La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/03/2017 | FRANCE | N°15-28431

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 mars 2017, 15-28431


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause et l'article L. 1221-1 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme [C] a été engagée le 4 septembre 2006 par la société Costa Del Sol en qualité de collaboratrice agent de maîtrise et que le 14 avril 2009, la société l'a affectée à raison de deux tiers de son temps dans une fonction commerciale consistant en la vente au sein d'un magasin ; qu'invoquant une modification de son contrat

de travail qu'elle refusait, la salariée ne s'est plus présentée sur son lieu d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause et l'article L. 1221-1 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme [C] a été engagée le 4 septembre 2006 par la société Costa Del Sol en qualité de collaboratrice agent de maîtrise et que le 14 avril 2009, la société l'a affectée à raison de deux tiers de son temps dans une fonction commerciale consistant en la vente au sein d'un magasin ; qu'invoquant une modification de son contrat de travail qu'elle refusait, la salariée ne s'est plus présentée sur son lieu de travail et a fait l'objet d'un avertissement pour insubordination le 2 juin 2009, puis d'un licenciement pour cause réelle et sérieuse le 17 juin 2009, après une mise à pied à titre conservatoire du 9 juin 2009 ;

Attendu que pour dire que l'employeur n'avait pas procédé à une modification du contrat de travail de la salariée et juger le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le contrat de travail précisait que les fonctions confiées à la salariée étaient évolutives et directement liées au besoin de la société et qu'aucun des éléments substantiels du contrat de travail, tels que la rémunération, la qualification et le lien de subordination n'avaient été modifiés, en sorte que le refus de la salariée d'accepter le changement de ses conditions de travail justifiait le licenciement ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher quelles étaient, avant la décision de l'employeur, les fonctions réellement exercées par la salariée en sa qualité de collaboratrice agent de maîtrise pour lesquelles elle avait été engagée, et si la proposition de l'employeur transformait ses attributions en lui confiant le poste de vendeuse pendant les deux-tiers de son temps de travail, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le licenciement de Mme [C] était fondée sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 11 septembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre ;

Condamne la société Costa Del Sol aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Costa Del Sol à payer à Mme [C] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mars deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme [C]

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit qu'il n'y a pas modification du contrat de travail mais changement des conditions de travail, dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et d'AVOIR débouté Mme [C] de l'intégralité de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement abusif et pour préjudice distinct ;

AUX MOTIFS QUE sur la règle non bis in idem : s'il est constant qu'un même fait fautif ne peut donner lieu à double sanction, il est tout aussi constant que la poursuite du comportement fautif peut entraîner une nouvelle sanction ; qu'en l'espèce, la salariée a été mise à pied conservatoire le 9 juin 2009 mais a persisté dans son refus d'accepter les changements apportés à son contrat de travail ; que l'employeur était donc tout à fait en droit devant le renouvellement du fait fautif de sanctionner à nouveau la salariée ; que de manière surabondante, il doit être rappelé que le licenciement a été prononcé pour cause réelle et sérieuse et ne situe donc pas sur le terrain disciplinaire ;
sur le licenciement : (…) l'employeur ne peut modifier unilatéralement le contrat de travail sans l'accord du salarié ; que toutefois, dans le cadre de son pouvoir de direction, il lui est loisible d'imposer au salarié un changement de ses conditions de travail ; qu'en l'espèce, il est reproché à Mme [C] d'avoir refusé un changement de ses conditions de travail en refusant son affectation pour deux tiers de son temps au site de [Établissement 1] ;
que cette dernière soutient que cette affectation constitue une véritable modification de son contrat de travail ; qu'or il résulte de la lecture du contrat de travail que la salariée a été embauchée le 4 septembre 2006 par la société Costa del Sol en qualité de collaborateur statut agent de maîtrise au coefficient de 220, le contrat précisant toutefois que le coefficient légal était de 180 ; qu'en préliminaire au contrat de travail, il était précisé qu'il était expressément convenu entre les parties que le poste et les tâches dévolues à la salariée étaient évolutives et directement liées aux besoins de la société ; que l'article 2 du contrat de travail énumérait les missions de la salariée qui consistaient notamment à assurer le développement des magasins dans les domaines du marketing, de la communication, des ventes et du suivi des frais généraux ; qu'il était expressément rappelé qu'en tout état de cause, les attributions de Mme [C] étaient évolutives et convenues comme telles et en tant que de besoin précisées par annexe ; que par courrier du 14 avril 2009, l'employeur informait la salariée de l'évolution de ses tâches consistant pour un tiers en une fonction commerciale stratégique consistant notamment en la promotion de l'enseigne, la recherche de nouveaux marchés et pour deux tiers à une fonction commerciale opérationnelle à savoir la vente au sein du magasin de [Établissement 1] ; qu'aucun des éléments substantiels du contrat de travail, à savoir la rémunération, la qualification et le lien de subordination n'étaient modifiés et c'est à juste titre que l'employeur a considéré qu'il n'y avait pas modification du contrat de travail mais simple changement des conditions de travail et a, devant le refus injustifié de la salariée, décidé de procéder à son licenciement ; que le refus de la salariée d'accepter le changement des conditions de travail justifie donc le licenciement pour cause réelle et sérieuse ;

1°- ALORS QU'en application de la règle « non bis in indem », est sans cause réelle et sérieuse le licenciement motivé par des griefs déjà sanctionnés ; que Mme [C] a fait valoir que la société Costa del Sol avait violé cette règle en lui infligeant une première fois, le 2 juin 2009, un avertissement en raison de son insubordination pour avoir refusé de se soumettre à la modification de ses attributions et en prononçant ensuite, le 17 juin 2009, son licenciement pour les mêmes motifs ; qu'en retenant que « la salariée a été mise à pied conservatoire le 9 juin 2009 mais a persisté dans son refus d'accepter les changements apportés à son contrat de travail» pour en déduire que « l'employeur était donc tout à fait en droit devant le renouvellement fautif de sanctionner à nouveau la salariée », sans la moindre explication sur l'avertissement précité du 2 juin 2009 qui avait déjà sanctionné Mme [C] pour ce même motif, la cour d'appel qui n'a pas répondu aux conclusions de Mme [C], a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°- ALORS qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des articles L.1331-1 et L.1231-1 du code du travail ;

3°- ALORS qu'en tout état de cause, ne constitue pas un fait fautif persistant qui autoriserait une nouvelle sanction, le maintien du refus du salarié de se voir imposer une modification de son contrat de travail, lequel est un seul et même acte et ne procède donc pas d'une réitération d'un même fait estimé fautif ; qu'à supposer que la cour d'appel ait entendu se fonder sur le caractère persistant du refus pour justifier une nouvelle sanction, la cour a violé les articles L.1221-1 et L.1231-1 du code du travail ;

4°- ALORS subsidiairement qu'est constitutif d'un licenciement disciplinaire, le licenciement motivé par l'insubordination du salarié ; qu'ayant relevé que Mme [C] avait été licenciée en raison de son « refus persistant de [se] soumettre à un simple changement de [ses] conditions de travail sans aucune modification d'un élément dit substantiel du contrat de travail », ce dont il ressort que la société Costa del Sol a reproché à Mme [C] son insubordination et en jugeant cependant, de manière surabondante, pour écarter en tout état de cause la règle « non bis in idem », que le licenciement ne présente pas de caractère disciplinaire au motif parfaitement inopérant que le licenciement a été prononcé pour cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les articles L.1331-1 et L.1231-1 du code du travail ;

5 °- ALORS QUE la transformation des attributions du salarié qui s'apprécie au regard des fonctions réellement exercées par le salarié avant le changement imposé par l'employeur, est constitutive d'une modification du contrat de travail que le salarié est en droit de refuser, quand bien même ne s'accompagnerait-elle pas d'une déqualification ; qu'en écartant toute modification du contrat de travail de Mme [C] au motif inopérant que son contrat de travail prévoyait des attributions évolutives et que sa rémunération, sa qualification et son lien de subordination n'avaient pas été modifiés sans s'expliquer sur les fonctions réellement exercées avant la modification de son poste par Mme [C] qui n'a jamais occupé le poste de vendeuse en magasin mais était en charge de la communication et s'était vu confier en outre des missions de recrutement, de formation mais aussi de suivi des frais généraux, de travaux informatiques, pour l'ensemble des boutiques, ce dont il s'évinçait que la réduction définitive de ses attributions à celle de vendeuse pour les deux tiers de son temps, affectant la nature même de ses fonctions, était constitutive d'une modification de son contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil et de l'article L.1221-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-28431
Date de la décision : 09/03/2017
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Fort-de-France, 11 septembre 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 mar. 2017, pourvoi n°15-28431


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:15.28431
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award