LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 29 novembre 2013), que M. X... a été engagé à compter du 1er mars 2011, avec reprise d'ancienneté à compter du 19 mars 2003, en qualité d'agent de service par la société Arcade ; qu'ayant été licencié pour faute grave par lettre du 16 février 2012 après avoir refusé une mutation disciplinaire sur un autre site qui lui avait été notifiée le 14 février 2012, il a saisi la juridiction prud'homale afin de contester le bien-fondé de son licenciement ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes, alors, selon le moyen, que le refus par un salarié de se soumettre à une sanction qu'il conteste ne peut, à lui seul, caractériser une faute grave ; que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée du préavis ; qu'en considérant que l'introduction par M. X..., sur le chantier de la chambre de commerce et d'industrie de Lille, d'une personne étrangère au service rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis tant en raison du risque encouru que du discrédit qui pouvait en résulter pour la société tout en constatant que, pour sanctionner ces mêmes faits, la société Arcade n'avait envisagé dans un premier temps qu'une mutation disciplinaire, ce qui démontrait que ces faits ne rendaient pas impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée du préavis, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Mais attendu qu'une modification du contrat de travail ne pouvant être imposée au salarié, l'employeur qui se heurte au refus d'une mutation disciplinaire impliquant une modification du contrat de travail, peut, dans l'exercice de son pouvoir disciplinaire, prononcer une autre sanction, y compris un licenciement pour faute grave aux lieu et place de la sanction refusée ; qu'ayant constaté que le licenciement était intervenu après que le salarié avait refusé sa mutation sur un autre site et en raison des faits qui étaient à l'origine de cette sanction, la cour d'appel n'encourt pas le grief du moyen ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Bertrand, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes contre la société ENTREPRISE GENERALE DE NETTOYAGE "ARCADE" ;
AUX MOTIFS QU'en application de l'article L.1332-2 du code du travail, la sanction de la mutation disciplinaire à laquelle l'intimé a refusé de se soumettre est intervenue plus de deux jours ouvrables après l'entretien, puisque celui-ci a eu lieu le jeudi 9 février 2012 et que la sanction a été prise le mardi 14 février 2012, et que plus de deux jours ouvrables se sont écoulés entre ces deux dates ; qu'en application de l'article L.1332-2 du code du travail, en raison du refus de l'intimé de se soumettre à la mutation disciplinaire qui emportait modification du contrat de travail, l'appelante pouvait, dans l'exercice de son pouvoir disciplinaire, envisager une autre sanction ; qu'en application de l'article L.1231-1 du code du travail, le grief énoncé dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est l'introduction par l'intimé d'une personne étrangère sur le site sur lequel il effectuait sa prestation de travail, ces faits étant survenus après un avertissement consécutif à une qualité de travail insuffisante ; qu'en exécution de l'avenant du contrat de travail en date du 6 septembre 2011, l'intimé était affecté sur le site du CCI Grand Lille CEPRECO à compter du 5 septembre 2011 pour effectuer des travaux de nettoyage ; qu'il résulte du courriel transmis le 1er février 2012 par Laurent Y..., coordinateur logistique au sein du groupe CEPRECO, que Loubna Z..., collègue de travail de l'intimé, l'a informé de la présence d'une personne étrangère au site accomplissant, aux côtés de ce dernier, une prestation de travail dans l'enceinte de l'établissement ; qu'il résulte de l'attestation établie le 8 septembre 2012, que le témoin a maintenu ses affirmations ; qu'elle les a réitérées devant le conseil de prud'hommes, signalant en outre en avoir informé Laurent Y... ; que les déclarations, recueillies à l'audience, d'un autre témoin, Sébastien A..., employé de la CCI de Lille, confortent celles de Loubna Z... ; que les constatations des premiers juges selon lesquelles les témoins n'auraient pas vu la femme qui se livrait à une activité de nettoyage en compagnie de l'intimé se trouvent en contradiction tant avec le contenu de l'attestation de Loubna Z... que celui des déclarations des deux témoins rapporté dans le jugement ; qu'ils avaient nécessairement vu la personne en cause puisque Loubna Z... affirmait qu'elle était étrangère au site et Sébastien A..., qu'il ne la connaissait pas ; que la présence de celle-ci et l'assistance qu'elle apportait s'explique par les circonstances entourant l'avertissement infligé à l'intimé le 31 janvier 2012 ; qu'il est en effet consécutif au contrôle contradictoire organisé le 26 janvier 2012 à la demande du client sur le site duquel l'intimé travaillait et qui se plaignait de la mauvaise qualité de la prestation de travail de celui-ci ; qu'il était constaté en particulier que les sanitaires étaient très mal nettoyés, que les cuvettes n'étaient pas propres, le sol sale et les lavabos encrassés ; que l'intimé ne pouvait ignorer que l'introduction d'une personne étrangère était interdite, le règlement intérieur de la société appelante faisait expressément défense aux salariés d'introduire ou de faire introduite dans l'entreprise des personnes étrangères à celle-ci ; que dès le 1er février 2012, le responsable du service administratif de CEPRECO a souligné dans un courriel adressé à la société, l'irrégularité de la pratique dont avait eu connaissance Laurent Y..., rappelant que sa responsabilité était engagée en cas d'incident, et exigeant un rappel à l'ordre et la prise de mesures en vue de faire respecter l'interdiction à toute personne non autorisée de pénétrer sur le site ; que le caractère comminatoire de ce courrier démontre l'importance que le client de la société appelante attachait à cette interdiction et met en évidence le risque de perdre celle-ci qu'a fait courir l'intimé par son comportement ; que le grief est ainsi caractérisé ; que les faits reprochés rendaient impossible le maintien de l'intimé dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis tant en raison du risque encouru rappelé précédemment que du discrédit qu'ils pouvaient jeter sur la réputation de la société (arrêt attaqué p.p. 3-4) ;
ALORS QUE le refus par un salarié de se soumettre à une sanction qu'il conteste ne peut, à lui seul, caractériser une faute grave ; que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée du préavis ; qu'en considérant que l'introduction par M. X..., sur le chantier de la chambre de commerce et d'industrie de Lille, d'une personne étrangère au service rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis tant en raison du risque encouru que du discrédit qui pouvait en résulter pour la société tout en constatant que, pour sanctionner ces mêmes faits, la société ARCADE n'avait envisagé dans un premier temps qu'une mutation disciplinaire, ce qui démontrait que ces faits ne rendaient pas impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, même pendant la durée du préavis, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail.