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19/11/2014 | FRANCE | N°13-21517

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 novembre 2014, 13-21517


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 22 mai 2013), que M. X... a été engagé par la société Taxi la Doloise le 1er octobre 2006 ; que, le 16 septembre 2008, les parties ont signé une rupture conventionnelle du contrat de travail qui a été homologuée par décision implicite du directeur départemental du travail et de l'emploi ; que le 28 mai 2009, le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour demander l'annulation de la convention de rupture ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux premières bra

nches, ci-après annexé :
Attendu que, sous le couvert de griefs non fo...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 22 mai 2013), que M. X... a été engagé par la société Taxi la Doloise le 1er octobre 2006 ; que, le 16 septembre 2008, les parties ont signé une rupture conventionnelle du contrat de travail qui a été homologuée par décision implicite du directeur départemental du travail et de l'emploi ; que le 28 mai 2009, le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour demander l'annulation de la convention de rupture ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches, ci-après annexé :
Attendu que, sous le couvert de griefs non fondés de violation des articles L. 1237-11 du code du travail et 1112 du code civil, le moyen ne tend qu'à contester l'appréciation souveraine par la cour d'appel de ce que le consentement du salarié à la rupture amiable avait été obtenu par la violence résultant du refus de l'employeur de répondre à ses demandes légitimes autrement que par la notification d'un avertissement et des conditions de travail qui lui étaient imposées ;
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche, et sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Taxi la Doloise aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils, pour la société Taxi la Doloise
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir prononcé l'annulation de la rupture conventionnelle, dit que la rupture du contrat de travail de M. X... produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la société Taxi La Doloise à payer à M. X... les sommes de 2.796 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 279,60 € au titre des congés payés afférents et de 8.500 € à titre des dommages et intérêts pour licenciement abusif ;
AUX MOTIFS QUE la rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties ; qu'elle résulte d'une convention signée par les parties et est soumise aux dispositions des articles L.1237-11 et suivants du code du travail, destinées à garantir la liberté de consentement des parties ; que la rupture conventionnelle peut être annulée pour violence, dol ou erreur ; qu'à l'appui de cette demande, M. X... fait valoir en substance que la DDTEFP n'a jamais rendu de décision explicite d'homologation et qu'il a subi harcèlement et pressions et a été contraint d'accepter cette rupture, son consentement ayant été vicié ; que l'employeur rétorque que les faits évoqués par le salarié relèvent du simple exercice du pouvoir de direction, M. X... n'ayant jamais accepté les contraintes inhérentes à l'organisation du travail particulier de chauffeur, que le consentement du salarié n'a pas été vicié et que la rupture conventionnelle doit être validée ; qu'il résulte des documents versés aux débats que M. X... avait interpellé son employeur, soit directement, soit par le biais de l'inspection du travail, sur les conditions d'exercice de son activité, notamment sur les horaires de travail ; qu'ainsi, dans un courrier adressé à son employeur le 26 juin 2008, il écrivait : « Je vous envoie ce courrier pour exprimer mon mécontentement envers votre façon de m'employer, il y a plusieurs choses qui ne vont pas / - Au niveau des nuits, au mois de mai et juin, j'ai été prévenu au dernier moment que je ne travaillais pas la nuit ; une fois à 23 h 30 et une deuxième fois à 21 h 45 (pour pouvoir assurer mon travail de nuit, je dors l'après-midi, et je bois du café lorsque je me lève, c'est difficile de se recoucher après cela) / - Vous m'avez employé plusieurs fois de jour et de nuit et même sans jour de congé dans la semaine, je n'ai rien dit... / - Le dimanche 11 mai à 21h vous m'avez prévenu que je ne travaillais pas le 12 mai (pentecôte, férié) et je me suis aperçu sur ma fiche de paie de mai que vous me l'avez compté en congé pris / - Vous me faites quelquefois remarquer que vous n'arrivez pas à me joindre, mais je devrais en tant que salarié taxi avoir un téléphone d'entreprise / - Je n'ai pas d'heure fixe pour commencer, notamment pour les nuits : - Mon travail d'après les lois taxis doit s'effectuer à l'amplitude, alors que je rentre 2 à 3 fois chez moi avec quelque fois 3 voire 5 heures d'attente entre deux courses, donc j'arrête mon temps et je ne peux rien faire car il faut attendre l'appel / - Depuis deux ans que je travaille chez vous, je n'ai eu qu'un seul arrêt de travail de 5 semaines et même à ce moment-là, vous n'avez pas arrêté de m'appeler pour me faire signer des feuilles et vous m'avez même menacé pour le signer. / De cet arrêt de travail, vous me reprochez d'avoir fait perdre de la clientèle de nuit / Toutes vos accusations commencent à me peser et cela devient difficile de tout supporter de votre part, étant donné que ce que vous me reprochez est totalement inexact / - Lorsque vous m'appelez mon jour de congé pour travailler, et que je refuse, votre mari m'appelle pour me menacer de me frapper / En conclusion, j'aimerai que l'application de la législation du travail soit effective dans votre entreprise et que vous rétablissiez des conditions normales de travail » ; que l'employeur n'a pas répondu à ce courrier dont copie avait été adressée à l'inspection du travail ; que néanmoins, dans un courrier daté du 11 juin 2008, mais notifié en fait par courrier recommandé du 22 juillet suivant, il infligeait un avertissement au salarié, avertissement immédiatement contesté par courrier recommandé du 25 juillet ; que l'employeur admettait en réponse s'« être mal exprimée » dans la formulation des reproches, mais maintenait cependant son avertissement par courrier recommandé du 31 août ; que le premier entretien en vue de la rupture amiable s'est tenu le 16 septembre suivant ; qu'il résulte de cette chronologie et des éléments figurant dans les différents courriers échangés qu'existait entre les parties un litige relatif à l'exécution du contrat de travail ; qu'ainsi le consentement du salarié à la rupture amiable, même s'il est formalisé par sa signature, et si la convention a été homologuée de manière implicite, a été obtenu par violence, caractérisée par le refus de l'employeur de répondre à ses demandes légitimes autrement que par la notification d'un avertissement, par les conditions de travail qui lui étaient imposées, sans toutefois que le harcèlement allégué ne soit établi par les éléments produits ; qu'en conséquence, il sera fait droit à la demande d'annulation de la rupture conventionnelle, avec toutes conséquences qui sont celles d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, le salarié étant fondé en sa demande en paiement du préavis, l'indemnité de licenciement ayant été déjà réglée lors de la rupture conventionnelle ; que M. X... ne justifiant pas de sa situation postérieurement à la rupture, en conséquence, l'indemnisation du préjudice en résultant nécessairement sera limité à la somme de 8.500 € ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la seule existence, au moment de la signature de l'acte, d'un différend entre les parties au contrat de travail n'affecte pas par elle-même la validité de la convention de rupture ; qu'en prononçant l'annulation de la rupture conventionnelle litigieuse, au motif « qu'existait entre les parties un litige relatif à l'exécution du contrat de travail (et) qu'ainsi le consentement du salarié à la rupture amiable, même s'il est formalisé par sa signature, et si la convention a été homologuée de manière implicite, a été obtenu par violence » (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 5), cependant que le litige existant entre les parties n'était pas de nature à entacher la validité de la convention de rupture, la cour d'appel a violé l'article L.1237-11 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la violence morale se caractérise par une atteinte portée à l'intégrité psychologique de celui qui en est la victime ; qu'en prononçant dès lors l'annulation de la rupture conventionnelle conclue par les parties, motif pris du « refus de l'employeur de répondre aux demandes légitimes (du salarié) autrement que par la notification d'un avertissement (et) par les conditions de travail qui lui étaient imposées », tout en constatant par ailleurs que l'existence d'un harcèlement moral n'était pas établie par les éléments produits aux débats (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 5), la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'existence d'une violence susceptible d'affecter la validité du consentement de M. X..., a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1237-11 du code du travail et de l'article 1112 du code civil ;
ALORS, ENFIN, QU' en retenant que l'employeur avait refusé de répondre aux demandes du salarié contenues dans un courrier du 26 juin 2008, ce qui constituait un cas de violence imputable à la société Taxi La Doloise (arrêt attaqué, p. 5, alinéa 5), tout en constatant la production aux débats d'un courrier du 22 juillet 2008, « dans lequel l'employeur réplique aux critiques formulées par le salarié dans son courrier du 26 juin précédent » (arrêt attaqué, p. 3, alinéa 7), la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Taxi La Doloise à payer à M. X... la somme de 17.586,65 € à titre de rappel de salaire outre 1.758,66 € au titre des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QU' aux termes de son contrat de travail, M. X... était embauché pour une durée hebdomadaire de 35 heures, la rémunération brute horaire étant fixée à 8,70 €, soit une rémunération mensuelle de 1.319,53 €, en ce non compris les heures supplémentaires et les majorations pour heures de nuit ; qu'il résulte de l'examen des bulletins de salaire produits que le salarié percevait régulièrement des rémunérations pour heures supplémentaires et des majorations pour heures de nuit, mais que le salaire de base était parfois calculé de manière aléatoire ; qu'ainsi, en novembre 2008, il est fixé à 70 heures avec diminution de salaire, alors qu'il était de 153 heures en février 2007 sans majoration ; qu'aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisées par le salarié ; que le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié après avoir ordonné au besoin toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'en l'espèce, M. X... verse aux débats les relevés de son activité journalière, les tableaux récapitulatifs de cette activité sur la période considérée et le décompte afférent ; qu'il étaie ainsi sa demande ; que l'employeur verse aux débats quelques exemples de fiches horaires présentées au bureau par le salarié (pièces 17 et 18) qui ne sont pas très exploitables ; qu'il fait également valoir que M. X... considère à tort les coupures de la journée comme du temps de travail effectif, et en sollicite la rémunération ; qu'il résulte des pièces produites par les deux parties, que les emplois du temps allégués par M. X... ne sont pas contestés, sauf s'agissant du mois d'août 2007 et des journées des 30 juin et 1er juillet 2006 ; qu'en l'absence de convention collective pour l'activité d'entreprise (taxi), il convient de se référer aux dispositions du code du travail ; qu'aux termes de l'article L.3121-1 du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives, sans pouvoir vaquer à des occupations personnelles ; que l'employeur ne rapporte aucune preuve de ce que, d'une part, il ait sollicité par note voire par courrier recommandé, la production des fiches horaires détaillées de M. X... et que, d'autre part, les indications précises portées sur les emplois du temps du salarié soient inexactes, à l'exception des deux exemples susmentionnés ; que l'expertise sollicitée n'a donc pas à être ordonnée, en l'absence de contestation véritable de ces documents, cette expertise n'ayant en aucune manière vocation à suppléer la carence des parties dans l'administration de la preuve, l'employeur ayant eu tout loisir durant le délai d'appel de vérifier les emplois du temps du salarié ; que l'employeur se contente par ailleurs d'affirmer que durant les temps dits de « coupure », le salarié n'était pas à sa disposition permanente, alors qu'au contraire, l'examen des relevés de course démontre que ces coupures n'étaient pas suffisamment importantes pour permettre au salarié de prendre des initiatives relatives à sa vie personnelle ; qu'il s'ensuit que le décompte du salarié sera admis, la cour n'ayant pas relevé de distorsion entre les relevés d'activité et celui-ci, et qu'il sera fait droit à ce chef de demande à hauteur de la somme de 17.586,65 € outre les congés payés afférents ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la seule brièveté du temps de pause ne permet pas de considérer que cette période constitue un temps de travail effectif ; qu'en estimant que les temps de « coupure » dans la journée de travail de M. X... devaient être considérés comme un temps de travail effectif, au motif que « l'examen des relevés de course démontrent que ces coupures n'étaient pas suffisamment importantes pour permettre au salarié de prendre des initiatives relatives à sa vie personnelle » (arrêt attaqué, p. 7, alinéa 1er), sans rechercher si, durant le temps dit de « coupure », le salarié se trouvait ou non soumis aux directives de l'employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.3121-1 et L.3121-2 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU' en justifiant la condamnation de l'employeur au paiement des heures supplémentaires au motif notamment que «l'employeur ne rapporte aucune preuve de ce que d'une part, il ait sollicité par note voire par courrier recommandé, la production des fiches horaires détaillées de Monsieur X... (...) » (arrêt attaqué, p. 6, alinéa 10), tout en relevant que les indications contenues dans le courrier de l'employeur du 22 juillet 2008 « ne sont pas contraires aux déclarations de l'employeur devant les premiers juges, ainsi qu'il résulte des notes prises par le greffier et communiquées à la Cour ("L'employeur n'a pas cessé chaque semaine de demander des décomptes, lui a remis des cahiers exacompta à tenir, Monsieur X... ne les a pas remplis, remettait seulement des feuilles volantes") » (arrêt attaqué, p. 3, alinéa 8), la cour d'appel a là encore entaché sa décision d'une contradiction de motifs, violant derechef l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 13-21517
Date de la décision : 19/11/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 22 mai 2013


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 nov. 2014, pourvoi n°13-21517


Composition du Tribunal
Président : Mme Vallée (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.21517
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