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11/12/2015 | FRANCE | N°14-15670

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 décembre 2015, 14-15670


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 février 2014) que M. X... engagé par la société Alben le 27 octobre 1986 en qualité de manoeuvre chauffeur poids lourds, exerçait, en dernier lieu, les fonctions de chef d'équipe ; qu'il a fait l'objet le 2 décembre 2012 d'une mise à pied disciplinaire ; qu'il a, le 13 décembre 2012, saisi la juridiction prud'homale en annulation de cette sanction et paiement d'un rappel de salaire, de primes d'ancienneté et de dommages et intérêts, puis, le 17 octobre 2005,

pris acte de la rupture de son contrat de travail en invoquant not...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 février 2014) que M. X... engagé par la société Alben le 27 octobre 1986 en qualité de manoeuvre chauffeur poids lourds, exerçait, en dernier lieu, les fonctions de chef d'équipe ; qu'il a fait l'objet le 2 décembre 2012 d'une mise à pied disciplinaire ; qu'il a, le 13 décembre 2012, saisi la juridiction prud'homale en annulation de cette sanction et paiement d'un rappel de salaire, de primes d'ancienneté et de dommages et intérêts, puis, le 17 octobre 2005, pris acte de la rupture de son contrat de travail en invoquant notamment des faits de harcèlement moral ; qu'il a formé des demandes supplémentaires en paiement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour non-respect par l'employeur de ses obligations contractuelles ;
Sur le premier moyen pris, en sa septième branche :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés, et de le débouter de sa demande tendant au paiement de dommages et intérêts en réparation de la rupture brutale de son contrat de travail par le salarié, alors, selon le moyen, que seul le manquement de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail justifie que lui soit imputée la rupture du contrat de travail dont le salarié a pris l'initiative ; qu'en s'abstenant de rechercher si le comportement du salarié qui, absent de l'entreprise depuis plus d'un an et demi, avait pris acte de la rupture de son contrat de travail à raison de faits qui n'avaient pu ni perdurer ni se reproduire, n'excluait pas que les manquements qu'il lui reprochait ainsi aient été suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat et justifier la requalification de la rupture en licenciement, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1231-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté qu'à la suite d'un accident du travail le salarié avait été en arrêt de travail jusqu'à la prise d'acte, la cour d'appel a pu en déduire que les faits dénoncés par celui-ci, constitutifs d'un harcèlement moral, caractérisaient des manquements suffisamment graves de l'employeur pour empêcher la poursuite du contrat, nonobstant leur ancienneté ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et de congés payés, alors, selon le moyen, que le salarié ne peut prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter ; qu'en condamnant l'employeur au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis quand le salarié, en arrêt de travail sans origine professionnelle depuis plus d'un an, était dans l'impossibilité physique d'effectuer ce préavis, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la prise d'acte de la rupture était justifiée, de sorte qu'elle produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel en a déduit à bon droit que le salarié était fondé à obtenir paiement de l'indemnité de préavis et les congés payés afférents ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les première à sixième branches du premier moyen annexé qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Alben et M. Y..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Alben et M. Y..., ès qualités, à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour la société Alben et M. Y..., ès qualités.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Alben au paiement des sommes de 26. 000 euros, 4. 810 euros, 5. 550 euros et 550 euros respectivement à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférents, et d'AVOIR débouté la SARL Alben de sa demande tendant au paiement de dommages-intérêts en réparation de la rupture brutale de son contrat de travail par Monsieur Fathi X....
AUX MOTIFS QUE Monsieur Fathi X... soutient qu'il n'avait jamais fait l'objet du moindre reproche de son employeur pendant 16 ans, que le climat social s'est dégradé à partir de 2002 avec le changement de direction de l'entreprise (le fils de l'ancien patron a repris l'entreprise et changement de directeur), que de nombreux salariés ont été amenés à démissionner en raison des pressions exercées par l'employeur, que celui-ci a voulu lui imposer d'effectuer un chantier dans le nord de la France alors qu'il était affecté sur le 06 depuis plusieurs années, qu'il a été abusivement sanctionné pour son refus, qu'il a été confronté à un harcèlement continuel et que, dans ce contexte, il a fait l'objet d'un malaise sur un chantier le 3 mars 2004, reconnu comme accident du travail par la CPAM ; qu'il produit, outre les pièces déjà citées ci-dessus dans le cadre de l'examen de la mise à pied disciplinaire, les éléments suivants :- un courrier du 12 juin 1998 de l'ancien directeur, Monsieur César N..., dénonçant « l'incompétence » du gérant. Monsieur Alain Z... (fils de Monsieur Z...) et ses agissements d'abus de biens sociaux au profit d'une autre entreprise AAP de vente d'armes gérée également par Monsieur Alain Z...,- un compte-rendu de réunion du personnel du 10. 09. 2002, rédigé par les délégués du personnel, faisant état du départ à la retraite de Monsieur César N... le 31. 12. 2002 et de la volonté du gérant, Monsieur Alain Z..., d'assurer également les fonctions de directeur,- l'attestation du 12 mars 2004 de Monsieur Franck A... en ces termes : « j'atteste que quand j'étais dans la société Alben, il y avait de gros problèmes de dirigeants qui exerçaient une telle pression sur le personnel. En ce qui me concerne j'ai travaillé avec M. X..., c'est une personne responsable et qui sait travailler, c'était mon chef d'équipe et il n'y a jamais eu un seul problème sur les chantiers et en dehors. Depuis décembre 2002, au moment du changement de direction, les problèmes ont commencé. Le gérant de la sté Alben est un incapable, il a fait pression sur tout le personnel en place pour les faire démissionner, 12 personnes environ ont démissionné. Il y a 2 mois, ils s'en sont pris à moi en faisant comme à M. X.... J'en ai pleuré des nerfs ; il fallait que je quitte cette société pour mon bien et celui de mon entourage. Je devenais invivable à la maison et en dehors. À l'heure actuelle je suis chez Adecco et je cherche une place stable, j'ai quitté un CDI pour de l'intérim mais je n'en pouvais plus. Si cette attestation peut aider A4. X.... Je sais ce qu'il traverse en ce moment mais malheureusement quand ils auront fini avec lui cela sera au tour d'un autre »,- l'attestation du 19 mars 2004 de Monsieur Jérôme B... en ces termes : « Nous sommes sur un chantier « LE PARADISIO » qui est difficile à réaliser.- Mardi 2 mars 2004, M. X... Fathi a demandé à M. C..., conducteur de travaux, une personne supplémentaire afin de réaliser le chantier. Cela lui a été refusé, c'est alors que Messieurs C... et X... ont commencé à se disputer en présence du gardien de l'immeuble,- Le lendemain matin, M. C... est revenu avec M. D..., directeur de la société Alben, et M. E... chef d'équipe ; M. D... a demandé à M. X... de quitter le chantier et qu'il allait mettre M, E... pour le remplacer en rajoutant : «- M. E... si vous avez besoin de plus de personnel pour finir le chantier, je vous les fait venir ! ». C'est alors que M. X... s'est mis en colère car on le lui avait refusé. Il a demandé à M. D... s'il se moquait de lui. En guise de réponse : «- Quittez le chantier, on en discutera au bureau », en se mettant le droit devant la bouche pour qu'il se taise. M. X... est devenu rouge de colère et c'est à ce moment-là qu'il a fait un malaise et s'est évanoui, tombé au sol, il a fallu l'intervention du SAMU qui l'ont conduit aux urgences vers 1lh30. Je trouve cela regrettable car M. X... est un bon chef d'équipe, il n'y a jamais eu un seul problème sur un chantier car il sait travailler. Je remarque que depuis quelque temps la direction harcèle le personnel et c'est pour cela que je peux témoigner tout en sachant qu'après M. X... mon tour risque d'arriver rapidement car depuis quelque temps nous subissons une pression à tour de rôle » ;- l'attestation du 30 septembre 2005 de Monsieur Alain F... en ces termes : « Durant mon activité au sein de la société Alben, j'ai été témoin à plusieurs reprises des faits suivants : Monsieur X..., chef d'équipe et collègue avec qui j'ai travaillé de nombreuses années était confronté à un harcèlement continuel surtout à partir du changement de direction. La forte pression psychologique qu'il subissait m'a surpris car Monsieur X... effectuait son travail avec compétence et conscience professionnelle. Il subissait des mesures vexatoires, discriminatoires et était contraint d'obéir à des décisions absolument arbitraires. Malgré cela, Monsieur X... se comportait tout à fait correctement avec ses collègues. A partir d'un certain temps ces agissements injustifiés envers sa personne lui portèrent préjudice car mon collègue devint renfermé, taciturne et déprimé. Les faits atteignirent à leurs combles lors de son dernier chantier. Je n'étais pas présent lors de ces événements, mais un excellent camarade de travail qui s'y trouvait, Monsieur Frédéric E..., y était et me raconta tout dans les détails. Lors de ces événements. Monsieur Stanislas D... était directeur et Monsieur Alain C... conducteur de travaux. En préliminaire je vais vous expliquer en quelques mots notre manière de travailler. En général nos chantiers nécessitent la présence d'une équipe de trois personnes, chef d'équipe compris. Lors de gros chantiers très techniques et complexes le besoin d'une quatrième personne est tout à fait nécessaire. Nous avions souvent recours à ce système avec l'ancien chef des travaux, Monsieur G... avant le changement de direction. Monsieur X... ayant justement en charge un très gros chantier demanda à maintes reprises l'appoint, d'une quatrième personne à Monsieur C... pour activer le travail, de mande refusée avec moult engueulades et mauvais prétexte. Lors de ces demandes je fus présent : une par téléphone au bureau de Monsieur
C...
et une autre fois sur le terrain de l'entrepôt où Monsieur X... s'était rendu en fin de journée. Chaque fois Monsieur C... « envoyait paître » Monsieur X... puis une fois le dos tourné ironisait et le critiquait vertement aux collègues présents sur les lieux dont moi-même et Monsieur E.... J'étais ulcéré car connaissant parfaitement ce travail, je m'étais rendu sur le site du chantier et avais constaté avec évidence l'utilité d'une quatrième personne. Monsieur C... informa le directeur de cette affaire. Ils se rendirent donc accompagnés de Monsieur E... (chef d'équipe) sur le chantier de Monsieur X... pour lui demander des comptes sur la « lenteur du travail » et avec l'intention préméditée d'enlever Monsieur X... de ce chantier et de le remplacer par Monsieur E.... Monsieur D... apostropha Monsieur X..., ne voulut écouter aucune explication, le traita d'incapable et lui tint des propos méprisants devant ses collègues ainsi que devant des habitants de l'immeuble Monsieur X... déjà affaibli par une extrême tension nerveuse et pour cause fut pris d'un malaise et dut être hospitalisé. Ensuite, lors de la prise de-fonctions du nouveau chef d'équipe Monsieur E..., celui-ci fut assuré de la confiance et du soutien de ses supérieurs hiérarchiques et, comble de l'ironie, se vit proposer l'alternative auparavant tant de fois refusée à Monsieur X... pour d'obscures raisons, du choix d'un quatrième ouvrier dès que le besoin s'en fera sentir. Choix qui s'imposa évidemment dès le lendemain et fut satisfait »,- la décision de radiation du 25 janvier 2005 du conseil de prud'hommes de Nice faisant suite à la saisine du 10 juillet 2003 de Monsieur Fathi X..., qui indique sans être contredit que cette décision a été affichée par l'employeur au sein de l'entreprise avec l'annotation manuscrite suivante : « il se disait le plus coriace il se disait le deuxième Patron il prétendait me faire sa loi il promettait que son syndicat me casserait »,- un courrier de plainte pour harcèlement moral adressé le 18 mars 2004 au Procureur de la République de Nice, avec avis de classement sans suite en date du 25 novembre 2005,- la décision de la CPAM du 21 juillet 2004 de notification de prise en charge de l'accident du 3 mars 2004 au titre de la législation relative aux risques professionnels après refus, avec déclaration du salarié précisant avoir travaillé le 3 mars 2004 « environ 3 heures dans un regard d'égout dans les garages de l'immeuble + altercation verbale avec le directeur et le conducteur de travaux »,
- des prescriptions médicales des 3 et 12 mars 2004,- une expertise médicale du Docteur I... en date du 30 mars 2005 qui confirme la date de consolidation du 3 octobre 2004 et la prolongation de l'arrêt de travail au titre de la maladie jusqu'au 7 mars 2005,- la première page du courrier du Docteur J... adressé le 9 mars 2005 à Maître Balenberger, faisant mention de l'état anxio-dépressif de Monsieur Fathi X... justifiant l'arrêt de travail pour maladie et précisant qu'« il existe des menaces de mort, d'harcèlement... de la part de l'employeur... »,- des certificats médicaux faisant mention d'un état anxieux et de « douleurs abdominales en rapport avec un état anxieux » (certificat du Dr K... du 27. 12. 2004) et poursuite de « troubles psychiatriques qui perturbent énormément ses possibilités de reprise du travail et qui sont en rapport avec les circonstances de son accident du travail » (certificat du Dr L..., médecin généraliste, du 06. 10. 2005, certificat du Dr M..., psychiatre, du 25. 11. 2005),- un courrier du 21 juin 2004 du service locatif de LOGIAM adressé à Monsieur Fathi X... pour lui annoncer que sa demande de logement était annulée en l'absence de retour par l'employeur de l'imprimé permettant d'actualiser son dossier ; qu'il résulte des éléments versés par le salarié que le climat social s'est dégradé au sein de l'entreprise particulièrement après le départ de l'ancien directeur, Monsieur César N..., fin décembre 2002, que des pressions ont été exercées par la nouvelle direction à tour de rôle sur les salariés, les conduisant à démissionner, que Monsieur Fathi X... a subi « des mesures vexatoires, discriminatoires » et des pressions psychologiques, qu'il a été abusivement sanctionné le 6 mars 2003 par une mise à pied disciplinaires, que son employeur a négligé de remplir le formulaire destiné au service locatif de LOGIAM qu'il s'est vu refuser sur son dernier chantier l'aide d'une quatrième personne qui a pourtant été immédiatement accordée à son remplaçant, qu'il a été renvoyé de ce dernier chantier par ses supérieurs hiérarchiques et qualifié d'incapable devant ses collègues, que le chef de travaux Monsieur C... le critiquait « vertement » auprès de ses collègues, que son action devant le conseil de prud'hommes a été traitée en dérision par son employeur par l'affichage de l'ordonnance de radiation du 25 janvier 2005 annotée, et que l'état de santé du salarié s'est dégradé jusqu'à l'accident survenu le 3 mars 2004, reconnu au titre d'un accident du travail, suivi d'un arrêt maladie pour un état anxieux ; qu'au vu de ces éléments versés par le salarié et qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, il incombe à la SARL Alben de prouver que ses agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiés par des éléments étrangers à tout harcèlement ; que la SARL Alben fait valoir que Monsieur Fathi X..., qui était en arrêt de travail depuis un an et demi lors de sa prise d'acte, ne peut prétendre avoir été victime de harcèlement alors qu'il était absent de l'entreprise et qu'il ne s'était jamais plaint auparavant de « menace » ou « brimade », qu'à partir du 3 octobre 2004, l'arrêt maladie dont le salarié a bénéficié ne concernait plus l'accident du travail, de sorte qu'il n'était aucunement lié à son travail mais à son état de santé personnel, que les témoignages produits par le salarié proviennent d'anciens employés de la société Alben qui ont été débauchés par une société concurrente, la société Alphasonic, dans un contexte particulièrement malsain de dénigrement constant de la société Alben et d'actes de concurrence déloyale particulièrement graves de son ancien directeur, que les attestations des anciens employés ne sont donc que des attestations de pure complaisance, cherchant à jeter le discrédit sur la société Alben et que le malaise du salarié le 3 mars 2004 est un incident isolé qui n'a rien à voir avec le harcèlement ; qu'elle cite une ordonnance de référé du tribunal de commerce du 14 septembre 2004 dont elle affirme qu'elle ordonne à la société Alphasonic et ses gérants successifs, Messieurs N... et G..., de cesser leurs agissements en concurrence déloyale, sans cependant la verser aux débats ; qu'elle produit des jugements du conseil de prud'hommes de Nice en date du 28 octobre 2004 concernant des salariés qui ont été déboutés de leur demande de requalification de leurs démissions intervenues entre mai et août 2003 en un licenciement sans cause, réelle et sérieuse et qui ont été condamnés au paiement de dommages-intérêts pour manquement à leur obligation de loyauté envers leur ancien employeur, la SARL Alben, du fait qu'ils ont participé à la création de la société concurrente Alphasonic, outre un jugement du 15 mai 2006 concernant Monsieur O... licencié pour faute et qui a été débouté de ses demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; mais que les jugements versés par l'employeur concernent Madame P... et Messieurs Q..., R... et G... et ne concernent pas Messieurs A..., B... et F... ayant témoigné en faveur de Monsieur Fathi X... et dont il n'est pas démontré qu'ils ont rejoint la société Alphasonic ; que les témoignages de Messieurs A..., B... et F... qui sont concordants et sont corroborés par les autres éléments versés par le salarié sont donc parfaitement crédibles ; qu'il résulte, par conséquent, des éléments versés par le salarié non utilement contredits par l'employeur que Monsieur Fathi X... a été victime d'agissements répétés de harcèlement moral (pressions, mesures vexatoires, mise à pied disciplinaire du 6 mars 2003 abusive, refus de remplir un formulaire destiné au service locatif de LOGIAM, refus d'une aide qui a été accordée à son remplaçant, dénigrement de ses capacités devant ses collègues, mépris affiché par la hiérarchie), qui ont eu pour effet une dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé ; qu'au vu du harcèlement moral subi par le salarié, la prise d'acte de rupture du contrat de travail par Monsieur Fathi X... est justifiée par les manquements graves de l'employeur et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il convient, en conséquence, d'accorder à Monsieur Fathi X..., sur la base du salaire moyen mensuel brut de 1850 € calculé sur les trois derniers mois de travail, la somme balte de 5550 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et la somme de 4810 € à titre d'indemnité légale de licenciement, indemnités dont le calcul des montants n'est pas discuté, ainsi que la somme de 555 € au titre des congés payés sur préavis ; que Monsieur Fathi X... produit l'avis du 22 mars 2007 de la CAF lui annonçant le renouvellement de son droit au RMI jusqu'en juin 2007, le courrier de la CAF mentionnant un montant des prestations familiales et sociales de 1147, 35 € pour le mois de mars 2007, un courrier du 19 mars 2007 du Conseil Général des Alpes-Maritimes concernant son contrat d'insertion d'une durée de trois mois, des bulletins de salaire de janvier à juin 2006 d'Adecco, des relevés de l'ASSEDIC de juillet à décembre 2006 (607, 29 euros d'indemnités versées en décembre 2006), un contrat de travail à durée indéterminée conclu le 22 décembre 2006 avec la société Innocentini qui l'a employé en qualité de chauffeur manutentionnaire avec une rémunération mensuelle brute de 1. 358, 84 euros ; qu'en considération des éléments fournis, de l'ancienneté du salarié de 18 ans dans l'entreprise et du montant de son salaire, la Cour alloue à Monsieur Fathi X... la somme de 26. 000 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il convient d'ordonner la remise par la SARL Alben d'un bulletin de paie mentionnant les sommes allouées de nature salariale et de l'attestation Pôle emploi rectifiée en conformité avec le présent arrêt.
ALORS QUE ne saurait caractériser un harcèlement moral le fait pour l'employeur, agissant dans le strict cadre de son pouvoir de direction et d'organisation, d'affecter le salarié de son choix sur un chantier dont il a la responsabilité, et de lui adjoindre les moyens qu'il estime nécessaires à sa réalisation ; qu'en reprochant à la société Alben d'avoir déchargé Monsieur Fathi X... d'un chantier pour le remplacer par un de ses collègues, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civile et L. 1221-1 du Code du travail ensemble le principe constitutionnel de liberté d'entreprendre.
ET ALORS QUE si le salarié faisait état d'une sanction disciplinaire, il ne soutenait pas que cette sanction aurait procédé du harcèlement qu'il dénonçait par ailleurs ; qu'en se fondant sur ladite sanction pour dire établi le harcèlement moral, la Cour d'appel a méconnu l'objet du litige en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile.
ALORS en outre QUE le silence opposé à l'affirmation d'un fait ne vaut pas à lui seul reconnaissance de ce fait ; qu'en se bornant à dire que l'employeur n'aurait pas contesté avoir affiché et annoté la décision de radiation du Conseil de prud'hommes pour dire ce grief établi, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil.
ALORS encore QUE le salarié faisait encore état d'un refus de son employeur de remplir un formulaire destiné au service location de LOGIAM et tentait d'étayer ce grief par la seule production d'un courrier dudit service indiquant n'avoir pas reçu l'imprimé de l'employeur ; qu'il ne résultait dudit courrier qu'une simple abstention, susceptible de résulter d'un oubli, et non un refus ; qu'en affirmant pourtant que l'employeur aurait refusé de remplir ce formulaire sans préciser les éléments sur lesquels elle entendait fonder cette affirmation, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
ET ALORS QU'un fait unique ne peut caractériser un harcèlement moral ; que ne saurait en soi caractériser un harcèlement moral le seul fait pour l'employeur d'avoir, en une occasion unique, remis en cause les compétences d'un salarié qu'il avait été contraint de décharger d'un chantier qu'il n'avait pas été en mesure de mener à bien ; qu'en retenant néanmoins l'existence d'un harcèlement moral au regard de ce motif, la Cour d'appel a violé L. 1152-1 du Code du travail.
ALORS en outre QUE le juge peut recevoir des tiers les déclarations de nature à l'éclairer sur les faits litigieux dont ils ont personnellement connaissance ; que pour dire imputable à la société Alben la dégradation de l'état de santé de Monsieur Fathi X..., la Cour d'appel s'est exclusivement fondée sur des certificats médicaux émanant de praticiens extérieurs à l'entreprise et qui ne pouvaient de ce fait que rapporter les propos de leur patient sans pouvoir en apprécier la véracité ; qu'en fondant sa décision sur ces documents, la Cour d'appel a violé les articles 199 et 202 du Code de procédure civile.
ALORS en tout cas QUE seul le manquement de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail justifie que lui soit imputée la rupture du contrat de travail dont le salarié a pris l'initiative ; qu'en s'abstenant de rechercher si le comportement du salarié qui, absent de l'entreprise depuis plus d'un an et demi, avait pris acte de la rupture de son contrat de travail à raison de faits qui n'avaient pu ni perdurer ni se reproduire, n'excluait pas que les manquements qu'il lui reprochait ainsi aient été suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat et justifier la requalification de la rupture en licenciement, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1231-1 du Code du travail et 1134 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
, subsidiaire
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Alben au paiement des sommes de 5550 euros et 555 euros respectivement à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférents.
AUX MOTIFS ENONCES AU PREMIER MOYEN
ALORS QUE le salarié ne peut prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter ; qu'en condamnant l'employeur au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis quand le salarié, en arrêt de travail sans origine professionnelle depuis plus d'un an, était dans l'impossibilité physique d'effectuer ce préavis, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-15670
Date de la décision : 11/12/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 13 février 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 déc. 2015, pourvoi n°14-15670


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.15670
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