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01/12/2016 | FRANCE | N°15-21664;15-21668

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 décembre 2016, 15-21664 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° G 15-21.664 et N 15-21.668 ;
Sur le moyen unique, commun aux deux pourvois :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Riom, 19 mai 2015), que M. X... et M. Y... ont été engagés par la société Alcan Rhenalu, devenue la société Constellium Issoire, respectivement à compter d'août 2000 et du 18 juin 2001, en qualité d'agent de fabrication ; qu'un accord d'aménagement et de réduction du temps de travail a été conclu le 31 mai 2000 permettant la mise en place de

la modulation du temps de travail ; que les salariés ont saisi la juridiction...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° G 15-21.664 et N 15-21.668 ;
Sur le moyen unique, commun aux deux pourvois :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Riom, 19 mai 2015), que M. X... et M. Y... ont été engagés par la société Alcan Rhenalu, devenue la société Constellium Issoire, respectivement à compter d'août 2000 et du 18 juin 2001, en qualité d'agent de fabrication ; qu'un accord d'aménagement et de réduction du temps de travail a été conclu le 31 mai 2000 permettant la mise en place de la modulation du temps de travail ; que les salariés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes de rappels d'heures supplémentaires ;
Attendu que l'employeur fait grief aux arrêts de faire droit à ces demandes alors, selon le moyen :
1°/ que la mise en place par un accord d'entreprise d'une modulation du temps de travail ne constitue pas une modification du contrat de travail ; qu'en jugeant néanmoins que l'instauration d'une modulation du temps de travail par l'accord d'entreprise du 31 mai 2000 constituait une modification du contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que l'article 45 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 qui insère dans le code du travail l'article L. 3122-6, selon lequel la mise en place d'une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année prévue par un accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail, ce texte, qui s'analyse en une loi de validation, et en tant qu'elle est justifiée par un motif impérieux d'intérêt général tenant à l'adaptation des entreprises aux rythmes de production, a un effet rétroactif ; qu'elle est applicable aux décisions de mise en oeuvre effective de la modulation du temps de travail prises avant la publication de ladite loi ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé le texte précité, ensemble l'article 2 du code civil ;
3°/ que, subsidiairement, l'instauration d'une modulation du temps de travail ne peut constituer une modification du contrat de travail qui requiert l'accord exprès du salarié qu'autant qu'elle est postérieure à l'embauche de celui-ci ; qu'en jugeant que l'instauration d'une modulation du temps de travail par l'accord collectif du 31 mai 2000 ne pouvait être mise en oeuvre sans l'accord du salarié cependant qu'il ressort de ses propres constatations que celui-ci a été embauché postérieurement, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé l'article 1134 du code civil ;
4°/ que, subsidiairement, l'article 45 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012, qui insère dans le code du travail l'article L. 3122-6, selon lequel la mise en place d'une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année prévue par un accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail, est applicable aux décisions de mise en oeuvre effective de la modulation du temps de travail prises après publication de ladite loi, le 23 mars 2012 ; qu'en faisant droit à la demande de rattrapage d'heures supplémentaires pour la période postérieure au 23 mars 2012, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Mais attendu, d'abord que si l'article 45 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 insère dans le code du travail l'article L. 3122-6, selon lequel la mise en place d'une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année prévue par un accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail, ce texte, qui, modifiant l'état du droit existant, n'a ni caractère interprétatif, ni effet rétroactif, n'est applicable qu'aux décisions de mise en oeuvre effective de la modulation du temps de travail prises après publication de ladite loi ;
Attendu, ensuite que la cour d'appel qui a constaté que l'employeur avait mis en oeuvre la modulation du temps de travail avant l'entrée en vigueur de la loi du 22 mars 2012 susvisée, a exactement décidé que cette décision constituait une modification du contrat de travail nécessitant l'accord exprès des salariés concernés et qu'à défaut ceux-ci pouvaient prétendre au paiement d'heures supplémentaires y compris pour la période postérieure à la publication de cette loi ;
Attendu, enfin que le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit en sa troisième branche ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Constellium Issoire aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Constellium Issoire à payer à MM. X... et Y... la somme de 1 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit au pourvoi n° G 15-21.664 par la SCP Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société Constellium Issoire venant aux droits de la société Constellium France venant elle-même aux droits de la société Alcan Rhenalu.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré l'aménagement du temps de travail et le mode de décompte des heures supplémentaires résultant de l'accord du 1er juin 2000, inopposable à M. Jean-Jacques Y... et d'avoir condamné la société Constellium à lui payer la somme de 22 299,49 euros à titre de rappel sur heures supplémentaires pour les années 2004 à 2015, outre 2 229,94 euros au titre des congés payés afférents ;
Aux motifs que pour solliciter un rappel de salaire sur les heures de travail qu'il a décomptées en se basant sur les dispositions légales relatives à la durée du travail, le salarié conteste l'application de l'accord collectif conclu au sein de l'entreprise le 31 mai 2000; que cet accord a décidé, en son article 5, que "la réduction de la durée du travail de l'ensemble du personnel sera organisée d'une part, pari'attribution de jours ou de derni-journées de repos par période de quatre mois et d'autre part, par la réduction de I 'horaire hebdomadaire de l'horaire en moyenne sur cette période"; que trois périodes sont définies (janvier à avril, mai à août, septembre à décembre) avec des dispositions spécifiques pour chaque catégorie de salariés (personnel travaillant en journée, 1x8, 2x8, 3x8, régime de maintenance, personnel en "21 postes", etc.) ; que pour les salariés qui, comme M. Y..., sont soumis, compte tenu du fonctionnement de l'entreprise à feu continu, à un horaire "21 postes" (5h-13h pendant 2 jours, 13h-21h pendant 2 jours, 21h-5h pendant 2 jours, repos pendant 4 jours), la réduction du temps de travail aboutit, aux tenues de l'accord, à un horaire moyen de 32,34 heures par semaine, la réduction du temps de travail se faisant par l'attribution de 8 jours par an dit de RTT répartis inégalement au sein de chacune des périodes de 4 mois; que la définition des périodes de hautes et de basses activités se fait "lors de la validation budgétaire où est précisé le niveau d'activité prévisionnel de l'année par ligne de produits" (article 6-4); que s'agissant des heures supplémentaires, l'article 7-2 prévoit les dispositions suivantes "Les heures effectuées au-delà de 35 heures hebdomadaires de travail effectifen moyenne sur un cycle de quatre mois, conformément aux dispositions de l'article L. 212-7-1 du code du travail, sont des heures supplémentaires. Les heures payées sur le mois m+1 suivant leur réalisation et effectuées au-delà de l'horaire hebdomadaire moyen prévu par l'accord sur le quadrimestre seront alors considérées comme des heures supplémentaires ; qu'elles feront l'objet des majorations légales en vigueur. Par ailleurs les parties s'accordent sur le fait de procéder à un décompte des heures supplémentaires à la +fin de chaque quadrimestre: janvier/avril, mai/août, septembre/décembre (..)"; qu'il ressort de cet accord, qui fait expressément référence à l'article L. 212-7-1 du code du travail à plusieurs reprises (article 5 et article 7-2) que les parties signataires ont entendu mettre en place une organisation du temps de travail par cycle ; que l'article L. 212-7-1 du code du travail qui était alors applicable, devenu l'article L. 3122-2, disposé que "la durée du travail de l'entreprise ou de l'établissement peut être organisée sous forme de cycles de travail dès lors que sa répartition à l'intérieur d'un cycle se répète à l'identique d'un cycle à l'autre. Ces cycles de travail, dont la durée est fixée à quelques semaines, peuvent être mis en place : 1° dans les entreprises qui fonctionnent en continu, 2° lorsque cette possibilité est autorisée par décret ou prévue par une convention ou un accord collectif étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement qui doit alors fixer la durée maximale du cycle; que lorsque sont organisés des cycles de travail, seules sont considérées comme heures supplémentaires pour l'application des articles L. 212-5, L. 212-5-1 et L. 212-6 celles qui dépassent la durée moyenne de trente-cinq heures calculée sur la durée du cycle de travail" ; qu'au sens de ce texte, le cycle s'entend d'un dispositif d'aménagement du temps de travail permettant, par dérogation au droit commun, un décompte du temps de travail sur une périodicité supérieure à la semaine ; que le cycle correspond à une période, multiple de la semaine, au sein de laquelle la répartition du travail est identique d'une période pluri-hebdomadaire à l'autre; qu'à l'intérieur du cycle, les semaines peuvent comporter des durées inférieures, égales ou supérieures à la durée légale, les semaines comportant des heures au-delà de la durée légale devant être compensées au cours du cycle par des semaines comportant une durée inférieure; que seules sont considérées comme des heures supplémentaires celles qui dépassent la durée moyenne de trente-cinq heures calculée sur la durée du cycle de travail; que si l'article L. 212-7-1 précise que la durée du cycle est de "quelques semaines" et si, selon la circulaire DRT n°94-4 du 21 avril 1994, l'administration du travail considère que la durée du cycle ne peut excéder 8 à 12 semaines, aucune disposition légale ou réglementaire ne fixe la durée maximum du cycle ; qu'en application de l'article L. 212-7-1, le cycle peut être mis en place par un accord collectif qui doit fixer, notamment, la durée maximale du cycle, la répartition de la durée du travail à l'intérieur du cycle et la répartition de la durée du. travail sur les différents jours de la semaine ; que le salarié invoque la non conformité de cet accord avec les dispositions légales applicables, notamment en ce que les cycles ne se répètent pas à l'identique; que cependant, la non conformité de l'accord ne peut conduire qu' à son inopposabilité au salarié; qu'or, en tout état de cause, dans la mesure où ce mode d'organisation déroge aux règles légales de décompte des heures supplémentaires et constitue une modification du contrat de travail, l'instauration d'une organisation du travail par cycle requiert aussi l'accord exprès de chacun des salariés auxquels elle doit être appliquée même si cette organisation résulte d'un accord collectif; que l'article L 3122-6 du code du travail, issu de l'article 45 de la loi 112012-387 du 22 mars 2012 entrée en vigueur le 24 mars suivant, dispose, cettes, que la mise en place d'une répartition des horaires de travail sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année prévue par un accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail mais ces dispositions ne sauraient s'appliquer aux cycles rais en place avant le 24 mars 2012; que l'employeur fait valoir que les dispositions relatives au cycle sont contenues dans un accord collectif relatif à la réduction de la durée du travail s'inscrivant dans le cadre des lois dites "AUBRY", que l'accord sur la réduction du travail n'a jamais été contesté et qu'il a été validé par l'inspection du travail; que cependant, si les dispositions de l'accord du, 31 mai 2000, relatives à la réduction du temps de travail s'imposent au salarié, il reste que les dispositions de cet accord, en ce qu'elles sont relatives à la mise en place d'un aménagement du temps de travail par cycle, ne peuvent lui être opposables que si son accord a été recueilli ; que la société Constellium Issoire qui se borne à produire une notice d'information sur les dispositions de l'accord prétendument distribuée aux salariés de l'entreprise n'apporte aucun élément de nature à justifier qu'elle aurait recueilli l'accord de M. Y... avant de lui appliquer l'aménagement du temps de travail par cycle et le mode de décompte des heures supplémentaires résultant de l'accord collectif du 31 mai 2000; qu'en effet le contrat de travail de l'intéressé ne fait aucune référence aux dispositions spécifiques de cet accord relatif à l'organisation du temps de travail et au décompte des heures supplémentaires et mentionne simplement qu'"en application de l'accord des 35 h 00, la rémunération brute mensuelle, base 35 h 00 hebdomadaires sera de 7711,00 francs, à laquelle s'ajouteront les primes en vigueur" ; que dans la mesure où les dispositions de l'accord d'entreprise du 31 mai 2000 relatives à la mise en place d'un aménagement du temps de travail par cycle et au calcul de la durée du temps de travail sont par conséquent inopposables à M. Y... celui-ci apparaît fondé à se prévaloir du régime légal de décompte des heures supplémentaires par semaine civile prévue par l'article L 3121-20 du code du travail ; qu'aux termes de l'article L3171-4 du code du travail "en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné en cas de besoin toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles" ; que la charge de la preuve n'incombe spécialement à aucune des parties et s'il appartient à l'employeur de justifier des horaires de travail effectués par le salarié, il incombe cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que M. Y... fonde sa réclamation sur un tableau récapitulatif mentionnant pour chaque semaine concernée le nombre d'heures de travail effectué au-delà de 35 heures, dont il sollicite le paiement pour les années 2004 à 2015; que la société CONSTELLIUM ISSOIRE produit quant à elle des récapitulatifs annuels du pointage effectué pour chacun des salariés concernés et faisant apparaître le nombre d'heures de travail effectivement réalisées ; que le rapprochement entre le tableau établi parie salarié et les récapitulatifs annuels de pointage produits par l'employeur font apparaître que le salarié n'a pas toujours calculé ses heures sur la semaine civile et a intégré dans le calcul des heures effectuées un certain nombre de jours qui ne correspondent pas à des jours effectivement travaillés, notamment des jours de RTT et de congés payés, de telle sorte que le nombre d'heures supplémentaires retenues sera pour 2004, 135 heures majorées à 25%, - pour 2005, 129 heures majorées à 25%, pour 2006, 200 heures majorées à 25%, pour 2007, 190 heures majorées à 25%, pour 2008, 70 heures majorées à 25%, pour 2009, 91 heures majorées à 25% et 35 heures majorés à 50%, pour 2010, 81 heures majorées à 25% et 35 heures majorés à 50%, pour 2011, Il 0 heures majorées à 25% et 40 heures majorées à 50%, pour 2012, 120 heures majorées à 25% et 33 heures majorés à 50%, pour 2013, 83 heures majorées à 25% et 34 heures majorés à 50%, pour 2014, 109 heures majorées à 25% et 40 heures majorés à 50 %, pour 2015, 8 heures majorées à 25% et 5 heures majorées à 50 %; qu'ainsi il sera fait droit à la demande de rappel de salaire pour un montant de 22.299,49 euros au titre des heures supplémentaires effectuées au cours des années 2004 à 2015 outre 2229,94 euros au titre des congés payés afférents ;
Alors, d'une part, que la mise en place par un accord d'entreprise d'une modulation du temps de travail ne constitue pas une modification du contrat de travail ; qu'en jugeant néanmoins que l'instauration d'une modulation du temps de travail par l'accord d'entreprise du 31 mai 2000 constituait une modification du contrat de travail de M. Y..., la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
Alors, d'autre part, que l'article 45 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 qui insère dans le code du travail l'article L. 3122-6, selon lequel la mise en place d'une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année prévue par un accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail, ce texte, qui s'analyse en une loi de validation, et en tant qu'elle est justifiée par un motif impérieux d'intérêt général tenant à l'adaptation des entreprises aux rythmes de production, a un effet retrocactif ; qu'elle est applicable aux décisions de mise en oeuvre effective de la modulation du temps de travail prises avant la publication de ladite loi ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé le texte précité, ensemble l'article 2 du code civil ;
Alors, subsidiairement, que l'instauration d'une modulation du temps de travail ne peut constituer une modification du contrat de travail qui requiert l'accord exprès du salarié qu'autant qu'elle est postérieure à l'embauche de celui-ci ; qu'en jugeant que l'instauration d'une modulation du temps de travail par l'accord collectif du 31 mai 2000 ne pouvait être mise en oeuvre sans l'accord de M. Y... cependant qu'il ressort de ses propres constatations que celui-ci a été embauché postérieurement, le juin 2001, (arrêt attaqué, p. 2, § 1), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé l'article 1134 du code civil ;
Alors, enfin, et plus subsidiairement, que la l'article 45 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012, qui insère dans le code du travail l'article L. 3122-6, selon lequel la mise en place d'une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année prévue par un accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail, est applicable aux décisions de mise en oeuvre effective de la modulation du temps de travail prises après publication de ladite loi, le 23 mars 2012 ; qu'en faisant droit à la demande de rattrapage d'heures supplémentaires de M. Y... pour la période postérieure au 23 mars 2012, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Moyen produit au pourvoi n° N 15-21.668 par la SCP Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société Constellium Issoire venant aux droits de la société Constellium France venant elle-même aux droits de la société Alcan Rhenalu.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré l'aménagement du temps de travail et le mode de décompte des heures supplémentaires résultant de l'accord du 1er juin 2000, inopposable à M. Cyrille X... et d'avoir condamné la société Constellium à lui payer la somme de 17 725,89 euros à titre de rappel sur heures supplémentaires pour les années 2004 à 2015, outre 1 772,58 euros au titre des congés payés afférents ;
Aux motifs que pour solliciter un rappel de salaire sur les heures de travail qu'il a décomptées en se basant sur les dispositions légales relatives à la durée du travail, le salarié conteste l'application de l'accord collectif conclu au sein de l'entreprise le 31 mai 2000; que cet accord a décidé, en son article 5, que "la réduction de la durée du travail de l'ensemble du personnel sera organisée d'une part, pari'attribution de jours ou de derni-journées de repos par période de quatre mois et d'autre part, par la réduction de I 'horaire hebdomadaire de l'horaire en moyenne sur cette période"; que trois périodes sont définies (janvier à avril, mai à août, septembre à décembre) avec des dispositions spécifiques pour chaque catégorie de salariés (personnel travaillant en journée, 1x8, 2x8, 3x8, régime de maintenance, personnel en "21 postes", etc.) ; que pour les salariés qui, comme M. X..., sont soumis, compte tenu du fonctionnement de l'entreprise à feu continu, à un horaire "21 postes" (5h-13h pendant 2 jours, 13h-21h pendant 2 jours, 21h- 5h pendant 2 jours, repos pendant 4 jours), la réduction du temps de travail aboutit, aux tenues de l'accord, à un horaire moyen de 32,34 heures par semaine, la réduction du temps de travail se faisant par l'attribution de 8 jours par an dit de RTT répartis inégalement au sein de chacune des périodes de 4 mois; que la définition des périodes de hautes et de basses activités se fait "lors de la validation budgétaire où est précisé le niveau d'activité prévisionnel de l'année par ligne de produits" (article 6-4); que s'agissant des heures supplémentaires, l'article 7-2 prévoit les dispositions suivantes "Les heures effectuées au-delà de 35 heures hebdomadaires de travail effectifen moyenne sur un cycle de quatre mois, conformément aux dispositions de l'article L. 212-7-1 du code du travail, sont des heures supplémentaires. Les heures payées sur le mois m+1 suivant leur réalisation et effectuées au-delà de l'horaire hebdomadaire moyen prévu par l'accord sur le quadrimestre seront alors considérées comme des heures supplémentaires ; qu'elles feront l'objet des majorations légales en vigueur. Par ailleurs les parties s'accordent sur le fait de procéder à un décompte des heures supplémentaires à la +fin de chaque quadrimestre: janvier/avril, mai/août, septembre/décembre (..)"; qu'il ressort de cet accord, qui fait expressément référence à l'article L. 212-7-1 du code du travail à plusieurs reprises (article 5 et article 7-2) que les parties signataires ont entendu mettre en place une organisation du temps de travail par cycle ; que l'article L. 212-7-1 du code du travail qui était alors applicable, devenu l'article L. 3122-2, disposé que "la durée du travail de l'entreprise ou de l'établissement peut être organisée sous forme de cycles de travail dès lors que sa répartition à l'intérieur d'un cycle se répète à l'identique d'un cycle à l'autre. Ces cycles de travail, dont la durée est fixée à quelques semaines, peuvent être mis en place : 1° dans les entreprises qui fonctionnent en continu, 2° lorsque cette possibilité est autorisée par décret ou prévue par une convention ou un accord collectif étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement qui doit alors fixer la durée maximale du cycle; que lorsque sont organisés des cycles de travail, seules sont considérées comme heures supplémentaires pour l'application des articles L. 212-5, L. 212-5-1 et L. 212-6 celles qui dépassent la durée moyenne de trente-cinq heures calculée sur la durée du cycle de travail" ; qu'au sens de ce texte, le cycle s'entend d'un dispositif d'aménagement du temps de travail permettant, par dérogation au droit commun, un décompte du temps de travail sur une périodicité supérieure à la semaine ; que le cycle correspond à une période, multiple de la semaine, au sein de laquelle la répartition du travail est identique d'une période pluri-hebdomadaire à l'autre; qu'à l'intérieur du cycle, les semaines peuvent comporter des durées inférieures, égales ou supérieures à la durée légale, les semaines comportant des heures au-delà de la durée légale devant être compensées au cours du cycle par des semaines comportant une durée inférieure; que seules sont considérées comme des heures supplémentaires celles qui dépassent la durée moyenne de trente-cinq heures calculée sur la durée du cycle de travail; que si l'article L. 212-7-1 précise que la durée du cycle est de "quelques semaines" et si, selon la circulaire DRT n°94-4 du 21 avril 1994, l'administration du travail considère que la durée du cycle ne peut excéder 8 à 12 semaines, aucune disposition légale ou réglementaire ne fixe la durée maximum du cycle ; qu'en application de l'article L. 212-7-1, le cycle peut être mis en place par un accord collectif qui doit fixer, notamment, la durée maximale du cycle, la répartition de la durée du travail à l'intérieur du cycle et la répartition de la durée du. travail sur les différents jours de la semaine ; que le salarié invoque la non conformité de cet accord avec les dispositions légales applicables, notamment en ce que les cycles ne se répètent pas à l'identique; que cependant, la non conformité de l'accord ne peut conduire qu' à son inopposabilité au salarié; qu'or, en tout état de cause, dans la mesure où ce mode d'organisation déroge aux règles légales de décompte des heures supplémentaires et constitue une modification du contrat de travail, l'instauration d'une organisation du travail par cycle requiert aussi l'accord exprès de chacun des salariés auxquels elle doit être appliquée même si cette organisation résulte d'un accord collectif; que l'article L 3122-6 du code du travail, issu de l'article 45 de la loi 112012-387 du 22 mars 2012 entrée en vigueur le 24 mars suivant, dispose, cettes, que la mise en place d'une répartition des horaires de travail sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année prévue par un accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail mais ces dispositions ne sauraient s'appliquer aux cycles rais en place avant le 24 mars 2012; que l'employeur fait valoir que les dispositions relatives au cycle sont contenues dans un accord collectif relatif à la réduction de la durée du travail s'inscrivant dans le cadre des lois dites "AUBRY", que l'accord sur la réduction du travail n'a jamais été contesté et qu'il a été validé par l'inspection du travail; que cependant, si les dispositions de l'accord du, 31 mai 2000, relatives à la réduction du temps de travail s'imposent au salarié, il reste que les dispositions de cet accord, en ce qu'elles sont relatives à la mise en place d'un aménagement du temps de travail par cycle, ne peuvent lui être opposables que si son accord a été recueilli ; que la société Constellium Issoire qui se borne à produire une notice d'information sur les dispositions de l'accord prétendument distribuée aux salariés de l'entreprise n'apporte aucun élément de nature à justifier qu'elle aurait recueilli l'accord de M. X... avant de mettre en oeuvre à son égard l'aménagement du temps de travail par cycle et le mode de décompte des heures supplémentaires résultant de cet accord la seule référence aux "accords 35 heures" dans le contrat de travail ne pouvant établir l'existence d'une telle acceptation ; que dans la mesure où les dispositions de l'accord d'entreprise du 31 mai 2000 relatives à la mise en place d'un aménagement du temps de travail par cycle et au calcul de la durée du temps de travail sont par conséquent inopposables à M. X... celui-ci apparaît fondé à se prévaloir du régime légal de décompte des heures supplémentaires par semaine civile prévue par l'article L 3121-20 du code du travail ; qu'aux termes de l'article L3171-4 du code du travail "en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné en cas de besoin toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles" ; que la charge de la preuve n'incombe spécialement à aucune des parties et s'il appartient à l'employeur de justifier des horaires de travail effectués par le salarié, il incombe cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que M. X... fonde sa réclamation sur un tableau récapitulatif mentionnant pour chaque semaine concernée le nombre d'heures de travail effectué au-delà de 35 heures, dont il sollicite le paiement pour les années 2004 à 2015; que la société CONSTELLIUM ISSOIRE produit quant à elle des récapitulatifs annuels du pointage effectué pour chacun des salariés concernés et faisant apparaître le nombre d'heures de travail effectivement réalisées ; que le rapprochement entre le tableau établi parie salarié et les récapitulatifs annuels de pointage produits par l'employeur font apparaître que le salarié n'a pas toujours calculé ses heures sur la semaine civile et a intégré dans le calcul des heures effectuées un certain nombre de jours qui ne correspondent pas à des jours effectivement travaillés, notamment des jours de RTT et de congés payés, de telle sorte que le nombre d'heures supplémentaires retenues sera pour 2004 ,99 heures majorées à 25% et 40 heures majorées à 50%, pour 2005, 80 heures majorées à 25% et 25 heures majorées à 50%, pour 2006, 83 heures majorées à 25% et 30 heures majorées à 50%, pour 2007, 47 heures majorées à 25% et 18 heures majorées à 50%, pour 2008, 49 heures majorées à 25% et 11 heures majorées à 50%, pour 2009, 91 heures majorées à 25% et 35 heures majorés à 50%, pour 2010, 75 heures majorées à 25% et 25 heures majorés à 50%, pour 2011, heures majorées à 25% et 30 heures majorées à 50%, pour 2012, 69 heures majorées à 25% et 10 heures majorés à 50%, pour 2013, 94 heures majorées à 25% et 34 heures majorés à 50%, pour 2014, 98 heures majorées à 25% et 40 heures majorés à 50 %, pour 2015, 5 heures majorées à 25% et 5 heures majorées à 50 %; qu'ainsi il sera fait droit à la demande de rappel de salaire pour un montant de 17 725,89 euros au titre des heures supplémentaires effectuées au cours des années 2004 à 2015 outre 1 772,58 euros au titre des congés payés afférents ;
Alors, d'une part, que la mise en place par un accord d'entreprise d'une modulation du temps de travail ne constitue pas une modification du contrat de travail ; qu'en jugeant néanmoins que l'instauration d'une modulation du temps de travail par l'accord d'entreprise du 31 mai 2000 constituait une modification du contrat de travail de M. X..., la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
Alors, d'autre part, que l'article 45 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 qui insère dans le code du travail l'article L. 3122-6, selon lequel la mise en place d'une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année prévue par un accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail, ce texte, qui s'analyse en une loi de validation, et en tant qu'elle est justifiée par un motif impérieux d'intérêt général tenant à l'adaptation des entreprises aux rythmes de production, a un effet retrocactif ; qu'elle est applicable aux décisions de mise en oeuvre effective de la modulation du temps de travail prises avant la publication de ladite loi ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé le texte précité, ensemble l'article 2 du code civil ;
Alors, subsidiairement, que l'instauration d'une modulation du temps de travail ne peut constituer une modification du contrat de travail qui requiert l'accord exprès du salarié qu'autant qu'elle est postérieure à l'embauche de celui-ci ; qu'en jugeant que l'instauration d'une modulation du temps de travail par l'accord collectif du 31 mai 2000 ne pouvait être mise en oeuvre sans l'accord de M. X... cependant qu'il ressort de ses propres constatations que celui-ci a été embauché postérieurement, en août 2000, (arrêt attaqué, p. 2, § 1), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé l'article 1134 du code civil ;
Alors, enfin, et plus subsidiairement, que la l'article 45 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012, qui insère dans le code du travail l'article L. 3122-6, selon lequel la mise en place d'une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année prévue par un accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail, est applicable aux décisions de mise en oeuvre effective de la modulation du temps de travail prises après publication de ladite loi, le 23 mars 2012 ; qu'en faisant droit à la demande de rattrapage d'heures supplémentaires de M. X... pour la période postérieure au 23 mars 2012, la cour d'appel a violé le texte susvisé.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-21664;15-21668
Date de la décision : 01/12/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 19 mai 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 01 déc. 2016, pourvoi n°15-21664;15-21668


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Delaporte et Briard, SCP Delvolvé et Trichet, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.21664
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