LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 9 octobre 2015), que M. [F], employé en qualité d'agent du service commercial de l'établissement public industriel et commercial SNCF, devenu SNCF mobilités, a fait l'objet d'une mise à pied d'un jour avec sursis pour avoir eu des activités mensuelles très inférieures à la moyenne de l'équipe et n'avoir pas utilisé les outils informatiques ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale en contestation de cette sanction et pour obtenir des dommages et intérêts et être placé dans un positionnement avec une rémunération supérieure ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'agent fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes en annulation de la mise à pied disciplinaire et en condamnation de l'employeur à lui verser des dommages et intérêts pour sanction abusive, alors, selon le moyen :
1°/ que l'insuffisance professionnelle, sauf mauvaise volonté délibérée du salarié, ne constitue pas une faute ; qu'en se fondant, pour estimer que la sanction disciplinaire était justifiée, sur le fait que M. [F] ne réalisait que 0,79 opérations par jour tandis que la moyenne de l'équipe était de 3,77, ainsi que sur le fait que M. [F] n'utilisait pas les logiciels TPE /ACE, cependant que de tels manquements, dont elle n'a pas constaté qu'ils révélaient la mauvaise volonté délibérée du salarié, ne pouvaient tout au plus caractériser qu'une insuffisance professionnelle et non une faute susceptible de justifier une sanction disciplinaire, la cour d'appel, qui n'a pas déduit de ses propres constatations les conséquences qui s'en évinçaient, a violé l'article L. 1331-1 du code du travail.
2°/ que l'insuffisance professionnelle, sauf mauvaise volonté délibérée du salarié, ne constitue pas une faute ; qu'en retenant que les agissements de M. [F] étaient constitutifs d'une faute justifiant la mise à pied disciplinaire dont il avait fait l'objet, au regard du faible nombre d'opérations réalisé par rapport à celui réalisé par ses collègues, ainsi que de la non utilisation des outils TPE /Accelio, sans rechercher si ces carences étaient dues à une mauvaise volonté délibérée du salarié, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à caractériser une mauvaise volonté délibérée du salarié, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1331-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, ayant constaté qu'en novembre 2009, décembre 2010 et février 2011, le nombre d'opérations réalisées par le salarié et son activité commerciale étaient nettement inférieurs à la moyenne de celles de ses collègues et qu'il n'utilisait pas les appareils informatiques de vérification des titres de transport mis à sa disposition, a pu retenir que la carence de l'agent était fautive et que sa poursuite sur une longue période malgré les suivis professionnels justifiait la sanction ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'agent fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes de requalification au niveau C II 11 et de ses demandes de versement rétroactif des salaires dus à ce titre depuis janvier 2011, alors, selon le moyen, qu'il faisait valoir, dans ses écritures, qu'une partie des positions est attribuée automatiquement aux salariés les plus anciens, qui relèvent, en tant que tels, du contingent prioritaire ; que, pour que tel ne soit pas le cas, il est nécessaire de produire une « objection motivée du service » ; qu'ils faisaient partie de ce contingent prioritaire, ce qui n'était pas contesté par l'employeur, et qu'aucune objection motivée du service n'avait été produite par ce dernier ; qu'il s'en déduisait qu'ils auraient donc dû bénéficier de la position de rémunération demandée ; qu'en ne répondant pas à ce chef de conclusions pourtant déterminant de la solution du litige, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté qu'il résultait de l'article 13-4 du chapitre 6 du statut des relations collectives entre la SNCF et son personnel que « le choix des agents susceptibles de bénéficier du classement sur la position supérieure est fait en fonction de la qualité des services et de l'expérience acquise », la cour d'appel a relevé que l'agent avait été sanctionné à plusieurs reprises depuis 2003 et qu'en 2011, il avait obtenu, pour l'ensemble de ses activités, une note de 42 sur 215 alors que les agents qui avaient été promus à cette même période avaient bénéficié de notes comprises entre 140 et 204 et a pu décider, répondant aux conclusions, que l'agent ne pouvait pas bénéficier d'une promotion ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [F] aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mars deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour M. [F].
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur [F] de sa demande tendant à voir annuler la mise à pied disciplinaire qui lui a été notifiée le 14 février 2011 et à la condamnation de l'employeur à lui verser des dommages et intérêts pour sanction abusive.
AUX MOTIFS propres QUE le juge du contrat de travail saisi de la contestation sur le bien-fondé d'une sanction disciplinaire peut l'annuler si elle apparait irrégulière en la forme, injustifiée ou disproportionnée. L'employeur doit fournir au juge les éléments qu'il a retenus pour prendre la sanction : le salarié fournit également les éléments qui viennent à l'appui de ses allégations. En l'espèce, selon les termes même du courrier de notification au salarié de la sanction litigieuse, les faits qui lui sont reprochés tiennent à des activités mensuelles très inférieures à la moyenne de l'équipe et à une non utilisation des outils Accelio et TPE. Quatre missions sont dévolues aux agents du service commercial des trains (ASCT) : -la sécurité (opérations liées au départ des trains, à l'arrêt des trains en pleine voie, rondes….) ) la sureté (connaissances réglementaires positionnement… ) le service (gestion des annonces, port de la tenue, accueil des clients….) – la sauvegarde des recettes (contrôle des titres de transport et régularisation des voyageurs sans titre de transport valable). A l'appui de la sanction Infligée à M. [F], la SNCF produit, notamment aux débats le dossier "suivi des signalements, réclamations" relatif à l'intimé ayant donné Heu à l'entretien du 10 février 2011 portant les appréciations suivantes sur le comportement de l'intéressé à la date du 14 décembre 2010 : ''à ce jour, votre relevé d'activités mensuelles de 0,79 opérations par journée de travail alors que la moyenne de l'équipe est de 3,76. Pas d'émission de cc Accelio et pas d'utilisation de TPE" - à la date du 2 février 2011 : "doit s'impliquer davantage en activité commerciale. ..... Activité commerciale : insuffisante (0,79 par journée de travail moyenne de l'équipe : 3,77). N'utilise pas Accelio et le TPE". Ces différents chiffres et ratios ne sont pas critiqués par l'intimé. Il résulte, en outre, du point d'étape du 20 novembre 2009 que M. [F] qui s'était vu assigner en 2009 les objectifs suivants : "utilisation· TPE/Accelio pour l'émission des titres 100%; faire deux opérations par jour alors que la moyenne de son équipe était de 3,5, n'utilisait toujours pas, en novembre 2009, le TPE/Accelio et effectuait à cette date 0,48 opérations par jour. La carence fautive invoquée ·par J'employeur relativement à son activité· commerciale est, donc, avérée et sa réitération sur une longue période nonobstant les suivis professionnels et les points d'étape mis en place justifie le bien fondé de la sanction qui lui a été notifiée. M. [F] soutient, par .ailleurs, que faisant partie du contingent prioritaire pour l'année 2011, un passage à une position de rémunération supérieure aurait dû être effectué à son bénéfice. Cependant ainsi qu'il résulte de l'article 13-4 du chapitre 6 du statut des relations collectives entre la SNCF et son personnel : "le choix des agents susceptibles de bénéficier du classement sur la position supérieure est fait en fonction de la qualité des services et de l'expérience acquise......". Or il ressort des pièces du dossier que- M. [F] a été sanctionné à cinq reprises depuis 2004 (défaut de prise en charge de la clientèle en situation perturbée, port de tenue professionnelle incomplète, pas de port de casquette, activités mensuelles très ·inférieures à la moyenne de l'équipe et non utilisation des outils Accelio et TPE.). -en 2011, pour J'ensemble de ses activités, il a obtenu la note 42 sur 215 dont accueil des clients 15/40, sûreté 10/20, sécurité 22/55, plan de veille 5/20, sauvegarde des recettes : 0 point, étant relayé que les agent qui ont été promus à cette même période ont obtenu des notes comprises entre 140 et 204. Dans ces conditions, M. [F] ne peut être que débouté de ses demandes au titre de sa promotion, de rappel de salaires et de dommages intérêts. Il n'apparait pas inéquitable de laisser à la charge de la SNCF la totalité des frais non compris dans les dépens qu'elle a pu être amenée à exposer pour assurer la défense de ses intérêts. Il convient, par conséquent, de la débouter de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Les dépens de première instance et de l'appel seront mis à la charge de M. [F] lequel sera, par voie de conséquence, débouté de l'ensemble de ses demandes au titre des frais irrépétibles.
ALORS QUE l'insuffisance professionnelle, sauf mauvaise volonté délibérée du salarié, ne constitue pas une faute ; qu'en se fondant, pour estimer que la sanction disciplinaire était justifiée, sur le fait que M. [F] ne réalisait que 0,79 opérations par jour tandis que la moyenne de l'équipe était de 3,77, ainsi que sur le fait que M. [F] n'utilisait pas les logiciels TPE /ACE, cependant que de tels manquements, dont elle n'a pas constaté qu'ils révélaient la mauvaise volonté délibérée du salarié, ne pouvaient tout au plus caractériser qu'une insuffisance professionnelle et non une faute susceptible de justifier une sanction disciplinaire, la cour d'appel, qui n'a pas déduit de ses propres constatations les conséquences qui s'en évinçaient, a violé l'article L 1331-1 du code du travail.
Et ALORS QUE l'insuffisance professionnelle, sauf mauvaise volonté délibérée du salarié, ne constitue pas une faute ; qu'en retenant que les agissements de M. [F] étaient constitutifs d'une faute justifiant la mise à pied disciplinaire dont il avait fait l'objet, au regard du faible nombre d'opérations réalisé par rapport à celui réalisé par ses collègues, ainsi que de la non utilisation des outils TPE /Accelio, sans rechercher si ces carences étaient dues à une mauvaise volonté délibérée du salarié, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à caractériser une mauvaise volonté délibérée du salarié, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1331-1 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur [F] de sa demande de requalification au niveau C II 11 et de sa demande de versement rétroactif des salaires dus à ce titre depuis janvier 2011.
AUX MOTIFS QUE M. [F] soutient, par ailleurs, que faisant partie du contingent prioritaire pour l'année 2011, un passage à une position de rémunération supérieure aurait dû être effectué à son bénéfice. Cependant ainsi qu'il résulte de l'article 13-4 du chapitre 6 du statut des relations collectives entre la SNCF et son personnel : "le choix des agents susceptibles de bénéficier du classement sur la position supérieure est fait en fonction de la qualité des services et de l'expérience acquise. Or il ressort des pièces du dossier que :- M. [F] a été sanctionné à cinq reprises depuis 2004 (défaut de prise en charge de la clientèle en situation perturbée, port de tenue professionnelle incomplète, pas de port de casquette, activités mensuelles très inférieures à la moyenne de l'équipe et non utilisation des outils Accelio et TPE.) -en 2011, pour l'ensemble de ses activités, il a obtenu la note 42 sur 215 dont accueil des clients 15/40, sûreté 10/20, sécurité 22/55, plan de veille 5/20, sauvegarde des recettes : 0 point, étant relevé que les agents qui ont été promus à cette même période ont obtenu des notes comprises entre 140 et 204. Dans ces conditions, M. [F] ne peut être que débouté de ses demandes au titre de sa promotion, de rappel de salaires et de dommages intérêts.
Et AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE Monsieur [F] [W] occupe les fonctions d'agent du service commercial des trains. Monsieur [F] [W] soutient qu'il n'a pas bénéficié de la position de rémunération qualification C II 11, alors que celle-ci aurait dû lui être attribuée dès l'année 2011. Il considère que le fait de ne pas lui avoir attribué cette position de rémunération relève d'une sanction disciplinaire déguisée, voire même d'une double sanction. La S.N.C.F quant à elle vient soutenir qu'effectivement Monsieur [F] [W] n'a pas assuré un service satisfaisant, ayant été sanctionné à six reprises, dont six fois pour des problèmes de sécurité (non-respect des procédures de sécurité, refus d'accuser réception d'une consigne). Il convient donc de déterminer si la décision de ne pas attribuer à Monsieur [F] [W] la position II de rémunération au mois de janvier 2011 relevait ou non d'une sanction disciplinaire déguisée. Les dispositions de l'article 13-4 du statut des relations collectives entre la S.N.C.F et son personnel régissant la progression de carrière des agents de la S.N.C.F est ainsi rédigé: « Le choix des agents susceptibles de bénéficier du classement sur la position supérieure est fait en fonction de la qualité des services assurés et de l'expérience acquise. Toutefois, sont classés par priorité sur la position supérieure sous réserve d'assurer un service satisfaisant, les agents les plus anciens en position à concurrence d'une fraction du nombre N, ci-dessus égale à:1/2 pour le personnel A, B, C, TA et TB ». A la date de saisine du Conseil, Monsieur [F] [W] était déjà placé au second niveau de la qualification C, position de rémunération 1O. Il est certain que compte tenu de son ancienneté, Monsieur [F] [W] pouvait être placé en position prioritaire début de l'année 2011. Toutefois, la lecture des dispositions du statut permet de dire que le placement dans la position supérieure constitue une promotion qui ne dépend pas de la seule ancienneté, ni même d'une position prioritaire. En l'espèce, si l'ancienneté assure effectivement cette position prioritaire, il n'en demeure pas moins que le classement dans la position supérieure demeure une promotion choisie sur des critères de choix par l'employeur, en particulier de la qualité des services assurés et de l'expérience acquise. Compte tenu des éléments versés aux débats et dossiers par les parties, il s'en déduit que le fait de ne pas accorder en 2011 cette position à Monsieur [F] [W] ne relève pas d'une sanction disciplinaire déguisée. En effet, il n'en demeure pas moins que le fait de ne pas attribuer la position 11 à Monsieur [F] [W] ne peut être considéré comme fautif au regard de la position prioritaire de ce dernier au regard de son ancienneté et de ses entretiens d'évaluation. Par ailleurs, il n'est pas justifié d'une quelconque disparité de traitement avec d'autres salariés étant observé que Monsieur [F] [W] a connu un certain déroulement de carrière normal depuis son embauche, le 1er février 1981, puisqu'il a une progression certaine étant en 2010 en position C II, position 11.
ALORS QUE M. [F] faisait valoir, dans ses écritures, qu'une partie des positions est attribuée automatiquement aux salariés les plus anciens, qui relèvent, en tant que tels, du contingent prioritaire ; que, pour que tel ne soit pas le cas, il est nécessaire de produire une «objection motivée du service » ; que M. [F] faisait partie de ce contingent prioritaire, ce qui n'était pas contesté par l'employeur, et qu'aucune objection motivée du service n'avait été produite par ce dernier ; qu'il s'en déduisait que M. [F] aurait donc dû bénéficier de la position de rémunération demandée ; qu'en ne répondant pas à ce chef de conclusions pourtant déterminant de la solution du litige, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et violé l'article 455 du code de procédure civile.