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19/11/2014 | FRANCE | N°13-21788

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 novembre 2014, 13-21788


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles 1134 et 1147 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 2 novembre 1992 par la société ST Dupont, comme chef du département qualité ; que son engagement a été confirmé par lettre du 27 janvier 1993 comportant une clause de non-concurrence ; que la relation de travail était régie par la convention des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, étendue par arrêté du 27 avril 1973 ; que le salarié ayant été i

nformé de la suppression de son poste, il s'est porté candidat au plan de départs ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles 1134 et 1147 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 2 novembre 1992 par la société ST Dupont, comme chef du département qualité ; que son engagement a été confirmé par lettre du 27 janvier 1993 comportant une clause de non-concurrence ; que la relation de travail était régie par la convention des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972, étendue par arrêté du 27 avril 1973 ; que le salarié ayant été informé de la suppression de son poste, il s'est porté candidat au plan de départs volontaires ; que son contrat a été rompu le 17 décembre 2010 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour solliciter le paiement de l'indemnité de non-concurrence ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande, l'arrêt retient que la société n'ayant pas entendu faire jouer la clause de non-concurrence prévue dans la lettre d'engagement, le salarié ne peut demander qu'il en soit fait application ; que cette clause qui réserve à l'employeur la faculté de la mettre en oeuvre, n'est pas valide, et que le salarié qui l'a respectée ne formulant aucune demande indemnitaire tendant à réparer le préjudice subi du fait de l'application de cette clause illicite, sa demande tendant au seul paiement de la contrepartie financière de ladite clause ne peut qu'être rejetée ;
Attendu, cependant, que seul le salarié peut se prévaloir de la nullité de la clause de non-concurrence ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il résultait de ses constatations que le salarié, qui faisait valoir qu'il n'avait pas été délié de son obligation de non-concurrence dans le délai requis par la convention collective, avait respecté la clause de non-concurrence, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 mai 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la société ST Dupont aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille quatorze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté un salarié de sa demande tendant au paiement de la contrepartie financière d'une clause de non-concurrence figurant dans son contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE le courrier du 27 janvier 1993 confirmant l'engagement de Monsieur Paul X... au sein de la SA société Dupont contient la disposition suivante : "Au cas où vous quitteriez notre emploi dans notre société, vous acceptez de vous soumettre aux obligations d'une clause de non-concurrence ainsi définie : Vous vous interdisez pendant une durée d'un an éventuellement renouvelable de vous intéresser directement ou indirectement ou de vous mettre au service de toute entreprise concurrençant notre société, ou ayant des intérêts dans des entreprises concurrentes. Cet engagement de non-concurrence vaut pour la France métropolitaine et pour les pays du marché commun. Dans l'hypothèse où notre société ferait jouer la clause de non-concurrence l'indemnité qui vous serait versée sera celle prévue par les conventions collectives » ;
AUX MOTIFS AUSSI QU'en premier lieu, il est constant que la SA société Dupont n'a pas entendu faire jouer la clause de non-concurrence ; que Monsieur Paul X... ne peut donc demander qu'il soit fait application de la clause telle qu'elle résulte de sa rédaction du 27 janvier 1993, réclamation qui au demeurant n'est pas expressément formulée ; qu'en second lieu, le salarié qui a respecté une clause de non-concurrence illicite peut prétendre au versement de dommages et intérêts ; qu'en l'espèce, la clause litigieuse, qui réserve à l'employeur la faculté de la mettre en oeuvre, n'est pas valide et que toutefois Monsieur Paul X... ne formule aucune demande indemnitaire tendant à réparer le préjudice subi du fait de l'application de cette clause illicite dans la mesure où il se borne à en demander la contrepartie financière ;
AUX MOTIFS ENFIN QU'il résulte de ce qui précède que la demande du salarié, tendant au seul paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence figurant dans la lettre du 27 janvier 1993 confirmant son engagement, ne peut qu'être rejetée ;
ALORS QUE, D'UNE PART seul le salarié peut se prévaloir de l'illicéité d'une clause de non-concurrence et non l'employeur pour se dérober à ses obligations ; qu'à aucun moment, le salarié n'a entendu soulever la nullité de la clause de non-concurrence mais faisait à l'inverse valoir que n'en ayant pas été délié, contraint dans le cadre du respect de ladite clause de poursuivre son activité professionnelle en la respectant, il a vu ce faisant sa liberté de travail entravée ; qu'en infirmant le jugement entrepris aux motifs que l'employeur faisait valoir que la clause était illicite et qu'en l'état de cette donnée, seuls des dommages et intérêts pouvaient être octroyés au salarié qui n'en demandait pas, la Cour viole les articles 1134 et 1147 du Code civil, ensemble l'article L 1121-1 du Code du travail, ensemble le principe selon lequel nul ne peut se prévaloir de son propre manquement pour chercher à obtenir un avantage ;
ET ALORS QUE, D'AUTRE PART, ET EN TOUTE HYPOTHÈSE la stipulation dans le contrat de travail d'une clause de non-concurrence nulle cause nécessairement un préjudice au salarié ; que dès lors, la Cour d'appel ne pouvait qu'infirmer le jugement entrepris et le débouter de ses demandes sans, à tout le moins, l'inviter à prendre des écritures faisant état d'un préjudice souffert, eu égard à cette clause de non-concurrence pesant comme une épée de Damoclès sur le salarié qu'il avait dû respecter ; qu'ainsi, la Cour viole son office au regard de l'article 12 du Code de procédure civile, ensemble au regard de l'article 4 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-21788
Date de la décision : 19/11/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 28 mai 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 nov. 2014, pourvoi n°13-21788


Composition du Tribunal
Président : Mme Goasguen (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.21788
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