La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/03/2015 | FRANCE | N°13-17103

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 mars 2015, 13-17103


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 4 mars 2013) que Mme X... a été engagée par la Société de secours minier de Moselle Est, devenue la CARMI Est, à compter du 1er août 2002, en qualité de médecin classée à l'échelle 2 de la classification de la convention collective des médecins généralistes de la sécurité sociale minière du 31 mai 1999, avec une reprise d'ancienneté dans la profession de dix mois et vingt-trois jours ; que l'employeur a dénoncé, le 4 mai 2006, la convention collective et a dé

cidé, par lettre circulaire diffusée le 19 mai 2006, que tout médecin nouvelle...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 4 mars 2013) que Mme X... a été engagée par la Société de secours minier de Moselle Est, devenue la CARMI Est, à compter du 1er août 2002, en qualité de médecin classée à l'échelle 2 de la classification de la convention collective des médecins généralistes de la sécurité sociale minière du 31 mai 1999, avec une reprise d'ancienneté dans la profession de dix mois et vingt-trois jours ; que l'employeur a dénoncé, le 4 mai 2006, la convention collective et a décidé, par lettre circulaire diffusée le 19 mai 2006, que tout médecin nouvellement recruté serait, au minimum, classé à l'échelle 3 de la convention collective et que les médecins déjà en place et classés à l'échelle 1 ou 2 seraient immédiatement promus à l'échelle 3 ; que, faisant valoir que le mécanisme de redéploiement d'échelon institué par l'employeur avait entraîné, pour un même travail, des différences entre les médecins reclassés et les médecins nouvellement engagés, au détriment des premiers, la salariée a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir son reclassement à l'échelon 5 de la convention collective et le paiement d'un rappel de salaire et congés payés afférents, en vertu du principe « à travail égal, salaire égal » ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'accueillir ces demandes alors, selon le moyen :
1°/ que ne contrevient pas au principe d'égalité de traitement en matière salariale, l'engagement unilatéral d'un employeur par lequel celui-ci supprime les deux premières échelles de la classification résultant de la convention collective normalement applicable et accorde immédiatement aux salariés engagés antérieurement comme postérieurement à cette entrée en vigueur, le bénéfice de la nouvelle classification issue de cet engagement ; que la cour d'appel, qui a jugé l'inverse, a violé le principe « à travail égal, salaire égal » ;
2°/ que ne constitue pas une discrimination, la différence de traitement qui trouve son origine dans une disposition d'ordre public que doit respecter l'entreprise ; qu'en affirmant que la reprise de l'ancienneté dans la profession des nouveaux engagés était constitutive d'une différence de traitement en matière salariale quand cette reprise d'ancienneté était expressément prévue par l'article 32 de la convention collective des médecins généralistes de la sécurité sociale minière qui, bien que régulièrement dénoncée le 4 mai 2006, continuait à survivre en application de l'article L. 2261-11 du code du travail, à la date à laquelle l'employeur a pris son engagement unilatéral et supprimé les échelles 1 et 2 de la classification antérieurement applicable, la cour d'appel a violé cet article, ensemble le principe « à travail égal, salaire égal » et l'article 32 de la convention collective des médecins généralistes de la sécurité sociale minière ;
3°/ que si la date d'engagement d'un salarié ne peut à elle seule faire échec à l'application du principe « à travail égal, salaire égal », il demeure que, sauf à faire rétroagir les effets d'une convention collective nouvellement entrée en vigueur, l'on ne saurait appliquer à un salarié déjà en poste une reprise d'ancienneté dont la convention collective prévoit qu'elle n'est applicable qu'au moment de l'embauche ; que la cour d'appel, qui a jugé l'inverse, a violé l'article 34 de la convention collective des omnipraticiens exerçant dans les centres de santé miniers du 23 janvier 2008, ensemble le principe « à travail égal, salaire égal » ;
Mais attendu qu'au regard du respect du principe « à travail égal, salaire égal », la seule circonstance que des salariés aient été engagés avant ou après l'entrée en vigueur d'un accord collectif ou d'un engagement unilatéral ne saurait suffire à justifier des différences de traitement entre eux ; qu'il appartient à l'employeur de démontrer qu'il existe des raisons objectives à la différence de traitement entre des salariés effectuant un même travail ou un travail de valeur égale dont il revient au juge de contrôler la réalité et la pertinence ;
Et attendu qu'ayant relevé que les médecins engagés à compter du 1er juin 2006 avaient bénéficié d'un classement à l'échelle 3 même en l'absence d'ancienneté dans la profession, quand les médecins engagés avant la mise en place du nouveau système de classement des emplois avaient été positionnés au même échelon pour une ancienneté plus importante dans la profession et qu'ainsi l'accès plus rapide à l'échelon 3 des médecins nouvellement engagés n'était que la conséquence des modalités d'application du redéploiement des échelons unilatéralement décidé par l'employeur et défavorables aux anciens salariés, la cour d'appel a décidé à bon droit, en l'absence d'élément objectif et pertinent tenant à la formation ou à la nature des fonctions exercées ou encore à la pénurie de main-d'oeuvre que la salariée devait bénéficier à compter du 1er juin 2006 de la reprise d'ancienneté attribuée par la convention collective nationale des médecins généralistes de la sécurité sociale minière du 31 mai 1999 aux salariés recrutés directement ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au à payer une somme à titre de rappel de salaire pour les consultations effectuées le samedi matin, alors, selon le moyen :
1°/ que la règle « à travail égal, salaire égal » n'a vocation à s'appliquer qu'à l'égard de salariés placés dans une situation identique ; qu'en l'espèce, il résulte expressément de l'arrêt attaqué que le paiement d'une journée complète pour les consultations du samedi matin était réservé aux seuls médecins employés dans le cadre de contrats à durée déterminée et ce, aux fins de compenser la précarité de leur emploi ; qu'en faisant application du principe « à travail égal, salaire égal » quand il résultait de cette constatation que cet avantage était réservé à des salariés qui, du fait de la nature de leur emploi, ne se trouvaient pas dans une situation identique à celle des salariés employés dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le principe « à travail égal, salaire égal » ;
2°/ qu'une différence de traitement en matière de salaire n'est constitutive d'une discrimination que si elle n'est pas justifiée par des éléments objectifs, extérieurs à toute notion de discrimination ; qu'en statuant comme elle l'a fait quand elle a relevé que le paiement d'une journée complète pour les consultations du samedi matin était accordé aux médecins travaillant dans le cadre de contrats de travail à durée déterminée en raison de la précarité de leur emploi, ce dont résultait l'existence d'une justification objective et extérieure à toute notion de discrimination, la cour d'appel a derechef violé le principe « à travail égal, salaire égal » ;
Mais attendu, d'une part, qu'une différence de statut juridique entre des salariés effectuant un travail de même valeur au service du même employeur ne suffit pas, à elle seule, à caractériser une différence de situation au regard de l'égalité de traitement en matière de rémunération, d'autre part, qu'une différence de traitement entre des salariés placés dans la même situation doit reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence ;
Et attendu qu'ayant relevé que l'employeur se bornait à justifier la différence de traitement constatée au détriment des salariés recrutés sous contrat à durée indéterminée, consistant à attribuer aux seuls médecins engagés pour une durée déterminée une journée entière de récupération pour un samedi matin travaillé, par la seule différence de statut juridique et par un motif général tenant à la précarité des salariés en contrat de travail à durée déterminée sans préciser concrètement les raisons objectives et matériellement vérifiables justifiant cette disparité et fournir les éléments de nature à établir la réalité ainsi que la pertinence de ces raisons, la cour d'appel n'a pas méconnu le principe invoqué ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le deuxième moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la CARMI Est aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la CARMI Est à payer à Mme X... la somme de 1 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mars deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour la CARMI Est
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR ordonné le classement de Mme X... à l'échelle 4 à compter du 1er juin 2006, à l'échelle 5 à compter du 8 janvier 2007 et à l'échelle 6 à compter du 1er janvier 2011 et condamné la CARMI-EST à lui verser la somme de 56.419,52 € à titre de rappel de salaire, outre 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « le principe "à travail égal, salaire égal" implique que l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés pour autant qu'ils soient placés dans une situation identique et qu'il incombe à l'employeur de prouver que la différence de rémunération entre deux salariés exerçant des fonctions identiques est fondée sur des raisons objectives. Au regard de ce principe, la seule date d'embauché ne saurait à elle seule justifier une différence de traitement entre salariés placés dans une même situation ; qu'en l'espèce, ainsi que cela a déjà été relevé, les mesures unilatérales prises par la Caisse Autonome Nationale de Sécurité Sociale dans les Mines ont eu pour effet de supprimer à compter du 1er juin 2006 les échelles 1 et 2 tant pour les anciens salariés que pour les nouveaux embauchés de sorte que les anciens salariés qui se trouvaient aux échelles et 2 ont été immédiatement reclassés à effet du 1er juin 2006 à l'échelle 3 et que l'échelle de départ des salariés embauchés à partir du 1er juin 2006 a été fixée à l'échelle 3 ; que toutefois, les anciens salariés qui étaient aux échelles 1 et 2 ont été reclassés au stade initial de l'échelle 3, sans que leur ancienneté dans la profession, antérieure à l'embauche et postérieure à celle-ci, ait été prise en compte alors que les nouveaux salariés ont été positionnés à l'échelle 3 mais en tenant ensuite compte de leur ancienneté dans la profession. C'est ainsi que l'intimée reconnaît qu'il est possible qu'un médecin nouvellement embauché avec, par exemple, plus de 7 années d'expérience antérieures à son embauche, soit classé à l'échelle 4 alors que Martine X... se trouve à l'échelle 3, étant relevé que celle-ci comptabilisait au 1er juin 2006 et depuis son embauche en contrat à durée indéterminée une ancienneté de 3 ans et demi et que l'échelle à laquelle elle a été embauchée témoigne d'une ancienneté antérieure de 5 ans 10 mois et 23 jours, soit une ancienneté totale dans la profession de plus de 9 ans ; qu'il apparait ce faisant que la différence de classement, et partant de rémunération, entre les anciens salariés des échelles 1 et 2 et les nouveaux salariés est la conséquence du reclassement des emplois décidé unilatéralement par la Caisse Autonome Nationale de Sécurité Sociale dans les Mines le 19 mai 2006, défavorable aux premiers de ces salariés ; que la CARMI Est ne justifie d'aucun élément tenant à la formation ou aux fonctions exercées ou encore à la pénurie de main d'oeuvre pour justifier une telle différence, étant observé que si la CARMI Est prétend que compte tenu de la pénurie de médecins sur le marché du travail, la CAN SSM a décidé de classer tout nouvel embauché à l'échelle 3 de la grille salariale conventionnelle, l'intimée ne produit pas la moindre pièce attestant de sa difficulté à recruter de nouveaux médecins généralistes ; qu'en outre, la CARMI Est ne saurait prétendre que la prise en compte de l'ancienneté de Martine X... lors de son reclassement au 1er juin 2006 serait contraire aux dispositions conventionnelles relatives à l'avancement et constituerait une mesure discriminatoire par rapport aux nouveaux embauchés dont l'ancienneté n'est reprise qu'à l'embauche dès lors que le passage à l'échelle 3 au 1er juin 2006 de tous les salariés des échelles 1 et 2 ne s'est pas inscrit pas dans le cadre d'avancements tels que prévus à l'article 33 de la convention collective dénoncée mais s'analysait en des reclassements consécutifs à une modification de la classification des médecins généralistes ; que quant au fait allégué par la CARMI Est que la CAN SSM aurait été tenue, en application de l'article 32 de l'ancienne convention en survie, de reprendre l'ancienneté des nouveaux embauchés pour déterminer leur placement dans l'échelle, il ne saurait non plus justifier la différence constatée dans la mesure où cette différence trouve en réalité son origine non dans la dénonciation de la convention collective et la survie de la convention dénoncée mais dans la décision unilatérale de la Caisse Autonome Nationale de Sécurité Sociale dans les Mines de modifier la classification des médecins généralistes ; que Martine X... est bien fondée à arguer d'une atteinte à la règle "à travail égal, salaire égal" consécutive à la modification de la classification des emplois appliquée à compter du 1er juin 2006 ; que la réparation d'une différence de traitement et/ou de salaire injustifiée se résoud par l'alignement de la situation et/ou de la rémunération du salarié lésé sur celle (s) du ou des collègues qui se trouvent dans la même situation ; qu'en l'espèce, la salariée ne peut prétendre à deux échelles supplémentaires, soit l'échelle 5, à compter du 1er juin 2006 par rapport à l'échelle 3 d'entrée des nouveaux embauchés en arguant de ce que les anciens salariés ont été recrutés à l'échelle 1 majorée de leur ancienneté dans la profession alors que les nouveaux salariés ont été recrutés à l'échelle 3 majorée de leur ancienneté dans la profession puisque l'échelle d'entrée des anciens salariés ne pouvait être régie que par les dispositions conventionnelles alors applicables ; qu'en revanche, elle est en droit de bénéficier de la reprise d'ancienneté qui a été accordée aux salariés embauchés à compter du 1er juin 2006 et ce, dès cette même date ; qu'en outre, la convention collective des omnipraticiens exerçant dans les centres de santé miniers du 23 janvier 2008, qui s'est substituée à celle conclue le 31 mai 1999, prévoit que les années de pratique antérieure en qualité d'interne en médecine sont retenues pour la totalité de leur durée pour le classement à l'embauche ; qu'il s'ensuit et il n'est pas contesté par la CARMI Est que les salariés engagés après l'entrée en vigueur de cette convention ont un classement qui prend en compte la totalité de leurs années de pratique antérieure comme interne en médecine alors que ceux embauchés auparavant ont un classement qui ne tient pas du tout compte des périodes d'internat de médecine générale hors concours ; que cette différence de traitement, que la CARMI Est ne justifie par aucun élément objectif, est donc uniquement liée à la date d'embauché des salariés et la CARMI Est ne saurait s'opposer à la réparation de cette différence de traitement en invoquant l'absence d'effet rétroactif du nouveau dispositif conventionnel alors que cette réparation consiste non pas à prendre en compte les années d'internat à compter de la date d'embauché mais à partir de celle d'entrée en vigueur de la nouvelle convention collective afin que la situation des salariés embauchés avant et après cette date soit identique au regard de cette caractéristique ;
ALORS, D'UNE PART, QUE ne contrevient pas au principe d'égalité de traitement en matière salariale, l'engagement unilatéral d'un employeur par lequel celui-ci supprime les deux premières échelles de la classification résultant de la convention collective normalement applicable et accorde immédiatement aux salariés engagés antérieurement comme postérieurement à cette entrée en vigueur, le bénéfice de la nouvelle classification issue de cet engagement ; que la cour d'appel, qui a jugé l'inverse, a violé le principe « à travail égal, salaire égal » ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE que ne constitue pas une discrimination, la différence de traitement qui trouve son origine dans une disposition d'ordre public que doit respecter l'entreprise ; qu'en affirmant que la reprise de l'ancienneté dans la profession des nouveaux engagés était constitutive d'une différence de traitement en matière salariale quand cette reprise d'ancienneté était expressément prévue par l'article 32 de la convention collective des médecins généralistes de la sécurité sociale minière qui, bien que régulièrement dénoncée le 4 mai 2006, continuait à survivre en application de l'article L. 2261-11 du code du travail, à la date à laquelle l'employeur a pris son engagement unilatéral et supprimé les échelles 1 et 2 de la classification antérieurement applicable, la cour d'appel a violé cet article, ensemble le principe « à travail égal, salaire égal » et l'article 32 de la Convention collective des médecins généralistes de la sécurité sociale minière ;
ALORS, ENFIN, QUE si la date d'engagement d'un salarié ne peut à elle seule faire échec à l'application du principe « à travail égal, salaire égal », il demeure que, sauf à faire rétroagir les effets d'une convention collective nouvellement entrée en vigueur, l'on ne saurait appliquer à un salarié déjà en poste une reprise d'ancienneté dont la convention collective prévoit qu'elle n'est applicable qu'au moment de l'embauche ; que la cour d'appel, qui a jugé l'inverse, a violé l'article 34 de la convention collective des omnipraticiens exerçant dans les centres de santé miniers du 23 janvier 2008, ensemble le principe « à travail égal, salaire égal ».

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la CARMI Est à payer à Mme X... une somme de 15.287 € au titre des astreintes de nuit, outre 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE : « il résulte de l'article L 3121-7 du code du travail anciennement codifié à l'article L 212-4 bis que l'astreinte doit faire l'objet d'une compensation et que l'accord collectif ou, à défaut d'accord, l'employeur doit fixer les compensations auxquelles les astreintes donnent lieu. Ainsi, la CARMI Est ne saurait valablement invoquer l'absence prétendue de sujétion particulière liée aux astreintes de semaine pour s'opposer à la demande dès lors qu'une compensation est due s'agissant de toute astreinte impliquant pour le salarié de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise, ce qui était le cas des gardes de semaine prévues à l'article 16 paragraphe 2 de la convention collective du 31 mai 1999. Il résulte de l'article 25 de cette convention et de son annexe applicables à la période correspondant aux astreintes litigieuses que la rémunération des médecins était alors calculée selon la formule suivante : R = (Re x Np)/1200, R étant la rémunération de base de l'année n, Re la rémunération annuelle maximale à laquelle peut prétendre un médecin en fonction de son échelle, Np l'effectif pondéré de ressortissants au 31 décembre de l'année n-1 et 1200 le nombre normal de ressortissants répartis selon la structure démographique de la population française que devrait avoir un médecin à temps plein, et étant précisé que si Np est supérieur à 1200, le médecin perçoit la rémunération maximale. Il résulte de ces mêmes dispositions que l'effectif pondéré est basé sur le nombre de bénéficiaires de l'assurance maladie du régime minier inscrits sur la liste du médecin au 31 décembre de l'année précédente et que cet effectif réel est majoré sous forme de pondérations lorsque : (i) la part de la clientèle minière du médecin âgé de plus de 65 ans excède la part de la population française se situant dans la même tranche d'âge (ii) le médecin effectue certaines vacations à la demande de l'employeur (iii) le médecin participe au service médical restreint. En l'espèce, Martine X... fait valoir qu'elle a toujours eu un effectif réel avant pondération supérieure 1200. Or, dans un tel cas, le médecin bénéficie automatiquement de la rémunération maximale, avant toute pondération liée à la participation au service médical restreint qui reste sans effet sur le montant de sa rémunération. Autrement dit, dans une telle hypothèse, le salaire servi au médecin ne tient nullement compte des astreintes de semaine qu'il effectue de sorte que celles-ci, qui ne donnent lieu par ailleurs à aucun repos compensateur selon l'article 16 paragraphe 2 précité, ne font pas non plus l'objet d'une compensation financière. Et il convient de constater, d'une part, que sur l'ensemble de la période concernée, Martine X... a toujours perçu la rémunération maximale correspondant à l'échelle à laquelle elle était classée, ce que la CARMI Est indique d'ailleurs elle-même et, d'autre part, que cette dernière ne fournit aucun élément sur l'effectif réel qui a été celui de Martine X... sur les années litigieuses susceptible de contredire l'affirmation de la salariée à ce sujet de sorte que la CARMI Est ne démontre pas que Martine X... a perçu une compensation financière au titre de ses astreintes de semaine, alors qu'il incombe à l'employeur de prouver qu'il s'est libéré de cette obligation. En conséquence, Martine X... est en droit de réclamer une telle compensation dans les limites de la prescription, soit 130 astreintes de nuit suivant le tableau récapitulatif établi par la salariée et non contesté par l'employeur ».
ALORS QUE c'est à celui qui allègue l'existence d'un fait de le prouver ; que pour soutenir que ses astreintes de nuit n'avaient jamais fait l'objet d'aucune indemnisation, Mme X... prétendait, sans toutefois offrir d'en faire la preuve, qu'ayant toujours eu « un effectif réel avant pondération » supérieur à 1.200, elle devait percevoir la rémunération maximale applicable dans son échelle, de sorte que le montant de sa rémunération, qui était effectivement au maximum de l'échelle, ne pouvait comprendre l'indemnisation des astreintes de nuit ; que la cour d'appel, qui, pour retenir cette argumentation, a reproché à l'employeur de ne pas démontrer que Mme X... avait un « effectif réel avant pondération » inférieur à 1.200, a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la CARMI EST au paiement d'une somme de 30.243,50 € à titre de rappel de salaire pour les consultations effectuées le samedi matin, outre 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE : « Il résulte du principe "à travail égal, salaire égal" qu'une différence de statut juridique entre des salariés effectuant un travail de même valeur au service du même employeur ne suffit pas, à elle seule, à caractériser une différence de situation au regard de l'égalité de traitement en matière de rémunération. En l'espèce, la CARMI Est ne conteste pas que les médecins généralistes engagés en contrat de travail à durée déterminée bénéficiaient d'un avantage équivalent à celui invoqué par Martine X... au regard des matinées de consultation du samedi puisqu'elle indique que ces derniers bénéficiaient d'une journée entière de récupération pour un samedi matin travaillé. Et elle ne conteste pas non plus les dires de Martine X... d'après lesquels cet usage a persisté jusqu'au 1er janvier 2012, date à partir de laquelle il a été dénoncé. Au demeurant, la lettre signée le 18 août 2011 par le directeur général de la CARMI Est confirme l'affirmation de Martine X... dès lors que cette lettre mentionne : "Nous vous informons par la présente lettre que notre organisme entend dénoncer l'usage concernant, dans le bassin houiller, la rémunération des consultations de samedis matins des médecins sous contrat à durée déterminée, sur la base d'une journée complète. Afin de respecter un préavis suffisant, cette décision ne prendra effet qu'à compter du 1er janvier 2012. Après cette date, l'usage sera donc remis en cause et vous ne bénéficierez plus des avantages qui en résultaient. Le cas échéant, l'activité du samedi matin sera rémunérée selon les règles de la convention collective nationale des omnipraticiens exerçant dans les centres de santé miniers." Il apparaît ainsi que jusqu'au 1er janvier 2012, chaque consultation du samedi matin ouvrait droit pour un médecin en contrat de travail à durée déterminée à la rémunération d'une journée complète alors que la salariée sous contrat de travail à durée indéterminée n'a jamais bénéficié du même avantage puisqu'il est acquis aux débats que pour chaque matinée de consultation du samedi, elle a récupéré une demi-journée conformément à l'avenant à la convention collective nationale des médecins généralistes de la sécurité sociale minière relatif à l'aménagement et la réduction du temps de travail du 1 1 septembre 2001 puis, à compter du 31 octobre 2008, a perçu la rémunération d'une demi-journée de travail. Or, la CARMI Est ne saurait légitimer cette différence de rémunération par un motif général tenant à la précarité des salariés en contrat de travail à durée déterminée sans indiquer concrètement les raisons objectives et matériellement vérifiables justifiant cette disparité et fournir les éléments de nature à établir la réalité ainsi que la pertinence de ces raisons. En l'absence de telles indications et de tels éléments, Martine X... est bien fondée à se plaindre de ce chef d'une atteinte à l'égalité de traitement, étant au demeurant observé que le fait que cet usage ait été dénoncé pour soumettre les salariés en contrat de travail à durée déterminée au régime appliqué aux salariés en contrat à durée indéterminée sans que la survenance d'un élément nouveau explique cette dénonciation et sans qu'un autre avantage ait été accordé en compensation aux salariés en contrat à durée déterminée tend au contraire à démontrer qu'aucune raison objective ne justifiait une telle différence. Martine X... est dès lors en droit d'obtenir réparation de cette disparité par l'allocation pour chaque consultation effectuée d'une rémunération d'une journée complète de travail sous déduction des demi-journées de récupération qu'elle a prises puis des rémunérations pour une demi-journée de travail qu'elle a perçues » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la règle « à travail égal, salaire égal » n'a vocation à s'appliquer qu'à l'égard de salariés placés dans une situation identique ; qu'en l'espèce, il résulte expressément de l'arrêt attaqué que le paiement d'une journée complète pour les consultations du samedi matin était réservé aux seuls médecins employés dans le cadre de contrats à durée déterminée et ce, aux fins de compenser la précarité de leur emploi ; qu'en faisant application du principe « à travail égal, salaire égal » quand il résultait de cette constatation que cet avantage était réservé à des salariés qui, du fait de la nature de leur emploi, ne se trouvaient pas dans une situation identique à celle des salariés employés dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le principe « à travail égal, salaire égal » ;
ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'une différence de traitement en matière de salaire n'est constitutive d'une discrimination que si elle n'est pas justifiée par des éléments objectifs, extérieurs à toute notion de discrimination ; qu'en statuant comme elle l'a fait quand elle a relevé que le paiement d'une journée complète pour les consultations du samedi matin était accordé aux médecins travaillant dans le cadre de contrats de travail à durée déterminée en raison de la précarité de leur emploi, ce dont résultait l'existence d'une justification objective et extérieure à toute notion de discrimination, la cour d'appel a derechef violé le principe « à travail égal, salaire égal » ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-17103
Date de la décision : 03/03/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 04 mars 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 mar. 2015, pourvoi n°13-17103


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.17103
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award