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05/05/2017 | FRANCE | N°15-28433

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 mai 2017, 15-28433


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 13 octobre 2015), que la société Accor, propriétaire de la marque Etap hôtel, a établi un contrat de franchise avec la société Etap hôtel, laquelle a conclu un contrat de licence de marque et de gestion avec la société Hoteco, propriétaire d'un fonds d'hôtellerie à Sélestat, exploité sous l'enseigne Etap hôtel ; que M. Karim X... a crée la société Zarkom dont il est le gérant et, par contrat de gérance-mandat du 29 janvier 2004,

la société Hoteco a confié l'exploitation de l'hôtel Etap hôtel de Sélestat à la so...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 13 octobre 2015), que la société Accor, propriétaire de la marque Etap hôtel, a établi un contrat de franchise avec la société Etap hôtel, laquelle a conclu un contrat de licence de marque et de gestion avec la société Hoteco, propriétaire d'un fonds d'hôtellerie à Sélestat, exploité sous l'enseigne Etap hôtel ; que M. Karim X... a crée la société Zarkom dont il est le gérant et, par contrat de gérance-mandat du 29 janvier 2004, la société Hoteco a confié l'exploitation de l'hôtel Etap hôtel de Sélestat à la société Zarkom ; qu'invoquant l'existence d'un contrat de travail avec la société Hoteco, M. Karim X... a pris acte de sa rupture et saisi le juridiction prud'homale ;

Attendu que la société Hoteco fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il constate l'existence d'un contrat de travail avec M. Karim X..., alors, selon le moyen :

1°/ que le respect par le gérant-mandataire des directives impératives résultant d'un contrat de franchise conclu par le mandant ne saurait caractériser l'existence d'un lien de subordination entre le mandant et le mandataire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a caractérisé le prétendu lien de subordination liant la société mandante Hoteco à M. Karim X..., gérant-mandataire, par l'obligation de respecter les directives applicables aux hôtels de la chaîne Etap hôtel en vertu du contrat de franchise conclu par la société mandante avec le groupe Accor ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;

2°/ que sont inhérentes à la notion même de mandat de gestion d'un fonds de commerce d'hôtel, dont la propriété reste au mandant qui en supporte les risques d'exploitation, les stipulations exigeantes, voire détaillées du contrat de mandat relatives à la définition et aux caractéristiques de l'ensemble des prestations fournies, dès lors que ces exigences sont celles qui résultent de l'intégration de cet hôtel dans un réseau, une chaîne d'hôtels à prestation de qualité et à prix économiques, impliquant une exacte identité de prestations et de produits dans chaque hôtel de la chaîne ; qu'en se bornant à déduire des normes et procédures d'exploitation de la chaîne Etap hôtel, détaillées dans le contrat de gérance-mandat comportant les moyens de gestion d'un hôtel jusqu'au moindre détail, l'existence d'une subordination propre au contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1984 du code civil et de l'article L. 1221-1 du code du travail ;

3°/ que les normes de gestion que doit respecter le gérant-mandataire d'un hôtel dont le mandant est propriétaire du fonds de commerce et supporte les risques liés à l'exploitation, sont inhérentes au contrat de gérance-mandat et ne suffisent pas à emporter la qualification de contrat de travail ; qu'en se fondant, pour retenir que M. Karim X... était lié par un contrat de travail à la société Hoteco, sur l'existence d'échanges de courriels entre la société Hoteco et la société Zarkom concernant des devis, des travaux de prestataires et des factures de fournisseurs et, s'agissant de la gestion comptable, sur la transmission à la société Hoteco par M. Karim X... de l'inventaire des produits en stock, de l'inventaire de mi-clôture, de l'état des ventes trimestrielles et sur une demande d'explication concernant un chèque impayé, donc sur des obligations constitutives de limites normales apportées à l'autonomie de gestion d'une société gérante mandataire, la cour d'appel a violé l'article 1984 du code civil et l'article L. 1221-1 du code du travail ;

4°/ que le gérant-mandataire d'un hôtel qui conserve toute liberté, dans le cadre de son mandat, de déterminer ses conditions de travail, d'organiser son emploi du temps, d'embaucher ou de remplacer du personnel, n'est pas lié par un contrat de travail, quand bien même la société mandante, propriétaire de plusieurs hôtels, veille au respect du contrat de gérance-mandat et des normes communes à ses hôtels, en procédant en particulier au suivi d'opérations lors de l'engagement de dépenses affectant l'exploitation de l'hôtel ; que la société Hoteco faisait valoir que M. Karim X... organisait librement son emploi du temps, prenait ses vacances quand il le souhaitait, embauchait à sa convenance le personnel nécessaire, que sa liberté d'entreprendre ainsi que les ressources tirées de son activité de gérant-mandataire lui avaient permis de créer la société MKM cuisines et de se lancer dans une autre activité alors qu'il était encore lié à la société Hoteco par le contrat de gérance-mandat ; qu'en se fondant sur un ensemble d'éléments liés à l'exécution du mandat par la société Zarkom et au contrôle que la société Hoteco était en droit d'exercer en sa qualité de mandant et propriétaire de plusieurs hôtels, sans rechercher si M. Karim X... n'avait pas gardé toute latitude de déterminer ses conditions de travail et d'embaucher du personnel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1984 du code civil et de l'article L. 1221-1 du code du travail ;

5°/ que le pouvoir du gérant-mandataire de recruter et de licencier le personnel de l'établissement qu'il gère, sous sa responsabilité, sans en référer au mandant, est incompatible avec l'existence d'un rapport de subordination ; que la société Hoteco faisait valoir, au soutien de son contredit, que le mandataire gérant disposait contractuellement de la faculté de procéder seul à l'embauche, au licenciement ainsi qu'à la fixation des conditions de travail du personnel qu'il recrutait, ce qui excluait tout lien de subordination entre M. Karim X... et elle-même ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail et l'article 1984 du code civil ;

6°/ que seules les conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité professionnelle permettent de déterminer l'existence ou non d'un contrat de travail ; que la société Hoteco faisait valoir qu'elle avait délégué la gestion de l'hôtel Etap hôtel, exploité en franchise, dans la plus large autonomie possible, que dans le cadre du contrat de gérance-mandat conclu avec la société Zarkom, dont M. Karim X... était gérant, ce dernier bénéficiait d'une large liberté pour gérer l'hôtel Etap hôtel, dans le respect des normes fixées par le contrat de franchise conclu avec la société Etap hôtel, que les directives données étaient inhérentes à la convention de franchise que la société Hoteco était elle-même tenue de respecter, qu'elle ne s'était jamais immiscée dans son organisation du travail, le recrutement du personnel, le choix des sous-traitants ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces conditions d'exploitation propres à la société Hoteco exclusives d'un contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1984 du code civil et de l'article L. 1221-1 du code du travail ;

7°/ que le contrat de travail se définit comme l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu'en se bornant à énoncer, pour retenir l'existence d'un contrat de travail entre M. Karim X... et la société Hoteco, que celle-ci donnait des ordres à M. Karim X..., allant au-delà du contrat de mandat-gérance et de sa qualité de propriétaire de fonds de commerce, et sans qu'elle puisse s'abriter derrière le contrat de franchise et que la société Hoteco avait pouvoir de sanctionner M. Karim X... en cas de manquement allant de la sanction financière à la résiliation du contrat, sans caractériser un quelconque pouvoir disciplinaire de cette dernière de sanctionner d'éventuels manquements de M. Karim X... dans l'exécution des ordres et directives susceptibles d'être donnés par elle, la seule faculté reconnue au mandant de résilier le contrat de mandat en cas d'inexécution de ses obligations par le mandataire étant le fait de tout contrat et n'étant pas propre au contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1984 du code civil et de l'article L. 1221-1 du code du travail ;

8°/ que si l'intégration dans un service organisé constitue un indice du lien de subordination, c'est uniquement lorsque les conditions de travail sont unilatéralement déterminées par le prétendu employeur ; que la société Hoteco faisait valoir au soutien de son contredit que M. Karim X... était libre d'organiser son temps de travail, d'aller et venir, de développer une activité différente parallèle au contrat de gérance-mandat, ce qui excluait tout lien de subordination de ce dernier à son égard ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur le pouvoir de M. Karim X... de fixer lui-même ses propres conditions de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;

Mais attendu que l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs ; que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que le travail au sein d'un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination lorsque l'employeur détermine unilatéralement les conditions d'exécution du travail ;

Et attendu, qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que les conditions d'exploitation de l'hôtel étaient détaillées à l'extrême dans le contrat, que le gérant-mandataire ne pouvait intervenir librement pour de simples travaux d'entretien ou pour le changement de matériels courants, qu'il devait suivre les directives du mandant en matière de publicité et l'informer de ses congés et absences, que la société Hoteco avait la possibilité de contrôler régulièrement et de façon permanente l'exécution des ordres et directives donnés, notamment par le biais de visites, audits ou consultations des documents et qu'elle avait le pouvoir de sanctionner le gérant-mandataire en cas de manquement par des sanctions ou la résiliation du contrat, la cour d'appel a ainsi fait ressortir l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné et a pu décider que le gérant-mandataire était lié à cette société par un contrat de travail ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Hoteco aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Hoteco à payer à M. Karim X... la somme de 1 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mai deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour la société Hoteco

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement du conseil de prud'hommes de Strasbourg en date du 5 mars 2015 en ce qu'il avait constaté l'existence d'un contrat de travail entre Monsieur Karim X... et la société Hoteco, s'était déclaré compétent pour statuer sur les demandes, a réservé à statuer sur le surplus et avait renvoyé l'affaire à une audience ultérieure ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, vu le dossier de la procédure, les pièces versées aux débats et les conclusions des parties auxquelles il est référé pour un plus ample exposé de leurs moyens et arguments ; que l'appel est régulier et recevable ; que le contrat de mandat gérance a été signé avec la société Zarkom représentée par son gérant M. Karim X..., étant constaté l'absence de production d'un extrait K Bis tant de la société Zarkom que concernant M. Karim X... qui n'a pas contesté son inscription au RCS ; que l'existence d'un contrat de travail ne dépend ni de la volonté exprimée des parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité du travailleur ; que c'est à M. Karim X... de combattre la présomption simple de non salariat ; que le lien de subordination, justifiant la qualification de contrat de travail est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que l'intégration dans un service organisé constitue un indice du lien de subordination lorsque les conditions de travail sont unilatéralement déterminées par le co-contractant ; que l'article 4 du contrat de mandat gérance stipule son caractère intuitu personae en ce qu'il est expressément confié en considération de la personne du mandataire social et de son engagement de diriger et d'exploiter sous sa responsabilité et pour le compte de la société mandante le fonds de commerce d'hôtellerie ; qu'au cas où le mandataire social souhaite céder tout ou partie de son capital social, il est soumis à une clause d'agrément très stricte avec possibilité de refus pour la société mandante d'agréer la cession ; que l'article 12-4 du contrat stipule la résiliation du contrat en cas de démission de M. Karim X... de sa fonction de mandataire social de la société Zarkom respectivement de la perte de sa qualité d'associé ; que les conditions d'exploitation de l'hôtel sont fixées par l'article 3 du contrat ; qu'il s'agit de normes détaillées à l'extrême, jusqu'à la composition du petit-déjeuner, la température de la chambre, l'espace communication ; que M. Karim X... n'avait que très peu de latitude et de liberté d'action ; que la SAS Hoteco lui donnait des ordres, allant au-delà du contrat de mandat gérance et de sa qualité de propriétaire du fonds de commerce, et sans qu'elle puisse s'abriter opportunément derrière le contrat de franchise ; que la SAS Hoteco intervenait dans les axes de communication de son mandataire ainsi que cela résulte de sa télécopie du 3. 4. 2003, où il lui a été imposé de participer par la commande d'un quart de page au livret d'accueil de l'hôpital de Sélestat et où il lui a été demandé des comptes sur une autre commande similaire ; que s'agissant du message d'accueil téléphonique, il a été demandé à M. Karim X... par mail du 4. 5. 2003 de recourir au même fournisseur et dans les mêmes conditions que pour celui installé à l'hôtel de la Gare, établissement principal de la SAS Hoteco ; que le 4. 6. 2003, M. Karim X... a justifié de la conformité du devis final ; que selon les mails échangés les 24 et 25 juin 2010, M. Karim X... a dû transiter par la SAS Hoteco pour obtenir son accord de commander des nouvelles couettes et après s'en être expliqué sur les motifs ; qu'il résulte des mails échangés début décembre 2010 que M. Karim X... a dû produire les devis de traitement de déchets et l'estimatif de la dépense annuelle à ce titre ; que la SAS Hoteco n'a pas utilement contesté le mail du 11. 7. 2011 d'où il résulte que M. Karim X... devait l'informer de ses congés et de ses absences ; que M. Karim X... ne pouvait intervenir librement pour certaines décisions courantes pour lesquelles il devait passer par l'autorisation de la SAS Hoteco ; qu'ainsi, dans son mail du 27. 1. 2011, il lui demandait la démarche à suivre quant à la défectuosité du distributeur de boissons et que par mail du 11. 2. 2011, il lui était donné l'accord pour commander une nouvelle machine à café selon le devis présenté ; que selon le mail précité du 11. 7. 2011, les travaux d'entretien et de réparation, courants et/ ou urgents, relevaient du pouvoir décisionnaire de la SAS Hoteco (peinture cage d'escalier et rez-de-chaussée, remontage cloison de séparation suite intervention chauffagiste, remplacement du réfrigérateur, remplacement du sèche-linge) ; que selon les mails des 25. 10. 2011 et 5. 11. 2011 de M. Karim X..., il en a été de même pour le mauvais fonctionnement du lave-vaisselle puis de sa défectuosité, la décision finale relevant de son mandant ; que les parties ont encore échangé des mails en octobre et novembre 2011 desquels il résulte que M. Karim X... n'avait aucune latitude pour les travaux de réparation de l'enseigne lumineuse de l'hôtel et qu'il ne faisait qu'informer la SAS Hoteco des défectuosités constatées et de l'état d'avancement des travaux qu'elle décidait ; que concernant la gestion comptable de l'établissement, M. Karim X... justifie avoir dû transmettre l'inventaire des produits en stock, l'inventaire de mi-clôture, l'état des ventes trimestrielles ; qu'il lui a même été demandé le 28. 3. 2011 de s'expliquer sur un chèque impayé 52, 10 € ; qu'il lui a été demandé l'envoi des états de ventes des semestres 2010 et 2011 ; qu'il résulte de ces éléments que l'activité de M. Karim X... s'est exercée sans aucune liberté de choix de moyens, dans le cadre d'un service organisé et décidé par la SAS Hoteco, dans ses locaux, avec le matériel fourni par elle et selon des horaires imposés, au-delà des contraintes pouvant résulter d'un contrat de franchise ; qu'il est sans incidence que, sept années après la signature du contrat de mandat gérance litigieux, selon statuts du 21. 11. 2010, M. Karim X... ait décidé de créer avec son épouse une société MKM Cuisines, et alors que son implication dans celle-ci est inconnue ; que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont retenu qu'il était lié par un contrat de travail à la SAS Hoteco et que le conseil de prud'hommes s'est déclaré compétent pour connaître de la demande ; que l'article R. 1412-1 2 º du code du travail dispose que le salarié peut saisir le conseil de prud'hommes du lieu où l'employeur est établi ; que par conséquent, le lieu de l'établissement principal de la SAS Hoteco étant 13, place de la Gare à Strasbourg, c'est à juste titre que le conseil de prud'hommes s'est déclaré territorialement compétent ; que le jugement déféré est donc confirmé en ses entières dispositions ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, sur la compétence matérielle du conseil de prud'hommes, l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donné à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité du travailleur ; que d'autre part, le lien de subordination justifiant la qualification de contrat de travail est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité de l'employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner des manquements de son subordonné ; que l'intégration dans un service organisé constitue un indice du lien de subordination lorsque les contrats de travail sont unilatéralement déterminées par le co-contractant ; qu'en l'espèce, il résulte des dispositions de l'article 3. 4 du contrat intitulé « exploitation personnelle » confirmé par l'article 12. 4. 4 relatif à la résiliation du contrat que le contrat a été conclu intuitu personae et que les ordres et directives données n'ont pas été adressées à la société Zarkom mais à son gérant, Monsieur Karim X... ; que s'agissant des conditions d'exploitation de l'hôtel, il résulte des dispositions de l'article 3 du contrat qu'elles sont fixées dans le cadre et le respect des normes et procédures d'exploitation de la chaîne Etap Hotel ; que ces normes sont détaillées sur 10 pages et touchent tous les moyens de gestion d'un hôtel, jusqu'au moindre détail notamment : équipement de la literie, équipements de la penderie, éclairage et température de la chambre, composition du petit déjeuner, espace communication … ; que les horaires d'accueil des clients sont imposés ; qu'en outre, Monsieur Karim X... était tenu à de très nombreuses obligations et interdictions s'agissant de la gestion et de l'exploitation de l'hôtel, ne lui laissant que très peu de liberté d'action et de moyens ; que le matériel était fourni par la société Hoteco ; que Monsieur Karim X... justifie que la société Hoteco lui donnait des ordres et directives allant au-delà du contrat de mandat et de sa qualité de propriétaire du fonds de commerce ; qu'en 2003, s'agissant du message d'accueil téléphonique, la société Hoteco lui a demandé de recourir au même fournisseur et dans les mêmes conditions que l'hôtel de la gare ; qu'il lui a également été demandé en 2010 de produire les devis s'agissant notamment des traitements des déchets ; que Monsieur Karim X... n'avait pas même le pouvoir de commander 4 couettes ainsi que cela résulte des mails du 24 et 25 juin 2010 ; qu'il ne pouvait pas plus décider de la réparation ou du changement du distributeur de boissons (mails du 27/ 1/ 2011), du lave-vaisselle (mails du 5/ 11/ 2011) ou de l'enseigne (mail du 20/ 10/ 2011) ou de la réalisation de travaux urgents (12 juillet 2011) ; que s'agissant de la gestion comptable, Monsieur Karim X... était tenu de transmettre à la société Hoteco l'inventaire des produits en stock, d'établir un inventaire de mi clôture et de transmettre l'état des ventes semestrielles, voire de s'expliquer sur un chèque impayé ou la baisse du prix moyen d'une chambre ; que de même, les axes de communication étaient décidés par la société Hoteco ainsi qu'en atteste le mail du 3 avril 2003 ; que si Monsieur Karim X... avait pouvoir de recruter le personnel nécessaire à la gestion de l'hôtel, il résulte de l'échange de mails des 5 au 11 juillet 2011, qu'il était tenu d'aviser la société Hoteco de ses congés ; il est également établi et non contesté que la société Hoteco avait le pouvoir de contrôler régulièrement et de façon permanente l'exécution des ordres et directives donnés, notamment par le biais des visites, audits, consultations des documents et système informatique, clients mystère ; enfin la société Hoteco avait pouvoir de sanctionner Monsieur Karim X... en cas de manquement, allant de la sanction financière à la résiliation du contrat (article 12 du contrat) ; il résulte dès lors de l'ensemble de ces éléments et constatations, et étant rappelé que l'activité de Monsieur Karim X... s'exerçait dans le cadre d'un service organisé par la société Hoteco, sans qu'il n'ait aucune liberté de choix des moyens que Monsieur Karim X... était lié par un contrat de travail à la société Hoteco, ce qui justifie la compétence du conseil de prud'hommes ; que sur la compétence territoriale du conseil de prud'hommes de Strasbourg, au vu de l'article R. 1412-1 du code du travail, le salarié peut saisir outre le conseil de prud'hommes du lieu de l'établissement dans lequel il effectue son travail ou celui de son domicile, celui du lieu où l'employeur est établi ; qu'or, si le siège social de la société Hoteco se trouve à Colmar, il résulte de l'extrait Kbis que l'établissement principal est situé 13, place de la gare à Strasbourg ; que la société Hoteco est établie à Strasbourg en ce sens qu'elle y gère un établissement hôtelier doté d'une autonomie technique ; que c'est d'ailleurs à Strasbourg et alors que Monsieur Karim X... était salarié de cet hôtel que les parties sont entrées en relation ; que dès lors la compétence territoriale du tribunal de céans est justifiée, et ce d'autant plus qu'il est dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice que le conseil de prud'hommes de Strasbourg, saisi de trois autres dossiers opposant les locataires gérants des hôtels appartenant à la société Hoteco (dont celui de Monsieur Mohammed X...) statue également dans celui de Monsieur Karim X... ;

ALORS, D'UNE PART, QUE le respect par le gérant-mandataire des directives impératives résultant d'un contrat de franchise conclu par le mandant ne saurait caractériser l'existence d'un lien de subordination entre le mandant et le mandataire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a caractérisé le prétendu lien de subordination liant la société mandante Hoteco à Monsieur Karim X..., gérant mandataire, par l'obligation de respecter les directives applicables aux hôtels de la chaîne Etap Hôtel en vertu du contrat de franchise conclu par la société mandante avec le groupe Accor ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE sont inhérentes à la notion même de mandat de gestion d'un fonds de commerce d'hôtel, dont la propriété reste au mandant qui en supporte les risques d'exploitation, les stipulations exigeantes, voire détaillées du contrat de mandat relatives à la définition et aux caractéristiques de l'ensemble des prestations fournies, dès lors que ces exigences sont celles qui résultent de l'intégration de cet hôtel dans un réseau, une chaîne d'hôtels à prestation de qualité et à prix économiques, impliquant une exacte identité de prestations et de produits dans chaque hôtel de la chaîne ; qu'en se bornant à déduire des normes et procédures d'exploitation de la chaîne Etap Hôtel, détaillées dans le contrat de gérance-mandat comportant les moyens de gestion d'un hôtel jusqu'au moindre détail, l'existence d'une subordination propre au contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1984 du code civil et de l'article L. 1221-1 du code du travail ;

ALORS, DE TROISIÈME PART, QUE les normes de gestion que doit respecter le gérant-mandataire d'un hôtel dont le mandant est propriétaire du fonds de commerce et supporte les risques liés à l'exploitation, sont inhérentes au contrat de gérance-mandat et ne suffisent pas à emporter la qualification de contrat de travail ; qu'en se fondant, pour retenir que Monsieur Karim X... était lié par un contrat de travail à la société Hoteco, sur l'existence d'échanges de courriels entre la société Hoteco et la société Zarcom concernant des devis, des travaux de prestataires et des factures de fournisseurs et, s'agissant de la gestion comptable, sur la transmission à la société Hoteco par Monsieur Karim X... de l'inventaire des produits en stock, de l'inventaire de mi-clôture, de l'état des ventes trimestrielles et sur une demande d'explication concernant un chèque impayé, donc sur des obligations constitutives de limites normales apportées à l'autonomie de gestion d'une société gérante mandataire, la cour d'appel a violé l'article 1984 du code civil et l'article L. 1221-1 du code du travail ;

ALORS, DE QUATRIÈME PART, QUE le gérant-mandataire d'un hôtel qui conserve toute liberté, dans le cadre de son mandat, de déterminer ses conditions de travail, d'organiser son emploi du temps, d'embaucher ou de remplacer du personnel, n'est pas lié par un contrat de travail, quand bien même la société mandante, propriétaire de plusieurs hôtels, veille au respect du contrat de gérance-mandat et des normes communes à ses hôtels, en procédant en particulier au suivi d'opérations lors de l'engagement de dépenses affectant l'exploitation de l'hôtel ; que la société Hoteco faisait valoir (contredit, pp. 6, 16, 17 et 20) que Monsieur Karim X... organisait librement son emploi du temps, prenait ses vacances quand il le souhaitait, embauchait à sa convenance le personnel nécessaire, que sa liberté d'entreprendre ainsi que les ressources tirées de son activité de gérant-mandataire lui avaient permis de créer la société MKM Cuisines et de se lancer dans une autre activité alors qu'il était encore lié à la société Hoteco par le contrat de gérance-mandat ; qu'en se fondant sur un ensemble d'éléments liés à l'exécution du mandat par la société Zarcom et au contrôle que la société Hoteco était en droit d'exercer en sa qualité de mandant et propriétaire de plusieurs hôtels, sans rechercher si Monsieur Karim X... n'avait pas gardé toute latitude de déterminer ses conditions de travail et d'embaucher du personnel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1984 du code civil et de l'article L. 1221-1 du code du travail ;

ALORS, DE CINQUIÈME PART, QUE le pouvoir du gérant mandataire de recruter et de licencier le personnel de l'établissement qu'il gère, sous sa responsabilité, sans en référer au mandant, est incompatible avec l'existence d'un rapport de subordination ; que la société Hoteco faisait valoir, au soutien de son contredit (pp. 16 et 20), que le mandataire gérant disposait contractuellement de la faculté de procéder seul à l'embauche, au licenciement ainsi qu'à la fixation des conditions de travail du personnel qu'il recrutait, ce qui excluait tout lien de subordination entre Monsieur Karim X... et elle-même ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1221-1 du code du travail et l'article 1984 du code civil ;

ALORS, DE SIXIÈME PART, QUE seules les conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité professionnelle permettent de déterminer l'existence ou non d'un contrat de travail ; que la société Hoteco faisait valoir qu'elle avait délégué la gestion de l'hôtel Etap Hôtel, exploité en franchise, dans la plus large autonomie possible, que dans le cadre du contrat de gérancemandat conclu avec la société Zarcom, dont Monsieur Karim X... était gérant, ce dernier bénéficiait d'une large liberté pour gérer l'hôtel Etap Hôtel, dans le respect des normes fixées par le contrat de franchise conclu avec la société Etap Hotel, que les directives données étaient inhérentes à la convention de franchise que la société Hoteco était elle-même tenue de respecter, qu'elle ne s'était jamais immiscée dans son organisation du travail, le recrutement du personnel, le choix des sous-traitants ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces conditions d'exploitation propres à la société Hoteco exclusives d'un contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1984 du code civil et de l'article L. 1221-1 du code du travail ;

ALORS, DE SEPTIÈME PART, QUE le contrat de travail se définit comme l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; qu'en se bornant à énoncer, pour retenir l'existence d'un contrat de travail entre Monsieur Karim X... et la société Hoteco, que celle-ci donnait des ordres à Monsieur Karim X..., allant audelà du contrat de mandat-gérance et de sa qualité de propriétaire de fonds de commerce, et sans qu'elle puisse s'abriter derrière le contrat de franchise et que la société Hoteco avait pouvoir de sanctionner Monsieur Karim X... en cas de manquement allant de la sanction financière à la résiliation du contrat, sans caractériser un quelconque pouvoir disciplinaire de cette dernière de sanctionner d'éventuels manquements de Monsieur Karim X... dans l'exécution des ordres et directives susceptibles d'être donnés par elle, la seule faculté reconnue au mandant de résilier le contrat de mandat en cas d'inexécution de ses obligations par le mandataire étant le fait de tout contrat et n'étant pas propre au contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1984 du code civil et de l'article L. 1221-1 du code du travail ;

ALORS, DE HUITIÈME PART, QUE si l'intégration dans un service organisé constitue un indice du lien de subordination, c'est uniquement lorsque les conditions de travail sont unilatéralement déterminées par le prétendu employeur ; que la société Hoteco faisait valoir au soutien de son contredit (pp. 16, 17 et 20) que Monsieur Karim X... était libre d'organiser son temps de travail, d'aller et venir, de développer une activité différente parallèle au contrat de gérance mandat, ce qui excluait tout lien de subordination de ce dernier à son égard ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur le pouvoir de Monsieur Karim X... de fixer lui-même ses propres conditions de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-28433
Date de la décision : 05/05/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 13 octobre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 mai. 2017, pourvoi n°15-28433


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.28433
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