LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 17 septembre 2013), que M. X... a été engagé le 1er janvier 1985 en qualité de technicien supérieur au centre EDF-GDF services de Besançon, groupe fonctionnel (GF) 8, niveau de rémunération (NR) 9 ; qu'il exerce depuis 2007 les fonctions de "chargé d'études senior", GF 10 NR 145 ; que militant de la CGT depuis 1991, il a exercé diverses responsabilités syndicales et électives à partir de novembre 1997 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale aux fins notamment d'obtenir son reclassement au GF 11 à compter du 1er janvier 2002 et au N 195 à compter du 1er janvier 2012 ainsi que le paiement de dommages-intérêts en réparation des préjudices matériel et moral subis ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de reconstitution de carrière et en paiement de la somme de 132 677 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice matériel subi du fait de la discrimination syndicale, alors, selon le moyen :
1°/ que la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu ; qu'il appartient dès lors au juge de rechercher à quelle classification serait parvenu le salarié s'il avait bénéficié d'un déroulement normal de carrière et d'ordonner, à titre de réparation, son repositionnement à cette classification ; qu'en rejetant la demande du salarié tendant à son reclassement et au paiement des dommages-intérêts réparant le préjudice matériel subi du fait de la discrimination syndicale dont il a fait l'objet, tout en constatant qu'au cours de ses vingt-huit ans de services, il avait connu une évolution de carrière anormalement lente, en lien avec ses activités syndicales, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1, L. 2145-5 et L. 1134-5, alinéa 3, du code du travail ;
2°/ qu'en retenant que la progression plus ou moins rapide de la carrière d'un salarié est fonction, d'une part, de facteurs personnels difficiles à quantifier tels que les contraintes familiales et difficultés de santé, d'autre part, de facteurs liés à la disponibilité des postes souhaités par celui-ci, lesquels sont étrangers à toute discrimination, de sorte que l'étendue du préjudice effectivement subi ne pouvait être définie par référence à une carrière linéaire exclusive d'aléas, quand il lui appartenait de rechercher à quel niveau de classification serait parvenu le salarié s'il n'avait pas été victime de discrimination, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs inopérants, a derechef violé les articles L. 1132-1, L. 2141-5 et L. 1134-5, alinéa 3, du code du travail ;
3°/ subsidiairement, qu'en retenant, pour limiter la réparation du préjudice résultant de la discrimination syndicale, des facteurs personnels tenant à l'état de santé du salarié ou à ses contraintes familiales, la cour d'appel s'est fondée sur des critères discriminatoires, en violation des articles L. 1132-1, L. 2141-5 et L. 1134-5, alinéa 3, du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la demande de reconstitution de carrière telle que présentée par le salarié était établie sur la base de temps d'acquisition moyens d'un niveau supérieur purement théoriques, la cour d'appel a souverainement apprécié l'entier préjudice subi par celui-ci résultant de la discrimination ; que le moyen, qui dans sa troisième branche critique un motif surabondant, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... et le syndicat CGT du personnel des industries de l'énergie du centre EGS aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize avril deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. Bertrand X... et le syndicat CGT du personnel des industries de l'énergie du centre EGS Franche-Comté Sud
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté monsieur X... de sa demande de reconstitution de carrière et en paiement de la somme de 132.677 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice matériel subi du fait de la discrimination syndicale ;
AUX MOTIFS QUE la demande de reconstitution de carrière telle que présentée par l'appelant ne peut être entérinée, en ce qu'elle est établie sur la base de temps d'acquisition moyens d'un niveau supérieur GF ou de NR, qui sont purement théoriques et ne peuvent donc refléter la diversité des situations de chaque agent telle que constatée dans la réalité, ces temps théoriques étant uniquement destinés en cas d'écart trop important entre ceux-ci et l'évolution de carrière d'un militant syndical à constituer une présomption de discrimination ; qu'il ne peut être exclu en effet que des facteurs personnels difficiles à quantifier entrent pour une part dans la progression plus ou moins rapide de la carrière d'un salarié, (contraintes familiales-difficultés de santé) ainsi que des facteurs liés à la disponibilité des postes souhaités par celui-ci, qui sont étrangers à toute discrimination, de sorte que l'étendue du préjudice effectivement subi ne peut être définie par rapport à une carrière théorique linéaire dépourvue d'aléas d'aucune sorte, au risque d'introduire une forme de discrimination positive au bénéfice des militants syndicaux et représentants du personnel ; qu'en l'espèce, en considération des éléments d'information figurant au dossier, il apparaît justifié d'allouer à monsieur X... en réparation du préjudice financier et moral, directement lié à la discrimination syndicale dont il a été victime tant en ce qui concerne ses conditions de travail 1997 à 2005 que le retard qu'il a subi du fait de son reclassement tardif au niveau GF 10 - 140, d'une part une indemnité de 30 000 euros, d'autre part le bénéfice d'un reclassement au niveau GF 11 NR 180, avec effet rétroactif au 1er janvier 2013 ;
1°) ALORS QUE la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n'avait pas eu lieu ; qu'il appartient dès lors au juge de rechercher à quelle classification serait parvenu le salarié s'il avait bénéficié d'un déroulement normal de carrière et d'ordonner, à titre de réparation, son repositionnement à cette classification ; qu'en rejetant la demande de monsieur X... tendant à son reclassement et au paiement des dommages et intérêts réparant le préjudice matériel subi du fait de la discrimination syndicale dont il a fait l'objet, tout en constatant qu'au cours de ses vingt-huit ans de services, le salarié avait connu une évolution de carrière anormalement lente, en lien avec ses activités syndicales, la cour d'appel a violé les articles L. 1132-1, L. 2145-5 et L. 1134-5 alinéa 3, du code du travail ;
2°) ALORS QU'en retenant que la progression plus ou moins rapide de la carrière d'un salarié est fonction, d'une part, de facteurs personnels difficiles à quantifier tels que les contraintes familiales et difficultés de santé, d'autre part, de facteurs liés à la disponibilité des postes souhaités par celui-ci, lesquels sont étrangers à toute discrimination, de sorte que l'étendue du préjudice effectivement subi ne pouvait être définie par référence à une carrière linéaire exclusive d'aléas, quand il lui appartenait de rechercher à quel niveau de classification serait parvenu le salarié s'il n'avait pas été victime de discrimination, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs inopérants, a derechef violé les articles L. 1132-1, L. 2141-5 et L. 1134-5, alinéa 3, du code du travail ;
3°) ALORS, subsidiairement, QU'en retenant, pour limiter la réparation du préjudice résultant de la discrimination syndicale, des « facteurs personnels » tenant à l'état de santé du salarié ou à ses contraintes familiales, la cour d'appel s'est fondée sur des critères discriminatoires, en violation des articles L. 1132-1, L ; 2141-5 et L. 1134-5, alinéa 3, du code du travail.