination de qualification par rapport à au moins une autre personne de son service outre une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE Sur la discrimination hommes/ femmes ; Mme X... fait valoir qu'elle a occupé un poste d'assistante reporting décomptes de décembre 2001 au 31 août 2007 et qu'elle aurait dû être classée comme agent de maîtrise en dernier lieu GF 11 après 43 ans de carrière ; que son absence d'évolution de carrière en dernier échelon est selon elle, constitutive d'une discrimination homme/ femme et ne repose pas sur des critères objectifs puisqu'elle a su évoluer et a obtenu un diplôme de BTS comptable ; que ses collègues masculins ont d'après la salariée, tous été, en revanche, classés GF11 alors que les entretiens de carrière ne peuvent justifier une telle différence de traitement et que la société RTE s'est bien abstenue de lui délivrer une formation au poste occupé ; que la société RTE soutient que la qualification GF11 nécessitait une maîtrise particulière alors que Mme X... gérait les seuls portefeuilles déclaratifs, n'atteignant pas ainsi le niveau expert lui permettant d'avoir la même classification, et donc rémunération que ses collègues masculins au pôle des RE (assistant reporting décomptes) ; qu'il ressort des pièces versées au dossier que Mme X... a intégré en décembre 2001, le poste d'assistante reporting décomptes avec une qualification GF9 et a fini sa carrière après 10 ans sans aucune évolution, classée comme GF10 ; que Mme X... exerçait plus particulièrement les fonctions de chargée de contrôle, de calcul, d'analyse et de la facturation des clients en sa qualité de responsable équilibre déclaratifs ; que l'organigramme RTE daté du 29 mars 2004 mentionne 2 équipes toutes deux composées de collègues masculins à l'exception de Mme X..., deux autres salariés exerçant les mêmes fonctions d'appui expert RE (M. Z... et M. A...) ; que M. C...atteste de ce que Mme X... n'avait pas en charge des clients difficiles dans son périmètre, ce qui explique selon lui, le niveau hiérarchique atteint par sa collègue, les dossiers complexes comme GDF/ SUEZ étant suivis par un autre salarié lequel était « expert équilibre » ; que les pièces du procès-verbal de la sous-commission classement avancement, daté du 16/ 1/ 2012 rapportent le vote favorable des délégations syndicales alors que la direction a proposé le rejet de la demande de Mme X... au motif que l'accès au dernier GF nécessitait un niveau « de maîtrise totale des activités de l'emploi occupé, les entretiens annuels révélant que Mme X... n'avait pas atteint tous les attendus requis pour pouvoir accéder au GF 11 » ; que ces propos sont contredits par la lecture des entretiens annuels d'évaluation qui témoignent tous de la bonne intégration de la salariée à son poste, aucune formation n'étant rendue nécessaire dans l'exercice de sa tâche ; qu'en outre, la situation individuelle de Mme X... mentionne divers perfectionnements effectués au sein de l'entreprise et ce, très régulièrement peu important que les diplômes de l'intéressée ne soient pas produits, dès lors que la société RTE ne conteste pas leur obtention par Mme X... et se borne à relever que Mme X... n'est pas en mesure de les produire ; qu'en définitive, aucun critère objectif n'est mis en avant pour justifier que la salariée ait bénéficié d'un régime différent de ses collègues masculins du même groupe, placés dans une situation identique ; que le détail des carrières et des formations ou diplômes des hommes occupant le même poste que Mme X... n'est d'ailleurs pas précisé, de sorte que la cour n'est pas même en mesure de connaître les critères objectifs nécessaires pour prétendre être promu à la qualité « d'expert » GF 11 ; que la seule affirmation que tous n'exerçaient pas exactement les mêmes activités bien qu'ayant des activités relativement proches, ne suffit pas à justifier que la disparité de situation entre Mme X... et ses deux autres collègues masculins occupant le même poste procède de critères objectifs, étrangers à toute discrimination ; qu'en conséquence, les documents produits justifient l'existence d'une discrimination homme/ femme et à tout le moins, une discrimination entre Mme X... et au moins un de ses collègues masculins occupant le même poste ; que la discrimination alléguée étant caractérisée, les premiers juges doivent être approuvés, tant dans le principe que dans le montant de la condamnation qu'ils ont prononcée à l'encontre de la société RTE ;

1) ALORS QU'une différence de qualification ne constitue pas une discrimination si elle est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'une outre, une inégalité de traitement ne peut être caractérisée qu'entre des salariés qui se trouvent dans une situation identique et qui notamment, exécutent effectivement les mêmes tâches ; qu'il n'était pas contesté que Mme X... gérait exclusivement un portefeuille de RE déclaratifs ; que la société RTE avait précisé que la complexité du portefeuille géré par les salariés était un élément objectif pris en compte pour le classement des agents et avait notamment ajouté que M. D..., auquel Mme X... prétendait comparer sa situation, gérait des portefeuilles mixtes plus complexes ; qu'en énonçant qu'aucun critère objectif n'était mis en avant pour justifier la différence de la qualification accordée Mme X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1, L. 1132-4 et L. 3221-4 du code du travail ;

2) ALORS QUE la société RTE avait fait valoir que M. D..., contrairement à Mme X..., participait à des réunions de processus et du contrôle interne, était en charge du domaine des ventes, rédigeait ou vérifiait et approuvait des modes opératoires couvrant l'ensemble de l'activité RE (conclusions, p. 18) ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces moyens établissant des critères objectifs pour justifier la différence de qualification constatée entre M. D... et Mme X..., la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

3) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent statuer sans préciser les pièces desquelles sont déduites leurs constatations ; qu'en affirmant que le salarié portant le nom de famille A... était un collègue masculin de Mme X..., sans préciser les éléments de preuve justifiant une telle affirmation, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

4) ALORS QUE, subsidiairement, une différence de qualification ne constitue pas une discrimination si elle est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'une outre, une inégalité de traitement ne peut être caractérisée qu'entre des salariés qui se trouvent dans une situation identique et qui notamment, exécutent effectivement les mêmes tâches ; qu'il n'était pas contesté que Mme X... gérait exclusivement un portefeuille de RE déclaratifs ; que la cour d'appel a constaté que les collègues masculins de Mme X... n'exerçaient pas les mêmes activités qu'elle ; qu'il ressortait également des organigrammes du CNES versés aux débats par la société RTE que M. A... relevait des ingénieurs décomptes ; qu'en énonçant qu'aucun critère objectif n'était mis en avant pour justifier la différence de qualification accordée Mme X..., sans s'expliquer sur la qualité d'ingénieur décomptes de M. A..., après avoir constaté l'absence d'identité des activités exercées par les salariés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1, L. 1132-4 et L. 3221-2 du code du travail ;

5) ALORS QU'une différence de qualification ne constitue pas une discrimination si elle est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu'en outre, une inégalité de traitement ne peut être caractérisée qu'entre des salariés qui se trouvent dans une situation identique et qui notamment, exécutent effectivement les mêmes tâches ; qu'il ressortait des organigrammes du CNES versés aux débats par la société RTE, que M. Z..., assistant reporting décompte comme Mme X..., bénéficiait d'une qualification GF 10 ; qu'en retenant une différence de qualification entre eux, la cour d'appel a méconnu l'interdiction qui lui est faite de dénaturer les éléments de la cause ;

6) ALORS QUE la salariée qui soutient être victime d'une discrimination doit démontrer qu'elle accomplit les mêmes tâches que chaque salarié homme bénéficiant de la qualification qu'elle revendique, et qu'aucun des salariés hommes qui bénéficient de la même qualification qu'elle n'exerce des tâches différentes des siennes ; qu'en se bornant à retenir une discrimination de qualification au détriment de Mme X... par rapport à au moins une autre personne de son service, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1132-1, L. 1132-4 et L. 3221-2 du code du travail ;

7) ALORS QUE subsidiairement, la société RTE avait fait valoir dans ses conclusions que la promotion sollicitée par Mme X... imposait l'acquisition de compétences nouvelles démontrées et reconnues par la hiérarchie, précisant que cette promotion était subordonnée non seulement à une performance continue mais aussi au franchissement d'un seuil de professionnalisme qui atteste d'une évolution objective des compétence de l'agent et donc d'un certain niveau de maîtrise des activités de son emploi (conclusions, p. 11 et 12) ; que les synthèses d'entretiens individuels versées aux débats, réalisés en 2003, 2004, 2005 et 2006, corroboraient que Mme X... n'était en charge que de portefeuilles déclaratifs, sur des opérations simples, et rencontrait également certaines difficultés ; qu'en énonçant que les entretiens annuels d'évaluation témoignaient de la bonne intégration de la salariée à son poste, aucune formation n'étant rendue nécessaire dans l'exercice de sa tâche, la cour d'appel a encore méconnu l'interdiction qui lui est faite de dénaturer les éléments de la cause.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-20991
Date de la décision : 14/06/2017
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 05 mai 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 jui. 2017, pourvoi n°15-20991


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.20991
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