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03/11/2016 | FRANCE | N°15-17666

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 novembre 2016, 15-17666


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 février 2015), que Mme X..., engagée le 16 juin 2008 par la société Financière Saint-Martin en qualité de comptable, a été licenciée ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à la rupture de son contrat de travail et en paiement d'une indemnité de non-concurrence ;
Attendu que la société Financière Saint-Martin fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la salariée une somme au titre de l'indemni

té spéciale de non-concurrence, alors, selon le moyen :
1°/ que la clause de ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 février 2015), que Mme X..., engagée le 16 juin 2008 par la société Financière Saint-Martin en qualité de comptable, a été licenciée ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à la rupture de son contrat de travail et en paiement d'une indemnité de non-concurrence ;
Attendu que la société Financière Saint-Martin fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la salariée une somme au titre de l'indemnité spéciale de non-concurrence, alors, selon le moyen :
1°/ que la clause de non-concurrence stipulait que l'employeur pouvait renoncer à son exécution, en premier lieu, dans les trois semaines suivant la notification de la rupture du contrat ou, en second lieu, en cas d'absence de préavis, dans les deux semaines suivant la date de rupture du contrat ; que l'arrêt attaqué a jugé tardive la renonciation à l'exécution de cette clause faite par la société Financière Saint-Martin, au prétexte que ladite société ne pouvait se prévaloir du second cas de renonciation dès lors qu'il n'y avait pas absence de préavis mais dispense de la salariée d'exécuter son préavis par la lettre de licenciement du 7 octobre 2010 ; qu'en statuant de la sorte, quand en visant indistinctement une « absence de préavis » la clause de non-concurrence n'exigeait pas que cette absence ait nécessairement une cause autre que la décision de l'employeur de dispenser la salariée d'exécuter son préavis, la cour d'appel a ajouté à la clause dont s'agit une condition qu'elle ne prévoyait pas et l'a ainsi dénaturée, en violation de l'article 1134 du code civil ;
2°/ que lorsque la clause de non-concurrence confère à l'employeur la faculté de renoncer à son exécution, nonobstant toute stipulation contraire l'employeur peut exercer cette faculté, en cas de licenciement et de dispense d'exécution du préavis, jusqu'au départ effectif du salarié de l'entreprise et non pas jusqu'au jour où l'employeur manifeste sa volonté de rompre le contrat par l'envoi de la lettre de licenciement ; qu'en jugeant tardive la renonciation à l'exécution de la clause de non-concurrence effectuée par la société Financière Saint-Martin le 24 novembre 2010 au motif que, même s'il y avait eu absence de préavis, cette renonciation aurait été faite hors du délai de deux semaines courant à compter de la rupture, c'est-à-dire à compter de la notification du licenciement par lettre du 7 octobre 2010, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que l'employeur qui dispense le salarié de l'exécution de son préavis doit, s'il entend renoncer à l'exécution de la clause de non-concurrence, le faire au plus tard à la date du départ effectif de l'intéressé de l'entreprise, nonobstant stipulations ou dispositions contraires ; que l'arrêt retient que l'employeur a licencié la salariée le 7 octobre 2010 en lui demandant de ne pas effectuer son préavis et que la levée de la clause de non-concurrence n'est intervenue que le 24 novembre 2011 ; que, par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, la décision se trouve légalement justifiée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Financière Saint-Martin aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Financière Saint-Martin et condamne celle-ci à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois novembre deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Financière Saint-Martin
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Financière Saint-Martin à payer à madame X...74 763, 12 € au titre de l'indemnité spéciale de non-concurrence augmentée de 7 476, 31 € pour congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la clause de non concurrence ; le contrat de travail de Mme X..., embauchée le 16 juin 2008 en qualité de comptable unique par la société Dam, a été transféré le 1er avril 2009 à a SARL Société Financière Saint Martin en application d'une convention tripartite de transfert du 16 mars 2009 qui précise que d'un commun accord les conditions d'emploi et de rémunération préexistantes et l'ancienneté acquise sont maintenues ; par avenant du même jour la SARL Société Financière Saint Martin et Mme X...convenait d'une rémunération mensuelle fixe brute de 2900 euros pour 35 heures hebdomadaires, les autres termes du contrat de la société Dam restant inchangés, ou acquis ; l'article 17 du contrat initial prévoyait une clause de non-concurrence limitée à une période de douze mois en contrepartie de laquelle le salarié devait percevoir après son départ effectif de la société, une indemnité spéciale fixée d'un commun accord entre les parties à 200 % de la rémunération mensuelle perçue en moyenne au cours des 24 derniers mois en cas de licenciement, et à 50 % de cette rémunération mensuelle en cas de démission. Le contrat réservait à la société le droit de dispenser le salarié de l'exécution de la clause de non-concurrence ou d'en réduire la durée ; Par courrier du 24 novembre 2010 la société entendait se prévaloir de cette option en ces termes : « votre contrat de travail a été rompu le 7 octobre 2010 par un licenciement. Les liens que vous avez avec notre entreprise seront donc interrompus le 7 décembre 2010. Le contrat que vous avez signé avec l'entreprise le 5 juin 2008 et confirmé par l'avenant du 16 mars 2009 comportait une clause de non-concurrence sur l'article 17. Comme votre contrat de travail nous y autorise, nous entendons expressément vous dispenser de l'application de cette clause il vous est donc permis de travailler pour toute entreprise de votre choix ou d'exercer toute activité de votre choix. Vous êtes donc, dès la fin de votre préavis, déliée de toute obligation à notre endroit, tout en demeurant tenu de respecter une obligation de discrétion à l'égard des éléments confidentiels que vous auriez pu avoir connaissance à l'occasion de votre travail. Bien entendu dans ces conditions, l'indemnité compensatrice de non-concurrence ne vous est pas due » ; Mme X...fait valoir que la renonciation de l'employeur a été tardive au regard des dispositions contractuelles exigeant d'en fait usage dans les trois semaines suivant la notification de son licenciement en cas de préavis ou dans les deux semaines suivant la rupture en cas de dispense d'exécution de préavis ; que la rupture de son contrat de travail doit être fixée au jour de son départ effectif de l'entreprise, soit à compter du 7 octobre 2010 compte tenu de la non-exécution de son préavis dont elle a bénéficié du fait de l'employeur. L'employeur conteste la date à laquelle le contrat de travail a pris effectivement fin, soutenant qu'il convient de retenir soit le 23 septembre 2010, date de sa mise à pied, soit le 7 décembre 2010, terme de son préavis de deux mois même si la notification de son licenciement est intervenue le 7 octobre 2010 et que l'intéressée a été dispensée d'exécuter son préavis. Elle en déduit qu'elle a levé l'obligation de non concurrence dans les délais posés par le contrat. Il ressort des termes du contrat de travail conclu entre les parties que 2 délais étaient fixés à l'employeur dans l'exercice de son droit à renoncer à faire valoir la clause de non-concurrence à savoir : dans les trois semaines suivant la notification de la rupture du contrat ou dans les deux semaines suivant la rupture du contrat de travail, en cas d'absence de préavis ; S'agissant du premier cas offert : en droit du travail la notification de la rupture du contrat est celle de la remise de la lettre de licenciement. En conséquence, en l'espèce le licenciement étant intervenu le 7 octobre 2010, et l'employeur disposant d'un délai de trois semaines courant à compter de cette date pour exercer son droit à renoncer à la clause de non-concurrence, il était hors délai lorsqu'il a entendu sans prévaloir par courrier du 24 novembre 2010. S'agissant du second cas offert : les articles 1156 et suivants du code civil, il ressort qu'on doit dans les conventions rechercher qu'elle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes, que lorsqu'une clause est susceptible de deux sens, on doit plutôt l'entendre dans celui avec lequel elle peut avoir quelque effet que dans le sens avec lequel elle n'en pourrait produire aucun, et en prenant le sens qui convient le plus à la matière du contrat, qu'en cas de doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation ; Ainsi pour faire prendre un sens particulier à la seconde clause par rapport à la première, il convient de relever ce qui la distingue de celle-ci ; Deux distinctions essentielles apparaissent, la première résulte de la disparition du terme « notification », ne laissant subsister comme point de départ du délai que le moment de « la rupture » du contrat, la seconde ressort de la précision que ce second cas concerne le « cas d'absence de préavis » ; l'absence de préavis se distingue de la dispense de préavis, la première conséquence d'une faute grave ou lourde ou d'une volonté commune des parties, prive le salarié de son salaire, met fin de manière anticipée à la relation contractuelle par le départ effectif du salarié ; La seconde dispense le salarié de l'exécution de son travail mais ne met pas fin au contrat avant son échéance et ne le prive pas du paiement de ses salaires ; aucun choix ne s'offre à l'employeur pour décider de qualifier d'absence ou de dispense le préavis non effectué et espérer ainsi, en l'espèce, par une décision unilatérale, d'entrer ou non dans le second cas offert pour la levée de la clause de non-concurrence, celle-ci résultant de la seule analyse des conditions de rupture de contrat ; Or dans sa lettre du 7 octobre 2010, l'employeur, notifie au salarié qu'il entend le priver de l'exécution de son préavis en raison de la gravité des faits qui lui sont reprochés mais tout à la fois lui signifie un licenciement « pour cause réelle et sérieuse » et lui règle ses salaires jusqu'au 7 décembre 2010 ; Il en résulte qu'il ne s'agit pas d'une « absence » de préavis décidée unilatéralement par l'employeur ; En conséquence dans la mesure ou la SARL société Financière Saint Martin ne justifie pas remplir les conditions l'autorisant à se prévaloir du second cas, et rentre de droit dans la première hypothèse, la discussion sur la distinction à opérer entre « notification » de la rupture du contrat et « rupture du contrat » est sans incidence sur les débats ; En tout état de cause la rupture du contrat se situe à la date où l'employeur a manifesté sa volonté d'y mettre fin et si la date de cette rupture peut dans certains cas prêter à discussion, aucune discussion n'est possible lorsque comme en l'espèce cette manifestation résulte d'une notification d'une lettre de licenciement ; Ainsi en l'espèce une absence de préavis n'aboutirait qu'à réduire de trois à deux semaines le délai courant à compter de la rupture du contrat en l'espèce à compter du 7 octobre 2010 de sorte que l'employeur serait toujours hors délai ; En conséquence, la clause de non concurrence n'a pas été levée dans les délais et Mme X...est fondée à réclamer paiement de l'indemnité conventionnelle soit un montant total de 74. 763, 12 euros correspondant à 200 % de la rémunération mensuelle moyenne de 3. 115, 13 euros perçue au cours des vingt quatre derniers mois pendant la durée de la clause de non concurrence ; Cette contrepartie financière de l'obligation de non concurrence ayant la nature d'une indemnité compensatrice de salaire ouvre droit à congés payés de 7. 476, 30 euros » ; arrêt p. 4 et 5
ALORS 1°) QUE la clause de non-concurrence stipulait que l'employeur pouvait renoncer à son exécution, en premier lieu, dans les trois semaines suivant la notification de la rupture du contrat ou, en second lieu, en cas d'absence de préavis, dans les deux semaines suivant la date de rupture du contrat ; que l'arrêt attaqué a jugé tardive la renonciation à l'exécution de cette clause faite par la société Financière Saint-Martin, au prétexte que ladite exposante ne pouvait se prévaloir du second cas de renonciation dès lors qu'il n'y avait pas absence de préavis mais dispense de la salariée d'exécuter son préavis par la lettre de licenciement du 7 octobre 2010 ; qu'en statuant de la sorte, quand en visant indistinctement une « absence de préavis » la clause de non-concurrence n'exigeait pas que cette absence ait nécessairement une cause autre que la décision de l'employeur de dispenser la salariée d'exécuter son préavis, la cour d'appel a ajouté à la clause dont s'agit une condition qu'elle ne prévoyait pas et l'a ainsi dénaturée, en violation de l'article 1134 du code civil ;
ALORS 2°) QUE lorsque la clause de non-concurrence confère à l'employeur la faculté de renoncer à son exécution, nonobstant toute stipulation contraire l'employeur peut exercer cette faculté, en cas de licenciement et de dispense d'exécution du préavis, jusqu'au départ effectif du salarié de l'entreprise et non pas jusqu'au jour où l'employeur manifeste sa volonté de rompre le contrat par l'envoi de la lettre de licenciement ; qu'en jugeant tardive la renonciation à l'exécution de la clause de non-concurrence effectuée par la société Financière Saint-Martin le 24 novembre 2010 au motif que, même s'il y avait eu absence de préavis, cette renonciation aurait été faite hors du délai de deux semaines courant à compter de la rupture, c'est-à-dire à compter de la notification du licenciement par lettre du 7 octobre 2010, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-17666
Date de la décision : 03/11/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 18 février 2015


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 nov. 2016, pourvoi n°15-17666


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.17666
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