CIV. 1
CGA
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 9 novembre 2016
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10532 F
Pourvoi n° Z 15-22.001
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ M. [Z] [N],
2°/ Mme [T] [V], épouse [N],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
contre les arrêts rendus le 22 mai 2014 et 3 juillet 2015 par la cour d'appel de Dijon (3e chambre civile), dans le litige les opposant :
1°/ à M. [K] [N],
2°/ à Mme [I] [Q], épouse [N],
tous deux domiciliés [Adresse 2],
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 4 octobre 2016, où étaient présents : Mme Batut, président, Mme Mouty-Tardieu, conseiller référendaire rapporteur, M. Matet, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de Me Blondel, avocat de M. [Z] [N] et de Mme [T] [N] ;
Sur le rapport de Mme Mouty-Tardieu, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [Z] [N] et Mme [T] [N] aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille seize.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour M. [Z] [N] et Mme [T] [N]
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
dirigé contre l'arrêt avant dire droit du 2 mai 2015 :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a accordé un droit de visite à M. [K] [N] et à Mme [I] [Q] épouse [N] sur leurs petites-filles, [B] [N] et [H] [N] ;
AUX MOTIFS DE L'ARRET AVANT DIRE DROIT DU 22 MAI 2014 QUE les appelants persistent à soutenir qu'au regard des dispositions combinées du Code civil et du code de procédure civile, les grands-parents ne sont plus, depuis la réforme intervenue par la loi du 4 mars 2002, recevables à agir directement pour obtenir un droit de visite et d'hébergement sur leurs petits-enfants ; que s'agissant d'une question relevant de l'autorité parentale, seuls les parents seraient recevables à saisir le juge aux affaires familiales sur le fondement de l'article 371-4 du Code civil, les grands-parents, ayant la qualité de tiers, devant préalablement saisir par simple requête – par application des articles 1179-1 du Code de procédure civile et 373-2-8 du Code civil,, - le procureur de la République, lequel pourra saisir ensuite, s'il l'estime nécessaire, le juge aux affaires familiale dans la forme des règles de procédure en matière contentieuse, telles qu'édictées par l'article 1180 du code de procédure civile ; que le premier juge, comme le ministère public auquel le dossier avait été communiqué, a considéré que les dispositions de l'article 373-2-8 du Code civil n'ont vocation à s'appliquer que dans l'hypothèse visée par l'article 373-3 du Code civil où un tiers sollicite de se voir confier un enfant, cet article renvoyant pour son application à l'article 373-2-8 du Code civil ; que le juge aux affaires familiales a estimé qu'il ressort clairement de la combinaison des articles 371-4 du Code civil et 1180 du Code de procédure civile que la fixation des relations personnelles de l'enfant mineur avec des tiers, parents ou non, obéit aux règles de la procédure contentieuse ordinaire devant le tribunal de grande instance et qu'au surplus, si l'article 371-4 remanié par les lois du 4 mars 2002 et 5 mars 2007 consacre désormais un droit de l'enfant, cette disposition ne peut s'interpréter de manière stricte, comme attribuant le droit aux relations personnelles exclusivement à l'enfant et non aux ascendants, ce qui reviendrait en fait à nier tout droit à ces derniers ; que les appelants estiment cette analyse erronée, ce texte étant selon eux de portée générale, nulle disposition ne limitant l'application de l'article 373-2-8 du Code civil à la seule hypothèse, visée par l'article 373-3 du Code civil, d'un tiers sollicitant de se voir confier un enfant ; que, d'ailleurs, si cet article n'avait vocation à s'appliquer qu'au cas visé par l'article 373-3 du Code civil, il aurait – toujours selon les appelants – été inclus dans cet article ou l'aurait suivi ; mais que les termes mêmes de l'article 373-2-8 du Code civil manifestent bien que cette disposition ne concerne pas le droit de visite et d'hébergement des grands-parents puisque le droit aujourd'hui reconnu à l'enfant d'entretenir des relations avec ses grands-parents ne concerne pas l'autorité parentale proprement dite ; qu'or, le texte examiné ne concerne que l'autorité parentale et la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants qui n'est pas davantage en cause dans la présente espèce ; qu'en outre, les appelants ayant choisi de positionner prioritairement le débat sur un terrain strictement juridique, la cour ajoute à la motivation pertinente du juge des affaires familiales que tant la doctrine que la jurisprudence s'accordent à admettre depuis les réformes de 2002 et de 2007 l'action directe des grands-parents dans les mêmes conditions que précédemment ; que dans tous les cas d'application de l'article 373-2-8 du Code civil par les cours d'appel, il s'agissait d'espèces dans lesquelles les grands-parents demandaient à exercer l'autorité parentale sur les enfants aux lieu et place de leurs parents ; qu'en revanche, les cours d'appel sont très habituellement amenées à statuer sur des demandes de droit de visite et d'hébergement présentées directement par des grands-parents qui se heurtent au refus des parents de leur permettre de rencontrer leurs petits-enfants ; que si, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007 qui a substitué à la rédaction de la loi du 4 mars 2002 (« seuls des motifs graves peuvent faire obstacle à ce droit ») une nouvelle formulation selon laquelle « seul l'intérêt de l'enfant pet faire obstacle à l'exercice de ce droit ») une nouvelle formulation selon laquelle « seul l'intérêt de l'enfant peut faire obstacle l'exercice de ce droit », les juridictions s'attachent à ne considérer que l'intérêt exclusif de l'enfant qui sert de fondement unique à l'instauration ou au refus d'un droit de visite au profit des grands-parents , en revanche, elles appliquent les textes nouveaux à la lumière de la jurisprudence antérieure et considèrent que les grands-parents sont également titulaires d'un droit de visite et d'hébergement sur leurs petits-enfants, ce droit étant présumé conforme à l'intérêt de ces derniers, sauf aux parents, qui s'opposent à cet exercice à rapporter la preuve contraire ; qu'en conséquence, l'action de M. et Mme [K] [N] ne peut qu'être déclarée recevable ;
ET AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES DU PREMIER JUGE QU'aux termes de l'article 371-4 du Code civil, l'enfant a le droit d'entretenir des relations personnelles avec ses ascendants ; que seul l'intérêt de l'enfant peut faire obstacle à l'exercice de ce droit ; que si tel est l'intérêt de l'enfant, le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l'enfant et un tiers, parent ou non ; que l'article 1180 du Code de procédure civile dispose que les demandes formées en application de l'article 371-4 du Code civil et de l'alinéa 2 de l'article 373-3 du Code civil obéissent aux règles de la procédure en matière contentieuse applicable devant le Tribunal de grande instance ; qu'elles sont jugées après avis du ministère public ; que M. [Z] [N] et Mme [T] [V] épouse [N] soutiennent que la demande présentée par les requérants ne peut être recevable, faute pour eux de disposer de la possibilité de saisir directement le juge aux affaires familiales ; qu'ils soutiennent qu'il leur appartenait de saisir le procureur de la République sur le fondement de l'article 373-2-8 du Code civil en leur qualité de tiers afin que le représentant du ministère public, seul habilité à agir, saisisse le juge compétent ; que les demandeurs estiment pour leur part que la procédure est parfaitement régulière, position à laquelle adhère le procureur de la République dans son avis écrit ; qu'il convient de faire observer que la procédure tendant à accorder à un tiers le droit d'entretenir des relations personnelles avec un mineur diffère de celle autorisant un tiers à se voir confier un enfant ; que cette dernière est en effet régie par l'article 373-3 du Code civil qui renvoie lui-même aux articles 373-2-8 et 373-2-11 ; que l'article 1179-1 du Code de procédure civile rappelle à cette fin que seuls les parents et le Ministère public, lui-même éventuellement saisi par un tiers, peuvent saisir le juge aux affaires familiales à l'effet de voir confier l'enfant à un tiers ; qu'il ressort clairement de la combinaison des articles 371-4 et 1180 que la fixation des relations personnelles de l'enfant mineur avec des tiers, parents ou non, obéit aux règles de la procédure contentieuse ordinaire devant le Tribunal de grande instance ; qu'au surplus, si l'article 371-4 remanié par les lois du 4 mars 2002 et du 5 mars 2007 consacre désormais un droit de l'enfant, cette disposition ne peut s'interpréter de manière stricte, comme attribuant le droit aux relations personnelles exclusivement à l'enfant et non aux ascendants, ce qui reviendrait en fait à nier tout droit à ces derniers ; que par conséquent, il y a lieu de déclarer comme parfaitement recevable la demande présentée par M. [K] [N] et Mme [I] [Q] épouse [N] ;
ALORS QUE, D'UNE PART, le droit d'un enfant à des relations avec ses ascendants figure au chapitre du Code civil traitant de l'autorité parentale à l'article 374-1 ; qu'en vertu de l'article 373-2-8, les tiers - dont les ascendants d'un enfant - n'ont pas qualité pour saisir directement le juge aux affaires familiales à l'effet de statuer sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale ; que les grands-parents ne sont donc pas recevables à saisir directement le juge aux fins de voir fixer un droit de visite à l'égard de leurs petits-enfants ; qu'en jugeant au contraire qu'une demande fondée sur l'article 374-1 ne concerne pas l'exercice de l'autorité parentale, la cour viole les textes précités ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, il résulte de la combinaison des articles 371-4 du Code civil et 1180 du Code de procédure civile que le procureur de la République qui, saisi par un tiers, décide lui-même de saisir le juge aux affaires familiales à l'effet de statuer sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale, doit respecter les règles de procédure contentieuse devant le tribunal de grande instance ; qu'en jugeant néanmoins qu'il résulte de la combinaison de ces articles qu'un tiers – ici des grands-parents - peut saisir directement le juge aux affaires familiales pour qu'il octroie aux grands-parents un droit de visite, la Cour viole, par fausse interprétation, les textes précités, ensemble méconnait son office au regard de l'article 12 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire) dirigé contre chacun des arrêts attaqués de la Cour de Dijon :Il est reproché aux arrêts attaqués d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a accordé un droit de visite à Monsieur [K] [N] et à Madame [I] [Q] épouse [N] sur leurs petites-filles, [B] [N] et [H] [N] ;
ALORS QUE le Ministère public doit avoir communication des demandes formées en application de l'article 371-4 du Code civil ; que cette règle est d'ordre public ; qu'en l'espèce, la cour d'appel accueille la demande de Monsieur et Madame [K] [N] tendant sur le fondement de l'article 371-4 du Code civil à obtenir un droit de visite sur leurs petites-filles cependant qu'il ne résulte ni des mentions de chacun des arrêts attaqués, ni des pièces de la procédure, ni d'aucun autre moyen de preuve, que la cause ait été communiquée à hauteur d'appel au Ministère public, peu important qu'elle l'ait été en première instance ; qu'en statuant ainsi, la Cour viole l'article précité, ensemble les articles 425 et 1180 du Code de procédure civile.