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28/01/2015 | FRANCE | N°13-24493

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 janvier 2015, 13-24493


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué (chambre de la cour d'appel de Saint-Denis à Mamoudzou, 11 juin 2013) de déclarer irrecevable comme tardif l'appel formé par lui le 25 février 2013, contre le jugement rendu le 18 décembre 2012 par le tribunal du travail de Mamoudzou, le déboutant partiellement de ses demandes à l'encontre de son employeur, la Société immobilière de Mayotte, alors, selon le moyen :

1°/ que si le droit à un tribunal, qui implique le dr

oit concret et effectif d'y accéder, n'est pas absolu, les conditions de recevabi...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué (chambre de la cour d'appel de Saint-Denis à Mamoudzou, 11 juin 2013) de déclarer irrecevable comme tardif l'appel formé par lui le 25 février 2013, contre le jugement rendu le 18 décembre 2012 par le tribunal du travail de Mamoudzou, le déboutant partiellement de ses demandes à l'encontre de son employeur, la Société immobilière de Mayotte, alors, selon le moyen :

1°/ que si le droit à un tribunal, qui implique le droit concret et effectif d'y accéder, n'est pas absolu, les conditions de recevabilité d'un recours ne peuvent toutefois en restreindre l'exercice au point qu'il se trouve atteint dans sa substance même ; qu'en se fondant, pour dire que les dispositions de l'article 206 de la loi du 15 décembre 1952 régissant la procédure devant le tribunal de travail de Mamoudzou selon lesquelles l'appel doit être formé dans les quinze jours du prononcé du jugement, ne constituent pas une atteinte au droit d'exercer un recours effectif, sur la double circonstance que cette règle, destinée à assurer la célérité de la procédure en matière du droit du travail, est connue des justiciables de Mayotte et que le conseil de l'appelant, non inscrit au barreau de Mayotte, intervient régulièrement devant les juridictions mahoraises, la cour d'appel qui s'est déterminée par des motifs inopérants, a violé ensemble les articles 6-1 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°/ que le délai pour former appel ayant pour point de départ le prononcé du jugement ne peut commencer à courir qu'autant que la date à laquelle il a été rendu, a été portée à la connaissance effective des parties ; qu'en énonçant, pour considérer que M. X... avait été informé de la date du délibéré, nonobstant son report à trois reprises et de sa date de plus de six mois postérieure à l'audience, que la feuille d'audience indique clairement ces dates successives de report et que le greffier du tribunal du travail avait reçu du conseil de l'appelant un courriel le remerciant d'avoir accepté de lui remettre la copie exécutoire du jugement rendu ce jour, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé une connaissance effective et certaine par M. X... du jugement rendu le 18 décembre 2012, a ainsi violé ensemble les articles 206 de la loi n° 52-1332 du 15 décembre 1952 et 6-1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3°/ que la signification à domicile ou, à défaut, en l'étude, n'est possible que si toutes les diligences ont été faites pour que l'acte soit signifié à personne, l'huissier devant impérativement relater dans l'acte ces dernières et les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une telle signification ; qu'en énonçant, pour déclarer la signification du jugement régulière et l'appel formé le 25 février 2013 par M. X... irrecevable comme tardif, que la signification avait été déposée en l'étude de l'huissier le 25 janvier 2013 et suivie de lettre prévue à l'article 658 du code de procédure civile, M. X... étant à cette date absent de son domicile, sans faire concrètement état des diligences effectuées par l'huissier de justice pour tenter de trouver le destinataire, la cour d'appel a violé les articles 654, 655 et 656 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, que l'article 206 de la loi n° 15-1322 du 15 décembre 1952 instituant un code du travail dans les territoires et territoires associés relevant des ministères de la France d'outre-mer qui dispose que dans les quinze jours du prononcé du jugement, appel peut être interjeté dans les formes prévues à l'article 190, n'est pas de nature à porter atteinte au droit à un recours effectif à un tribunal garanti par l'article 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou au droit à un procès équitable garanti par l'article 6-1 à un tribunal dès lors que les parties ont eu connaissance de la date à laquelle le jugement serait rendu ;

Attendu, ensuite, qu'ayant constaté que le jugement avait été rendu contradictoirement, que l'intéressé avait été informé des dates successives du report de son prononcé et que le jour de celui-ci, son avocat avait adressé au greffier du tribunal du travail un courriel le remerciant d'avoir délivré la copie exécutoire du jugement à son client, que le délai de quinze jours était expiré depuis le 2 janvier 2013 et que la signification opérée postérieurement à l'expiration du délai d'appel n'avait pu avoir pour effet de faire revivre un nouveau délai, la cour d'appel en a exactement déduit que l'appel formé le 25 février 2013 était irrecevable ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils pour M. X...

M. X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable l'appel qu'il a formé contre le jugement rendu le 18 décembre 2012 par le Tribunal de travail de Mamoudzou ;

AUX MOTIFS QU'il résulte de l'article 206 de la loi du 15 décembre 1952 régissant la procédure devant le Tribunal du Travail de Mamoudzou qu'appel peut être interjeté dans les formes prévues à l'article 190 dans les quinze jours du prononcé dudit jugement ; qu'une jurisprudence établie conditionne l'application stricte de ce texte au fait que les parties doivent avoir eu connaissance de la date à laquelle le jugement devait être rendu ; que dans le cas contraire (jugement réputé contradictoire ou absence d'indication de la date du délibéré), le délai d'appel court à compter de la notification du jugement ; que l'appelant feint d'avoir été trompé par la référence erronée faite par l'intimée dans ses écritures à des textes qui n'existent pas alors qu'il verse à son dossier un extrait de la loi du 15 décembre 1952 comportant les articles 190 et 206 applicables au litige ; que la règle selon laquelle le délai pour former appel a pour point de départ le prononcé du jugement vise à assurer la célérité de la procédure en matière de droit du travail ; qu'elle est connue des justiciables de Mayotte comme beaucoup d'autres règles dérogatoires du droit commun et est très génra1ement respectée ; que si le conseil de l'appelant n'est pas inscrit au barreau de Mayotte, il intervient régulièrement devant les juridiction mahoraises ; que dès lors, cette règle ne constitue pas une atteinte au droit à un recours effectif garanti par l'article 13 de la CEDH ou au droit à un procès équitable garanti par l'article 6-1 ; qu'en l'espèce, le jugement déféré a été rendu contradictoirement et deux éléments permettent de considérer que M. X... a été informé de la date du délibéré nonobstant le report de celui-ci à trois reprises ; que d'une part, la feuille d'audience indique clairement les dates de report successives (16 octobre, 20novembre, 3 décembre et 18 décembre2012), ce qui laisse présumer que les parties en ont été informées ; que d'autre part, le greffier du Tribunal du Travail a reçu le 18 décembre 2012 du conseil de M. X... un courriel le remerciant d'avoir accepté de remettre à ce dernier la copie exécutoire du jugement "rendu ce jour" ; qu'en application de l'article 206 susvisé, le délai de quinze jours a commencé à courir le 18 décembre 2012 et les parties étaient en droit d'interjeter appel jusqu'au 2 janvier 2013 ; que toute juridiction doit vérifier la régularité de sa saisine ; que c'est dans ces conditions que le greffe, sur instruction du magistrat chargé de suivre l'affaire, a invité les parties, dans la convocation qui leur était adressée, à conclure sur la recevabilité de l'appel, moyen que la cour aurait relevé d'office ; qu'il est donc sans intérêt de s'interroger sur la valeur de la fin de non-recevoir soulevée par l'intimée qui, il est vrai, avait fait signifier le jugement à M. X... en lui indiquant qu'il disposait d'un délai de quinze jours pour faire appel ; que la signification opérée postérieurement à l'expiration du délai d'appel n'a pu avoir pour effet de faire revivre un nouveau délai ; que l'appel formé le 25 février 2013 par M. X... est tardif ; qu'en tout état de cause, même en prenant comme point de départ du délai d'appel la signification du jugement, il conviendrait encore de déclarer l'appel irrecevable puisque formé plus de quinze jours après la signification régulièrement déposée en l'étude de l'huissier le 25 janvier 2013 et suivie de la lettre prévue à l'article 658 du code de procédure civile, M. X... étant à cette date absent de son domicile et reconnaissant dans ses écritures qu'il était en congé ; qu'aucune obligation n'était faite à l'huissier de tenter une nouvelle signification après le retour de congé de l'intéressé ; que M. X... se réfère à tort à l'article 678 du code de procédure civile qui s'applique à la procédure avec représentation obligatoire ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

1°) ALORS QUE si le droit à un tribunal, qui implique le droit concret et effectif d'y accéder, n'est pas absolu, les conditions de recevabilité d'un recours ne peuvent toutefois en restreindre l'exercice au point qu'il se trouve atteint dans sa substance même ; qu'en se fondant, pour dire que les dispositions de l'article 206 de la loi du 15 décembre 1952 régissant la procédure devant le Tribunal de travail de Mamoudzou selon lesquelles l'appel doit être formé dans les quinze jours du prononcé du jugement, ne constituent pas une atteinte au droit d'exercer un recours effectif, sur la double circonstance que cette règle, destinée à assurer la célérité de la procédure en matière du droit du travail, est connue des justiciables de Mayotte et que le conseil de l'appelant, non inscrit au barreau de Mayotte, intervient régulièrement devant les juridictions mahoraises, la cour d'appel qui s'est déterminée par des motifs inopérants, a violé ensemble les articles 6-1 et 13 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°) ALORS QUE le délai pour former appel ayant pour point de départ le prononcé du jugement ne peut commencer à courir qu'autant que la date à laquelle il a été rendu, a été portée à la connaissance effective des parties ; qu'en énonçant, pour considérer que M. X... avait été informé de la date du délibéré, nonobstant son report à trois reprises et de sa date de plus de 6 mois postérieure à l'audience , que la feuille d'audience indique clairement ces dates successives de report et que le greffier du tribunal du travail avait reçu du conseil de l'appelant un courriel le remerciant d'avoir accepté de lui remettre la copie exécutoire du jugement rendu ce jour, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé une connaissance effective et certaine par M. X... du jugement rendu le 18 décembre 2012, a ainsi violé ensemble les articles 206 de la loi n° 52-1332 du 15 décembre 1952 et 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3°) ALORS QUE la signification à domicile ou, à défaut, en l'étude, n'est possible que si toutes les diligences ont été faites pour que l'acte soit signifié à personne, l'huissier devant impérativement relater dans l'acte ces dernières et les circonstances caractérisant l'impossibilité d'une telle signification ; qu'en énonçant, pour déclarer la signification du jugement régulière et l'appel formé le 25 février 2013 par M. X... irrecevable comme tardif, que la signification avait été déposée en l'étude de l'huissier le 25 janvier 2013 et suivie de lettre prévue à l'article 658 du code de procédure civile, M. X... étant à cette date absent de son domicile, sans faire concrètement état des diligences effectuées par l'huissier pour tenter de trouver le destinataire, la cour d'appel a violé les articles 654, 655 et 656 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-24493
Date de la décision : 28/01/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Chambre d'appel de la CA de St Denis de la Réunion à Mamoudzou, 11 juin 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 jan. 2015, pourvoi n°13-24493


Composition du Tribunal
Président : Mme Lambremon (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:13.24493
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