CIV. 1
IK
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 10 février 2016
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10037 F
Pourvoi n° R 15-11.252
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme [R] [G], épouse [T], domiciliée [Adresse 1],
contre l'arrêt rendu le 10 novembre 2014 par la cour d'appel d'Angers (1re chambre B), dans le litige l'opposant à M. [F] [T], domicilié [Adresse 2],
défendeur à la cassation ;
M. [T] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 12 janvier 2016, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Matet, conseiller rapporteur, Mme Bignon, conseiller doyen, Mme Nguyen, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de Mme [G], de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. [T] ;
Sur le rapport de M. Matet, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation du pourvoi principal, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu, en conséquence, de statuer sur le moyen de cassation du pourvoi incident éventuel ;
REJETTE le pourvoi principal ;
Condamne Mme [G] aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. [T] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille seize.MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit, au pourvoi principal, par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour Mme [G]
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait déclaré madame [R] [G] irrecevable en sa demande de révision ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE : « pour pouvoir prospérer dans son action en révision du jugement, madame [G] doit avant d'apporter la preuve que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue, prouver qu'elle n'a pu sans faute de sa part, faire valoir la cause qu'elle invoque avant que la décision ne soit passée en force de chose jugée ; que madame [G] estime que son époux a frauduleusement omis de noter sur la déclaration sur l'honneur relative à la composition de son patrimoine datée du 31/1/2010, les droits qu'il pouvait espérer de la succession de son père décédé le [Date décès 1]/2010 et dont elle ignorait la consistance ; que madame [G] n'a pas ignoré le décès de son beau-père monsieur [S] [T] : elle a assisté à ses obsèques le 19/1/2010 ; qu'en outre, madame [G], qui entretenait de bonnes relations avec sa belle famille, si elle ne connaissait pas la composition précise du patrimoine de son beau-père, savait que celui-ci, ancien industriel, bénéficiait d'une aisance patrimoniale manifeste ne serait-ce qu'au regard de son train de vie, de la nature et la consistance de ses propriétés immobilières à [Localité 2] et [Localité 1] et avait nécessairement notion que l'ouverture de sa succession serait de nature à accroître le patrimoine de son époux ; qu'il lui appartenait : soit, avant de signer la convention définitive soit avant de réitérer son consentement devant le juge aux affaires familiales, d'interroger son époux sur l'étendue de cette succession au besoin par voie de sommation de communiquer ou de différer la signature des accords entre époux jusqu'au prononcé d'un partage effectif ; qu'elle pouvait également poursuivre le divorce sur demande acceptée selon les modalités de l'article 233 du code civil initié par les époux lors de l'ordonnance de non-conciliation du 21/4/2009 ce qui laissait au juge le soin de statuer sur ladite prestation compensatoire au lieu d'opter en cours de procédure pour un divorce par consentement mutuel ; qu'or, l'accord global y compris sur la prestation compensatoire est intervenu dès février 2010 ainsi qu'il résulte du courrier de maître Cocaud Chatteleyn, avocat de monsieur [T] adressé le 8/2/2010 à maître [P], notaire chargé de dresser l'état liquidatif de divorce ; que la convention de liquidation-partage a été signée le 7/5/2010 par monsieur [T] et le 11/6/2010 par madame [R] [G] ; que ces accords ont été pris quelques semaines seulement après le décès de monsieur [S] [T], sans attendre que l'acte de partage de sa succession ne soit établi entre monsieur [F] [T] et sa soeur [I] [T] puisqu'il n'a été signé que le 5/7/2010 ; que madame [G] n'apporte aucun élément permettant d'établir que monsieur [F] [T] ait tenté de l'induire en erreur sur l'étendue des forces de la succession de son père avant que le divorce par consentement mutuel ne soit prononcé par le juge ; qu'aucun élément ne permet d'estimer que la déclaration sur l'honneur datée du 31/1/2010 qu'il a établie avant le partage de la succession litigieuse, ne soit antidatée ; qu'il est cohérent que cette déclaration soit rédigée à une date proche de l'accord global financier intervenu entre les époux en février 2010 ; qu'en outre, la fraude aurait consisté à minorer le montant de la part successorale et non à l'omettre totalement puisque madame [G] savait que monsieur [F] [T] avait hérité de la succession de son père ; que madame [G] a agi avec une certaine imprudence puisqu'elle avait toutes possibilités d'agir autrement à supposer que l'on considère que dans le cadre de la négociation des effets du divorce qui était en cours depuis le 14/1/2009, elle entendait que soit pris en considération le patrimoine de son beau-père décédé alors que les époux étaient déjà séparés ; que le recours qu'elle exerce n'est pas recevable dès lors qu'elle pouvait faire valoir la cause qu'elle invoque avant que le divorce et la convention ne soient entérinés par le juge aux affaires familiales ; que l'action diligentée par madame [G] si elle n'a pu prospérer pour les motifs énoncés ci-dessus, n'est pas en soi irrecevable » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « monsieur [T] a rédigé sa déclaration sur l'honneur le 31 janvier 2010 étant précisé que son père est décédé le [Date décès 1] 2010, de sorte que monsieur [T] ne pouvait déclarer le 31 janvier 2010 ce qu'il allait recevoir de la succession de son père le 5 juillet 2010 ; qu'il n'est pas établi, comme le soutient madame [G], que cette déclaration sur l'honneur soit antidatée et il ne saurait être exigé, au-delà des dispositions légales, de la part de l'auteur de cette déclaration, qu'il produise une déclaration sur l'honneur actualisée, en cas d'éléments nouveaux, sous peine de présomption de fraude ; que madame [G] ne pouvait ignorer que son époux avait une vocation successorale suite au décès de son beau-père et rien ne l'empêchait de délivrer une sommation de communiquer, dans le cadre de la procédure de mise en état, la communication de la liquidation des opérations successorales ou à tout le moins le justificatif de l'avancement des opérations de succession ; que madame [G] s'est engagée dans une procédure de consentement mutuel, sous la forme d'une passerelle ; qu'or elle connaissait le décès de son beau-père et elle restait libre de ne pas s'engager dans les termes d'une convention avant de connaître l'issue de la liquidation des opérations successorales concernant son beau-père ; qu'en conséquence, la fraude n'est aucunement caractérisée à l'encontre de monsieur [T] » ;
ALORS 1°) QUE : le recours en révision est ouvert s'il se révèle, après le jugement, que la décision du juge a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ; que seule la connaissance par l'auteur du recours, de la cause de révision invoquée, avant que la décision ne soit passée en force de chose jugée, serait de nature à faire obstacle à la recevabilité de celui-ci ; qu'en l'espèce, pour déclarer madame [R] [G] irrecevable en sa demande de révision, la cour d'appel s'est fondée sur des motifs tirés de la connaissance par celle-ci du décès de son beau-père et du train de vie, de la nature et de la consistance des propriétés immobilières à [Localité 2] et à [Localité 1] de ce dernier, de la vocation successorale de son époux ou de la notion qu'elle avait que l'ouverture de sa succession serait de nature à accroître le patrimoine de celui-ci ; que ces motifs ne sont pas de nature à caractériser la connaissance qu'avait madame [G] de la cause de révision, à savoir l'acte de partage de la succession de son beau-père intervenu le 5 juillet 2010 et la consistance du patrimoine de son époux en résultant, avant que la décision de divorce ne soit passée en force de chose jugée ; qu'en l'absence d'une déclaration sincère de monsieur [T] à la date de la convention réglant les effets du divorce, le 31 août 2010, ou lors du dépôt de la requête conjointe en divorce par consentement mutuel, le 2 septembre 2010, faisant état de ce patrimoine, il ne pouvait être imputé à faute à madame [G] de n'avoir pas soulevé la cause de révision invoquée avant la signature définitive de la convention ni avant que le jugement de divorce, dont la révision était demandée, ne fût passé en force de chose jugée ; que, quelque suspicion que celle-ci aurait pu avoir suite au décès de son beau-père, il ressort des motifs mêmes de l'arrêt qu'elle n'en avait pas eu connaissance ; qu'en considérant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 595, 1°, du code de procédure civile, ensemble les articles 230, 232, 271, 272 et 278 code civil, ainsi que la circulaire de la direction des affaires civiles et du sceau du 25 novembre 2002 ;
ALORS 2°) QUE : le recours en révision est ouvert s'il se révèle, après le jugement, que la décision du juge a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ; que, dans le cadre de la fixation d'une prestation compensatoire par le juge ou par les parties, les parties fournissent au juge une déclaration certifiant sur l'honneur l'exactitude de leurs ressources, revenus, patrimoine et conditions de vie ; que, même dans le cas d'une requête conjointe en divorce, il appartient à chacune d'elles d'actualiser sa déclaration en cours de procédure pour prendre en compte les changements susceptibles d'intervenir dans sa situation ; qu'en l'espèce, à la date du dépôt de la requête conjointe en divorce par consentement mutuel, le 2 septembre 2010, monsieur [T] a fourni au juge une déclaration datée du 31 janvier 2010 certifiant sur l'honneur l'exactitude de ses ressources, revenus, patrimoines et conditions de vie ; qu'il résulte des motifs propres et adoptés de la cour d'appel que, dans cette déclaration, monsieur [T] n'avait pas indiqué le montant de son patrimoine acquis suite à l'acte de partage de la succession de son père intervenu le 5 juillet 2010, soit antérieurement à la saisine du juge ; qu'en déclarant madame [R] [G] irrecevable en sa demande de révision, au motif inopérant qu'il est cohérent que cette déclaration soit rédigée à une date proche de l'accord global financier intervenu entre les époux en février 2010 et au motif erroné qu'il ne saurait être exigé, au-delà des dispositions légales, de la part de l'auteur de cette déclaration, qu'il produise une déclaration sur l'honneur actualisée, en cas d'éléments nouveaux, sous peine de présomption de fraude, la cour d'appel a violé l'article 595, 1°, du code de procédure civile, ensemble les articles 230, 232, 271, 272 et 278 du code civil, ainsi que la circulaire de la direction des affaires civiles et du sceau du 25 novembre 2002 ;
ALORS 3°) QUE : le recours en révision est ouvert s'il se révèle, après le jugement, que la décision du juge a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ; qu'en cas de divorce par consentement mutuel, les époux fixent le montant et les modalités de la prestation compensatoire dans la convention qu'ils soumettent à l'homologation du juge ; que le juge refuse d'homologuer la convention qui fixe de manière inéquitable les droits et obligations des époux, notamment lorsque les stipulations relatives à la prestation compensatoire préservent suffisamment les intérêts de l'époux bénéficiaire ; qu'en l'espèce, pour déclarer madame [R] [G] irrecevable en sa demande de révision, l'arrêt a retenu que la fraude aurait consisté à minorer le montant de la part successorale et non à l'omettre totalement puisque madame [G] savait que monsieur [F] [T] avait hérité de la succession de son père ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 595, 1°, du code de procédure civile, ensemble les articles 1100 du même code et 232, 271 272 et 278 du code civil ;
ALORS 4°) QUE : en tout état de cause, le recours en révision est ouvert s'il se révèle, après le jugement, que la décision du juge a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ; que le juge refuse d'homologuer la convention si elle fixe de manière inéquitable les droits et obligations des époux ; que la dissimulation par l'un des époux d'un élément de son patrimoine est de nature à tromper le juge en charge de l'homologation d'une convention réglant les effets du divorce ; qu'en l'espèce, à supposer même que madame [G] ait commis une faute, celle-ci ne saurait avoir d'incidence sur la recevabilité du recours en révision dès lors que la fraude invoquée a trompé le juge en charge de l'homologation ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 595, 1°, du code de procédure civile, ensemble les articles 1100 du même code et 230, 232, 271, 272 et 278 du code civil, ainsi que la circulaire de la direction des affaires civiles et du sceau du 25 novembre 2002.