LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 29 mai 2013), que Mme X... a été engagée le 1er août 1989 en qualité d'assistante comptable par contrat verbal, par la société CEC ; que par courrier du 31 mai 2010, la salariée a informé son employeur de sa volonté de démissionner ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire que la démission de la salariée s'analyse en une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de la condamner à payer à l'intéressée diverses sommes ;
Mais attendu qu'abstraction faite du motif surabondant critiqué par la première branche, le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation par la cour d'appel des éléments de fait dont elle a pu déduire l'existence de manquements suffisamment graves rendant impossible la poursuite du contrat de travail ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société CEC aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre février deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour la société CEC
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la démission de Mme X... s'analyse en une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné la société CEC à lui payer les sommes de 6.078,87 euros au titre des heures supplémentaires, de 607,88 euros au titre des congés payés y afférents, de 246,55 euros à titre de rappel de congés payés, de 17.064,71 euros à titre d'indemnité de licenciement, de 2.250,27 euros à titre de préavis, de 225,03 euros à titre de congés payés, de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de 1.500 euros à titre de dommages et intérêts pour perte de DIF ;
AUX MOTIFS QUE Mme X... fait à bon droit valoir que l'employeur a envers elle gravement méconnu ses obligations légales et conventionnelles en ce qui concerne la rémunération des heures supplémentaires et des congés, étant observé que la société CEC ne discute pas que sa salariée a accompli les heures sur lesquelles elle assoit ses réclamation, ni ne critique son calcul de congés, mais elle oppose qu'elle a rempli celle-ci de ses droits au moyen de repos compensateurs de remplacement en cours de procédure des reliquats de congés-payés ; qu'à ce titre les premiers juges se sont mépris en faisant leur l'argumentation de la société CEC ;
qu'en effet, de l'aveu même de la société CEC - et ceci découle de ses écritures comme de l'attestation de son fondateur M. Y... - il est acquis aux débats que pendant toute la durée de l'exécution du contrat de travail de Mme X... afin de faire face aux surcroîts d'activité saisonniers que connaissent les cabinets d'expertise comptable, impliquant pour les salariés la réalisation d'heures supplémentaires, l'employeur avait pris l'initiative d'instaurer une rémunération de celles-ci non pas en argent, mais en temps au moyen d'un calcul de "jours de récupération" devenus les repos compensateurs de remplacement ; qu'il en résultait pour la salariée une modification du mode de détermination et de rémunération des heures supplémentaires ; qu'il s'agissait donc bien de mesures ayant pour objet la modulation du temps de travail, selon le terme qui au cours de la période en l'espèce considérée sera celui retenu par le législateur ; que le recours à un tel système n'est pas prohibé, et du reste la convention collective le prévoit pour satisfaire aux spécificités de la répartition de l'activité dans les cabinets d'expertise comptable ; que toutefois en vertu tant en l'espèce des stipulations conventionnelles que des principes généraux régissant l'exécution d'un contrat, la décision de rémunérer ainsi les heures supplémentaires ne peut procéder de la volonté unilatérale exclusive de l'employeur ; que la convention collective soumet la validité et l'opposabilité aux salariés d'une telle décision à l'approbation des représentants du personnel, et lorsque l'entreprise n'en est pas dotée - ce qui est le cas en l'espèce - à celle de l'ensemble du personnel et elle doit être formalisée par écrit ;
qu'à tout le moins doit être obtenu par l'employeur l'accord non équivoque du salarié concerné ; que la preuve d'un tel accord non équivoque donné par Mme X... ne s'avère pas suffisamment rapportée ; que ne s'analyse pas comme tel l'absence - même prolongée - de protestations de sa part, ni les circonstances qu'au nombre de ses attributions figurait celle de saisir les heures effectuées par l'ensemble des salariés de l'entreprise pour en déduire l'ouverture des droits à repos compensateurs ; qu'il ne peut être déduit du fait que sous la subordination de l'employeur elle appliquait les directives données par lui, elle consentait simultanément pour sa part contractuellement à celles-ci ; que cette appréciation s'impose de plus fort alors qu'aucun document contractuel écrit n'a été signé entre les parties ; que les témoignages des autres salariés relatant le mode de comptabilisation et de rémunération sont dépourvus de valeur probante pour établir un consentement sans équivoque de l'appelante à ces modalités, et ceci quand bien même elles auraient pu se révéler plus favorables à celles-ci ; que Mme X... met par ailleurs en évidence la défaillance de l'employeur qui, au mépris de son obligation de sécurité-résultat, s'est abstenu de justifier du respect des visites périodiques à la médecine du travail, comme des visites d'embauche et de reprise après un congé de maternité ; qu'en 21 ans d'activité il n'est établi que la tenue de quatre visites médicales ; qu'en se bornant à produire les déclarations d'effectifs faites par elle au groupement de médecine du travail, et en soutenant que Mme X... aurait pris l'initiative de ne pas répondre aux convocations médicales, la société CEC n'établit pas suffisamment qu'elle a veillé efficacement au respect du contrôle médical instauré par le code du travail au besoin en usant de son pouvoir disciplinaire en cas de refus du salarié de s'y soumettre ; qu'il s'évince du tout que Mme X... avait subi de la part de la société CEC des manquements suffisamment graves pour imputer légitimement à cette dernière la responsabilité de la rupture de la relation contractuelle, et donc voir produire à sa démission les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en conséquence du tout Mme X... doit être accueillie en ses réclamations exactement calculées au titre des heures supplémentaires, congés payés, indemnités de licenciement et de préavis ;
ALORS, D'UNE PART, QUE seule la démission d'un salarié en raison de manquements graves, qu'il doit établir à l'encontre de son employeur, aux obligations essentielles du contrat de travail, s'analyse en une prise d'acte de la rupture dudit contrat imputable à cet employeur et qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que pour dire que la démission de Mme X... s'analyse en une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail imputable à son employeur, la société CEC, produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel, tout en constatant que les heures supplémentaires effectuées par Mme X... au sein de la société CEC avaient donné lieu à un repos compensateur, accepté sans protestations ni réserves par celle-ci, en toute connaissance de cause, s'est fondée cependant sur la modification du contrat de travail qu'emporterait cette indemnisation des heures supplémentaires pour déduire d'une absence d'accord exprès de Mme X..., le bien-fondé de sa prise d'acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de la société CEC ;
qu'en se fondant ainsi sur des motifs inopérants tirés des conditions d'acceptation expresse ou tacite de modification de contrat de travail par la salariée la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et observations tirées de l'indemnisation effective des heures supplémentaires de nature à caractériser la satisfaction par la société CEC de ses obligations légales et contractuelles et partant l'absence de manquement grave auxdites obligations, au regard des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du code du travail qu'elle a ainsi violés ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE seul un manquement grave de l'employeur à l'une de ses obligations essentielles découlant du contrat de travail telle que celle d'assurer la sécurité et la santé de son employée est de nature à fonder la décision de la salariée de prendre acte de la rupture de son contrat de travail imputable à celui-ci ; que, pour dire que la démission de Mme X... s'analyse en une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail imputable à son employeur, la société CEC, produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel s'est fondée sur l'absence de visite de Mme X... auprès des services de la médecine du travail ; qu'en se fondant sur des considérations sinon inopérantes tout au moins insuffisantes à caractériser des manquements graves de la société CEC à ses obligations fondamentales nées du contrat de travail, la cour d'appel n'a pas légalement justifié son arrêt infirmatif, au regard des articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du code du travail.