La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/02/2016 | FRANCE | N°15-11.318

France | France, Cour de cassation, Deuxième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 11 février 2016, 15-11.318


CIV. 2

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 11 février 2016




Rejet non spécialement motivé


M. PRÉTOT, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10118 F

Pourvoi n° N 15-11.318







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la dÃ

©cision suivante :

Vu le pourvoi formé par la société André BTP, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],

contre l'arrêt rendu le 3 décembre 2014 par la co...

CIV. 2

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 11 février 2016




Rejet non spécialement motivé


M. PRÉTOT, conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10118 F

Pourvoi n° N 15-11.318







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par la société André BTP, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],

contre l'arrêt rendu le 3 décembre 2014 par la cour d'appel de Rennes (9e chambre, sécurité sociale), dans le litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie de Loire-Atlantique, dont le siège est [Adresse 2],

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 13 janvier 2016, où étaient présents : M. Prétot, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Hénon, conseiller référendaire rapporteur, M. Laurans, conseiller, M. Graveline, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat de la société André BTP, de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de Loire-Atlantique ;

Sur le rapport de M. Hénon, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société André BTP aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Loire-Atlantique la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille seize et signé par M. Prétot, conseiller doyen faisant fonction de président, et par Mme Szirek, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de la décision.
MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société André BTP


Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société ANDRE BTP de sa demande d'expertise et d'avoir déclaré imputable à l'accident du travail dont a été victime M. [I] le 30 octobre 2008 l'ensemble des soins et arrêts de travail pris en charge par la CPAM ;

AUX MOTIFS QUE « il est constant que le 30 octobre 2008, au temps et au lieu de son travail, Monsieur [I] a été heurté par le bras articulé d'une mini-pelle. Son employeur, la société ANDRE BTP n'a jamais contesté l'imputabilité au travail de cet accident. Si la déclaration d'accident du travail du 30 octobre 2008 ne mentionnait pas le genou gauche comme siège des lésions, le certificat médical initial du même jour comportait quant à lui l'indication d'une contusion du genou gauche, dont la lésion a donné lieu au constat d'une continuité des symptômes, sous formes de douleurs, jusqu'au certificat médical final, après réalisation de l'arthroscopie et de la ménisectomie réalisées suite au diagnostic d'une fissure interne du ménisque du genou gauche au mois de juillet 2009. La présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail, au sens de l'article L.411-1 du Code de la Sécurité Sociale, s'étend pendant toute la durée d'incapacité de travail précédent soit la guérison complète soit la consolidation de l'état de la victime. En l'espèce, avant le constat de la guérison apparente, le 3 mai 2010, la réalisation de l'arthroscopie, puis la réalisation de la ménisectomie ont nécessité, en plus de la prescription de repos d'une journée par le certificat médical initial, la prescription d'arrêts de travail du 27 octobre au 8 décembre 2009, éléments caractérisant le fait que Monsieur [I] s'est trouvé en situation d'incapacité de travail avant la constatation de sa guérison. Si contrairement à ce qu'énonce le jugement, l'arrêt de travail initial n'a nullement été prolongé de façon ininterrompue jusqu'au 3 mai 2010, il n'en reste pas moins que la lésion nouvelle au genou gauche a été diagnostiquée avant guérison ou consolidation, si bien que les premiers juges ont à juste titre estimé que la présomption d'imputabilité devait recevoir application. Dans son avis du 8 février 2010, le Dr [V], médecin conseil de la société ANDRE BTP indique que « l'évolution sur un an fait plutôt penser à un processus dégénératif qui aurait pu être intriqué avec un traumatisme ». Force est de constater que par cet avis, la société appelante ne rapporte nullement la preuve que l'apparition de la fissure interne du genou gauche avait une cause totalement étrangère à l'accident du travail du 30 octobre 2008. Et c'est par une appréciation pertinente de cet élément de preuve que les premiers juges ont considéré qu'il ne justifiait pas que soit ordonnée une expertise judiciaire » ;

AUX MOTIFS A LES PRÉSUMER ADOPTÉS QUE « il est de jurisprudence constante que la présomption d'imputabilité résultant de l'article L.411-1 du Code de la sécurité Sociale s'étend pendant toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison, soit la consolidation de l'état de la victime. Ainsi, lorsqu'il y a continuité des soins et des symptômes depuis la date de l'accident, l'incapacité en découlant est présumée imputable à celui-ci, sauf à l'employeur à rapporter la preuve d'une cause totalement étrangère. L'employeur peut également solliciter une expertise judiciaire en justifiant d'éléments médicaux objectifs constituant un commencement de preuve. Le 31 octobre 2008, la Société ANDRE BTP a établi une déclaration d'accident du travail pour le compte de M. [I], qui indiquait avoir été heurté par le bras d'une mini-pelle. L'arrêt de travail initialement prescrit, d'une journée, a été prolongé et pris en charge par la Caisse au titre de l'accident initial jusqu'au 3 mai 2010, date de guérison retenue par le service médical sur la base du certificat final établi par le médecin traitant de M. [I]. L'employeur ne conteste pas le caractère professionnel de l'accident, mais seulement le lien de causalité avec les lésions et arrêts postérieurs au 4 novembre 2008, qui se rapportent selon lui, à un état antérieur affectant le genou gauche. La déclaration d'accident du travail mentionne comme siège des lésions le poignet gauche et le dos. Le certificat médical initial, établi le jour-même de l'accident, fait quant à lui, état de contusions au niveau de l'avant-bras gauche, du poignet gauche, de la région lombaire, du coude droit et, enfin, des genou et mollet gauches. Un certificat médical du 4 novembre 2008 évoque un « traumatisme lombaire, de l'avant-bras gauche, du coude droit, du genou et du mollet gauches ». Les certificats de prolongation mentionnent la persistance de douleurs, notamment au niveau du genou gauche jusqu'en juillet 2009, date à laquelle est diagnostiquée une fissure du ménisque, justifiant une arthroscopie en octobre 2009 puis une ménisectomie en novembre 2009. Il ressort de ces éléments que le genou gauche était, dès l'origine, le siège d'une lésion relevée dans le certificat médical initial, qualifiée dans un premier temps de « contusion », puis de « traumatisme » dans les quelques jours qui ont suivi. S'interrogeant sur le lien direct et certain entre l'accident et la fissure méniscale observée en juillet 2009, la Société ANDRE BTP produit une note de son médecin conseil, le Dr [V], établie le 8 février 2010, indiquant que le ménisque peut « s'abîmer » de deux manières : à la suite d'un accident, sur un ménisque sain, survient une « fracture » détachant une partie de celui-ci, à l'origine de sensations de blocage à la suite d'une usure, fréquemment observée vers la cinquantaine. Pour ce praticien, l'évolution sur un an fait en l'occurrence « plutôt penser à un processus dégénératif, qui pourrait être intriqué avec un traumatisme » ; reste, selon lui, à faire la part de ce qui relève du traumatisme et de la dégénérescence. Cette note, qui n'exclut pas le lien direct entre l'accident et les arrêts et soins postérieurs même si elle privilégie la piste dégénérative, n'est pas de nature à remettre en cause l'imputabilité présumée résultant de la continuité des soins et symptômes depuis l'accident, ni même à justifier une mesure d'expertise médicale. Les demandes présentées par la société ANDRE BTP seront en conséquence rejetées » ;

ALORS, D'UNE PART, QU'une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver, de sorte que l'expertise judiciaire est notamment destinée à permettre à une partie d'établir un fait qu'elle ne peut démontrer ; que le juge ne peut donc, pour rejeter une demande de mesure d'instruction, se fonder sur la carence d'une partie à prouver un fait que la mesure d'instruction sollicitée a précisément pour but d'établir ; que la société ANDRE BTP exposait en s'appuyant sur l'avis médical de son médecin conseil, que l'évolution de l'état du genou gauche de la victime faisait plutôt penser à un processus dégénératif causé par un état pathologique préexistant à l'accident ; que ne disposant pas des éléments médicaux nécessaires pour établir avec certitude cette allégation, elle sollicitait une expertise judiciaire pour prouver cette affirmation ; qu'en estimant que par l'avis de son médecin conseil la société ANDRE BTP « ne rapporte nullement la preuve que l'apparition de la fissure interne du genou gauche avait une cause totalement étrangère à l'accident du travail du 30 octobre 2008 » pour en déduire que « c'est par une appréciation pertinente de cet élément de preuve que les premiers juges ont considéré qu'il ne justifiait pas que soit ordonnée une expertise judiciaire », cependant que la finalité même de l'expertise est précisément de permettre à une partie de faire la preuve d'un fait qu'elle ne peut prouver, la Cour d'appel a violé l'article 146 du Code de procédure civile et les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;

ALORS, D'UNE PART, QUE constitue une atteinte au principe de l'égalité des armes résultant du droit au procès équitable garanti par l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales le fait d'interdire à une partie de faire la preuve d'un élément de fait essentiel pour le succès de ses prétentions ; que, si les lésions qui apparaissent antérieurement à la guérison ou à la consolidation de l'état de la victime sont présumées imputables à l'accident initial, l'employeur a la possibilité de démontrer que certaines de ces lésions ne sont pas imputables à l'accident du travail ou ne le sont que pour partie ; qu'il convient, dans cette hypothèse, de déclarer inopposables à l'employeur les dépenses correspondant à des prestations et soins afférents aux lésions imputables, non pas à l'accident du travail, mais exclusivement à un état pathologique antérieur ou indépendant évoluant pour son propre compte ; que seule une analyse du dossier médical de l'assuré, qui ne peut être opérée que dans le cadre d'une expertise judiciaire, est de nature à permettre à l'employeur de rapporter cette preuve ; que la société ANDRE BTP sollicitait une expertise judiciaire afin d'être en mesure de démontrer que les lésions apparues postérieurement à la prise en charge de l'accident du travail et les arrêts de travail pendant plus d'un an après l'accident du travail initial n'étaient pas imputables à cet accident et produisait, pour étayer sa demande et faire ressortir le caractère anormal de la durée des arrêts de travail pris en charge par la CPAM, l'avis détaillé de son médecin conseil qui exposait que l'évolution de l'état du genou gauche de la victime faisait plutôt penser à un processus dégénératif causé par un état pathologique préexistant à l'accident ; qu'en refusant néanmoins de faire droit à cette demande, la cour d'appel a privé l'exposante de toute possibilité effective de renverser la présomption d'imputabilité et rompu l'égalité des armes entre les parties, en violation des articles L. 411-1 et R. 142-22 du Code de la sécurité sociale et 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Synthèse
Formation : Deuxième chambre civile - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 15-11.318
Date de la décision : 11/02/2016
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Cour de cassation Deuxième chambre civile, arrêt n°15-11.318 : Rejet

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes SS


Publications
Proposition de citation : Cass. Deuxième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 11 fév. 2016, pourvoi n°15-11.318, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.11.318
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award