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11/02/2015 | FRANCE | N°13-21089

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 février 2015, 13-21089


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé à compter du 12 janvier 1989 par La Poste par différents contrats à durée déterminée ; qu'à partir de janvier 1991 et jusqu'au 28 mars 1993, suite à la modification du statut de La poste, transformée en établissement public industriel et commercial, il a été employé par contrats à durée déterminée sous statut contractuel de droit privé ; qu'il a été engagé, en 1993, par contrat à durée indéterminée intermittent ; que, le 1er juin 2000,

son contrat à durée indéterminée est devenu à temps partiel de 30 heures hebdomadai...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé à compter du 12 janvier 1989 par La Poste par différents contrats à durée déterminée ; qu'à partir de janvier 1991 et jusqu'au 28 mars 1993, suite à la modification du statut de La poste, transformée en établissement public industriel et commercial, il a été employé par contrats à durée déterminée sous statut contractuel de droit privé ; qu'il a été engagé, en 1993, par contrat à durée indéterminée intermittent ; que, le 1er juin 2000, son contrat à durée indéterminée est devenu à temps partiel de 30 heures hebdomadaires, ultérieurement de 32 heures hebdomadaires ; que le 1er janvier 2003, il est devenu à temps complet ; qu'il a saisi, le 1er juillet 2010, la juridiction prud'homale d'une demande de requalification de l'ensemble de ses contrats à durée déterminée et de demandes indemnitaires ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en régularisation de sa situation auprès des caisses de retraite de la sécurité sociale et complémentaire à compter de la date de requalification des contrats de travail, alors, selon le moyen, que la prescription trentenaire posée par l'article 2262 du code civil en vigueur au moment des faits était applicable non seulement à l'obligation de l'employeur d'affilier son personnel à un régime de retraite mais également à celle de régler les cotisations qui découlent de cette affiliation ; qu'en rejetant néanmoins la demande formée par M. X... au titre de la régularisation des cotisations de retraite au motif qu'elle se heurtait à la prescription quinquennale, la cour d'appel a violé l'article susvisé par refus d'application ainsi que l'article 2277 du même code dans sa version applicable au litige par fausse application ;
Mais attendu que le droit du salarié au paiement des salaires dus pour la période antérieure au 1er juillet 2005 étant éteint du fait de la prescription extinctive prévue par les articles 2224 du code civil et L. 3245-1 du code du travail, son action en paiement des cotisations de retraite assises sur ces salaires était nécessairement prescrite pour la même période ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de ne lui accorder aucune somme à titre de dommages-intérêts pour discrimination et atteinte au principe d'égalité alors, selon le moyen, que les salariés employés sous contrat à durée déterminée ne peuvent bénéficier de conditions d'emploi moins favorables que les salariés employés sous contrat à durée indéterminée au seul motif du caractère à durée déterminée de leur contrat ; qu'en particulier, ils bénéficient, dans les mêmes conditions, des dispositions conventionnelles et usages applicables aux salariés titulaires d'un contrat à durée indéterminée ; qu'en l'espèce, pour considérer qu'aucune discrimination au détriment de M. X... n'était établie, la cour d'appel s'est contentée de retenir que cette demande ne pouvait être étayée par le seul fait de la conclusion de CDD successifs qui ne faisait ressortir aucun élément direct ou indirect de discrimination par rapport aux salariés embauchés sous CDI de droit commun et à temps complet ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, comme le faisait valoir M. X..., en raison de son emploi abusif sous contrat à durée déterminée, ce dernier n'avait pas été privé du bénéfice d'avantages conventionnels dont bénéficiaient les agents de La Poste sous contrat à durée indéterminée, ce qui entraînait nécessairement un préjudice pour lui qu'il appartenait à la cour d'appel d'évaluer, cette dernière a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement ensemble des dispositions de la clause 4, point 1, de l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 et de l'article L. 1242-14 du code du travail ;
Mais attendu que si le salarié invoquait dans ses conclusions diverses dispositions conventionnelles applicables à La Poste et instaurant des différences de traitement au détriment des travailleurs employés sous contrat à durée déterminée, il ne soutenait pas qu'il aurait été en situation d'en bénéficier personnellement si ses contrats avaient été dès l'origine reconnus par son employeur comme un contrat à durée indéterminée ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 2262 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié en dommages- intérêts pour perte de droits à la retraite, l'arrêt, après avoir écarté comme prescrite la demande de celui-ci en régularisation de sa situation auprès des caisses de retraite de la sécurité sociale et complémentaire, ajoute qu'il y a lieu de rejeter, par là même, sa demande subsidiaire en dommages-intérêts pour perte de droits à retraite ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'action du salarié en réparation du préjudice causé par la faute de l'employeur qui n'a pas satisfait à son obligation de l'affilier à un régime de retraite et de régler les cotisations qui en découlent est soumise à la prescription régissant les actions en responsabilité civile, fixée à trente ans par l'article 2262 du code civil dans sa rédaction alors applicable, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes en dommages-intérêts pour perte de droits à la retraite, l'arrêt rendu le 14 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la société La Poste aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société La Poste à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de Monsieur X... tendant à voir régulariser, sous astreinte, sa situation auprès des caisses de retraite de la sécurité sociale et complémentaire (IRCANTEC) à compter de la date de requalification des contrats de travail ;
AUX MOTIFS QUE « la demande formulée au titre de la régularisation des cotisations retraite se heurte quant à elle à la prescription quinquennale devant être appliquée, les cotisations sociales étant afférentes aux salaires et ne pouvant être invoqué en l'espèce un refus de l'employeur d'affilier son salarié à un régime de retraite, un tel refus restant quant à lui soumis à la prescription trentenaire dont le jeu aurait alors pu être invoqué ; Monsieur X... bénéficiait par ailleurs depuis l'année 2003 d'un contrat à durée indéterminée à temps complet, dans le cadre duquel l'employeur a procédé au versement régulier des cotisations, de sorte qu'aucune régularisation à ce titre n'a lieu d'être sur la période non couverte par la prescription et il convient de rejet la demande de ce chef »
ALORS QUE la prescription trentenaire posée par l'article 2262 du Code civil en vigueur au moment des faits était applicable non seulement à l'obligation de l'employeur d'affilier son personnel à un régime de retraite mais également à celle de régler les cotisations qui découlant de cette affiliation ; qu'en rejetant néanmoins la demande formée par Monsieur X... au titre de la régularisation des cotisations de retraite au motif qu'elle se heurtait à la prescription quinquennale, la Cour d'appel a violé l'article susvisé par refus d'application ainsi que l'article 2277 du même Code dans sa version applicable au litige par fausse application ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande subsidiaire de Monsieur X... tendant à voir LA POSTE condamnée à lui verser des dommages et intérêts pour perte de droits à la retraite ;
AUX MOTIFS QUE « la demande formulée au titre de la régularisation des cotisations retraite se heurte quant à elle à la prescription quinquennale devant être appliquée, les cotisations sociales étant afférentes aux salaires et ne pouvant être invoqué en l'espèce un refus de l'employeur d'affilier son salarié à un régime de retraite, un tel refus restant quant à lui soumis à la prescription trentenaire dont le jeu aurait alors pu être invoqué ; Monsieur X... bénéficiait par ailleurs depuis l'année 2003 d'un contrat à durée indéterminée à temps complet, dans le cadre duquel l'employeur a procédé au versement régulier des cotisations, de sorte qu'aucune régularisation à ce titre n'a lieu d'être sur la période non couverte par la prescription et il convient de rejet la demande de ce chef »
ALORS QUE les décisions des juges du fond doivent être motivées ; qu'en l'espèce, en se bornant, après avoir rejeté la demande principale de Monsieur X... tendant à la régularisation des cotisations aux régimes de retraite, à considérer que sa demande subsidiaire de dommages et intérêts pour perte de droit à la retraite devait également être « par là même » rejetée sans autrement motiver sa décision de ce chef, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS en toute hypothèse QU'en vertu de l'article 2262 du Code civil alors applicable, les actions en responsabilité contractuelle étaient soumises à la prescription trentenaire ; qu'il en découle que, quand bien même la demande en régularisation des cotisations aux régimes de retraite formée par Monsieur X... se serait heurtée à la prescription quinquennale, ce dernier n'en était pas moins fondé à solliciter la réparation du préjudice résultant pour lui du manquement de LA POSTE à son obligation contractuelle de paiement de cotisations sociales en terme de perte de droits à la retraite ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 2262 du Code civil alors applicable et l'article 1147 du même Code.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué de n'avoir accordé à Monsieur X... aucune somme à titre de dommages et intérêts pour discrimination et atteinte au principe d'égalité ;
AUX MOTIFS QUE « le motif soulevé d'une discrimination salariale ne peut être étayé par le seul fait de la conclusion, d'abord de CDD successifs, ensuite du contrat intermittent puis des contrats à durée indéterminée à temps partiel, qui ne font ressortir, même si le salarié n'est pas tenu de présenter des éléments de comparaison avec d'autres salariés ayant eu selon lui un sort différent, aucun élément direct ou indirect de discrimination par rapport aux salariés embauchés sous CDI de droit commun et à temps complet ; indépendamment de l'analyse qui peut être faite dans son ensemble des méthodes de gestion de l'emploi dans LA POSTE, la discrimination invoquée ne peut être retenue» ;
ALORS QUE les salariés employés sous contrat à durée déterminée ne peuvent bénéficier de conditions d'emploi moins favorables que les salariés employés sous contrat à durée indéterminée au seul motif du caractère à durée déterminée de leur contrat ; qu'en particulier, ils bénéficient, dans les mêmes conditions, des dispositions conventionnelles et usages applicables aux salariés titulaires d'un contrat à durée indéterminée ; qu'en l'espèce, pour considérer qu'aucune discrimination au détriment de Monsieur X... n'était établie, la Cour d'appel s'est contentée de retenir que cette demande ne pouvait être étayée par le seul fait de la conclusion de CDD successifs qui ne faisait ressortir aucun élément direct ou indirect de discrimination par rapport aux salariés embauchés sous CDI de droit commun et à temps complet ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, comme le faisait valoir Monsieur X..., en raison de son emploi abusif sous contrat à durée déterminée, ce dernier n'avait pas été privé du bénéfice d'avantages conventionnels dont bénéficiaient les agents de LA POSTE sous contrat à durée indéterminée, ce qui entraînait nécessairement un préjudice pour lui qu'il appartenait à la Cour d'appel d'évaluer, cette dernière a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement ensemble des dispositions de la clause 4 point 1 de l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée du 18 mars 1999 et de l'article L. 1242-14 du Code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-21089
Date de la décision : 11/02/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 14 mai 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 fév. 2015, pourvoi n°13-21089


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.21089
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