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20/04/2017 | FRANCE | N°15-16262

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 avril 2017, 15-16262


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles,11 février 2015), que M. [H], engagé par la société Shell française, devenue la société des Pétroles Shell, occupant en dernier lieu un poste d'ingénieur commercial au sein de la division lubrifiants, a été licencié pour motif économique par lettre du 7 juillet 2010 dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi, après avoir refusé une mesure de cessation anticipée d'activité ;

Attendu que la société fait grief à l'ar

rêt de la condamner au paiement d'une somme à titre de dommages-intérêts en raison de l'...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles,11 février 2015), que M. [H], engagé par la société Shell française, devenue la société des Pétroles Shell, occupant en dernier lieu un poste d'ingénieur commercial au sein de la division lubrifiants, a été licencié pour motif économique par lettre du 7 juillet 2010 dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi, après avoir refusé une mesure de cessation anticipée d'activité ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement d'une somme à titre de dommages-intérêts en raison de l'inégalité de traitement dont a fait l'objet le salarié dans la mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l'emploi, alors, selon le moyen :

1°/ qu'un plan de sauvegarde de l'emploi peut contenir des mesures réservées à certains salariés lorsque tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique au regard de l'avantage en cause peuvent bénéficier de cet avantage ; que les salariés éligibles à un mécanisme d'entreprise de cessation anticipée d'activité ne se trouvent pas dans une situation identique à celle des autres salariés dont le licenciement est envisagé ; qu'en effet, ces derniers perdent nécessairement, après la rupture de leur contrat de travail, l'intégralité de leur salaire et donc l'essentiel de leurs revenus, cependant que les salariés âgés d'au moins 55 ans éligibles au mécanisme de cessation anticipée d'activité peuvent bénéficier d'une allocation de préretraite intégralement prise en charge par l'employeur jusqu'à la date de liquidation de leur retraite à taux plein ; qu'en condamnant la société des Pétroles Shell à indemniser le salarié au titre de l'inégalité de traitement dont le salarié aurait fait l'objet dans la mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l'emploi, après avoir pourtant constaté que, bien qu'intégré dans le groupe MSA 1 en raison de son âge et de son ancienneté, le salarié avait refusé de bénéficier du dispositif de cessation anticipée d'activité, ce dont il résultait que l'intéressé ne se trouvait pas, à la date de son licenciement et suivant les prévisions du plan de sauvegarde de l'emploi, dans la même situation que les autres salariés dont le licenciement était envisagé, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui découlaient de ses constatations au regard des dispositions de l'article L. 1133-2 du code du travail ;

2°/ qu'un plan de sauvegarde de l'emploi peut contenir des mesures réservées à certains salariés lorsque la différence de traitement est justifiée par des raisons objectives et pertinentes, et que les règles déterminant les conditions d'attribution de cet avantage sont préalablement définies et contrôlables ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que le plan de sauvegarde de l'emploi mis en oeuvre le 1er septembre 2009 avait vocation à équilibrer les mesures prises à l'égard de l'ensemble des classes d'âge représentées dans l'entreprise en minorant les avantages du plan pour les plus âgés à proportion de l'avantage social auquel ils étaient éligibles et auquel, inversement, les plus jeunes ne pouvaient pas prétendre, et que les règles déterminant l'octroi des avantages liés respectivement à la cessation anticipée d'activité et au licenciement pour motif économique avaient préalablement été définies dans le cadre de la négociation du plan de sauvegarde de l'emploi ; que, dès lors, le double objectif de maintien de l'emploi et d'équilibre des situations visé dans le plan de sauvegarde de l'emploi mis en oeuvre par la société des Pétroles Shell étant légitime, et la mesure litigieuse participant à la réalisation de cet objectif de manière pertinente et adaptée, la cour d'appel, en condamnant la société des Pétroles Shell à indemniser le salarié en raison de l'inégalité de traitement dont le salarié aurait été l'objet dans la mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l'emploi, a violé l'article L. 1133-2 du code du travail ;

Mais attendu que si un plan de sauvegarde de l'emploi peut contenir des mesures réservées à certains salariés, c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique au regard de l'avantage en cause puissent bénéficier de cet avantage, à moins qu'une différence de traitement soit justifiée par des raisons objectives et pertinentes et que les règles déterminant les conditions de cet avantage soient préalablement définies et contrôlables ;

Et attendu qu'ayant constaté, d'une part, que le salarié avait refusé une mesure de cessation anticipée d'activité et que cette décision avait pour effet de le priver automatiquement des dispositions favorables du plan de sauvegarde de l'emploi tant pécuniaires qu'en terme de recherche d'emploi, d'autre part, que ce dispositif avait manifestement pour objectif d'exercer une pression sur le salarié afin qu'il accepte une mesure de cessation anticipée d'activité, la cour d'appel, qui a relevé qu'il n'était pas démontré que le salarié se trouvait dans une situation objectivement plus favorable que les salariés des autres catégories, a retenu à bon droit qu'il faisait l'objet d'une différence de traitement qui n'était pas justifiée par des raisons objectives et pertinentes ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société des Pétroles Shell aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande
de la société des Pétroles Shell et condamne celle-ci à payer à M. [H] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt avril deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour la société des Pétroles Shell

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société des pétroles Shell, employeur, à verser à monsieur [H], salarié, des dommages et intérêts d'un montant de 75 000 euros en raison de l'inégalité de traitement dont il aurait été l'objet dans la mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Shell,

AUX MOTIFS QUE monsieur [H] a été engagé, par la société Shell française, devenue la société des pétroles Shell, comme employé de service, initialement par contrat de travail à durée déterminée du 26 juin 1974, qui a été suivi d'un contrat de travail à durée indéterminée ; qu'à la suite de promotions successives, monsieur [H] occupait en dernier lieu un poste d'ingénieur commercial sur la zone géographique Ile-de-France Ouest, au sein de la division Lubrifiants, exerçant ses fonctions en télétravail depuis 2007, pour une rémunération composée d'un fixe mensuel de 4 688,56 euros assorti d'une part variable dépendant des résultats ; que les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale du Pétrole ; qu'au mois de septembre 2009, la société des pétroles Shell a engagé une procédure d'information consultation sur un projet de réorganisation du service commercial de distribution en France des Lubrifiants et de plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) ; que, par courrier du 19 mai 2010, la société des pétroles Shell a informé monsieur [H] de la suppression de son poste à compter du 1er juillet 2010 et de ce qu'à cette date et en l'absence de reclassement interne, il était éligible à la mesure de cessation anticipée d'activité (CAA) définie au paragraphe 1.5 du PSE (MSA 1) ; qu'elle lui a indiqué qu'en application des dispositions de l'article 1.5 du PSE un délai d'un mois à compter de la réception du courrier lui était donné pour faire connaître sa réponse, étant précisé qu'à défaut de réponse il serait réputé avoir accepté de manière définitive la MSA 1 et qu'en cas de refus et à défaut de reclassement il se verrait appliquer la procédure de licenciement pour motif économique avec bénéfice des indemnités conventionnelles de licenciement prévues dans la convention collective ; que monsieur [H], qui avait refusé la CAA, a été licencié pour motif économique par lettre du 7 juillet 2010 ainsi libellée : « (...) Le motif économique est le suivant : Suppression du poste FBAM Consumers suite à la réorganisation du service Lubrifiants en France. /Cette réorganisation a été rendue nécessaire pour sauvegarder la compétitivité de l'entreprise. /Le Business Lubrifiants, en France, est confronté à un contexte économique en déclin sur l'ensemble des segments clients : automobile, industrie... Ce marché est désormais arrivé à maturité avec l'apparition de nouvelles technologies moins consommatrices d'huiles, entraînant par voie de conséquence une baisse progressive du portefeuille clients. /En effet, le marché français connaît une baisse régulière depuis l'année 2000, qui s'est accélérée en 2008 et 2009 sous l'effet de la crise. Cette décroissance s'est traduite, notamment en 2009, par une perte des parts de marché de Shell face à une concurrence de plus en plus agressive mise en oeuvre par les nombreux acteurs économiques présents sur ce même périmètre clients restreint. /Ce nouveau contexte engendre une érosion des marges et une diminution des volumes de 20 %, qui génère un coût unitaire plus élevé et sans vision d'amélioration à court et moyen terme. La hausse des prix des huiles de base impacte une partie des coûts de production devant être supportés par cette activité sans possibilité de les répercuter intégralement sur le client, compte tenu du contexte concurrentiel. /De plus, le désinvestissement des unités de raffinage en France impacte également, et de manière significative les coûts en matière de logistique au sein de ce Business. /D'ailleurs, les récentes études démontrent que le rapport entre la marge et les coûts du Business Lubrifiants en France est inférieur à celui d'autres pays en Europe. /Par conséquent, dans le but de sauvegarder la compétitivité de l'activité Lubrifiants, et ce malgré un déclin du marché de 2 % par an en moyenne, il s'avère nécessaire de se concentrer sur les secteurs prioritaires dotés d'un potentiel de croissance mais également de réduire les coûts directs du business. /Pour ce faire, le business Lubrifiants doit être en mesure d'adapter son offre client et donc se doit de la simplifier. Il doit aussi standardiser ses processus et adapter son organisation selon un modèle standard. /Ceci a pour conséquence la suppression du poste FBAM Consumers. /Nous sommes aujourd'hui dans l'impossibilité de procéder à votre reclassement interne (...) » ; que, sur l'inégalité de traitement, le plan de sauvegarde de l'emploi distingue trois catégories de salariés : - la catégorie MSA 1, composée de salariés éligibles aux dispositions relatives à la Cessation Anticipée d'Activité (CAA), âgés de 55 ans et plus, sous réserve des carrières longues, étant au minimum à 5 ans de l'âge de retraite à taux plein de la sécurité sociale, ayant une ancienneté minimum de 20 ans ; qu'ils peuvent demander une CAA avec maintien du contrat de travail qui leur ouvre droit au maintien de 84% de leur salaire ; qu'en cas de refus de la CAA et de licenciement pour motif économique ils ont droit aux indemnités conventionnelles de licenciement ; que quel que soit leur choix, pour autant qu'ils soient en recherche d'emploi ils bénéficient de l'accompagnement par le cabinet d'outplacement pour une durée maximale de 17 mois à compter de la suppression du poste, sans engagement d'Offres Valables d'Emploi. Les autres salariés ont droit à 2 Offres Valables d'Emploi ; qu'ils ne bénéficient pas de la période d'accompagnement du salarié (maintien du salarié sur le payroll) qui prévoit qu'afin de faciliter la recherche de reclassement du salarié celui-ci bénéficie d'une période de maintien de son statut de salarié pour une durée de plusieurs mois, variant en fonction de l'âge, à compter de la date de suppression du poste, et atteignant 8 mois pour les salariés de plus de 50 ans ; /- la catégorie MSA 2, composée des salariés ayant au moins 50 ans, pouvant prétendre à une retraite au taux plein Sécurité Sociale dans 5 à 10 ans, ayant un minimum de 25 ans d'ancienneté ; que ces salariés bénéficient d'indemnités de licenciement spécifiques en raison de la suppression dans ce PSE de dispositions favorables les concernant figurant dans le PSE 2007 ; qu'en fonction de l'éloignement de la date de la retraite à taux plein (TP) le nombre total de mois varie de 42 (TP-5 et TP-6) à 85 mois (TP-10) ; / - la catégorie MSA 3, composée des autres salariés ; qu'ils ont droit aux indemnités de licenciement prévues par la loi ou la convention collective, majorées en fonction de l'âge et de l'ancienneté ; que monsieur [H] soutient qu'ayant refusé la CAA et ayant donc été licencié pour motif économique le PSE l'a abusivement privé du bénéfice d'indemnités de licenciement majorées, de 8 mois de délai et rémunération supplémentaire et de 2 Offres Valables d'Emploi ; que si un plan de sauvegarde de l'emploi peut contenir des mesures réservées à certains salariés, c'est à la condition que tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique au regard de l'avantage en cause puissent bénéficier de cet avantage, à moins qu'une différence de traitement soit justifiée par des raisons objectives et pertinentes, et que les règles déterminant les conditions d'attribution de cet avantage soient préalablement définies et contrôlables ; qu'en l'espèce, la décision, pour légitime qu'elle puisse être, du salarié éligible à la CAA d'y renoncer avait pour effet de le priver automatiquement des dispositions favorables du Plan de Sauvegarde de l'Emploi tant pécuniaires puisqu'il n'avait droit à aucune majoration d'indemnité de licenciement qu'en termes de recherche d'emploi puisqu'il était également privé de 8 mois de maintien de salaire et de deux Offres Valables de Reclassement faites par le cabinet d'outplacement ; que ce dispositif avait manifestement pour objectif d'exercer une pression sur le salarié afin qu'il accepte une CAA ; que, dès lors qu'il refusait ce dispositif et qu'il était licencié pour motif économique, il n'est pas démontré qu'il se trouvait dans une situation objectivement plus favorable, notamment au regard de l'indemnisation par Pôle emploi, que les salariés des autres catégories ; que la différence de traitement n'était donc pas justifiée par des raisons objectives et pertinentes ; qu'infirmant le jugement, il convient donc de dire que monsieur [H] a subi une inégalité de traitement ; que, sur les dommages et intérêts pour inégalité de traitement, le préjudice subi du fait de l'absence de majoration de l'indemnité de licenciement, du défaut du maintien intégral du salaire pendant 8 mois et de l'absence d'offres valables de reclassement sera réparé par l'allocation d'une somme de 75 000 euros (arrêt, pp. 2 – 5),

ALORS, D'UNE PART, QU'un plan de sauvegarde de l'emploi peut contenir des mesures réservées à certains salariés lorsque tous les salariés de l'entreprise placés dans une situation identique au regard de l'avantage en cause peuvent bénéficier de cet avantage ; que les salariés éligibles à un mécanisme d'entreprise de cessation anticipée d'activité ne se trouvent pas dans une situation identique à celle des autres salariés dont le licenciement est envisagé ; qu'en effet, ces derniers perdent nécessairement, après la rupture de leur contrat de travail, l'intégralité de leur salaire et donc l'essentiel de leurs revenus, cependant que les salariés âgés d'au moins 55 ans éligibles au mécanisme de cessation anticipée d'activité peuvent bénéficier d'une allocation de préretraite intégralement prise en charge par l'employeur jusqu'à la date de liquidation de leur retraite à taux plein ; qu'en condamnant la société des pétroles Shell à indemniser monsieur [H] au titre de l'inégalité de traitement dont le salarié aurait fait l'objet dans la mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l'emploi, après avoir pourtant constaté que, bien qu'intégré dans le groupe MSA 1 en raison de son âge et de son ancienneté, monsieur [H] avait refusé de bénéficier du dispositif de cessation anticipée d'activité, ce dont il résultait que le salarié ne se trouvait pas, à la date de son licenciement et suivant les prévisions du plan de sauvegarde de l'emploi, dans la même situation que les autres salariés dont le licenciement était envisagé, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui découlaient de ses constatations au regard des dispositions de l'article L. 1133-2 du code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'un plan de sauvegarde de l'emploi peut contenir des mesures réservées à certains salariés lorsque la différence de traitement est justifiée par des raisons objectives et pertinentes, et que les règles déterminant les conditions d'attribution de cet avantage sont préalablement définies et contrôlables ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que le plan de sauvegarde de l'emploi mis en oeuvre le 1er septembre 2009 avait vocation à équilibrer les mesures prises à l'égard de l'ensemble des classes d'âge représentées dans l'entreprise en minorant les avantages du plan pour les plus âgés à proportion de l'avantage social auquel ils étaient éligibles et auquel, inversement, les plus jeunes ne pouvaient pas prétendre, et que les règles déterminant l'octroi des avantages liés respectivement à la cessation anticipée d'activité et au licenciement pour motif économique avaient préalablement été définies dans le cadre de la négociation du plan de sauvegarde de l'emploi ; que, dès lors, le double objectif de maintien de l'emploi et d'équilibre des situations visé dans le plan de sauvegarde de l'emploi mis en oeuvre par la société des Pétroles Shell étant légitime, et la mesure litigieuse participant à la réalisation de cet objectif de manière pertinente et adaptée, la cour d'appel, en condamnant la société des Pétroles Shell à indemniser monsieur [H] en raison de l'inégalité de traitement dont le salarié aurait été l'objet dans la mise en oeuvre du plan de sauvegarde de l'emploi, a violé l'article L. 1133-2 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société des pétroles Shell, employeur, à verser à monsieur [H], salarié, une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant de 50 000 euros,

AUX MOTIFS QUE, sur la rupture, en application de l'article L. 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques, à des mutations technologiques, à une réorganisation de l'entreprise ou, dans certaines conditions, à une cessation d'activité ; que la réorganisation d'une entreprise, si elle n'est pas justifiée par des difficultés économiques ou par des mutations technologiques, doit être indispensable à la sauvegarde de sa compétitivité ou de celle du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ; qu'il n'est pas discuté que la société des pétroles Shell fait partie du groupe Shell ; que la lettre de licenciement ne fait pas état de la situation du secteur d'activité Lubrifiants du groupe Shell et de ses éventuelles difficultés économiques ; que l'expertise du cabinet Syndex, établie à la demande du comité d'entreprise, ne donne aucun élément sur l'état du secteur d'activité des lubrifiants du groupe et se borne à analyser la situation des Lubrifiants en France ; qu'il conclut d'ailleurs à la bonne rentabilité financière du business et à l'absence d'impératif financier nécessitant la suppression de postes ; que la société des pétroles Shell ne communique aucun élément relatif au secteur d'activité Lubrifiants du groupe ; qu'il convient, infirmant le jugement, de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que, sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, monsieur [H] qui, à la date du licenciement, comptait au moins deux ans d'ancienneté dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés a droit, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, à une indemnité qui ne saurait être inférieure aux salaires bruts perçus au cours des six derniers mois précédant son licenciement ; qu'au regard de son âge au moment du licenciement, 57 ans, de son ancienneté d'environ 36 ans dans l'entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée et de la justification de ce qu'il n'a pas retrouvé d'emploi et a liquidé ses droits à la retraite au mois de juin 2013, il convient de lui allouer, en réparation du préjudice matériel et moral subi, la somme de 50 000 euros (arrêt, p. 5),

ALORS QUE la réorganisation de l'entreprise constitue un motif économique autonome de licenciement dès lors qu'elle est effectuée pour en sauvegarder la compétitivité ou celle du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ; que répond à ce critère la réorganisation mise en oeuvre pour prévenir des difficultés économiques à venir et leurs conséquences sur l'emploi, sans être subordonnée à l'existence de difficultés économiques à la date du licenciement ; qu'ayant relevé que, selon les termes de la lettre de licenciement notifiée le 7 juillet 2010, la réorganisation du service Lubrifiants était nécessaire pour sauvegarder la compétitivité de la société des Pétroles Shell sur un marché français des lubrifiants en net déclin depuis l'année 2000 et marqué par l'apparition de nouvelles technologies moins consommatrices d'huiles, par une concurrence accrue entre les acteurs économiques et par une augmentation importante des coûts de production et de logistique, le tout se manifestant, sur le territoire français, par une « baisse progressive du portefeuille clients », la « perte des parts de marché de Shell », l'« érosion des marges » de celle-ci et une « diminution des volumes de 20% », en se bornant à énoncer que la société des pétroles Shell ne communiquait pas d'élément relatif au secteur d'activité Lubrifiants du groupe, sans rechercher si, nonobstant l'absence de difficultés économiques établies à la date du licenciement, la réorganisation du service Lubrifiants en France, et la suppression consécutive du poste de monsieur [H], n'étaient pas nécessaires à la sauvegarde de la compétitivité de la société des Pétroles Shell et, en conséquence, de l'activité « lubrifiants » du groupe Shell en France, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-16262
Date de la décision : 20/04/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 11 février 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 avr. 2017, pourvoi n°15-16262


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Le Bret-Desaché, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.16262
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