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08/06/2016 | FRANCE | N°14-26667

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 juin 2016, 14-26667


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 16 septembre 2014) que M. X..., engagé le 5 mars 1986 par la société Des Eaux minérales de Challes en qualité de manoeuvre et exerçant en dernier lieu les fonctions de responsable technique de l'établissement thermal, a été licencié le 3 avril 2012 ; que, contestant cette mesure, il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et de le cond

amner au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ que la ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 16 septembre 2014) que M. X..., engagé le 5 mars 1986 par la société Des Eaux minérales de Challes en qualité de manoeuvre et exerçant en dernier lieu les fonctions de responsable technique de l'établissement thermal, a été licencié le 3 avril 2012 ; que, contestant cette mesure, il a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et de le condamner au paiement de diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ que la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; qu'en l'espèce, la lettre adressée au salarié le 3 avril 2012 lui notifiant la rupture de son contrat de travail reprochait à celui-ci une absence de relevage des plaques de régulation d'écoulement des eaux du parc de l'établissement thermal, constatée par l'employeur à la date du 10 janvier 2012, sans toutefois préciser la date à laquelle le salarié avait manqué à ses obligations ; qu'en décidant que ce grief ne pouvait être imputé au salarié qui était en absence régulière à la date du 10 janvier 2012, quand cette date correspondait non pas au manquement reproché mais seulement à la date à laquelle l'employeur en a eu connaissance, la cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée sur le bien-fondé de ce manquement, a méconnu les termes du litige tels que fixés par la lettre de licenciement, en violation des articles L. 1235-1 du code du travail ;
2°/ qu'en se prononçant de la sorte, quand la lettre de licenciement énonçait de manière claire et précise que l'employeur avait été informé de l'absence de relevage des plaques de régulation d'écoulement des eaux le 10 janvier 2012, et non que le salarié avait manqué à son obligation à cet égard le 10 janvier 2012, la cour d'appel a dénaturé les termes de ce document, en violation de l'article 1134 du code civil ;
3°/ que l'employeur faisait valoir, dans ses conclusions d'appel, que s'il avait eu connaissance de l'absence de relevage des plaques d'écoulement des eaux le 10 janvier 2012, à une date où le salarié pouvait être en congés, il s'était néanmoins abstenu d'effectuer cette tâche avant son départ en congés et qu'elle aurait dû être effectuée dès le début de l'hiver, de telle sorte que son absence à la date du 10 janvier 2012 était nécessairement inopérante pour écarter le grief énoncé au soutien de son licenciement ; qu'en s'abstenant de toute réponse sur ce moyen déterminant des conclusions de l'employeur, et en se bornant à décider que ce grief ne peut être imputé au salarié qui était en absence régulière le 10 janvier 2012, la cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que, sous le couvert de griefs non fondés de méconnaissance des termes du litige, de dénaturation et de défaut de réponse à conclusions, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve par les juges du fond qui ont décidé, dans l'exercice des pouvoirs qu'ils tiennent de l'article L. 1235-1 du code du travail, que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Des Eaux minérales de Challes aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Des Eaux minérales de Challes à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juin deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour la société Des Eaux minérales de Challes.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que le licenciement de M. X... est privé de cause réelle et sérieuse, d'avoir en conséquence condamné la société des EAUX MINERALES DE CHALLES à verser à celui-ci, outre une somme de 1. 000 euros pour non-respect de la procédure de licenciement, la somme de 70. 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de lui avoir ordonné de rembourser au Pôle Emploi les indemnités chômage versées à M. X... dans la limite de six mois d'indemnité et de l'avoir condamnée au paiement d'une somme complémentaire de 1. 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Aux motifs que « M. X... a été licencié pour faute le 3 avril 2012 pour les motifs suivants :
- Le 10 janvier 2012, nous avons été informés de l'absence du relevage, par vos soins : des plaques de régulation d'écoulement des eaux dans le parc de notre établissement thermal.- Le 30 janvier 2012, nous avons eu à déplorer une importante inondation de la cave de l'établissement, consécutive : D'une part, à une panne des pompes de relevage liée à un défaut d'entretien régulier, D'autre part, à l'absence d'approvisionnement en carburant du groupe électrogène,- Le 6 février 2012, le défaut de mise en position hiver des batteries froides (mode recyclage) a entraîné le gel de ces batteries et des canalisations proches ainsi que des coupures d'eau. Dans ces circonstances, notre clientèle n'a donc pu être accueillie dans l'établissement, ce qui a causé un important dysfonctionnement dans l'organisation et la planification des soins,- Le 16 février 2012, lors du passage d'un assistant du responsable technique régional, celui-ci n'a pu que constater que les radiateurs n'étaient toujours pas en position hors gel. En outre, il a découvert, ce même jour, que certaines des portes coupe-feu de l'établissement ne fermaient plus du fait d'un défaut d'entretien et de graissage. Ces graves carences dans l'exécution de vos fonctions font peser tant sur nos patients-curistes que sur les responsables de notre établissement des risques importants en matière de sécurité aux personnes.

Postérieurement à l'entretien préalable du 8 mars 2012 :
- Nous avons dû depuis cette date déplorer encore une fois les faits suivants :
Dissimulation de détournement et dégradation du matériel de la société, Oubli le 26 mars 2012 d'ouvrir au préalable la vanne des aérosols du service premier, Oublie le 26 mars 2012 de procéder à la fermeture de la porte d'entrée de l'établissement thermal.

Du fait des fonctions exercées et de l'ancienneté de M. X... au sein de l'établissement, l'ensemble des manquements reprochés, dès lors qu'ils seraient avérés et fondés, ne présentaient au cas d'espèce aucune difficulté technique particulière et relevaient bien de la seule compétence et responsabilité de M. X... ;
Il convient cependant d'analyser chaque grief évoqué dans la lettre de licenciement pour vérifier le bien-fondé du licenciement ;
1) Sur l'absence de relevage des plaques de régulation d'écoulement des eaux du par cet l'inondation de la cave qui s'en est suivie
Il est reproché au cas d'espèce une absence de relevage de ces plaques à la date du 10 janvier 2012, avec comme conséquence un risque de contamination microbienne de la parcelle de forage des eaux thermales du fait du terrain qui était gorgé en eau et d'une obstruction de l'exutoire par des feuilles et des branchages (attestation de M. Y... RTR qui s'est déplacé sur les lieux le 10 janvier) ;
Il est justifié sur cette même période que M. X... était en congés annuels, que son second, M. Z..., a géré l'incident ;
Si effectivement outre le fait que seule l'absence de relevage des plaques est visée dans la lettre de licenciement, M. X... ne peut être en tout état de cause tenu pour responsable de cet incident dès lors qu'il était en absence régulière sur le site et que son second qui assurait la permanence pouvait assurer cette maintenance et le nettoyage de l'exutoire ;
Ce grief n'est donc pas fondé ;
(…)
Sur les conséquences financières de la rupture
M. X... avait une ancienneté de 26 ans dans l'établissement, âge de 56 ans il est toujours sans emploi ;
Il convient en conséquence de condamner la SAS DES EAUX MINERALES DE CHALLES à lui payer une indemnité de 70. 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Sur les demandes accessoires
Il convient de faire application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail, qui prévoit que dans les prévus à l'article L. 1235-3 dudit code, le juge doit ordonner d'office, lorsque les organismes ne sont pas intervenus à l'instance et n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées, le versement par l'employeur fautif de tout ou partie des indemnités chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;
Il convient d'ordonner d'office, par application de l'article L. 1235-4 du code du travail, le remboursement par la SAS DES EAUX MINERALES DE CHALLES à Pôle Emploi des indemnités chômage versées à M. X... du jour de son licenciement au jour de la présente décision, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage ;
Il convient pour des raisons tenant à l'équité de faire application de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner la SAS DES EAUX MINERALES DE CHALLES à payer à M. X... une indemnité de 1. 200 euros à ce titre en instance d'appel » ;
Alors que la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; qu'en l'espèce, la lettre adressée au salarié le 3 avril 2012 lui notifiant la rupture de son contrat de travail reprochait à celui-ci une absence de relevage des plaques de régulation d'écoulement des eaux du parc de l'établissement thermal, constatée par l'employeur à la date du 10 janvier 2012, sans toutefois préciser la date à laquelle le salarié avait manqué à ses obligations ; qu'en décidant que ce grief ne pouvait être imputé au salarié qui était en absence régulière à la date du 10 janvier 2012, quand cette date correspondait non pas au manquement reproché mais seulement à la date à laquelle l'employeur en a eu connaissance, la Cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée sur le bienfondé de ce manquement, a méconnu les termes du litige tels que fixés par la lettre de licenciement, en violation des articles L. 1235-1 du code du travail ;
Alors, en outre, qu'en se prononçant de la sorte, quand la lettre de licenciement énonçait de manière claire et précise que l'employeur avait été informé de l'absence de relevage des plaques de régulation d'écoulement des eaux le 10 janvier 2012, et non que le salarié avait manqué à son obligation à cet égard le 10 janvier 2012, la Cour d'appel a dénaturé les termes de ce document, en violation de l'article 1134 du code civil ;
Alors, encore, que l'employeur faisait valoir, dans ses conclusions d'appel (p. 9), que s'il avait eu connaissance de l'absence de relevage des plaques d'écoulement des eaux le 10 janvier 2012, à une date où le salarié pouvait être en congés, il s'était néanmoins abstenu d'effectuer cette tâche avant son départ en congés et qu'elle aurait dû être effectuée dès le début de l'hiver, de telle sorte que son absence à la date du 10 janvier 2012 était nécessairement inopérante pour écarter le grief énoncé au soutien de son licenciement ; qu'en s'abstenant de toute réponse sur ce moyen déterminant des conclusions de l'employeur, et en se bornant à décider que ce grief ne peut être imputé au salarié qui était en absence régulière le 10 janvier 2012, la Cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-26667
Date de la décision : 08/06/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 16 septembre 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 jui. 2016, pourvoi n°14-26667


Composition du Tribunal
Président : Mme Vallée (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Spinosi et Sureau

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:14.26667
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