LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1251-19, L. 3141-22 dans sa rédaction applicable et D. 3141-8 du code du travail ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que M. Y... a été engagé par la société Manpower France selon un contrat de travail temporaire du 25 mars 2011, pour être mis à disposition de la société Peugeot Citroën Automobile en qualité d'agent de fabrication polyvalent préparation de commandes ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement tant d'un rappel d'indemnité compensatrice de congés payés aux motifs que n'avaient pas été incluses dans son assiette de calcul les primes annuelles, dont la prime de 13ème mois et la prime de vacances, servies par l'entreprise utilisatrice que d'une somme à titre de frais non répétibles ;
Attendu que pour faire droit à cette demande, le jugement, après avoir rappelé les dispositions des articles L. 3141-22, L. 1251-19 et D. 3141-8 du code du travail, retient que la base de l'indemnité compensatrice de congés payés aurait dû s'établir à 21 744,01 euros brut, soit 19 767,28 + 1 976,73 euros pour la période du 2 au 27 avril 2012, soit 2 174,40 euros brut, 19 068,23 euros brut soit 17 334,75 + 1 733,48 euros pour la période du 2 au 27 décembre 2013 selon le bulletin de salaire du 12 janvier 2014 et que, partant, il convient de condamner la société Manpower France à verser au salarié en complément de l'indemnité compensatrice de congés payés les sommes de 149,44 euros brut pour la période du 2 au 27 avril 2012, et de 132 euros brut pour la période du 2 au 27 décembre 2013 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les primes litigieuses, allouées pour l'année entière, avaient pour objet de rémunérer des périodes de travail et de congés réunis, de sorte qu'elles ne devaient pas être incluses dans l'assiette de calcul de l'indemnité compensatrice de congés payés versée par l'entreprise de travail temporaire au salarié intérimaire, le conseil de prud'hommes a violé les textes susvisés ;
Vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 16 février 2015, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Vesoul ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Rejette la demande d'inclusion de primes annuelles dans l'assiette de calcul de l'indemnité compensatrice de congés payés et celles en remboursement de frais non répétibles ;
Condamne M. Y... aux dépens de cassation et à ceux afférents à l'instance suivi devant les juges du fond ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier mars deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Manpower France
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR condamné la société Manpower France à payer à M. Y... un rappel d'indemnité compensatrice de congés payés, outre des frais irrépétibles ;
AUX MOTIFS QUE l'article L. 3141-22 du code du travail fixe les conditions d'indemnisation au titre des congés payés, à savoir une indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence ; que l'article L. 1251-19 du même code dispose, notamment : « Le salarié temporaire a droit à une indemnité compensatrice de congés payés pour chaque mission qu'il effectue, quelle qu'en ait été la durée. Le montant de l'indemnité est calculé en fonction de la durée de la mission et ne peut être inférieur au dixième de la rémunération totale brute perçue par le salarié pendant la mission. L'indemnité est versée à la fin de la mission » ; qu'il s'infère de l'article L. 1251-32 du code du travail : « Lorsque, à l'issue d'une mission, le salarié ne bénéficie pas immédiatement d'un contrat de travail à durée indéterminée avec l'entreprise utilisatrice, il a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de mission destinée à compenser la précarité de sa situation. Cette indemnité est égale à 10% de la rémunération totale brute due au salarié. L'indemnité s'ajoute à la rémunération totale brute due au salarié. Elle est versée par l'entreprise de travail temporaire à l'issue de chaque mission effectivement accomplie, en même temps que le dernier salaire dû au titre de celle-ci, et figure sur le bulletin de salaire correspondant » ; que l'article D. 3141-8 du code du travail dispose que : « L'indemnité de fin de mission, prévue à l'article L. 1251-32, est prise en compte pour la détermination de la rémunération totale prévue à l'article L. 3141-22 » ; qu'en l'espèce, la base de détermination de l'indemnité de fin de mission perçue par M. Y... s'établit à : - 19 767,28 € brut pour la période du 2 au 27 avril 2012 selon le bulletin de salaire du 12 mai 2012, soit 1 976,73 € brut d'IFM, - 17 334,75 € brut pour la période du 2 au 27 décembre 2013 selon le bulletin de salaire du 12 janvier 2014, soit 1 733,48 € brut d'IFM ; qu'en l'espèce, la base de l'indemnité compensatrice de congés payés aurait dû s'établir à : - 21 744,01 € brut, soit 19 767,28 + 1 976,73 € pour la période du 2 au 27 avril 2012, soit 2 174,40 € brut d'ICCP, - 19 068,23 € brut soit 17 334,75 + 1 733,48 € pour la période du 2 au 27 décembre 2013 selon le bulletin de salaire du 12 janvier 2014 ; que, partant, il convient de condamner la Sas Manpower France à verser à M. Y... en complément d'ICCP : - 149,44 € brut pour la période du 2 au 27 avril 2012, - 132 € brut pour la période du 2 au 27 décembre 2013 ;
1°) ALORS QUE toute décision de justice doit se suffire à elle-même et contenir les motifs de nature à la justifier ; que la seule référence à des dispositions légales ne saurait répondre à cette condition ; qu'en l'espèce, pour faire droit à la demande de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés du salarié, le conseil de prud'hommes s'est borné à dresser un catalogue de différentes dispositions du code du travail ; qu'en statuant ainsi, le conseil de prud'hommes, qui n'a pas mis en mesure la Cour de cassation d'exercer son contrôle, a violé les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;
2°) ALORS en tout état de cause QUE si une prime dont le versement est lié au temps de présence effective du salarié doit être intégrée dans l'assiette de l'indemnité compensatrice de congés payés versée au salarié intérimaire à la fin de sa mission, doit en revanche être exclue de cette assiette la prime calculée pour l'année entière, périodes de travail et de congé confondues ; qu'en l'espèce, en faisant droit à la demande de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés du salarié intérimaire qui soutenait que la prime de treizième mois, la prime de vacances et toutes les primes annuelles qui lui étaient versées et qui n'étaient pas liées à son temps de travail effectif devaient être incluses dans l'assiette de son indemnité compensatrice de congés payés, le conseil de prud'hommes a violé les articles L. 1251-19 et L. 3141-22 du code du travail ;
3°) ALORS en tout état de cause QUE le principe d'égalité de traitement interdit une différence de traitement entre des salariés placés dans une situation identique au regard de l'avantage en cause, cette différence devant reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ; qu'en l'espèce, la société Manpower France faisait valoir qu'intégrer toutes les primes perçues par le salarié intérimaire dans l'assiette de son indemnité compensatrice de congés payés, y compris les primes versées pour l'année entière, périodes de travail et de congé confondues, quand ces primes sont exclues de l'assiette de l'indemnité compensatrice de congés payés des salariés en contrat à durée indéterminée, créait une inégalité de traitement injustifiée, les salariés intérimaires étant dans une situation identique aux salariés en contrat à durée indéterminée au regard de l'indemnité compensatrice de congés payés ; qu'en faisant néanmoins droit à la demande de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés du salarié intérimaire, le conseil de prud'hommes a violé le principe d'égalité de traitement ;
4°) ALORS en tout état de cause QUE les primes annuelles entrent dans l'assiette de l'indemnité de fin de mission versée au salarié à l'issue d'une mission de travail temporaire s'il ne bénéficie pas immédiatement d'un contrat à durée indéterminée avec l'utilisateur ; que l'indemnité de fin de mission est quant à elle intégrée dans l'assiette de l'indemnité compensatrice de congés du salarié intérimaire ; qu'en faisant droit à la demande de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés du salarié intérimaire qui soutenait que toutes les primes annuelles devaient être incluses dans l'assiette de son indemnité compensatrice de congés payés, quand cela conduisait à ce que ces primes annuelles, qui étaient déjà intégrées dans l'assiette de l'indemnité de fin de mission, soient payées une seconde fois, même partiellement, le conseil de prud'hommes a encore violé l'article L. 1251-19 du code du travail.