CIV. 1
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 20 avril 2017
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10220 F
Pourvoi n° B 16-15.291
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. [X] [M], domicilié [Adresse 1],
contre l'arrêt rendu le 13 janvier 2015 par la cour d'appel de Grenoble (chambre des affaires familiales), dans le litige l'opposant à Mme [U] [W], divorcée [M], domiciliée [Adresse 2],
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 7 mars 2017, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Mansion, conseiller référendaire rapporteur, M. Matet, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de M. [M], de la SCP Ghestin, avocat de Mme [W] ;
Sur le rapport de M. Mansion, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [M] aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à Mme [W] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. [M]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé en toutes ses dispositions le jugement entrepris sauf en qu'il a fixé la récompense due par M. [M] à la communauté à la somme de 159.331,41 euros et y ajoutant, d'avoir dit que M. [M] doit une récompense à la communauté de 139.331,41 euros et débouté M. [M] de sa demande de récompense au profit de la communauté, à la charge de Mme [W], d'une somme équivalente à la valeur de l'appartement qu'elle a acquis le 10 juillet 2003,
AUX MOTIFS PROPRES QUE
M. [M] demande à la cour de dire que la récompense qu'il doit à la communauté s'élève à 117 381 euros; qu'il fait valoir à l'appui que la lapinière est en très mauvais état; que ce bâtiment, qui est à l'abandon, est très difficile à reconvertir'; que le coût du désamiantage est supérieur à la valeur de la construction, qu'il estime à un euro symbolique; que la communauté ne s'est pas appauvrie pour le financement de la construction de ce bâtiment, qui a été payé par M. [M] [M], frère de M. [X] [M]; que pour déterminer la récompense qui doit revenir à la communauté pour le paiement de la soulte prévue par la donation-partage intervenue le 11 février 1988 et de celle versée dans le cadre de l'échange de parcelles réalisé le 3 novembre 1977, l'expert a surévalué les parcelles litigieuses ;
Attendu que Mme [W] conclut à la confirmation du jugement en objectant que M. [M] n'a jamais été en mesure de prouver que son frère lui a laissé un terrain;
Attendu que selon l'article 954 alinéa premier du code de procédure civile: « Les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées » ;
Attendu que M. [W] n'invoque aucun fondement juridique à l'appui de sa prétention;
Vu l'article 12 du code de procédure civile ;
Attendu que selon l'article 1412 du code civil, récompense est due à la communauté qui a acquitté la dette personnelle d'un époux ;
Attendu que l'article 1469 du même code dispose que: « La récompense est, en général, égale à la plus faible des deux sommes que représente la dépense faite et le profit subsistant.
Elle ne peut, toutefois, être moins que la dépense faite quand celle-ci était nécessaire.
Elle ne peut être moins que le profit subsistant, quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la liquidation de la communauté, dans le patrimoine emprunteur. Si le bien acquis, conservé ou amélioré a été aliéné avant la liquidation, le profit est évalué au jour de l'aliénation; si un nouveau bien a été subrogé au bien aliéné, le profit est évalué sur ce nouveau bien »;
- à raison de l'édification d'une lapinière :
Attendu en l'espèce qu'il ressort du rapport de M. [P] que cette lapinière, qui appartient en propre M. [M] a été construite en 1978/1979, grâce à la somme de 50 000 euros prêtée par M. [M] [M], frère de l'appelant; que les époux [M] ont alors signé une reconnaissance de dette, pour 50 000 francs, au profit de M. [M] [M]; que M. [X] [M] soutient que cette dette a été remboursée au moyen d'un terrain lui ayant appartenu en propre, abandonné à M. [M] [M] ;
Attendu qu'à hauteur d'appel, M. [X] [M] produit aux débats deux attestations de M. [M] [M] par lesquelles ce dernier indique, d'une part, après avoir rappelé qu'il a prêté 50 000 francs à son frère, que « Celui-ci me l'a rendu par le terrain » et, d'autre part, que « Lors de la donation-partage effectuée le 11.02.1988 mes parents m'ont laissé du terrain en remboursement de la somme de 50 000 francs prêtée à mon frère le 30.05.1988 pour la construction du lapinier » ;
Attendu qu'il ressort de ces attestations, dont la validité n'a pas été mise en cause, que la somme de 50 000 francs ayant servi à l'édification de la lapinière n'a pas été remboursée par des fonds communs ; que M. [M] ne doit par conséquent aucune récompense à la communauté de ce chef; que le jugement sera infirmé sur ce point ;
- à raison de la soulte payée lors de la donation-partage du 11 février 1988:
Attendu que c'est par des motifs pertinents, que la cour adopte, que les premiers juges ont retenu que M. [M] est débiteur envers la communauté d'une récompense de 72 552,95 euros; qu'il suffira d'ajouter que les deux expertises ordonnées judiciairement concordent pour retenir, après examen contradictoire, que les parcelles à vocation agricole sise à [Localité 1] (Drôme) ont une valeur de 64 241,75 euros et celles situées à [Localité 2] (Drôme) de 900 euros; que l'évaluation réalisée par la SAFER à la seule demande de M. [M] ne l'a pas été contradictoirement, qu'elle ne comporte aucun élément de comparaison et n'explicite pas la méthodologie suivie pour aboutir à une évaluation inférieure de plus de moitié à celles, concordantes, des deux experts précédemment désignés; qu'en outre, M. [M] est mal fondé à prétendre, pour aboutir à une valeur totale, selon lui, de 3 800 euros seulement, pour une superficie de plus de 13 ha, qu'il conviendrait de déduire de la valeur des terrains celle des plantations qu'il a réalisées, outre celle d'un « entretien » assuré par lui, dès lors que les évaluations réalisées par les deux experts ont retenu qu'il s'agissait de terres libres d'occupation ;
Attendu en conséquence que le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu une récompense due à la communauté par M. [M] de ce chef de 72 552,95 euros ;
- à raison de la soulte versée lors de l'échange de parcelles intervenu le 3 novembre 1977:
Attendu que c'est par des motifs pertinents, que la cour adopte, que les premiers juges ont retenu que M. [M] est débiteur de ce chef d'une récompense envers la communauté de 998 euros; qu'il suffira d'ajouter que M. [M] n'invoque aucun élément probant à l'appui de son allégation selon laquelle les deux experts n'auraient pas estimé correctement la parcelle [Cadastre 1], objet de l'échange ayant donné lieu au paiement de la soulte ;
Attendu enfin que les parties s'accordent pour considérer que la récompense due par M. [M] à la communauté pour les travaux réalisés dans la maison qui lui appartient en propre s'élève à 65 780,49 euros ;
Attendu, en définitive, que M. [M] doit à la communauté une récompense de 139 331,44 euros (72 552,95 + 998 + 65.780,49) ;
Sur la récompense due par Mme [W] à la communauté:
Attendu que M. [M] demande à la cour de dire que Mme [W] doit à la communauté une récompense de 15 245 euros, outre une somme équivalente à la valeur de l'appartement qu'elle a acquis le 13 juillet 2003; qu'il fait valoir que Mme [W] a acheté, le 10 juillet 2003, pendant le mariage, un appartement qui est commun; qu'elle est donc selon lui redevable à la communauté d'une récompense égale à la valeur de cet immeuble;
Attendu que Mme [W] s'oppose à cette demande en concluant à la confirmation du jugement (qui a fixé la récompense qu'elle doit à la communauté à 15 245 euros), sans autrement s'en expliquer;
Vu l'article 954 du code de procédure civile ;
Attendu que M. [M] n'invoque aucun fondement juridique à l'appui de sa prétention ;
Vu l'article 12 du code de procédure civile ;
Attendu qu'il ressort des propres écritures de M. [M] que l'immeuble litigieux est commun, ce dont il résulte nécessairement que Mme [W] ne doit aucune récompense à la communauté de ce chef; que le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il a fixé la récompense que doit Mme [W] à la communauté à la somme de 15 245 euros;
Sur le matériel agricole et l'indemnité d'utilisation:
Attendu que M. [M] demande à la cour de dire que le matériel agricole à une valeur symbolique d'un euro et qu'aucune indemnité n'est due pour son utilisation; qu'il expose au soutien que le matériel agricole n'a aucune valeur et qu'il ne l'utilise pas;
Attendu que Mme [W] s'oppose à cette demande en objectant que le tracteur et la tonne litigieux ont une valeur très supérieure à celle retenue par le jugement; que M. [M] n'avance aucune preuve de ses allégations;
Vu l'article 954 du code de procédure civile;
Attendu que M. [M] n'invoque aucun fondement juridique à l'appui de sa prétention;
Vu l'article 12 du code de procédure civile;
Attendu que l'article 815-9 du code civil dispose que: « Chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l'effet des actes régulièrement passés au cours de l'indivision. A défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal.
L'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité »;
Attendu que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont retenu que le matériel agricole commun à une valeur de 1 500 euros ;
Attendu en outre qu'il est constant que M. [M] avait seul la jouissance de ce matériel, depuis 2001, Mme [W] ayant quitté le domicile conjugal; qu'il est par conséquent redevable d'une indemnité pour jouissance privative que les premiers juges ont exactement fixée à 50 euros par mois, à compter du 10 décembre 2001;
Sur les autres demandes: Attendu que le surplus du jugement n'est pas contesté à hauteur d'appel et sera par suite confirmé,
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'
aux termes de l'acte notarié du 11 février 1988, [X] [M] devait verser une soulte à ses frères et soeurs pour un montant total de 59500 francs. Il n'est pas contesté que ces sommes ont été réglées à l'aide des deniers de la communauté. Cette soulte représentait au jour de la donation-partage 35,10 % de la valeur de l'ensemble des biens attribués à [X] [M]. Pour déterminer le montant de cette récompense, le taux de 35,10 % doit être appliqué que la valeur actuelle des biens donnés selon leur état au jour de la donation de partage, soit: valeur de la maison de [Adresse 1] (avant les travaux): 139115 euros (et non 225600 euros somme correspondant à la valeur de la maison après les travaux)
Valeur de la parcelle [Cadastre 2]: 2446,80 euros
Valeur des parcelles agricoles de PARNANS (déduction faite des valeurs des parcelles 161, 163, 164, 649 et 652): 64241,75 euros, les deux expertises ayant abouti à la même valeur, qui sera donc retenue
Valeur totale des biens au jour de la donation-partage: 206703,55 euros Montant de la récompense : 206703,55x35,10=72552,95 euros
Soulte versée dans le cadre de l'échange du 3 novembre 1977
Il résulte de l'acte notarié établi le 3 novembre 1977 que [X] [M] a réglé une soule de 1663 francs. Il n'est pas contesté que ces sommes ont été réglées à l'aide des deniers de la communauté. Cette soulte représentait au jour de la donation-partage 78,85 % doit être appliqué que la valeur actuelle de cette parcelle, à savoir 1265,70 euros, soit une récompense de 998 euros.
Le total des récompenses dues par [X] [M] à la communauté s'élève donc à la somme de 20000+65780,49+72552,95+998=159331,44 euros.
Compte de récompense de [U] [W]
Les parties s'accordent pour reconnaître que [U] [W] doit à la communauté une somme de 15245 euros, suite à la somme de 100 000 francs qu'elle a prélevé sur le compte de SCEA LE SERVOIN.
Sur l'indemnité de jouissance
[X] [M] ayant conservé le matériel agricole, le premier expert a fixé l'indemnité d'occupation mensuelle à 50 euros. Les seconds experts ont fixé l'indemnité à 800 euros par an tout en relevant qu'il était difficile de procéder à une évaluation de ladite indemnité compte tenu de l'état du matériel. Vu la valeur du matériel, il sera retenu une indemnité de jouissance de 50 euros par mois,
ALORS QUE tout rapport amiable peut valoir, à titre de preuve, dès lors qu'il est soumis à la libre discussion des parties ; qu'en l'espèce, il est constant que l'évaluation de la SAFER (pièce n° 43) régulièrement produite au débat par M. [M], a été soumise à la libre discussion des parties ; qu'en déniant pourtant toute valeur probante à l'évaluation de la SAFER au motif que cette évaluation a été établie à la seule demande de M. [M] et ne l'a pas été contradictoirement, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile,
ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances observer et faire observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en déniant toute valeur probante à l'évaluation de la SAFER produite au débat par M. [M] au motif qu'elle ne comporte aucun élément de comparaison et n'explicite pas sa méthodologie, sans avoir préalablement invité les parties à s'expliquer sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir fixé à compter du 10 décembre 2001 et jusqu'au partage à 50 euros par mois le montant de l'indemnité de jouissance due par M. [M] à la communauté au titre de son utilisation du matériel agricole,
AUX MOTIFS PROPRES QUE
Sur le matériel agricole et l'indemnité d'utilisation:
Attendu que M. [M] demande à la cour de dire que le matériel agricole à une valeur symbolique d'un euro et qu'aucune indemnité n'est due pour son utilisation; qu'il expose au soutien que le matériel agricole n'a aucune valeur et qu'il ne l'utilise pas;
Attendu que Mme [W] s'oppose à cette demande en objectant que le tracteur et la tonne litigieux ont une valeur très supérieure à celle retenue par le jugement; que M. [M] n'avance aucune preuve de ses allégations;
Vu l'article 954 du code de procédure civile;
Attendu que M. [M] n'invoque aucun fondement juridique à l'appui de sa prétention;
Vu l'article 12 du code de procédure civile;
Attendu que l'article 815-9 du code civil dispose que: « Chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l'effet des actes régulièrement passés au cours de l'indivision. A défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal.
L'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité »;
Attendu que c'est par des motifs pertinents que la cour adopte que les premiers juges ont retenu que le matériel agricole commun à une valeur de 1 500 euros ;
Attendu en outre qu'il est constant que M. [M] avait seul la jouissance de ce matériel, depuis 2001, Mme [W] ayant quitté le domicile conjugal; qu'il est par conséquent redevable d'une indemnité pour jouissance privative que les premiers juges ont exactement fixée à 50 euros par mois, à compter du 10 décembre 2001;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE
[X] [M] ayant conservé le matériel agricole, le premier expert a fixé l'indemnité d'occupation mensuelle à 50 euros. Les seconds experts ont fixé l'indemnité à 800 euros par an tout en relevant qu'il était difficile de procéder à une évaluation de ladite indemnité compte tenu de l'état du matériel. Vu la valeur du matériel, il sera retenu une indemnité de jouissance de 50 euros par mois,
ALORS QU'un indivisaire n'est redevable d'une indemnité d'occupation que s'il use ou jouit privativement de la chose indivise; que la jouissance privative d'un bien suppose l'impossibilité de droit ou de fait pour les co-indivisaires d'user de la chose ; qu'en se bornant, pour condamner M. [M] à payer une indemnité de jouissance, à relever que M. [M] avait conservé le matériel agricole et qu'il est constant que M. [M] avait seul la jouissance de ce matériel depuis 2001, Mme [W] ayant quitté le domicile conjugal, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé l'impossibilité de droit ou de fait pour la co-indivisaire d'user de la chose, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 815-9 du code civil.