LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée (tribunal d'instance de Paris 20e arrondissement, 30 décembre 2014), et les pièces de la procédure, que, en vue des élections des délégués du personnel et des représentants du personnel au comité d'entreprise de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (la CNAMTS), un protocole d'accord préélectoral a été conclu le 14 septembre 2012 ; qu'il a été annulé par jugement du tribunal d'instance du 30 octobre 2012, les conditions de majorité prévues par les articles L. 2314-3-1 et L. 2324-4-1 du code du travail n'étant pas réunies ; que, par deux décisions du 4 mars 2014, l'autorité administrative a fixé le nombre d'établissements distincts, et procédé à la répartition des sièges entre les différentes catégories de personnel et à la répartition du personnel entre les collèges ; que la CNAMTS a invité le 2 avril 2014 les organisations syndicales à participer à une réunion de négociation du protocole préélectoral le 18 avril suivant ; que la demande de suspension d'exécution des décisions administratives a été rejetée par le juge administratif par ordonnances de référé du 2 mai 2014 ; que la CNAMTS a saisi, le 21 mai 2014, le tribunal d'instance du 20e arrondissement afin qu'il fixe les modalités matérielles d'organisation des élections ;
Attendu qu'il est fait grief à l'ordonnance de dire qu'il n'existe pas de droit d'option et que le personnel administratif des DRSM, mis à disposition par les CARSAT, doit être intégré aux listes électorales élaborées pour les élections des membres des comités d'établissement et des délégués du personnel de la CNAMTS, de dire qu'il appartient à la CNAMTS de négocier, de bonne foi, les modalités d'organisation et de déroulement des opérations électorales avec les organisations syndicales intéressées, de dire qu'il n'appartient pas au juge des référés du tribunal d'instance de se prononcer, même par la voie d'exception, sur l'existence d'un contrat de travail entre les agents administratifs des DRSM, mis à disposition de la CNAMTS, par les CARSAT, et cette même caisse nationale, de dire n'y avoir lieu à l'intervention forcée des CARSAT, et de dire n'y avoir lieu à faire injonction à la CNAMTS de produire certains documents, pour les motifs figurant dans le moyen ci-après annexé ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article R. 315-9 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable en la cause, que le personnel des échelons régionaux et locaux du contrôle médical, autre que les praticiens conseils, constitué par des agents mis à la disposition de l'échelon régional du contrôle médical par les caisses d'assurance retraite et de la santé au travail, placé sous l'autorité du médecin conseil régional, qui, sous l'autorité du directeur de la Caisse Nationale d'assurance maladie, fixe l'organisation du travail dans les services de l'échelon régional et des échelons locaux, et prend toute décision d'ordre individuel que comporte sa gestion, n'est pas constitué de salariés mis à disposition au sens des articles L. 2314-18-1 et L. 2324-17-1 du code du travail ; que, par ce motif de pur droit, substitué aux motifs critiqués, après avis donné aux parties, l'ordonnance se trouve légalement justifiée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour la fédération des employés et cadres Force ouvrière et le syndicat national Force ouvrière des cadres des organismes sociaux
Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR dit qu'il n'existe pas de droit d'option et que le personnel administratif des DRSM, mis à disposition par les CARSAT, doit être intégré aux listes électorales élaborées pour les élections des membres des comités d'établissement et des délégués du personnel de la CNAMTS, d'AVOIR dit qu'il appartient à la CNAMTS de négocier, de bonne foi, les modalités d'organisation et de déroulement des opérations électorales avec les organisations syndicales intéressées, d'AVOIR dit qu'il n'appartient pas au juge des référés du tribunal d'instance, de se prononcer, même par la voie d'exception, sur l'existence d'un contrat de travail entre les agents administratifs des DRSM, mis à disposition de la CNAMTS, par les CARSAT, et cette même caisse nationale, d'AVOIR dit n'y avoir lieu à l'intervention forcée des CARSAT et d'AVOIR dit n'y avoir lieu de faire injonction à la CNAMTS de produire les listes électorales, la liste nominative des agents mis à disposition et leur adresse électronique professionnelle, ou de faire connaître leur choix en matière électorale ;
AUX MOTIFS QUE 1/ Sur les différends qui opposent la CNAMTS aux syndicats : le différend qui oppose une partie des syndicats à la CNAMTS porte principalement sur la définition du corps électoral et plus précisément sur le personnel administratif des Directions régionales du service médical (DRSM ; il en existe 17), mis à disposition par les Caisses d'assurance de retraite et de santé au travail (CARSAT, anciennes CRAM) ; qu'à cet égard, la direction du travail (DIRECCTE), par deux décisions du 4 mars 2014 (élections des délégués du personnel et élection du comité d'entreprise au sein de deux établissements distincts), a statué sur la répartition des personnels dans les collèges électoraux et sur la répartition des sièges entre les collèges, en reconnaissant la qualité d'électeur et d'éligible au personnel administratif des DRSM, au sein de la CNAMTS, qui ne peut donc opter, pour être électeur ou éligible au sein des CARSAT ; que par deux ordonnances du 2 mai 2014, le tribunal administratif de Paris a rejeté les requêtes en référé suspension, en précisant que : « l'existence de contrats de travail liant le personnel administratif du service déconcentré du service du contrôle médical à la CNAMTS n'est pas susceptible de faire l'objet en l'état de l'instruction d'un doute sérieux » ; qu'il ne peut être question pour le juge judiciaire, qui ne dispose pas de cette compétence, de revenir sur la répartition des effectifs dans les collèges, ou sur le nombre de sièges à pourvoir, points déterminants du protocole d'accord préélectoral, qui ont d'ores et déjà été arbitrés par l'autorité administrative, la direction régionale du travail, dans les décisions du 4 mars 2014 ; qu'il n'existe pas de droit d'option et le personnel administratif des DRSM, mis à disposition par les CARSAT, doit être intégré aux listes électorales élaborées pour les élections des membres des comités d'établissement et des délégués du personnel de la CNAMTS ; qu'en revanche, il n'appartient pas au juge des référés du tribunal d'instance, juge de la régularité des opérations électorales, de se prononcer, même par la voie de l'exception, sur l'existence d'un contrat de travail entre les agents administratifs des DRSM, mis à disposition de la CNAMTS, par les CARSAT, et cette même caisse nationale ; 2/ Sur la fixation de toutes les modalités d'organisation et de déroulement des opérations électorales, par le juge : que l'article L. 2324-21 du code du travail, modifié par la loi du 5 mars 2014 (article 30) prévoit que : « Les modalités d'organisation et de déroulement des opérations électorales font l'objet d'un accord entre l'employeur et les organisations syndicales intéressées, conclu selon les conditions de l'article L. 2324-4-1. Cet accord respecte les principes généraux du droit électoral. Les modalités sur lesquelles aucun accord n'a pu intervenir peuvent être fixées par une décision du juge judiciaire. » ; que l'article R. 2324-2 du code du travail (créé par décret du 7 mars 2008) ajoute : « Les modalités d'organisation et de déroulement des opérations électorales sur lesquelles aucun accord n'a pu intervenir sont fixées, en application de l'article L. 2324-21, par le juge d'instance. Il statue en dernier ressort en la forme des référés. » ; qu'un protocole électoral, pour être valide doit avoir été conclu à la condition de double majorité, prévue par l'article L. 2314-3-1 du code du travail ; qu'il n'en demeure pas moins que ce protocole doit avoir été négocié, de bonne foi, entre l'employeur et les organisations syndicales intéressées ; que les syndicats ont été réunis une seule fois le 18 avril 2014 pour prendre connaissance du projet de protocole ; que la note de service du 12 mai 2014 indique : « Au terme de la réunion, le protocole d'accord préélectoral a été ouvert à la signature du jeudi 24 avril 2014 au mercredi 30 avril 2014. Aucune organisation syndicale n'ayant signé le protocole, nous constatons que cet accord ne réunit pas les conditions de double majorité prévue par l'article L. 2314-3-1 du code du travail pour le rendre valable et permettre l'organisation du scrutin… » ; que ce simple constat ne témoigne pas d'un effort de négociation de la part de l'employeur, notamment sur les questions qui ne sont pas de nature à opposer les parties, telles que la fixation du calendrier électoral ou les moyens matériels du scrutin, qui ne sont contestées par aucun syndicat, dans leurs conclusions ; que le simple fait de laisser le protocole préélectoral à la disposition des syndicats intéressés pour une éventuelle signature, ne constitue pas une négociation ; que le constat d'une absence de signature de la totalité du protocole soumis aux syndicats intéressés, ne signifie pas qu'il ne pouvait y avoir accord sur de nombreuses questions, en l'absence de réelles négociations de la part de l'employeur, qui aurait dû rechercher des points d'accord ; que le tribunal n'a pas vocation à valider, a priori, la totalité du protocole préélectoral, qui n'a pas été réellement négocié avec les syndicats intéressés ; qu'à cet égard, les modalités d'organisation et de déroulement des opérations électorales peuvent être fixées par le juge, qui n'en a pas l'obligation, notamment lorsqu'il n'y a pas de désaccord manifeste, en l'absence de réelle négociation ; qu'il appartient à la CNAMTS de négocier, de bonne foi, les modalités d'organisation et de déroulement des opérations électorales avec les organisations syndicales intéressées, et notamment les modalités pratiques du vote par correspondance, dont la généralisation n'est pas interdite ; 3/ Sur la présence des CARSAT à l'instance et la production des listes électorales : qu'il résulte des deux décisions administratives de la DIRECCTE, du 4 mars 2014, que le personnel administratif de la direction régionale du service médical (DRSM) n'est pas inscrit à l'effectif des caisses d'assurance de retraite et de santé au travail (CARSAT, anciennes CRAM), dans lesquelles ils ne sont, ni électeurs ni éligibles, au titre des élections de comité d'entreprise et des délégués du personnel ; que les CARSAT ne sont pas des parties intéressées aux élections internes à la CNAMTS et il n'existe pas un lien suffisant entre les prétentions du syndicat SAPC, qui souhaitait voir reconnaître un droit d'option, impossible en raison de l'existence des décisions administratives précitées, et l'intervention forcée des CARSAT, étrangères à ces élections ; que le syndicat SAPC ne peut exiger la production des listes électorales, la liste nominative des agents mis à disposition, leur adresse électronique professionnelle, avec injonction, en l'absence de possibilité de choix en matière électorale (pas de droit d'option) et ce, avant une véritable négociation du protocole préélectoral, d'autant que la liste électorale bénéficie d'un recours spécifique, pouvant être contestée dans les trois jours de sa publication (articles R. 2314-28 et R. 2324-24) ;
1°) ALORS QUE dans ses deux décisions des 2 mars 2014, la DIRECCTE ne s'était pas prononcée sur la qualité d'électeur et d'éligible du personnel administratif des DRSM au sein de la CNAMTS, encore moins pour la leur reconnaître en ce que cette détermination ne relevait pas de sa compétence, point confirmé par les termes des ordonnances du tribunal administratif de Paris en date du 2 mai 2014 rejetant les recours en référé suspension ; qu'en affirmant que la direction du travail aurait, dans ses deux décisions, reconnu la qualité d'électeur et d'éligible au personnel administratif des DRSM, au sein de la CNAMTS, pour en déduire qu'il ne peut donc opter pour être électeur ou éligible au sein des CARSAT et qu'en conséquence ledit personnel, mis à disposition par les CARSAT, doit être intégré aux listes électorales élaborées pour les élections des membres des comités d'établissement et des délégués du personnel de la CNAMTS, le tribunal d'instance a méconnu le sens et la portée de ces deux décisions, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse, à supposer même que dans ses deux décisions, la DIRECCTE se soit prononcée sur la question de l'électorat et de l'éligibilité du personnel administratif des DRSM, ce qui aurait alors constitué un excès de pouvoir de sa part, le tribunal d'instance ne pouvait s'estimer lié, en ce qu'il était seul compétent pour statuer en dernier ressort et trancher les contestations portant sur l'électorat dudit personnel ; qu'en se déclarant tenu par les décisions de la DIRECCTE, le tribunal d'instance a méconnu son office et violé les articles L. 2314-25 et L. 2324-1 du code du travail ;
3°) ALORS QUE les salariés mis à disposition qui remplissent les conditions mentionnées au premier alinéa de l'article L. 1111-2 du code du travail choisissent s'ils exercent leur droit de vote dans l'entreprise qui les emploie ou l'entreprise utilisatrice ; qu'en affirmant qu'il n'existait pas de droit d'option pour en déduire que le personnel administratif des DRSM, mis à disposition par les CARSAT, devait être intégré aux listes électorales élaborées pour les élections des membres des comités d'établissement et des délégués du personnel de la CNAMTS, le tribunal d'instance a violé les articles L. 2314-18-1 et L. 2324-17-1 du code du travail ;
4°) ALORS QUE le tribunal d'instance, juge de l'action, qui est seul compétent en dernier ressort pour apprécier si les salariés remplissent les conditions pour être électeurs et éligibles, l'est également pour déterminer, par voie d'exception, l'existence ou le transfert de contrats de travail en vue de se prononcer sur leur électorat et leur éligibilité ; qu'en affirmant qu'il n'appartenait pas au juge des référés de tribunal d'instance, juge de la régularité des opérations électorales, de se prononcer, même par la voie de l'exception, sur l'existence d'un contrat de travail entre les agents administratifs des DRSM, mis à disposition de la CNAMTS par les CARSAT, et cette même caisse nationale, le tribunal d'instance a méconnu le principe susvisé et violé l'article L. 2314-25 du code du travail.