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29/09/2015 | FRANCE | N°14-14996

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 29 septembre 2015, 14-14996


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 4 février 2014), que M. X... a été engagé le 13 octobre 2008 par la société Sodexo (la société) en qualité de chef de partie ; que par lettre du 22 janvier 2010, la société l'a informé qu'il était affecté à compter du 1er février 2010 sur le site de l'Hôtel de région ; que le 6 avril 2010, l'association gérant le restaurant de ce site a résilié le contrat la liant à la société à compter du 30 juin 2010 ; qu'estimant qu'il y avait tran

sfert d'une entité économique autonome, celle-ci a adressé le 23 avril 2010 à l'a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 4 février 2014), que M. X... a été engagé le 13 octobre 2008 par la société Sodexo (la société) en qualité de chef de partie ; que par lettre du 22 janvier 2010, la société l'a informé qu'il était affecté à compter du 1er février 2010 sur le site de l'Hôtel de région ; que le 6 avril 2010, l'association gérant le restaurant de ce site a résilié le contrat la liant à la société à compter du 30 juin 2010 ; qu'estimant qu'il y avait transfert d'une entité économique autonome, celle-ci a adressé le 23 avril 2010 à l'association la liste des salariés affectés sur le site, parmi lesquels M. X... ; que le 16 juin 2010, la région Haute-Normandie a refusé de reprendre le salarié, qui a pris acte de la rupture de son contrat de travail et saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire qu'il n'y a pas eu transfert du contrat de travail du salarié et que la prise d'acte de rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse à ses torts exclusifs et de la condamner à payer au salarié diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ que l'ensemble des contrats de travail d'une entité économique autonome est transféré de plein droit vers le repreneur lorsque l'activité de cette entité employant des salariés de droit privé est reprise par une personne publique dans le cadre d'un service public administratif ; que ce transfert des contrats de travail s'opère de plein droit et de manière automatique dès lors que le salarié faisait partie des effectifs de l'entité économique autonome transférée et n'a pas manifesté de refus à la transmission de son contrat de travail au nouvel employeur ; qu'en décidant cependant, pour dire que la société était restée l'employeur du salarié, que le transfert de son contrat de travail ne pouvait avoir eu lieu par le seul effet des dispositions de l'article L. 1224-3 du code du travail, qu'à la condition qu'il « ait été exclusivement affecté à l'activité de restauration confiée à la société sur le site de l'Hôtel de région », la cour d'appel - qui constatait que l'entité économique autonome de laquelle l'intéressé était salarié avait été transférée à la région de Haute Normandie et que celui-ci n'avait manifesté aucun refus à ce transfert - a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas et a violé les articles L. 1224-1 et L 1224-3 du code du travail ;
2°/ qu'il appartient à l'entreprise repreneuse qui a obtenu de l'entreprise sortante la liste des contrats de travail transférés, d'établir que le transfert du contrat de travail d'un salarié attaché à l'activité cédée ne s'est en réalité pas opéré ; qu'en décidant qu'il appartenait à la société de démontrer que son ancien salarié, qui avait donné son accord au transfert de son contrat de travail, était exclusivement affecté à l'activité de restauration transférée, quand il appartenait à la région de Haute Normandie, qui le contestait, de l'établir, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
3°/ dans ses écritures d'appel, la société faisait expressément valoir que le refus de la région de reprendre le contrat du salarié tenait au fait que celui-ci avait été placé en arrêt maladie depuis plusieurs mois ; qu'en se bornant à statuer comme elle l'a fait, sans répondre à ce chef péremptoire des écritures d'appel de l'exposante, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant constaté par une décision motivée, sans méconnaître les règles d'administration de la preuve, que le salarié n'était pas affecté à l'entité transférée, la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Sodexo entreprises administrations aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros au conseil régional de Haute-Normandie ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf septembre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la société Sodexo entreprises administrations.
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement ayant dit et jugé que Monsieur X... était resté salarié de la société SODEXO et d'avoir en conséquence requalifié la prise d'acte de rupture du contrat de travail par le salarié en un licenciement sans cause réelle et sérieuse aux torts exclusifs de la société SODEXO et de l'avoir en conséquence condamnée à verser diverses sommes à Monsieur X....
AUX MOTIFS QUE Sur le transfert d'une entité économique autonome ; contrairement à ce qu'à semblé considéré le conseil de prud'hommes et à ce que soutient la Région Haute Normandie, les dispositions de l'article L 1224-3 du code du travail avaient vocation à s'appliquer ; l'activité de restauration exercée par la société SODEXO au sein de l'Hôtel de région constituait en effet une entité économique autonome, dès lors qu'elle reposait, non sur la seule main d'oeuvre de la société SODEXO, comme le soutient la Région, mais aussi sur les « gros équipements » et les locaux utilisés par cette société au bénéfice d'une clientèle captive, peu important que ces équipements et locaux n'aient pas appartenu à la société SODEXO, mais aient été simplement mis à sa disposition par la Région Haute Normandie ; Sur la détermination de l'employeur de M. X... ; le transfert du contrat de travail de M. X... à la Région Haute Normandie ne pouvait avoir lieu par le seul effet des dispositions de l'article L 1224-3 du code du travail, indépendamment de toute demande du salarié concerné, qu'à la condition qu'il ait été exclusivement affecté à l'activité de restauration confiée à la société SODEXO sur le site de l'Hôtel de région ; que la société SODEXO, soutenue en cela par M. X..., fait valoir en ce sens que ce dernier y était affecté depuis le 1er février 2010. Elle produit à cette fin divers documents auxquels ne saurait toutefois être conférée la portée qu'elle leur prête, dès lors qu'ils sont soit contradictoires entre eux, soit contredits par des pièces versées aux débats par la Région ; Parmi les documents produits par la société SODEXO figurent pour l'essentiel :- les bulletins de paie sur lequel figure le N° SIRET de SODEXO lié au restaurant administratif de la Région, mais ceci est la simple conséquence de la lettre indiquant qu'il y serait affecté à compter du 1er février, ce qu'indique également le registre du personnel, sans que cela prouve le caractère effectif de cette affectation, compte tenu des divers évènements ayant marqué l'exécution du contrat de travail, ainsi qu'il sera dit ciaprès ;- deux attestations de MM. Y..., responsable régional SODEXO, et Z..., chef de cuisine SODEXO, qui affirment la réalité de l'affectation et disent avoir rencontré M. X... à plusieurs reprises sur place. Toutefois, d'une part, la deuxième attestation n'est pas conforme (non manuscrite) aux prescriptions des articles 202 et suivants du Code de procédure civile, ce qui atténue sa force probante, d'autre part, la Région produit six attestations de personnes, peu important qu'elles portent l'en-tête de la Région, qui citent expressément les autres personnes ayant travaillé avec elles dans la cuisine, parmi lesquelles ne figure pas M. X.... De plus, il résulte de ces attestations que c'est M. C... qui exerçait les fonctions de « second de cuisine », c'est à dire celles qu'aurait prétendument exercé M. X... et qu'il les a assumées durant tout le premier semestre. M. C... précise d'ailleurs lui-même qu'il est resté à ce poste « durant le premier semestre », qu'il a été « affecté en lycée depuis le 1er juillet 2010 » et qu'il a travaillé avec M. A... « de fin mai à début juin ». La mention « fin avril » dans son attestation s'applique donc non à son propre départ, mais à celui de son premier chef, M. B... « sous la responsabilité de (qui il a travaillé) jusqu'à fin avril ». Enfin, l'attestation produite par l'employeur selon laquelle une de ces personnes ayant attesté saurait pas écrire, émanant de M. Z..., est cette fois encore non conforme aux prescriptions du code de procédure civile et sa valeur probante doit céder devant la force d'une attestation dans les formes qu'aucun élément objectif ne permet de suspecter ;- un badge de parking, dont il n'est pas contesté qu'il s'agit du parking de l'Hôtel de région. Toutefois la présidente de l'association du personnel de la région affirme n'avoir pas été sollicitée pour l'obtention d'une telle carte ; la liste des cartes ne comporte pas mention de M. X... et le directeur adjoint des services de la Région atteste que la vérification des systèmes de lecteurs de badge a permis de constater qu'aucun accès au parking n'avait été activité entre février et juin 2010 avec ladite carte. Dès lors, et en quelque sens qu'on l'interprète, l'attestation de l'épouse de M. X... censée prouver que son mari a travaillé à l'Hôtel de région n'est pas de nature à prouver ce fait ;- des relevés de présence et d'heures et d'absence relatifs au travail de M. X.... Toutefois, ces documents sont contradictoires. Ainsi, à titre d'exemple, le bordereau de présence censé prouver sa présence sur le site de l'Hôtel de région le marque présent alors que le « suivi de présence » le note comme absent (ex. 2ème quinzaine de février). De même le suivi de présence le marque comme ayant travaillé à la CPAM de ROUEN (remplacement dont l'employeur souligne qu'il ne ferait en tout état de cause pas obstacle au transfert) alors qu'il était en arrêt maladie (ex. fin avril). Aucun crédit ne peut donc leur être accordé ; qu'aucun des quelques autres éléments versés n'est de nature à infirmer la conclusion qu'implique l'étude des éléments ci-dessus, à savoir que c'est la société SODEXO qui aurait du conserver le contrat de M. X... et que c'est à sa charge que doivent être mises les sommes allouées à ce dernier par suite de la requalification de sa prise d'acte ; que le jugement doit donc être confirmé, sauf sur l'astreinte dont il a assorti la délivrance des documents de fin de contrat ;
ALORS DE PREMIERE PART QUE l'ensemble des contrats de travail d'une entité économique autonome est transféré de plein droit vers le repreneur lorsque l'activité de cette entité employant des salariés de droit privé est reprise par une personne publique dans le cadre d'un service public administratif ; que ce transfert des contrats de travail s'opère de plein droit et de manière automatique dès lors que le salarié faisait partie des effectifs de l'entité économique autonome transférée et n'a pas manifesté de refus à la transmission de son contrat de travail au nouvel employeur ; qu'en décidant cependant en l'espèce, pour dire que la société SODEXO était restée l'employeur de Monsieur X..., que le transfert de son contrat de travail ne pouvait avoir eu lieu par le seul effet des dispositions de l'article L 1224-3 du code du travail, qu'à la condition qu'il « ait été exclusivement affecté à l'activité de restauration confiée à la société SODEXO sur le site de l'Hôtel de Région », la Cour d'appel - qui constatait que l'entité économique autonome de laquelle Monsieur X... était salarié avait été transférée à la Région de Haute Normandie et que celui-ci n'avait manifesté aucun refus à ce transfert - a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas et a violé les articles L 1224-1 et L 1224-3 du Code du travail ;
ALORS DE DEUXIEME PART QU'il appartient à l'entreprise repreneuse qui a obtenu de l'entreprise sortante la liste des contrats de travail transférés, d'établir que le transfert du contrat de travail d'un salarié attaché à l'activité cédée ne s'est en réalité pas opéré ; qu'en décidant en l'espèce qu'il appartenait à la société SODEXO de démontrer que son ancien salarié, Monsieur X..., qui avait donné son accord au transfert de son contrat de travail, était exclusivement affecté à l'activité de restauration transférée, quand il appartenait à la Région de Haute Normandie, qui le contestait, de l'établir, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
ALORS DE TROISIEME PART QUE dans ses écritures d'appel, la société SODEXO faisait expressément valoir que le refus de la Région de reprendre le contrat de Monsieur X... tenait au fait que celui-ci avait été placé en arrêt maladie depuis plusieurs mois ; qu'en se bornant à statuer comme elle l'a fait, sans répondre à ce chef péremptoire des écritures d'appel de l'exposante, la Cour a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14-14996
Date de la décision : 29/09/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 04 février 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 29 sep. 2015, pourvoi n°14-14996


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boutet-Hourdeaux, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.14996
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