La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/09/2016 | FRANCE | N°15-17.733

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte rnsm/na, 06 septembre 2016, 15-17.733


COMM.

IK



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 6 septembre 2016




Rejet non spécialement motivé


Mme MOUILLARD, président



Décision n° 10187 F

Pourvoi n° K 15-17.733







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi form

é par :

1°/ la société BIH Brasseries internationales Holding (Eastern) Limited, société anonyme,

2°/ la société Brasseries internationales pour l'Afrique (R...), société anonyme,

...

COMM.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 septembre 2016

Rejet non spécialement motivé

Mme MOUILLARD, président

Décision n° 10187 F

Pourvoi n° K 15-17.733

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par :

1°/ la société BIH Brasseries internationales Holding (Eastern) Limited, société anonyme,

2°/ la société Brasseries internationales pour l'Afrique (R...), société anonyme,

ayant toutes deux leur siège [...] ),

contre l'ordonnance rendue le 4 mars 2015 par le premier président de la cour d'appel de Paris, dans le litige les opposant :

1°/ au directeur général des finances publiques, domicilié [...] ,

2°/ à la Direction nationale d'enquêtes fiscales, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 14 juin 2016, où étaient présents : Mme Mouillard, président, M. Gauthier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, M. Debacq, avocat général, M. Graveline, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Delaporte et Briard, avocat des sociétés BIH Brasseries internationales Holding (Eastern) Limited et Brasseries internationales pour l'Afrique ;

Sur le rapport de M. Gauthier, conseiller référendaire, l'avis de M. Debacq, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les sociétés BIH Brasseries internationales Holding (Eastern) Limited et Brasseries internationales pour l'Afrique aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six septembre deux mille seize.MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Delaporte et Briard, avocat aux Conseils, pour les sociétés BIH Brasseries internationales Holding (Eastern) Limited et Brasseries internationales pour l'Afrique

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé les ordonnances du juge des libertés et de la détention de Paris en date du 16 juillet 2014 et de Melun en date du 15 juillet 2014 ayant autorisé des agents de la Direction nationale d'enquêtes fiscales à procéder à des visites et saisies dans des locaux situés à Champeaux et à Paris,

Aux motifs que « les sociétés [...] et BIHE sont implantées en Belgique mais n'y disposent d'aucun moyen humain, ne sont propriétaires d'aucun matériel, celui-ci étant mis à disposition par un prestataire de service, n'ont pas de droit au bail pour avoir choisi le système de la domiciliation ; qu'elles sont gérées de fait par Monsieur D... même s'il existe d'autres administrateurs comme Monsieur A... et Mme Y... Q... lesquels ne sont en effet pas actionnaires ; que Monsieur A..., apparaissant dans des structures appelées à dissimuler le vrai détenteur du capital de la société [...] (BREWERY INTERNATIONAL TECHNOLOGY LIMITED sise à Hong Kong) et par ailleurs conseiller financier à travers l'entité Charcot ; que Mme Y... Q..., qui dirige le groupe TMF proposant ses services financiers, comptables, de secrétariat juridique et d'entreprise ainsi que des services de gestion et de domiciliation, notamment à R... ; que [...] a pour activité le négoce d'installations brassicoles et a ainsi acquis une installation brassicole, le 1er février 2012, auprès de la société WALLART SARL pour 3.700.000 euros qu'elle a revendue à la société ABIM, devenue sa mère, à la date du 27 septembre 2013, le prix de vente n'étant pas payé ; qu'il convient de rappeler que [...] a bénéficié d'apports de E... D... et de la société de droit de Hong-Kong BREWERY INTERNATIONAL TECHNOLOGY LIMITED, représentée en février 2012, par V... A... puisque l'intégralité des actions de [...] a été échangée contre celles de la société de droit mauricien AFRIQUE BRASSERIES INTERNATIONALES MAURICE LTD, une action étant revendue, en avril 2013, à E... D... ; que ces opérations juridiques n'ont consisté qu'à interposer entre Monsieur D... et R... ; que BIHE a pour fonction de gérer des participations dans des entreprises et des créances dues par celles-ci et au 31 décembre des années 2009 et 2010, BIHE détenait intégralement, directement et/ou indirectement, que sur des sociétés liées au groupe CASTEL dont Monsieur D... est un ancien salarié, comme la société de droit géorgien CASTEL-SAKARTVEL C3, la société de droit azerbaidjanais GANDJA 8 PIVA, la société de droit arménien KOTAYK BREWERY, et ce, pour un montant total de participations de 8.345.995 euros ; qu'elle n'a aucun chiffre d'affaires et enregistre donc ses écritures comptables décidées par son dirigeant Monsieur D... ; qu'il convient de rappeler que la société, détenue à 71% par la société de droit belge EBHL HOLDINGS et à 21,29% par E... D... a été constituée à Gibraltar et a créé un établissement stable en Belgique ; qu'on trouve une activité de production de Monsieur D... en sa qualité de président directeur général de BRALICO (Brasserie et Limonaderie du Congo) ; que les entités [...] et BIHE ne nécessitant pas de disposer de moyens de fonctionnement lourds puisqu'il s'agit de structures porteuses des activités de Monsieur D..., réalisées soit en Afrique soit dans le U... ; que Monsieur D... est le fondateur de ces entreprises et leur manager et il n'y a pas d'autres dirigeants ; qu'elles n'existent que par lui et pour lui et leur centre décisionnel réel est donc au lieu de la résidence habituelle de celui-ci, lequel se situe en France puisque c'est l'endroit où à titre personnel, il est résident fiscal ; que s'il voyage beaucoup, il ressort des éléments de procédure qu'il s'envole plus souvent de Paris que de Bruxelles ; qu'il dispose en France de deux résidences ; que sachant qu'il intervient à travers des sociétés à Hong-Kong, Ile Maurice, U..., Afrique, Gibraltar et Belgique lesquelles ne constituent pas un groupe et ne bénéficient pas d'une intégration fiscale ; qu'ainsi, l'analyse des informations fournies par la DNEF et Monsieur D... permet de vérifier la réalité des faits constituant les présomptions nécessaires d'une fraude fiscale justifiant les visites domiciliaires ordonnées par le premier juge, étant observé que les appelants ne mettent en cause aucune des données avancées par la DGFOP mais s'appuient pour contester l'analyse faite par cette administration et le JLD sur une situation résultant de la constitution et de l'implantation historique des activités de Monsieur D... et critiquant par ailleurs l'ordonnance formellement pour en tirer la conséquence que le JLD n'a pas effectué son travail conformément à l'esprit de la loi ; »

Alors que le juge des libertés et de la détention ne peut autoriser des visites et saisies que s'il se fonde sur des éléments de fait et de droit qui laissent présumer l'existence d'agissements frauduleux ; qu'en considérant que les juges des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Paris et de Melun auraient caractérisé un faisceau de présomption selon lesquelles les sociétés BRASSERIES INTERNATIONALES POUR L'AFRIQUE et BRASSERIES INTERNATIONALES HOLDING EASTERN LIMITED SA auraient exercé leurs activités en France, quand aucun des éléments sur lesquels ces juges s'étaient fondés et repris par l'ordonnance attaquée, c'est-à-dire l'absence de moyens propres d'exploitation en Belgique de ces sociétés et la circonstance que M. D... déclare ses revenus en France, n'était de nature à faire présumer que lesdites sociétés disposaient d'un établissement stable en France et mettraient sciemment en oeuvre des procédés listés par l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales pour tenter de se soustraire au paiement des impôts en France, le magistrat délégué du premier président de la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des ordonnances rendues par les juge des libertés et de la détention des Tribunaux de grande instance de Paris et Melun et a, en conséquence, violé l'article 1134 du Code civil et le principe selon lequel il est interdit aux juges du fond de dénaturer les documents de la cause.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé les ordonnances du juge des libertés et de la détention de Paris en date du 16 juillet 2014 et de Melun en date du 15 juillet 2014 ayant autorisé des agents de la Direction nationale d'enquêtes fiscales à procéder à des visites et saisies dans des locaux situés à Champeaux et à Paris,

Aux motifs que « les motifs et le dispositif de chacune des ordonnances rendues en application de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales par les juges des libertés et de la détention sont réputés établies par le juge qui les a rendues et signées, aucun fait vérifiable n'autorisant en l'espèce les appelants à suspecter l'impartialité de celui-ci alors que la saisine des JLD est une contrainte procédurale ; que le fait que les deux ordonnances sont quasiment identiques n'implique nullement une rédaction unique mais l'examen identique fait par deux juges à deux moments différents, d'éléments prégnants et simples à utiliser, selon un raisonnement parallèle, sociétés visées s'inscrivant dans le même schéma unique de fraude ; que le fait que les ordonnances aient été rendues les 15 et 16 juillet 2014, soit quatre jours ouvrés après la saisine des JLD n'implique nullement une impossibilité pour le juge d'examiner 35 pièces annexes représentant plus de 284 feuillets, le professionnalisme du juge consistant notamment à savoir analyser et synthétiser les écritures et vérifier dans les pièces communiquées celles ayant une importance prégnante pour se faire son idée et apprécier la validité des présomptions avancées par le requérant, sauf à considérer qu'il faille dorénavant contraindre les parties et donc leur conseil à réduire le nombre de pièces communiquées au soutien de leurs arguments ; »

Alors, en premier lieu, que, les personnes faisant l'objet d'une visite et d'une saisie domiciliaires doivent bénéficier d'un contrôle juridictionnel effectif par un Tribunal indépendant et impartial, ce qui implique que le juge respecte son obligation légale de vérifier de manière concrète que la demande d'autorisation qui lui est soumise est bien fondée et ce qui s'oppose à ce que ce dernier signe une ordonnance pré-rédigée par l'administration fiscale ; que tenu de motiver sa décision, le juge des libertés et de la détention ne peut, pour toute motivation, reprendre mot pour mot les conclusions de l'une des parties ; qu'en l'espèce, les juges des libertés et de la détention des Tribunaux de grande instance de Melun et Paris, du début à la fin de leurs ordonnances, ont repris textuellement les projets d'ordonnances rédigés par l'administration fiscale ; qu'ils n'y ont ajouté aucune motivation propre attestant de la réalité d'une analyse et d'un raisonnement ; qu'ainsi, le magistrat délégué du premier président de la Cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du Code de procédure civile ;

Alors, en second lieu, qu'en statuant de la sorte, le magistrat délégué du premier président de la Cour d'appel a également méconnu le principe de l'égalité des armes et le droit du justiciable à un procès équitable, les ordonnances ayant été rendues au seul vu de la thèse de l'administration fiscale, celle des sociétés BRASSERIES INTERNATIONALES HOLDING EASTERN LIMITED SA et BRASSERIES INTERNATIONALES POUR L'AFRIQUE SA n'ayant pas même été considérée ; que le magistrat délégué du premier président de la Cour d'appel a ainsi violé l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé les ordonnances du juge des libertés et de la détention de Paris en date du 16 juillet 2014 et de Melun en date du 15 juillet 2014 ayant autorisé des agents de la Direction nationale d'enquêtes fiscales à procéder à des visites et saisies dans des locaux situés à Champeaux et à Paris,

Aux motifs que « si l'article 8 de la CEDH garantissant le « droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance » implique que toute saisie doit être proportionnée au but poursuivi, c'est-à-dire strictement nécessaire à l'objet de l'enquête ayant fondé l'autorisation du juge des libertés et de la détention, la possibilité pour l'administration fiscale de mettre en oeuvre un autre de ses droits, y compris à l'encontre du tiers prévu aux articles L. 81 et suivants du Livre des procédures fiscales ou d'un autre pays dans le cadre d'une convention fiscale ne lui interdit pas le recours aux visites et saisies domiciliaires prévu à l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales ; que le lien entre les présomptions de fraude et les lieux visés est établi ; que la Cour européenne des droits de l'homme reconnaît que des ingérences de la part des autorités publiques dans la vie privée sont possibles, à la condition toutefois qu'elles reposent sur une loi ce qui est le cas, et qu'elles poursuivent un but légitime, autrement dit que dans une société démocratique, elles s'imposent absolument, et la poursuite contre la fraude fiscale poursuit un but d'intérêt général et de préservation de l'équilibre économique indispensable dans une telle société, et sont qualifiées par le Conseil constitutionnel comme la « nécessité de l'impôt » ; qu'il s'en déduit que le premier juge a valablement considéré que les présomptions de fraude étaient suffisamment caractérisées pour opérer dans les lieux concernés et l'ordonnance entreprise sera confirmée ; »

Alors que les visites et saisies domiciliaires qui constituent une ingérence dans l'exercice du droit au respect de la vie privée et du domicile, qui est garanti par l'article 8 §1 de la Convention européenne des droits de l'homme, doivent être strictement nécessaires et proportionnées au but recherché, en l'occurrence, la prévention des infractions pénales et, plus particulièrement, d'une fraude fiscale, ce qui suppose que les garanties offertes par l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme soient appliquées de manière concrète et effective et non pas théorique et illusoire ; qu'en l'espèce, par ordonnances en date des 15 et 16 juillet 2014, les juges des libertés et de la détention de Paris et de Melun ont, en vertu de l'article L. 16 B du Livre des procédures fiscales, autorisé des agents de l'administration à effectuer une visite et une saisie de documents au domicile de M. D..., en vue de rechercher la preuve de la fraude fiscale des sociétés BRASSERIES INTERNATIONALES POUR L'AFRIQUE SA et BRASSERIES INTERNATIONALES HOLDING EASTERN LIMITED SA ; que pour déduire que les premiers juges ont valablement considéré que les présomptions de fraude étaient suffisamment caractérisées pour opérer au domicile de M. D... et confirmer les ordonnances entreprises, le magistrat délégué du premier président de la Cour d'appel de Paris s'est borné à affirmer que « la poursuite contre la fraude fiscale poursuit un but d'intérêt général et de préservation de l'équilibre économique indispensable dans une société (démocratique) », sans indiquer en quoi le domicile de M. D..., actionnaire administrateur, serait susceptible de contenir des documents permettant d'apprécier l'existence de présomptions d'agissements visés par la loi à l'encontre des sociétés précitées ; qu'en statuant ainsi, le magistrat délégué du Premier Président n'a pas exercé un contrôle in concreto et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des exigences de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale financière et économique - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 15-17.733
Date de la décision : 06/09/2016
Sens de l'arrêt : Rejet

Publications
Proposition de citation : Cass. Com. financière et économique - formation restreinte rnsm/na, 06 sep. 2016, pourvoi n°15-17.733, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.17.733
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award