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10/08/2016 | FRANCE | N°16-81610

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 août 2016, 16-81610


Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Ertan X...,

contre l'arrêt n° 5 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 1re section, en date du 16 février 2016, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs, notamment, d'importation de stupéfiants en bande organisée, infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 26 mai 2016, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;


Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur la recevabilité du pourvoi...

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Ertan X...,

contre l'arrêt n° 5 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 1re section, en date du 16 février 2016, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs, notamment, d'importation de stupéfiants en bande organisée, infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 26 mai 2016, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur la recevabilité du pourvoi formé par l'avocat de M. X... :
Attendu que M. X..., ayant épuisé par l'exercice qu'il en avait fait par déclaration au greffe de la maison d'arrêt, en date du 19 février 2016, le droit de se pourvoir en cassation, était irrecevable à se pourvoir à nouveau le même jour par l'intermédiaire de son avocat ; que seul est recevable le pourvoi formé par M. X... en personne ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 80, 151, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la chambre de l'instruction a rejeté le moyen tiré de la nullité des actes réalisés hors saisine par le juge d'instruction ;
" aux motifs qu'il résulte, notamment, de l'article 80 du code de procédure pénale que le juge d'instruction ne peut informer qu'en vertu d'un réquisitoire du procureur de la République, et que lorsque des faits non visés au réquisitoire sont portés à la connaissance du juge d'instruction, celui-ci doit immédiatement communiquer au procureur de la République les plaintes ou les procès-verbaux qui les constatent, le procureur de la République pouvant alors, notamment, requérir du juge d'instruction par réquisitoire supplétif qu'il informe sur ces nouveaux faits ; que le 29 avril 2014, à 12 heures 30, l'OCTRIS était avisé par l'officier de liaison espagnol qu'il ressortait en dernier lieu des contrôles et des surveillances effectuées par la police espagnole, depuis le 16 janvier 2014, que MM. X..., Y... et Z... occupaient deux chambres dans deux hôtels à Madrid, et que trois autres individus faisaient également l'objet d'une enquête préliminaire en Espagne ; qu'à 13 heures 30, l'OCTRIS prenait attache avec la BPPJ de Madrid, qui informait le service de l'ouverture d'une enquête préliminaire auprès du tribunal de province de Huesca pour des faits de trafic de stupéfiants les impliquant ; qu'à 14 heures 20, l'OCTRIS rendait compte au juge d'instruction de la présence en Espagne de ces individus dans deux hôtels à Madrid avec des véhicules vus lors de surveillances au pavillon du ... à Chataincourt, Neuville-sous-Bois ; que le juge d'instruction adressait alors à l'OCTRIS une commission rogatoire internationale afin de permettre aux fonctionnaires de l'OCTRIS de détecter tous éléments en possession des autorités espagnoles, d'assister aux éventuelles interpellations devant avoir lieu, perquisitions et auditions subséquentes, et de recueillir tous renseignements relatifs aux véhicules susceptibles d'être interceptés et aux éléments saisis en particulier s'agissant de produits stupéfiants ; qu'il est soutenu par la défense que le juge d'instruction aurait alors instruit hors saisine du procureur de la République sur ces faits nouveaux ; que, cependant, que les réquisitoires introductifs du 3 novembre 2011 et du 3 mai 2012, ont notamment saisi le juge d'instruction, qui a ordonné la jonction des deux procédures le 4 mars 2014, de faits d'association de malfaiteurs en vue du trafic de produits stupéfiants, et d'association de malfaiteurs en vue de l'importation de produits stupéfiants en bande organisée ; qu'informé d'éléments susceptibles de caractériser ces faits d'association de malfaiteurs dont il était régulièrement saisi, le magistrat instructeur ordonnait des perquisitions et délivrait des mandats d'arrêt qui ne portaient pas sur les faits apparus en Espagne à compter du 29 avril 2014, mais constituaient des actes judiciaires susceptibles de permettre la caractérisation des faits d'association de malfaiteurs et l'interpellation de leurs auteurs ; qu'en effet, il ne résulte d'aucune pièce de la procédure que le juge d'instruction a alors instruit sur les faits nouveaux commis en Espagne ; qu'en particulier, il ressort clairement de la demande d'entraide pénale internationale du 29 avril 2014, du mandat d'arrêt délivré à l'encontre de l'appelant le 26 mai 2014, ainsi que du mandat d'arrêt européen du 3 juin 2014, que le juge d'instruction a uniquement mené des investigations sur les faits caractérisant les circonstances de la commission du fait principal ; qu'en conséquence, il ne peut être valablement soutenu que le juge d'instruction aurait instruit hors saisine du procureur de la République ; que, de surcroît, et en toute hypothèse, le juge d'instruction n'aurait pas pu régulièrement solliciter du parquet un réquisitoire supplétif le saisissant des faits commis en Espagne en avril 2014 avant la dénonciation officielle des autorités judiciaires espagnoles, laquelle est intervenue le 29 juillet 2015 ; qu'ainsi, non seulement le juge d'instruction a informé en vertu d'un réquisitoire du procureur de la République, mais qu'en outre il ne lui appartenait pas, ainsi que le soutient à tort la défense, de transmettre à compter du 29 avril 2014, prématurément et irrégulièrement, le dossier au parquet aux fins de saisine des faits commis en Espagne qui n'étaient pas encore dénoncés officiellement par les autorités judiciaires espagnoles ; qu'en conséquence, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article 80 du code de procédure pénale ne peut qu'être rejeté ;

" alors qu'en vertu de l'article 80 du code de procédure pénale, le juge d'instruction ne peut informer qu'en vertu d'un réquisitoire du procureur de la République, les faits nouveaux ne pouvant donner lieu qu'à des vérifications sommaires non coercitives ; qu'en l'espèce, le juge d'instruction était saisi, en vertu de deux réquisitoires, de faits concernant un transfert de marchandises sur le parking d'une station essence située aux environs de Chattelerault dans la nuit du 29 au 30 octobre 2011, ainsi que d'une saisie de 1255 kg de résine de cannabis le 29 avril 2012 à Saint-Maurice ; que c'est en violation manifeste du cadre de sa saisine que le juge d'instruction a, consécutivement à la découverte de faits survenus en Espagne au début de l'année 2014, ayant donné lieu à des investigations puis à des interpellations le 29 avril 2014 par les autorités espagnoles, ordonné plusieurs perquisitions en France et délivré une demande de communication d'une copie de l'entier dossier ouvert par les autorités étrangères, ainsi qu'un mandat d'arrêt et un mandat d'arrêt européen à l'encontre de M. X... explicitement motivés par référence aux faits commis en Espagne, et ce avant la délivrance d'un réquisitoire supplétif pour ces faits, lequel n'est intervenu que le 17 septembre 2014 ; que, dans ces conditions, la chambre de l'instruction ne pouvait rejeter le moyen de nullité au motif que les investigations auraient porté sur les faits d'association de malfaiteurs dont le juge d'instruction était déjà saisi " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'une information judiciaire a été ouverte à Paris le 3 mai 2012 contre M. Sasa A... et tous autres des chefs d'importation de produits stupéfiants en bande organisée, infractions à la législation sur les stupéfiants, association de malfaiteurs et délits douaniers d'importation et détention ou transport de marchandises prohibées dangereuses pour la santé ; que M. A... a été interpellé alors qu'il circulait dans une automobile où avaient été aperçues des valises d'apparence douteuse ; que la perquisition au domicile de M. A... a permis la découverte, notamment, de cannabis, d'une compteuse à billets, d'espèces et d'un jugement rendu par un tribunal espagnol aux noms de MM. Eric Y..., Amar C... et Sasa A... portant sur des faits de falsification de documents officiels, commis le 12 janvier 2012 ;
Attendu que des investigations menées dans le cadre d'une commission rogatoire internationale allemande relative à la provenance de certains véhicules impliqués dans ces faits ont permis d'effectuer un rapprochement avec un " go fast " réalisé le 29 octobre précédent par M. Stéphane D... traité dans le cadre d'une information judiciaire distincte ouverte, également à Paris, le 3 novembre 2011 contre personne non dénommée, des chefs d'importation en bande organisée, acquisition, détention, transport, offre et cession de produits stupéfiants, association de malfaiteurs en vue du trafic de stupéfiants ; qu'il s'est alors avéré que MM. A... et D... étaient en relation avec une même équipe constituée notamment de MM. E...
F..., Eric Y..., Mahamadou H... chargée d'acheter ! es véhicules en Allemagne sous une fausse identité, de récupérer la marchandise en Espagne et de l'acheminer depuis le sud de l'Espagne vers la région parisienne ; qu'en raison de la connexité, les deux dossiers ont été joints le 4 mars 2014 ;
Attendu que, parallèlement, la coopération établie avec les autorités espagnoles a révélé que la police espagnole enquêtait sur MM. E...
F..., Eric Y..., Ertan X... et Atmane Z... depuis le mois de janvier 2014, les surveillances et contrôles de véhicules de l'équipe mettant en évidence un mode opératoire propre aux convois type " go fast " ; que le 29 avril 2014, le juge d'instruction a adressé aux autorités judiciaires espagnoles une demande d'entraide pénale internationale, afin de permettre aux enquêteurs français de recueillir tous éléments d'enquête et d'assister à d'éventuelles interpellations ; que l'enquête espagnole a abouti le 29 avril 2014 à l'interpellation et l'incarcération de MM. F..., Z..., H... et Hakim I... avec 690 kg de résine de cannabis tandis que MM. Y... et X... ont continué d'être recherchés ; que ces derniers ayant finalement été interpellés, ils ont été placés en détention par les autorités espagnoles ;
Attendu qu'en cet état, concomitamment aux interpellations en Espagne, des perquisitions ont été notamment réalisées en France aux domiciles de MM. Y... et X... en mai 2014 ; qu'en outre, le juge d'instruction a délivré six mandats d'arrêt ;
Attendu que le 17 septembre 2014, le juge d'instruction a ordonné que la procédure fût transmise au parquet aux fins de réquisitions sur faits nouveaux, eu égard aux éléments recueillis au cours de l'enquête et vu le retour partiel de commissions rogatoires mettant en évidence que les importations de produits stupéfiants s'étaient poursuivies de 2011 jusqu'à courant 2014 ; que le ministère public a délivré un réquisitoire supplétif le même jour ; que le 2 octobre 2015, le juge d'instruction a ordonné que la procédure fût communiquée au ministère public aux fins de réquisitions sur la dénonciation officielle des autorités espagnoles ; que le 6 octobre 2015, le parquet a délivré un réquisitoire supplétif pour ces faits ; que M. X... a été mis en examen des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants, association de malfaiteurs et importation en contrebande de marchandises dangereuses ;
Attendu que, pour écarter le moyen tiré de la nullité des actes réalisés hors saisine par le juge d'instruction, l'arrêt attaqué prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, et dès lors que les différentes phases d'investigations visaient, sans excéder la saisine du juge d'instruction, au recueil des indices établissant la mise en oeuvre par les mis en examen, comprenant M. X..., d'une entente en vue de mettre en place un trafic de cannabis entre l'Espagne et la France, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Par ces motifs :
I-Sur le pourvoi formé par l'avocat de M. X... ;
Le DÉCLARE IRRECEVABLE ;
II-Sur le pourvoi formé par M. X... en personne ;
Le REJETTE ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Straehli, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Carbonaro, conseiller rapporteur, M. Fossier, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-81610
Date de la décision : 10/08/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 16 février 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 10 aoû. 2016, pourvoi n°16-81610


Composition du Tribunal
Président : M. Straehli (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:16.81610
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