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16/11/2016 | FRANCE | N°15-15197;15-15205;15-15210;15-15214;15-15215;15-15244;15-15277

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 novembre 2016, 15-15197 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° D 15-15. 197, N 15-15. 205, T 15-15. 210, X 15-15. 214, Y 15-15. 215, E 15-15. 244 et R 15-15. 277 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que la société Plysorol, spécialisée dans la fabrication de panneaux de bois sur trois sites en France, Magenta, Fontenay le Comte et Lisieux qui employaient respectivement 93, 113 et 75 salariés, contrôlait deux filiales situées au Gabon-les sociétés Leroy Gabon et Pogab-qui fournissaient et transformaient le bois des forêt

s de ce pays ; que suite à un redressement judiciaire prononcé le 31 mars ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° D 15-15. 197, N 15-15. 205, T 15-15. 210, X 15-15. 214, Y 15-15. 215, E 15-15. 244 et R 15-15. 277 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués, que la société Plysorol, spécialisée dans la fabrication de panneaux de bois sur trois sites en France, Magenta, Fontenay le Comte et Lisieux qui employaient respectivement 93, 113 et 75 salariés, contrôlait deux filiales situées au Gabon-les sociétés Leroy Gabon et Pogab-qui fournissaient et transformaient le bois des forêts de ce pays ; que suite à un redressement judiciaire prononcé le 31 mars 2009 de la société Plysorol, un plan de cession a été ordonné au profit de la société de droit chinois Shandong, à laquelle s'est substituée la société Plysorol Europe nouvellement créée ; que le 9 avril 2010, cette dernière a été placée en redressement judiciaire, puis le 11 octobre 2010 le tribunal de commerce de Lisieux a autorisé la cession de ses actifs à la société de droit libanais Woodtec détenue à 94 % par M. C... et la société Plysorol International était constituée ; que le 6 septembre 2012, le tribunal de commerce prononçait la liquidation judiciaire de la société Plysorol International avec une poursuite d'activité jusqu'au 30 septembre 2012, désignant la société Beuzeboc et M. A... comme mandataires liquidateurs lesquels, après la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi, licenciaient pour motif économique le 1er octobre 2012 l'ensemble des salariés de cette entreprise ; que le 26 décembre 2012, Mme B... et sept autres salariés protégés de la société Plysorol International, dont le licenciement a été autorisé par l'administration du travail, ont saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article L. 1235-10 du code du travail dans sa version applicable au litige ;

Attendu que la pertinence d'un plan de sauvegarde de l'emploi doit être appréciée en fonction des moyens dont disposent l'entreprise et le groupe dont elle fait partie pour maintenir les emplois ou faciliter le reclassement ; que s'agissant des possibilités de reclassement au sein du groupe, cette pertinence doit s'apprécier parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'en revanche, s'agissant des moyens financiers du groupe, la pertinence doit s'apprécier compte tenu des moyens de l'ensemble des entreprises unies par le contrôle ou l'influence d'une entreprise dominante dans les conditions définies à l'article L. 2331-1 du code du travail sans qu'il y ait lieu de réduire le groupe aux entreprises situées sur le territoire national ;

Attendu que pour constater l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi et fixer en conséquence diverses sommes au passif de la liquidation judiciaire de la société Plysorol International, les arrêts retiennent, par motifs propres et adoptés, que ce plan ne contient aucun dispositif pour faciliter la mobilité des salariés faute notamment de participation financière du groupe ; que l'argumentation des organes de la procédure suivant laquelle l'appréciation des moyens du groupe devait se faire au regard de la situation des sociétés Woodtec, Leroy Gabon et Pogab, seules sociétés ayant entre elles des liens capitalistiques et constituant le groupe au sens de la loi et qui se trouvaient en situation financière obérée, ne peut être retenue ; qu'en effet, l'expert financier judiciaire désigné dans le cadre de la procédure collective, emploie lui-même l'expression « groupe ghanéen John Bitar » pour recouvrir Plysorol et ses filiales, ainsi que la société John Bitar Gabon elle-même filiale de ce groupe, et donc ce dernier ne doit pas être exclu du périmètre de financement du plan de sauvegarde de l'emploi et ce d'autant que la société John Bitar Gabon était devenue titulaire des permis forestiers au Gabon ; que cette analyse ne s'avère pas contredite par le rapport de l'administrateur judiciaire dont il appert que Woodtec, mais surtout M. C... lui-même avaient consenti des prêts à Plysorol et les capacités financières au moment du plan de sauvegarde de l'emploi du même M. C... ne sont pas connues ni n'ont été recherchées ; Que l'administrateur en analysant le poste « Dettes fournisseurs » y inclut des montants dus « aux sociétés du groupe » et il cite à ce titre la société libanaise Totalwood, et la société de droit anglais « Timber et Trading Agency » de sorte que rien ne permet de se convaincre que ces deux entités incluses par les organes de la procédure dans le périmètre de reclassement, devaient être exclues d'emblée pour le financement du plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'enfin, il n'est nullement établi que la société John Bitar Gabon ne disposait pas de moyens pour contribuer au plan de sauvegarde de l'emploi alors que le procès-verbal du comité d'entreprise du 29 mai 2012 après avoir rappelé que cette société avait été en mesure de recapitaliser respectivement à hauteur de 70 % et 10 % les sociétés Pogab et Leroy, reprenait son intention déjà exprimée dans un communiqué du 3 avril 2012 d'investir pour Plysorol un million d'euros dans un nouveau procédé ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs en partie inopérants, sans limiter son appréciation des moyens financiers du groupe auquel appartenait la société Plysorol aux sociétés unies par le contrôle ou l'influence d'une entreprise dominante dans les conditions définies à l'article L. 2331-1 du code du travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Sur le deuxième moyen :

Vu l'article 624 du code de procédure civile ;

Attendu que la cassation à intervenir sur le premier moyen des pourvois emporte la cassation par voie de conséquence du chef du dispositif critiqué par le deuxième moyen de ces pourvois et relatif aux dommages-intérêts pour préjudice moral distinct procédant d'une insuffisante recherche de contribution du groupe au plan de sauvegarde de l'emploi ;

Et sur le troisième moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Plysorol International des créances de salaires et de congés payés au titre des temps de pause pour les cinq années précédant la saisine de la juridiction prud'homale, les arrêts retiennent que les jugements qui avaient seulement invité les salariés à chiffrer leur réclamation au titre des temps de pause pour le temps non couvert par la prescription doivent être complétés ; que pour s'opposer à cette demande les mandataires liquidateurs se réfèrent à l'accord sur le temps de travail du 14 juin 2001 ayant eu pour effet de compenser le paiement antérieur des temps de pause par une hausse du taux horaire ; que cependant, pour accueillir la réclamation exactement calculée, il suffit, à l'instar de ce que déduisent les salariés des bulletins de paye versés aux débats de constater que la société Plysorol après les discussions engagées autour de la conformité de l'accord d'entreprise à la convention collective de branche, avait à compter du 1er janvier 2012 à nouveau payé de manière distincte les temps de pause comme du temps de travail effectif, ce dont il s'évince un engagement sans équivoque de l'employeur de payer cette rémunération ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions des mandataires liquidateurs de la société Plysorol International qui faisaient valoir que cette société ne pouvait être tenue à un rappel de salaire calculé sur la base de cinq années dès lors que la reprise des actifs s'était opérée par jugement de cession en date du 11 octobre 2010 et que ni le jugement ni l'offre de cession ne mentionnaient la reprise de ce passif, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'ils déclarent irrecevable la demande de préavis, les arrêts rendus le 21 janvier 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur les points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;

Condamne les salariés aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits, aux pourvois n° s D 15-15. 197, N 15-15. 205, T 15-15. 210, X 15-15. 214, Y 15-15. 215, E 15-15. 244 et R 15-15. 277, par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Beuzeboc et M. A..., ès qualités

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR constaté l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi et d'AVOIR en conséquence fixé diverses sommes au passif de la liquidation de la société Plysorol International ;

AUX MOTIFS QUE c'est avec pertinence sauf à compléter leur motivation que les premiers juges ont considéré que la preuve n'était pas suffisamment administrée au vu des éléments du dossier, que le plan de sauvegarde de l'emploi satisfaisait au prescrit des articles L. 1233-61 et L. 1233-62 du code du travail, ni qu'au sens de l'article L. 1235-10 du même code il s'avérait proportionné aux moyens dont disposait l'unité économique et sociale ou le groupe ; que c'est sans contradiction ni dénaturation que les premiers juges ont décrit les mesures du plan social et leur improbable mise en oeuvre effective faute de précisions sur les moyens financiers qui seraient affectés ; qu'il convient d'ajouter la même observation sur la prévision d'une cellule d'appui pendant la durée de 45 jours, et du reste aucun bilan de l'activité de celle-ci n'est produit ; qu'il y a aussi lieu, ainsi que le fait valoir la partie intimée, de relever, à partir de l'expertise judiciaire et du rapport de l'administrateur, des éléments qui sont de nature à contredire-et du moins à faire sérieusement douter ce qui suffit-de l'argumentation des appelants selon laquelle ne devaient contribuer au financement du plan social que les sociétés Woodtec, Leroy Gabon et Pogab aux motifs qu'elles seules auraient eu entre elles des liens capitalistiques et auraient constitué le groupe ou l'unité économique visées par la loi, de sorte qu'en relevant que Woodtec n'avait pas d'activité, que Leroy et Pogab étaient dans une situation économique obérée, c'était sans fraude, ni volonté de se soustraire à ses obligations que M. C... avait fait savoir qu'il ne financerait pas le plan de sauvegarde de l'emploi, ce qui est acté dans ce document ; que la lecture de l'expertise judiciaire vient contredire la notion restrictive du groupe retenu dans ce cadre juridique par les appelants ; que les experts après avoir décrit la situation calamiteuse en son temps laissée dans les filiales du Gabon de Plysorol relatent le retrait par les autorités du Gabon des permis d'exploitation forestiers à la société Leroy Gabon fin 2011, et l'octroi en janvier 2012 de ceux-ci au « groupe John Bitar » ; que l'expert relève que si M. C... a coopéré à sa mission il s'est en revanche irréductiblement opposé à lui donner copie, ni seulement à lui laisser procéder à la lecture des arrêtés du ministre du Gabon accordant les permis forestiers ; que cet élément fondamental-dans la mesure où la perte des permis forestiers considérés a pour une grande part contribué à priver Plysorol et ses filiales de matières premières-a donc été soustrait au contrôle des appelants, des représentants du personnel et des juges, en dernier lieu de la cour ; que néanmoins l'expert emploie lui-même l'expression « groupe John Bitar » pour recouvrir Plysorol et ses filiales ainsi que la société John Bitar Gabon elle-même filiale du « groupe ghanéen John Bitar » et donc ce dernier ne devait pas être exclu du périmètre de financement du plan de sauvegarde de l'emploi, d'autant que c'était ces sociétés qui étaient devenues titulaires des permis forestiers ; que cette analyse ne s'avère pas contredite par le rapport de l'administrateur judiciaire dont il appert que Woodtec, mais surtout M. C... lui-même avait consenti des prêts à Plysorol (5518 k €) et les capacités financières au moment du plan de sauvegarde de l'emploi du même M. C... ne sont pas connues ni n'ont été recherchées ; que l'administrateur en analysant le poste « Dettes fournisseurs » y inclut des montants dus « aux sociétés du groupe » et il cite à ce titre la société libanaise Totalwood, et la société de droit anglais « Timber et Trading Agency » de sorte que rien ne permet de se convaincre que ces deux entités incluses par les appelants dans le périmètre de reclassement, devaient être exclues d'emblée pour le financement du plan de sauvegarde de l'emploi ; qu'enfin, et la partie intimée le souligne aussi avec pertinence, il n'est nullement établi que la société John Bitar Gabon ne disposait pas de moyens pour contribuer au plan de sauvegarde de l'emploi alors que le procès-verbal du comité d'entreprise du 29 mai 2012 après avoir rappelé que cette société avait été en mesure de recapitaliser respectivement à hauteur de 70 % et 10 % les sociétés Pogab et Leroy, reprenait son intention déjà exprimée dans un communiqué du 3 avril 2012 d'investir pour Plysorol un million d'euros dans un nouveau procédé ; que l'attribution postérieure par les autorités gabonaises à la société John Bitar Gabon des permis forestiers vient de plus fort confirmer que celle-là disposait des moyens matériels et financiers pour exploiter effectivement ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail, toute rupture du contrat de travail pour cause économique au sens de ce texte relève du chapitre consacré au licenciement pour motif économique ; qu'en l'espèce, le départ du salarié de la société a pour origine la suppression d'emplois au sein de l'entreprise pour motifs économiques et ne résulte pas d'un accord social portant sur une réduction des effectifs ; que les licenciements ont été autorisés par le juge-commissaire, cette ordonnance n'ayant pas été contestée, elle est donc devenue définitive, de sorte que le caractère économique du licenciement ne peut plus être contesté ; que toutefois, le conseil reste compétent pour apprécier la situation des salariés au regard de l'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur en application des articles L. 1233-4, L. 1233-5, L. 1233-61 et L. 1233-62 du code du travail ; qu'il convient de constater que le salarié ne remet nullement en cause les difficultés économiques rencontrées par la société Plysorol International mais que sa contestation porte uniquement sur la violation par ladite société de son obligation tant légale que conventionnelle de recherche de reclassement, laquelle rendrait le licenciement illicite et qu'aucun dispositif d'accompagnement de la mobilité pour favoriser le reclassement n'a été prévu par le PSE ; qu'il ressort de l'article L. 1233-4 du code du travail, qu'en matière de licenciement pour motif économique, la notification de la rupture du contrat de travail n'est possible qu'après que l'employeur ait fait tous les efforts nécessaires tant en matière de formation et d'adaptation que de reclassement du salarié tant en interne qu'en externe ; qu'en cas d'inexécution partielle ou totale, il appartient au juge d'apprécier si cette inexécution constitue un manquement à ses obligations pour que le licenciement sans cause réelle et sérieuse soit prononcé ; que la législation du licenciement collectif pour motif économique se caractérise dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, par l'établissement et la mise en oeuvre d'un plan de sauvegarde de l'emploi intégrant un plan de reclassement prévoyant en priorité des actions de reclassement interne ; qu'avant d'examiner concrètement si le plan de sauvegarde de l'emploi présente ou non un caractère suffisant, certaines précisions s'imposent en préalable ; qu'en premier lieu, il convient d'observer que le plan a été soumis à la consultation des élus dans le cadre d'une procédure, au cours de laquelle suite aux observations formulées par les salariés et par l'administration du travail, l'employeur a accepté diverses modifications ; que si le plan modifié n'a pas, au vu des pièces régulièrement produites aux débats, fait l'objet d'un nouvel écrit communiqué aux instances de consultation et en tout état de cause au comité central d'entreprise, il convient, alors que la procédure de consultation n'a à aucun moment fait l'objet d'une contestation, d'apprécier la validité du plan, en l'espèce, en fonction des moyens certes limités de la société Plysorol International mais aussi et surtout du groupe Ghassan Bitar qui s'est pourtant refusé à financer toute mesure du plan de sauvegarde de l'emploi, selon les dires des administrateurs judiciaires lors de la réunion du comité central d'entreprise du 24 septembre 2012 (PV du comité d'établissement de Lisieux du 24 septembre 2012), en prenant en compte les modifications apportées par la Selarl Beuzeboc et Maître Alain A..., ès qualités de mandataires liquidateurs ; qu'ainsi en l'absence de tout financement du groupe le PSE communiqué par les représentants de la procédure collective aux représentants du personnel peut s'avérer non seulement très insuffisant mais aussi et surtout totalement virtuel à l'exclusion des mesures financées soit par les seuls salariés pour le contrat de sécurisation professionnelle ou par l'Etat pour l'éventuelle allocation temporaire dégressive ; que par contre, ne sauraient être prises en compte pour apprécier la validité du plan, les démarches ou les mesures prises postérieurement à la saisine des institutions représentatives (des comités) et n'ayant fait l'objet d'aucune consultation auprès des élus ; que le plan de sauvegarde de l'emploi ne constitue pas un simple outil mais un acte qui créé des obligations à la charge de l'employeur ; qu'aussi, les initiatives prises par l'employeur postérieurement à la procédure de consultation ne sont pas susceptibles de valider rétroactivement l'éventuelle carence du plan ; (…) 1. 1. 4. Sur les autres mesures du PSE : qu'après analyse du plan de sauvegarde de l'emploi il apparaît qu'aucun dispositif pour faciliter la mobilité des salariés n'a été prévu ni même envisagé par les organes de la procédure faute notamment de participation du groupe ; qu'en effet, il convient de constater que :- pour ce qui est du CSP, que ce dispositif obligatoire dans les entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire n'a pu être proposé que par ce qu'il est intégralement financé par les salariés ;- quant à l'allocation temporaire dégressive, visée dans le PSE, qu'elle était conditionnée pour son financement intégral à l'intervention de l'Etat ;- que pour les aides à la formation, il est indiqué dans le PSE que ces aides seraient plus ou moins importantes selon le type de formation (adaptation qualifiante, reconversion professionnelle) sans que son montant ne soit ni indiqué ni précisé ; que concernant l'aide à la formation, il ressort des pièces du dossier, et surtout de l'absence de pièces dans le dossier de la défenderesse, que la société Plysorol International, en liquidation judiciaire, est dans l'incapacité d'établir qu'elle aurait fait bénéficier le demandeur de la moindre formation ; qu'il n'est pas plus précisé le montant des aides liées à la mobilité géographique ; qu'au vu de l'ensemble de ces observations, bien que le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit un certain nombre de mesures concernant le reclassement des salariés, il ne répond pas aux exigences posées par l'article L. 1233-62 du code du travail en raison de ses multiples carences et insuffisances et qu'au regard des moyens dont disposent l'entreprise et son groupe, apparaissent particulièrement caractérisées ;

ALORS QUE la pertinence du plan de sauvegarde de l'emploi doit s'apprécier compte tenu des moyens de l'ensemble des sociétés unies entre elles par le contrôle de la société mère ; qu'en l'espèce, les exposants soutenaient que pour l'appréciation de la pertinence des mesures du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Plysorol International au regard des moyens du groupe, il fallait définir le groupe comme l'ensemble des sociétés unies entre elles par le contrôle de la société mère, soit la société Woodtec ; que la cour d'appel a cependant retenu qu'entraient dans le groupe non seulement la société Woodtec, la société Plysorol International et ses filiales, mais aussi l'ensemble du « groupe ghanéen John Bitar » et les sociétés libanaise Totalwood et anglaise Timber et Trading Agency, autrement dit des sociétés qui n'entretenaient aucun lien capitalistique avec la société Plysorol International ; qu'en retenant une telle conception, extensive, de la notion de groupe au sens et pour les besoins de l'appréciation de la pertinence des mesures du plan de sauvegarde de l'emploi, la cour d'appel a violé l'article L. 1235-10, alinéa 2, du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société Plysorol International des créances au titre d'un préjudice moral distinct ;

AUX MOTIFS QUE si l'analyse qui précède ne met pas avec certitude en exergue une fraude-principalement du fait que ne sont pas en l'espèce déterminées les conditions qui ont présidé aux décisions de l'Etat gabonais de retrait et réattribution des permis forestiers, et alors que les procédures pénales qui seraient toujours en cours du chef de banqueroute n'ont pas abouti à une décision irrévocable-elle suffit néanmoins à caractériser un préjudice moral distinct né de l'insuffisante recherche de contribution du groupe au plan de sauvegarde de l'emploi, ce qui confère au licenciement un caractère abusif ; que ce dommage sera entièrement réparé par la fixation d'une créance de 5 000 euros de dommages et intérêts ; qu'il sera ajouté au jugement en ce sens ;

1°) ALORS QUE la cassation des arrêts attaqués sur le fondement du premier moyen, en ce qu'ils ont jugé que les mesures du plan de sauvegarde de l'emploi étaient insuffisantes au regard des moyens du groupe, entraînera automatiquement en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des arrêts en ce qu'ils ont jugé que l'insuffisante recherche de contribution du groupe au plan de sauvegarde de l'emploi avait créé un préjudice moral distinct dont les salariés pouvaient demander réparation ;

2°) ALORS en tout état de cause QU'un même préjudice ne peut être réparé deux fois ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a affirmé péremptoirement que les salariés avaient droit à la réparation d'un préjudice moral distinct né de l'insuffisante recherche de contribution du groupe au plan de sauvegarde de l'emploi qui conférait au licenciement un caractère abusif ; qu'en statuant ainsi, sans caractériser en quoi la prétendue insuffisante recherche de contribution du groupe au plan de sauvegarde de l'emploi aurait causé un préjudice moral distinct de celui né de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi au regard des moyens du groupe réparé pour les salariés ordinaires par des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour les salariés protégés par « des dommages et intérêts pour insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, ensemble le principe de la réparation intégrale.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief aux arrêts attaqués d'AVOIR fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société Plysorol International des créances de salaires et de congés payés au titre des temps de pause ;

AUX MOTIFS QUE le jugement qui avait seulement invité la partie intimée à chiffrer sa réclamation au titre des temps de pause pour le temps non couvert par la prescription doit être complété ; que pour s'opposer à cette demande les appelants se réfèrent à l'accord sur le temps de travail du 14 juin 2001 ayant eu pour effet de compenser le paiement antérieur des temps de pause par une hausse du taux horaire ; que cependant, pour accueillir la réclamation exactement calculée, il suffit, à l'instar de ce que déduit la partie intimée des bulletins de paye qu'elle verse aux débats de constater que la SAS Plysorol après les discussions engagées autour de la conformité de l'accord d'entreprise à la convention collective de branche, avait à compter du 1er janvier 2012 à nouveau payé de manière distincte les temps de pause comme du temps de travail effectif, ce dont il s'évince un engagement sans équivoque de l'employeur de payer cette rémunération ;

1°) ALORS QUE les juges du fond ne sauraient dénaturer les pièces de la procédure qui leur sont soumises ; que le conseil de prud'hommes de Reims avait jugé dans ses jugements du 22 octobre 2013 que les salariés ne pouvaient pas demander des rappels de salaire pour les cinq années précédant sa saisine mais seulement à compter du 10 octobre 2010, date de la création de la société Plysorol International, dans la mesure où lorsque la modification intervient dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, le nouvel employeur n'est pas tenu des obligations qui incombaient à l'ancien ; que pour faire pourtant droit aux demandes relatives aux temps de pause présentées par les salariés pour toute la période non prescrite, la cour d'appel a jugé que les jugements avaient seulement invité les salariés à chiffrer leur réclamation au titre des temps de pause pour le temps non couvert par la prescription ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des jugements du 22 octobre 2013 et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions est un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, les mandataires liquidateurs de la société Plysorol International faisaient valoir que si la cour d'appel devait entrer en voie de condamnation au titre du rappel de salaire lié à la rémunération du temps de pause, la société Plysorol International SAS ne pouvait être tenue à un quantum de rappel calculé sur la base de cinq années dès lors que la reprise des actifs s'était opérée par jugement de cession en date du 11 octobre 2010 et que ni le jugement ni l'offre de cession ne mentionnaient la reprise de ce passif ; qu'en ne répondant pas à ce moyen opérant des mandataires liquidateurs de la société Plysorol International, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-15197;15-15205;15-15210;15-15214;15-15215;15-15244;15-15277
Date de la décision : 16/11/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 21 janvier 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 nov. 2016, pourvoi n°15-15197;15-15205;15-15210;15-15214;15-15215;15-15244;15-15277


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.15197
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