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06/12/2016 | FRANCE | N°15-15.731

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte hors rnsm/na, 06 décembre 2016, 15-15.731


COMM.

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 6 décembre 2016




Rejet


Mme MOUILLARD, président



Arrêt n° 1083 F-D

Pourvoi n° J 15-15.731




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé p

ar la direction générale des finances publiques de Saône-et-Loire, dont le siège est [Adresse 2],

contre l'arrêt rendu le 6 janvier 2015 par la cour d'appel de Dij...

COMM.

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 6 décembre 2016




Rejet


Mme MOUILLARD, président



Arrêt n° 1083 F-D

Pourvoi n° J 15-15.731




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la direction générale des finances publiques de Saône-et-Loire, dont le siège est [Adresse 2],

contre l'arrêt rendu le 6 janvier 2015 par la cour d'appel de Dijon (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à Mme [J] [C]-[V], domiciliée [Adresse 1],

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 2 novembre 2016, où étaient présentes : Mme Mouillard, président, Mme Bregeon, conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Bregeon, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat du directeur général des finances publiques, de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de Mme [C]-[V], et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 6 janvier 2015), que [T] [S], épouse [C], est décédée le [Date décès 1] 2005, en laissant en héritage à sa fille, Mme [C]-[V], des actions de la société [S] & [W] ; que l'administration fiscale a notifié à Mme [C]-[V] une proposition de rectification de la déclaration de succession déposée le 13 juillet 2006 en élevant la valeur unitaire de ces actions ; qu'après mise en recouvrement et rejet de sa contestation amiable, Mme [C]-[V] a saisi le tribunal de grande instance aux fins de décharge intégrale des droits, pénalités et intérêts de retard réclamés ;

Attendu que le directeur général des finances publiques fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande alors, selon le moyen :

1°/ qu'il résulte des dispositions de l'article 666 du code général des impôts que les droits proportionnels ou progressifs d'enregistrement et de la taxe proportionnelle de publicité foncière sont assis sur les valeurs ; qu'en application des dispositions combinées des articles 720 et 724 du code civil, les successions s'ouvrent par la mort, au dernier domicile du défunt et les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt ; qu'il est de jurisprudence constante qu'en matière de succession, les biens compris dans l'actif successoral doivent être évalués au jour du fait générateur, soit au jour du décès ; qu'en l'espèce, en affirmant qu' « il n'est pas contesté que les actions litigieuses ont été cédées le 30 juin 2006 à la Sarl Cediane, qui est une émanation des associés majoritaires, au prix unitaire de 1 152 euros, soit très exactement la valorisation portée à la déclaration de succession déposée auprès de l'administration fiscale le 13 juillet 2006 », la cour d'appel s'est placée au jour de la cession des titres, soit le 30 juin 2006, au lieu de se placer au jour du décès, fait générateur de l'impôt, soit le [Date décès 1] 2005, pour déterminer la valeur des titres litigieux ; qu'en conséquence, la cour d'appel a violé ensemble les articles 666 du code général des impôts, 720 et 724 du code civil ;

2°/ qu'il résulte des dispositions de l'article 666 du code général des impôts que les droits proportionnels ou progressifs d'enregistrement et de la taxe proportionnelle de publicité foncière sont assis sur les valeurs ; qu'en application des dispositions combinées des articles 720 et 724 du code civil, les successions s'ouvrent par la mort, au dernier domicile du

défunt et les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt ; qu'en affirmant que « l'administration est mal fondée à remettre en cause le prix unitaire auquel cette cession s'est effectivement réalisée » et qu'« il doit au vu de ces divers éléments être considéré que la vente s'est en l'espèce réalisée dans des conditions normales au regard des spécificités inhérentes aux actions vendues » sans rechercher si le litige portait effectivement sur le prix de cession des titres au regard du fait générateur de l'impôt des mutations par décès, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 666 du code général des impôts, 720 et 724 du code civil ;

Mais attendu qu'il ressort des écritures de l'administration fiscale que, devant les juges d'appel, celle-ci s'était bornée à défendre sa méthode d'évaluation des titres sans soutenir que celle invoquée par Mme [C]-[V] ne permettait pas d'apprécier cette valeur au jour du fait générateur de l'impôt ; que le moyen est donc nouveau, mélangé de fait et de droit, et partant irrecevable ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le directeur général des finances publiques aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer la somme de 3 000 euros à Mme [C]-[V] ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six décembre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :



Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la direction générale des finances publiques de Saône-et-Loire

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement et ordonné la décharge des droits et pénalités mis à la charge de Madame [C][V] [J].

AUX MOTIFS QU' « En application des règles posées par les articles L191 et suivants du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve incombe en l'espèce à l'administration fiscale qui entend remettre en cause la valeur vénale déclarée en suite du décès de Mme [T] [S], épouse [C].

Il n'est pas contesté que les actions litigieuses ont été cédées le 30 juin 2006 à la SARL Cediane, qui est une émanation des associés majoritaires, au prix unitaire de

1 152 €, soit très exactement la valorisation portée à la déclaration de succession déposée auprès de l'administration fiscale le 13 juillet 2006.

Étant rappelé que la valeur des actions d'une société non cotée en bourse doit être appréciée en tenant compte de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi proche que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande, il appartient en premier lieu à l'intimée d'établir qu'en l'occurrence la cession opérée au profit de la SARL Cediane ne s'est pas déroulée dans les conditions normales de la loi du marché.

L'administration fiscale fait valoir à cet égard que la cession s'est déroulée dans l'urgence et que l'acquisition des actions n'a été proposée qu'aux seuls associés qui, avec 70% des titres, se trouvaient en position dominante, de telle sorte que la cédante n'avait pas d'autre alternative que d'accepter le prix imposé. Cette constatation ne suffit cependant pas à caractériser une dérogation au jeu normal de l'offre et de la demande, dès lors qu'il doit encore être démontré que la vente avait des chances sérieuses de se dérouler dans des conditions économiques différentes.

Pour apprécier ce dernier point, il est indispensable de prendre en considération les spécificités propres aux titres cédés, qui influent nécessairement sur les conditions dans lesquelles ils peuvent être cédés, et constituent à ce titre une composante du jeu de l'offre et de la demande.


Ainsi, il doit d'abord être constaté que la société [C] et [W] est une entreprise à caractère familial, et que le paquet d'actions litigieux représentait 27,72% du capital social, les 72,28% restant étant la propriété de la famille [W].

Il en résulte que les actions cédées ne conféraient pas à leur détenteur la minorité de blocage indispensable pour lui permettre de peser efficacement sur le processus décisionnel au sein de la société. Il n'est pas d'autre part contesté que la société applique une politique de distribution des dividendes pour le moins prudente, privilégiant en réalité largement la constitution de réserves. Dans de telles conditions d'absence de pouvoir décisionnel et de particulière faiblesse du rendement financier, il est évident que la cession des titres pouvait difficilement intéresser un investisseur extérieur, alors surtout que le coût global de l'opération imposait une mise de départ conséquente. D'ailleurs, comme le fait pertinemment observer l'appelante, la nouvelle de la mise en vente des actions suite au décès de Mme [S], veuve [C], a de toute évidence fait rapidement le tour du milieu viticole et de la tonnellerie dans lequel évolue de longue date la société [C] & [W], sans que, pour autant, aucun investisseur ne se soit effectivement présenté comme étant intéressé par le rachat des titres, la vente au profit de la SARL Cediane étant quant à elle intervenue près d'un an après le décès de Mme [S], épouse [C].

Il sera ensuite relevé que les statuts de la société comportent une clause d'agrément stipulant que le cessionnaire doit être agréé par la collectivité des associés statuant à la majorité des deux tiers, le cédant participant au vote. Compte tenu de la répartition du capital social entre les associés tel que rappelée précédemment, il est incontestable que Mme [C] [V] ne disposait pas des droits de vote suffisants pour s'opposer à un refus d'agrément de la part des associés majoritaires, et il était donc illusoire pour elle de penser pouvoir imposer à ces derniers l'arrivée d'un tiers dans le capital social, fût-il disposé à offrir un prix d'achat supérieur à celui proposé par les associés majoritaires.

Il doit au vu de ces divers éléments être considéré que la vente s'est en l'espèce réalisée dans des conditions normales au regard des spécificités inhérentes aux actions vendues. Dès lors, l'administration fiscale est mal fondée à remettre en cause le prix unitaire auquel cette cession s'est effectivement réalisée.

Le jugement déféré sera donc infirmé en toutes ses dispositions, et il sera fait droit à la demande de décharge partielle formée par Mme [C]-[V]».



Articles 666 du CGI, 720 et 724 du code civil.

- Violation de la loi -

Articles 666 du CGI, 720 et 724 du code civil

- Défaut de base légale -

ALORS QUE, D'UNE PART, il résulte des dispositions de l'article 666 du CGI que les droits proportionnels ou progressifs d'enregistrement et de la taxe proportionnelle de publicité foncière sont assis sur les valeurs ; qu'en application des dispositions combinées des articles 720 et 724 du code civil, les successions s'ouvrent par la mort, au dernier domicile du défunt et les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt ; qu'il est de jurisprudence constante qu'en matière de succession, les biens compris dans l'actif successoral doivent être évalués au jour du fait générateur, soit au jour du décès ; qu'en l'espèce, en affirmant qu' « il n'est pas contesté que les actions litigieuses ont été cédées le 30 juin 2006 à la Sarl Cediane, qui est une émanation des associés majoritaires, au prix unitaire de 1 152 €, soit très exactement la valorisation portée à la déclaration de succession déposée auprès de l'administration fiscale le 13 juillet 2006 », la Cour d'appel s'est placée au jour de la cession des titres, soit le 30 juin 2006, au lieu de se placer au jour du décès, fait générateur de l'impôt, soit le [Date décès 1] 2005, pour déterminer la valeur des titres litigieux ; qu'en conséquence, la Cour d'appel a violé ensemble les articles 666 du CGI, 720 et 724 du code civil.

ALORS QUE, D'AUTRE PART, il résulte des dispositions de l'article 666 du CGI que les droits proportionnels ou progressifs d'enregistrement et de la taxe proportionnelle de publicité foncière sont assis sur les valeurs ; qu'en application des dispositions combinées des articles 720 et 724 du code civil, les successions s'ouvrent par la mort, au dernier domicile du défunt et les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt ;qu'en affirmant que « l'administration est mal fondée à remettre en cause le prix unitaire auquel cette cession s'est effectivement réalisée » et qu'« il doit au vu de ces divers éléments être considéré que la vente s'est en l'espèce réalisée dans des conditions normales au regard des spécificités inhérentes aux actions vendues » sans rechercher si le litige portait effectivement sur le prix de cession des titres au regard du fait générateur de l'impôt des mutations par décès, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 666 du CGI, 720 et 724 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte hors rnsm/na
Numéro d'arrêt : 15-15.731
Date de la décision : 06/12/2016
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, arrêt n°15-15.731 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon


Publications
Proposition de citation : Cass. Com. financière et économique - formation restreinte hors rnsm/na, 06 déc. 2016, pourvoi n°15-15.731, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.15.731
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