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03/12/2014 | FRANCE | N°13-18378

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 décembre 2014, 13-18378


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 28 mars 2013), que M. X... a été engagé en qualité d'agent de sécurité à compter du 19 janvier 1998 par la société Sécurifrance, aux droits de laquelle vient la société Lyon sécurité privée ; qu'un accord d'aménagement du temps de travail a été conclu entre l'employeur et le syndicat FO permettant la mise en place de la modulation du temps de travail ; qu'à la suite de son licenciement, intervenu le 26 octobre 2010 le salarié a s

aisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que l'employ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 28 mars 2013), que M. X... a été engagé en qualité d'agent de sécurité à compter du 19 janvier 1998 par la société Sécurifrance, aux droits de laquelle vient la société Lyon sécurité privée ; qu'un accord d'aménagement du temps de travail a été conclu entre l'employeur et le syndicat FO permettant la mise en place de la modulation du temps de travail ; qu'à la suite de son licenciement, intervenu le 26 octobre 2010 le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié diverses sommes à titre de rappel de salaire pour mise à pied conservatoire, indemnité compensatrice de préavis, congés payés, indemnité conventionnelle de licenciement, dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que la mise en place par un accord d'entreprise de l'annualisation du temps de travail n'emporte pas modification du contrat de travail ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'un accord de modulation du temps de travail ne peut constituer une modification du contrat de travail d'un salarié que pour autant que l'accord lui est effectivement appliqué ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir que l'accord d'entreprise concernant l'aménagement du temps de travail ne s'appliquait pas à M. X... et qu'en réponse au salarié, qui refusait toute affectation emportant modification de son contrat de travail par application de l'accord d'annualisation du 1er septembre 2010, il lui avait écrit, par courrier du 23 septembre 2010, que son contrat de travail resterait en vigueur, sans modification, tel qu'il avait été défini lors de sa signature le 1er mars 2008 ; qu'en affirmant péremptoirement « qu'un planning s'intégrant dans le cadre de l'annualisation mise en place » avait été adressé par l'employeur au salarié le 9 septembre 2010, sans indiquer d'où résultait le fait que l'employeur aurait effectivement intégré l'accord mis en place dans le planning adressé au salarié, nonobstant la décision de l'employeur, formalisée le 23 septembre 2010, de maintenir le contrat de travail hors le champ de l'accord après refus du salarié de se le voir appliquer, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'instauration d'une modulation du temps de travail constitue une modification du contrat de travail qui requiert l'accord exprès du salarié ; que si l'article 45 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 insère dans le code du travail l'article L. 3122-6, selon lequel la mise en place d'une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année prévue par un accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail, ce texte, qui, modifiant l'état du droit existant, n'a ni caractère interprétatif, ni effet rétroactif, n'est applicable qu'aux décisions de mise en oeuvre effective de la modulation du temps de travail prises après publication de ladite loi ;
Et attendu que la cour d'appel qui, par une décision exempte de vice de la motivation, a constaté que l'employeur avait mis en oeuvre la modulation du temps de travail le 9 septembre 2010, a exactement décidé que celle-ci constituait une modification du contrat de travail nécessitant l'accord exprès du salarié ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Lyon'sécurité privée aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Lyon'sécurité privée à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois décembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Lyon'sécurité privée.
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR condamné la société LYON'SECURITE PRIVEE à payer à Monsieur X... différentes sommes à titre de rappel de salaire pour la mise à pied conservatoire, de congés payés afférents, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, d'AVOIR dit que les intérêts au taux légal sont dus sur la créance salariale (rappel de salaires, indemnités de licenciement et de préavis) à compter du 17 décembre 2010 date de l'accusé de réception de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation, et à compter du présent arrêt pour les autres sommes, d'AVOIR ordonné le remboursement par la société LYON'SECURITE PRIVEE aux organismes sociaux concernés des indemnités de chômage éventuellement payées à Monsieur X... dans la limite de six mois ;
AUX MOTIFS QUE l'accord d'aménagement du temps de travail en date du 1er septembre 2010 produit au débat prévoit :
- dans son article 1er que " le présent accord s'applique à l'ensemble du personnel salarié de la société Lyon Sécurité Privée qu'il soit titulaire d'un contrat de travail à durée déterminée ou d'un contrat à durée indéterminée. Il s'applique également aux travailleurs à temps complet, comme aux travailleurs à temps partiel dont le régime est fixé par le présent accord. Sont cependant expressément exclus du champ d'application du présent accord conformément aux dispositions de l'article L 3111-2 du code du travail les cadres dirigeants ¿

- dans son article 3 intitulé " aménagement du temps de travail des agents de sécurité et agents d'exploitation " paragraphe 3. 1 que " est concerné par cette modalité d'aménagement du temps de travail et, sans, que cette liste ne soit exhaustive au regard des évolutions d'organisation qui pourraient intervenir au sein de l'entreprise, le personnel exerçant des fonctions d'agent de sécurité ou d'agent d'exploitation et plus généralement tout le personnel non soumis au statu de cadre, d'agent de maîtrise ou technicien des fonctions " ;
que d'autre part, il est versé au débat la note de service général du 23 août 2010 qui a été adressée au salarié est ainsi libellée :
« chers collaborateurs, les instances représentatives du personnel et la direction sont arrivés au bout des négociations relatives à l'aménagement du temps de travail par la signature d'un accord entrepris applicable à compter du 1er septembre 2010 à l'ensemble des salariés de la société l'accord d'entreprise concerne l'aménagement du temps de travail par application d'une méthode d'annualisation du temps de travail. Dans un premier temps. L'annualisation du temps de travail est effective à compter du 1er septembre 2010 jusqu'au 31 mai 2011 pour la première période. Les heures supplémentaires effectuées au-delà de la durée légale du travail fixé par l'accord seront arrêtés au 31 mai 2011. Par la suite, la période d'annualisation du temps de travail sera du 1er juin au 31 mai de l'année suivante. L'ensemble des collaborateurs seront convoqués à un entretien individuel dans les prochains jours » ;
qu'en l'état de ces deux pièces mais surtout de l'accord lui même qui définit son champ d'application, il apparaît contrairement aux dires de l'employeur contenues dans sa lettre du 23 septembre 2009 en réponse à la télécopie du salarié et aux affirmations contenues dans ses conclusions que le dit accord est bien applicable à tout le personnel de l'entreprise sauf aux cadres dirigeants, qu'aucune distinction dans le dit protocole n'a été faite entre les salariés entrés dans l'entreprise : antérieurement ou postérieurement au 1er septembre 2010 ; que d'autre part, cette nouvelle mise en place de l'aménagement du temps de travail à l'année au sein de l'entreprise modifie le mode de détermination des heures supplémentaires et constitue à ce titre une modification du contrat de travail qui requiert l'accord exprès du salarié dès lors que le dit protocole est antérieur à la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 et qu'il n'est pas soumis à l'article L3122-6 du code du travail créé par cette loi ; qu'or, en l'espèce, il s'avère que l'employeur n'a pas sollicité l'accord exprès du salarié mais qu'il a néanmoins mis en oeuvre le protocole du 1er septembre 2010 en lui notifiant par lettre du 9 septembre 2009 (lire 2010) ayant pour objet la clôture de la procédure de reprise du personnel, son affectation sur le site du laboratoire du service des Essences des Armées, auquel était joint le planning pour septembre 2010 qui prévoyait l'intervention du salarié sur ce site le jeudi 16, le vendredi 17, le lundi 20, le Mardi 21 le mercredi 22, le jeudi 23, lundi 27 Mardi 28 et mercredi 29 septembre selon les horaires suivants pour chacun de ces jours de 7h15 à l8h15 pour un total de heures, le dit planning s'intégrant dans le cadre de l'annualisation mise en place ;
que dans la mesure où l'employeur n'a pas recueilli l'accord du salarié sur la modification du contrat de travail suite à l'application du protocole sus visé, il ne peut être considéré que. le refus de ce dernier d'exécuter le contrat de travail et ses absences reprochées à compter du 16 septembre 2010 puissent être qualifiées de fautives, de sorte que le licenciement ne repose pas en l'état sur une faute grave et doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse ; tenant l'âge du salarié (65 ans) au moment de la rupture, de son ancienneté (12 ans et 10 mois) de son salaire moyen brut (1540 euros) du fait qu'après la rupture il a fait valoir ses droits à la retraite, il y a lieu de lui allouer l'indemnisation suivante :
-718 euros à titre de rappel pour la mise à pied conservatoire et 71, 80 euros pour les congés payés afférents,
-3080 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 308 euros pour les congés payés afférents,
-4106 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
-9240 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
que les intérêts au taux légal sur les sommes sus visées seront dus dans les conditions précisées au dispositif ; qu'il y a lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer à ce titre une indemnité de 1000 euros ; que l'employeur qui succombe ne peut bénéficier de cet article et doit être tenu aux dépens ; que s'agissant d'un salarié de plus de deux ans d'ancienneté et d'une entreprise de plus de onze salariés, il y a lieu de faire application de l'article L. 1235-4 du code du travail dans les conditions fixées au dispositif ;
1) ALORS QUE la mise en place par un accord d'entreprise de l'annualisation du temps de travail n'emporte pas modification du contrat de travail ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
2) ALORS QU'en toute hypothèse, un accord de modulation du temps de travail ne peut constituer une modification du contrat de travail d'un salarié que pour autant que l'accord lui est effectivement appliqué ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir que l'accord d'entreprise concernant l'aménagement du temps de travail ne s'appliquait pas à Monsieur X... et qu'en réponse au salarié, qui refusait toute affectation emportant modification de son contrat de travail par application de l'accord d'annualisation du 1er septembre 2010, il lui avait écrit, par courrier du 23 septembre 2010, que son contrat de travail resterait en vigueur, sans modification, tel qu'il avait été défini lors de sa signature le 1er mars 2008 ; qu'en affirmant péremptoirement « qu'un planning s'intégrant dans le cadre de l'annualisation mise en place » avait été adressé par l'employeur au salarié le 9 septembre 2010, sans indiquer d'où résultait le fait que l'employeur aurait effectivement intégré l'accord mis en place dans le planning adressé au salarié, nonobstant la décision de l'employeur, formalisée le 23 septembre 2010, de maintenir le contrat de travail hors le champ de l'accord après refus du salarié de se le voir appliquer, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-18378
Date de la décision : 03/12/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 28 mars 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 déc. 2014, pourvoi n°13-18378


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Marc Lévis

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.18378
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