CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 18 janvier 2017
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10028 F
Pourvoi n° G 16-10.260
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ M. [G] [U], domicilié [Adresse 1],
2°/ M. [K] [U],
3°/ M. [Y] [U],
4°/ Mme [A] [U], épouse [C],
domiciliés tous trois [Adresse 2],
contre l'arrêt rendu le 30 avril 2015 par la cour d'appel de Grenoble (chambre des affaires familiales), dans le litige les opposant :
1°/ à Mme [L] [U], épouse [B], domiciliée [Adresse 3],
2°/ à M. [C] [U], domicilié [Adresse 4],
3°/ à Mme [T] [F], épouse [U], domiciliée [Adresse 5],
4°/ à Mme [F] [U], veuve [T], domiciliée [Adresse 6],
5°/ à M. [X] [U], domicilié [Adresse 7],
6°/ à M. [H] [U], domicilié [Adresse 8],
7°/ à Mme [E] [W], épouse [U], domiciliée [Adresse 9],
pris tous deux en qualité d'héritiers de [N] [U],
8°/ à M. [P] [U], domicilié [Adresse 10],
9°/ à Mme [Q] [U], épouse [X], domiciliée [Adresse 11],
10°/ à Mme [D] [U], épouse [Z], domiciliée [Adresse 12],
11°/ à Mme [J] [U], épouse [M], domiciliée [Adresse 13],
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 décembre 2016, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Reynis, conseiller rapporteur, M. Matet, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Ghestin, avocat de MM. [G], [K] et [Y] [U], de Mme [A] [U], de la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat de Mme [L] [U], de M. [C] [U], de Mme [F], de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de M. [X] [U] ;
Sur le rapport de M. Reynis, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne MM. [G], [K] et [Y] [U], et Mme [A] [U], aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille dix-sept.MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour MM. [G], [K] et [Y] [U] et Mme [A] [U].
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à la Cour d'appel de Grenoble, statuant sur la demande en réduction de la donation hors part successorale consentie par [X] [B] [U] à M. [G] [U] le 9 mars 1973, d'avoir confirmé le jugement ayant dit « que les donations qui excèdent la quotité disponible seront réduites » et, y ajoutant, dit « que les libéralités seront rapportables dans les conditions fixées par l'article 860 du Code civil dans sa rédaction issue de la loi n° 71-523 du 3 juillet 1971 et par les actes desquels ces libéralités résultent et seront réductibles dans les mêmes conditions fixées par l'article 922 du code civil dans sa rédaction issue de la même loi » ;
AUX MOTIFS vu l'article 47-II de la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006, l'article 860 du Code civil dans sa rédaction issue de la loi n° 75-523 du 3 juillet 1971, l'article 922 du même code dans sa réduction issue de la même loi, que M. [X] [V] [U], M. [P] [U] et Mme [Q] [U], héritiers à réserve, sollicitent la réduction des libéralités excédent la quotité disponible ; qu'aucune prescription n'est intervenue puisque les successions de [X] [B] [U] et de [W] [S] veuve [U] se sont ouvertes il y a moins de trente ans ; que M. [G] [U], M. [K] [U], M. [Y] [U] et Mme [A] [U] ne justifient d'aucun fait qui caractériseraient la renonciation tacite de M. [X] [V] [U], M. [P] [U] et Mme [Q] [U] à se prévaloir d'une atteinte portée à leurs droits réservataires ; qu'après le décès de [X] [B] [U], selon acte reçu les 11 et 31 mars 1994 par Me [V], notaire, Mme [W] [S] veuve [U] et ses neufs enfants ont signé une convention tendant au maintien dans l'indivision des biens dépendant de la succession du défunt, pour une durée de cinq ans, renouvelable par tacite reconduction ; que la connaissance par les demandeurs aux réductions de la donation intervenue au profit de M. [G] [U] le 9 mars 1973, seule circonstance invoquée par M. [G] [U], M. [K] [U], M. [Y] [U] et Mme [A] [U] n'emporte aucunement renonciation tacite à solliciter la réduction des libéralités concernées ; qu'il convient en conséquence de dire que les libéralités consenties par [X] [B] [U] et [W] [S] veuve [U] seront rapportables selon les dispositions précitées et dans les conditions fixées notamment par l'acte en date du 26 octobre 1982 et réductibles dans les conditions de l'article 922 (cf. arrêt, p. 2 et p. 15 et 16);
ET AUX MOTIFS ADOPTES DU JUGEMENT QUE le 21 janvier 1971, [X] [B] [U] faisait donation en avancement d'hoirie à Mme [F] [U] d'une parcelle de terre située à [Localité 1] lieudit « [Adresse 14] » cadastrée section B n° [Cadastre 1] d'une superficie de 4.610 m2 cette donation étant devenue préciputaire suivant un acte du 8 avril 1993 ; que le 9 mars 1973, [X] [B] [U] faisait donation par préciput et hors part à M. [G] [U] d'un tènement immobilier situé à [Localité 1] lieudit « [Adresse 14] » comprenant bâtiment d'habitation et d'exploitation et terrain cadastrés section B n° [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 5] d'une superficie de 13.870 m2 ; que le 26 octobre 1982, [W] [S] épouse [U] faisait donation en avancement d'hoirie à M. [M] [U] aux droits duquel viennent ses enfants [L] et [C], d'un tènement sis à [Localité 1] lieudit « [Adresse 15] » composé d'une maison d'habitation et dépendances, hangar à proximité et terrain, le tout d'une contenance de 34.190 m2 figurant au cadastre sous les n° [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] cette donation étant devenue préciputaire le 12 décembre 1997 ; que le 25 octobre 1988, [X] [B] [U] et [W] [S] épouse [U] donnaient par préciput et hors part à M. [M] [U] une parcelle de terrain situé à [Localité 1] lieudit « [Adresse 16] » cadastré section A pour une contenance de 383 m2 ; qu'aux termes des anciens articles 865, 868, 921 et 922 du Code civil la libéralité faite par préciput et hors part s'impute sur la quotité disponible et l'excédent est sujet à réduction, que cette dernière se détermine en formant une masse de tous les biens existant au décès du donateur, qu'on y réunit fictivement, après avoir déduit les dettes, ceux dont il a disposé par donation entre vifs, d'après leur état à l'époque de la donation et leur valeur à l'ouverture de la succession, que si des biens ont été aliénés, il est tenu compte de leur valeur à l'époque de l'aliénation, que l'indemnité de réduction se calcule d'après la valeur des biens donnés à l'époque du partage et de leur état au jour de la libéralité ; que la donation du 9 mars 1973 a été faite sous la condition que M. [G] [U] reçoive dans sa maison, loge, nourrisse, entretienne, soigne et fournisse tout ce qui nécessaire à l'existence de M. [X] [B] [U], donateur et ce jusqu'au décès de ce dernier ; que dans ses écritures, M. [G] [U] n'allègue pas cette charge qu'il a cependant fait valoir devant l'expert et qui est contestée par Mme [Z] [U] et MM. [X], [N] et [P] [U] et Mme [Q] [U] ; qu'il lui appartiendra en conséquence de rapporter la preuve de la réalité de l'exécution de cette charge s'il entend la faire valoir dans les opérations de liquidation partage (cf. jugement, p. 9 et 10);
1/ ALORS QUE l'exercice de l'action en réduction étant facultative, l'héritier réservataire dont la réserve a pu être entamée par des libéralités excessives du de cujus dépassant la quotité disponible, est libre d'y renoncer, même tacitement, après l'ouverture de la succession ; qu'après avoir constaté que la donation litigieuse avait été consentie par [X] [B] [U] le 9 mars 1973, que celui-ci était décédé le [Date décès 1] 1992, qu'à la suite de ce décès par actes authentiques des 11 et 31 mars 1994 sa veuve et leurs neuf enfants avaient conclu une convention d'indivision portant sur l'ensemble des biens dépendant de la succession, que les demandes en réduction qui n'émanaient que de certains des indivisaires n'avaient été formées qu'à titre additionnel après le rapport d'expertise déposé le 22 décembre 2009 qu'il n'y avait pas lieu d'homologuer et, enfin, que les demandeurs à la réduction avaient eu connaissance de la donation du 9 mars 1973 notamment lorsqu'ils avait signé avec l'ensemble des autres héritiers l' acte authentique des 11 et 31 mars 1994, la cour d'appel devait rechercher si ces circonstances, ensemble l'absence de toute protestation des demandeurs à la réduction pendant dix-sept ans à compter du décès manifestaient sans équivoque leur volonté de s'associer à la renonciation de [M] [U] et de Mme [F] [U]; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, avant de considérer comme elle l'a fait, que M. [G] [U], M. [K] [U], M. [Y] [U] et Mme [A] [U] ne justifiaient d'aucun fait de nature à caractériser une renonciation tacite, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 843 et s. du Code civil dans leur rédaction issue de la loi n° 71-523 du 3 juillet 1971, 922 du même Code issue de la même loi applicables en l'espèce, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
2/ ALORS QUE dans leurs conclusions, aux fins de voir retenir la volonté tacite mais exempte d'ambigüité de renoncer à l'action en réduction, des seuls héritiers réservataires demandeurs à la réduction (MM. [X] [V], [N] et [P] [U], Mme [Q] [U] et Mme [Z] [U]) M. [G] [U], M. [K] [U], M. [Y] [U] et Mme [A] [U] s'étaient prévalus de la tardiveté de l'exercice de l'action en réduction, en faisant valoir que les héritiers réservataires s'étaient abstenus de protester entre le décès d'[X] [B] [U] en 1992 et le dépôt du rapport d'expertise, le 22 décembre 2009, et que Mme [Z] [U] seule héritière à avoir agi en réduction devant les premiers juges n'avait formé sa demande additionnelle en réduction qu'à la suite du dépôt de celui-ci ; que cette argumentation était péremptoire ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait gief à la Cour d'appel de Grenoble d'avoir jugé que M. [X] [V] [U], détient sur l'indivision post-successorale de [X] [B] [U] une créance de salaire différé de 37.440 € ;
AUX MOTIFS QUE Mme [L] [U], M. [C] [U] et Mme [T] [U] concluent au rejet de cette prétention en objectant qu'il doit rapporter la preuve de sa participation à l'exploitation, qu'une simple entraide familiale ne suffit pas à ouvrir droit à un salaire différé, que tous les enfants ont participé aux travaux de la ferme jusqu'à leur départ du domicile familial ; que Mme [F] [U] s'oppose à cette demande sans s'expliquer davantage ; que M. [G] [U], M. [O] [G] [U], M. [Y] [U] et Mme [A] [U] concluent à la confirmation du jugement qui a rejeté cette prétention sans autrement s'en expliquer ; que Mme [Z] [U] conclut de même à la confirmation du jugement en faisant valoir que M. [V] [X] [U] ne justifie pas de l'effectivité de l'exploitation agricole ni ne précise à quelle succession il entend imputer la créance qu'il revendique et en objectant qu'il était hébergé gratuitement par ses parents ce qui constitue une contrepartie ; que M. [X] [V] [U] établit par ses pièces n° 71 à 75 avoir travaillé dans l'exploitation de ses parents à temps plein et non occasionnellement de 1948 à 1950, soit pendant trois ans, à une époque où il était âgé de plus de dix-huit ans ; qu'ainsi Mmes [U] [Y] et [R] [H] épouse [R] et MM. [S] [L], [N] [A] et [X] [R] déclarent que M ; [X] [V] [U] travaillait à la ferme de ses parents de 1948 à 1950, Mme [I] [L] précisant qu'il y travaillait « à longueur d'année » ; qu'il n'est pas soutenu que M. [X] [V] [U] aurait perçu une rémunération ni aurait été intéressé aux bénéfices ou aux pertes de l'exploitation ; que les circonstances que ses frères et soeurs aient eux aussi travaillé dans la ferme de leurs parents n'est pas de nature à le priver de sa créance ; que celui-ci détient une créance de salaire différé qui doit être liquidée comme suit (2/3 x (2.080x9) x 3 = 37.440 € où 9 représente le coût d'un SMIC horaire et 3 le nombre d'années (cf. arrêt, p. 13 et s.) ;
1/ ALORS QUE la créance de salaire différé est une dette non pas du propriétaire du fonds rural mais de l'exploitant de sorte que le bénéficiaire d'un contrat de salaire différé est créancier de l'exploitant et exerce son droit au cours du règlement de la succession de celui-ci ; qu'en jugeant, en l'espèce, que M. [X] [V] [U] détient une créance de salaire différé sur la succession de [X] [B] [U], cependant qu'elle avait constaté que M. [X] [V] [U] établissait avoir travaillé « dans l'exploitation de ses parents », [X] [B] [U] et [W] [S] épouse [U], la cour d'appel a violé l'article L. 321-13 du Code rural et de la pêche maritime;
2/ ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QUE seuls les descendants d'un exploitant agricole, âgés de plus de 18 ans, qui participent directement et effectivement à l'exploitation, sans être associés aux bénéfices, ni aux pertes, et qui ne reçoivent pas de salaire en argent en contrepartie de leur collaboration, sont réputés légalement bénéficiaires d'un contrat à salaire différé ; qu' il appartient à celui qui invoque une créance de salaire différé d'établir qu'il remplit les conditions pour y prétendre ; qu'en l'état du moyen de défense tiré du fait que M. [X] [V] [U] avait été hébergé par ses parents lorsqu' il avait participé à l'exploitation familiale entre 1948 et 1950, il appartenait à M. [X] [V] [U] d'établir qu'il n'avait perçu de salaire en contrepartie de son travail ;
qu'en se fondant sur le fait qu'il n'avait pas été soutenu que M. [X] [V] [U] aurait perçu une rémunération de ses parents, pour considérer qu'il détient une créance de salaire différé la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil, ensemble l'article 4 du Code de procédure civile.